Elle était belle avec ses cheveux couleur ébène et sa peau couleur chocolat. Elle était jeune aussi, à cette époque. Jeune et naïve quand elle a pris son billet d'avion pour l'Amérique. Pays des grands hommes. Le rêve américain comme beaucoup l'appelle. Elle rêvait d'y faire sa vie, d'y faire carrière. Maria, elle avait du talent, en plus de la beauté, tout le monde le lui répétait, mais ce que personne n'osait lui dire, c'était qu'ailleurs, ce n'était pas ici, qu'elle n'aurait pas aussi facile à vivre dans un pays qui n'est pas le sien. Le rêve américain, elle voulait le vivre, elle voulait y aller et faire découvrir sa voix à toutes ses personnes. Elle voulait devenir une grande star, tel Madonna ou être aussi connue qu'Oprah Winfrey. Des étoiles pleins les yeux, c'est ainsi que la jeune Maria est arrivée à LA, l'ambition dans sa valise.

Pourtant, la belle, elle déchante très vite. Elle comprend maintenant pourquoi ses parents n'étaient pas réellement d'accord avec ce désir. Elle se heurte à la dure réalité. Le rêve américain, ce n'est pas tout le monde qui arrive à le réaliser. Pourtant, elle est décidée à se battre la jeune Maria. Alors, elle multiplie les auditions, les petits boulots. Et finalement, elle le rencontre. Lui. Cet homme, son futur manager. Il lui ouvre des portes, il l'aide et elle… Elle lui ouvre ses cuisses en échange. Paiement malhonnête, mais ainsi, elle avance vers son rêve, même si elle se brise la petite, même si elle est encore loin de ses peines. Maria, elle ne le fait pas que par obligation, parce que cet homme, il est quand même son sauveur et elle commence à avoir des sentiments pour lui. Naïve petite enfant. Elle rêve éveillée, telle Alice au Pays des merveilles. Et elle va tomber de haut quand plusieurs mois plus tard, à force de rapport, elle finit par tomber enceinte... Les nausées sont là, le test le confirme. Elle attend un enfant. Son rêve se brise alors quand elle l'annonce à son manager et amant.

Tout tombe à l'eau. Plus de Maria superstar, il ne reste plus que Maria et son ventre qui petit à petit s'arrondit.


Les cris franchissent ses lèvres. L'enfant vient de naître. Un nouvel enfant sans père. Il est partit le con, laissant Maria seule et sans le sous. Neuf mois de galère pour la belle et pourtant elle ne peut s'empêcher de sourire en voyant l'enfant, son enfant. Pourtant, c'est le début de la fin. Elle le sait. Elle le ressent au fond d'elle. Elle n'y arrivera pas, mais Maria, c'est une battante, alors elle ne laisse pas ce sentiment l'affaiblir et elle tente de continuer d'avancer, comme durant ses neuf derniers mois. Avancer, ne pas reculer. Elle pourrait retourner au Brésil, dans sa famille, mais elle ne peut pas, parce qu'elle ne veut pas refuser à ses rêves. Non. Elle y croit encore. Elle est trop jeune pour renoncer et ce n'est pas ce petit homme à qui elle vient de donner la vie qui va l'en empêcher. C'est ce qu'elle se dit, ce qu'elle espère.

L'enfant prend son nom, à défaut d'avoir un père, elle aura celui de sa mère. Maria veut l'aimer, le chérir, c'est pour ça qu'elle lui donne le prénom de ce couturier célèbre, Kenzo Ribeiro.


Cela fait maintenant des années que les étoiles ont quitté ses yeux. Maria ne rêve plus. Maria est brisée par la vie et par ce rêve inachevé. Le rêve américain, elle a été si naïve d'y croire et elle le regrette. Elle aurait dû rentrer chez elle et même ne jamais en partir, pourtant, elle est trop fière pour cela. Avouer ses échecs à ses parents ? Jamais elle ne pourrait faire cela. Il la pense en bonne santé, avec un bon travail et ce même si elle n'a pas percé dans la musique. La vérité est bien loin de tout cela et surtout bien plus cruelle.

Maria, elle ne rêve plus. Maria, elle est beaucoup trop maigre, se privant pour Kenzo. Elle n'y arrive plus. Cela fait bien trop d'année qu'elle se prive pour lui, qu'elle se démène pour cet enfant. Elle tente de lui sourire, de lui partager sa passion dans de rare moment de complicité et surtout de temps libre pour elle. Elle enchaîne les boulots, vraiment, elle se démène. Alors, elle fini par craquer, pour l'argent facile, l'argent sale, son corps est à vendre pour celui qui le désire, pour celui qui en donne le prix. Elle vend son corps et avec l'argent qu'elle gagne, elle continue sa descente aux enfers. Drogues, alcools, clopes, tout y passe pour tenter de la soulager un peu. Elle veut oublier, fuir la réalité, fuir ce monde et tant pis pour le petit Kenzo. Maria, elle n'en peut juste plus. Elle n'a plus la force pour avancer, pour le soutenir également. L'enfant a assez grandi maintenant, il peut se débrouiller tout seul. C'est ce qu'elle estime, parce que de toute façon, elle est écorchée vive. Elle ne peut plus continuer... Alors, elle commet l'impardonnable en cette nuit d'halloween. Comme une mauvaise blague d'un esprit tourmenté, Kenzo se retrouve seul, abandonné. Maria ne viendra pas le chercher chez son ami. Elle ne reviendra plus jamais tout simplement.

Et maintenant, allez dire à l'enfant que sa mère n'est pas morte, qu'elle l'a juste abandonné parce qu'il était un trop lourd fardeau... Car Kenzo n'a plus sa mère, ni de maison, il ne lui reste en réalité, que ses yeux pour pleurer...


Enfance brisée, souvenir d'un être maintenant disparu... Kenzo hurle à plein poumons en plein milieu de la nuit. Terreur nocturne, traumatisme de l'abandon de sa mère. Il n'a plus de chez lui. L'enfant s'est retrouvé à l'orphelinat le plus proche. Une nouvelle vie... On lui a dit que tout allait bien se passer maintenant, qu'il ne serait plus tout seul, parce qu'on lui a demandé de parler, de raconter comment il vivait avec sa mère avant qu'elle ne parte. Mal. L'enfant avait vu les adultes grimacer, visiblement, ce qu'il avait vécu n'était pas normal. Et pourtant, il chérissait tant les moments passés avec sa mère, les chansons qu'ils chantaient ensemble. Il aurait bien besoin de ses berceuses le soir pour s'endormir. D'une certaine façon, il refuse d'accepter la vérité. Sa mère va revenir, pour lui, parce qu'il est précieux pour elle et qu'elle l'aimera toujours. Il croit en elle, en tout ce qu'elle a dit. Enfant maladroit, enfant blessé, il se rattrape comme il peut à ce qu'il veut. Il se ment à lui-même.

L'enfant brisé devient un adolescent turbulent. Recherche d'attention, il désire qu'on le regarde et ainsi, enchaîne les conneries, mais au moins, son désir est accompli. Les regards sont sur lui. Les Miller le désigne, il sera bientôt dès leur.

De sa mère, il ne lui restait que son nom, Ribeiro et pourtant, maintenant, sur ses papiers tout est différent. Kenzo Miller, cela sonne comme une tentative d'effacer pour de bon son passé, d'effacer Maria comme si elle n'était plus rien. Kenzo Miller, quatorze ans et nouveau dans sa "famille".


Petit à petit, le jeune Kenzo est obligé de se faire à cette nouvelle vie. Il a connu l'orphelinat et maintenant, la vie de famille... Une vie de famille bien différente de ce qu'il a connu jusqu'à présent. Pour lui, c'est étrange. C'est pas normal, mais surtout, il redoute de se retrouver encore abandonner. Il les tient tous à distance, refusant de s'attacher à eux. S'il était un chat, il feulerait dessus pour les éloigner, pour leur faire comprendre qu'il ne veut pas d'eux dans sa vie. Non, il n'a pas besoin d'eux. Il se débrouille très bien tout seul quand il était à l'orphelinat. Il ne veut pas dépendre à nouveau de quelqu'un et risquer d'être à nouveau blessé. L'attachement, ce n'est clairement pas pour lui. Il tire un trait sur cela. Il tente du moins, parce que le temps fait son oeuvre et si les premières années, il n'hésitait pas à jouer les loups solitaires, les choses ont changées. Petit à petit, il s'est laissé apprivoisée et à commencer à accorder un peu de sa confiance et de ses états d'esprit. Tranquillement, il s'est ouvert à eux, et pas seulement pendant ses crises de paniques en pleine nuit. Au fil du temps, il a tout simplement accepter d'être devenu un Miller, du moins, en partie, parce qu'il reste les traces du passé, les séquelles de ce qu'il a vécu et ce qui fait de lui ce qu'il est aujourd'hui. Après tout, c'est son vécu qui l'a poussé à rejoindre l'école de police dés qu'il était en âge de le faire pour rejoindre la brigade des stup' , c'est également cela qui a motivé son choix de ne pas chercher à percer dans la musique malgré ses aptitudes... Mais la question que l'on est en droit de se poser, c'est : Est-ce qu'il a réellement apprit à vivre avec son passé ou bien le subit-il toujours ? Kenzo lui-même ne saurait pas répondre à cette question... Mais peut-être qu'avec le temps tout cela sera plus clair ?