I'M A LIAR. SHE IS A LIAR. WE ARE LIARS. THEY ARE LIARS.
Elle était mignonne, avec son accent, et sa bouille d'ange. Tu t'étais surpris à remuer ton petit doigt, en imaginant qu'il se trouvait dans cette masse soyeuse. Elle avait souri, puis elle avait ramassé sa masse de papiers. Elle était arrivée avec ses classeurs, ses fiches rangées et c'était devenu le bordel en deux secondes. Elle avait démontré les propriétés point par point, mordillant son stylo de temps en temps, regardant sa montre parfois. Tu avais tenté de lui arracher quelques informations, mais elle avait répondu en quelques mots puis détourné le sujet gentiment. Elle t'avait avoué qu'elle venait de Norvège et qu'elle vivait seule avec sa mère. Elle ouvrit la porte, laissant tomber au passage des feuilles volantes. Tu les ramassas en face d'elle, puis quelques minutes plus tard, tu te rendis compte que tu aurais peut-être pu l'embrasser. Déçu, tu te mis à révasser, et à attendre la semaine prochaine où tu pourrais la revoir. Et en plus, tu avais exprès de ne rien comprendre.

J'AI PAS BESOIN DE ME DONNER BONNE CONSCIENCE, J'EN AI PAS.

Tu arrives, perdu dans cette masse de réseau humain. Tu affutes tes yeux, regardant dans la nuée de gens en tout genre quelqu'une avec qui tu pourrais parler. Tu l'aperçois dans la cour du lycée, seule, impopulaire. Ses boucles blondes cachent le haut de son manteau rouge, et ses lèvres contrastent avec la clarté du décor. Sous les flocons, elle te fait penser à blanche neige. Tu t'approches sans suffisance, elle t'inspecte. Tu ne saurais dire si tu la trouvais jolie, elle était plutôt atypique. Sa peau pale et sa bouche rose étaient en harmonie parfaite, ses traits étaient fins. Mais ce n'est pas le genre de fille qui attire voilà tout, elle se contente d'intriguer. Elle lève ses yeux noisettes, mais pour faire original, tu disais dorés foncés, généralement ça plaisait. Elle te dévisage de haut en bas, cherchant un potentiel ennemi, ou une quelconque hostilité dans ton visage. Une fois que son regard vif daigne s'arrêter un instant, tu entendis ses pensées bourdonner. Elle réfléchit. Au bout de quelques secondes qui te parurent une éternité, elle cligne des yeux, semble enfin t'accepter. Comme si une barrière invisible se levait, tu sens que tu peux l'approcher. Mais tu sais qu'elle guide le jeu. Tu sais que tu ne pourras faire que ce qu'elle refuse que tu fasses. Tu oses lui adresser quelques mots. Soulagée que ce ne soit que des questions banales, et non pas un interrogatoire, elle te souffle son nom. Elle te dit simplement qu'elle s'appelait Rolyrin. Pas commun, furent tes premiers mots. Non, pas connu nuance. On dit Rory, répliqua-t-elle avec un sourire, comme si elle avait l'habitude. Tu ne savais pas encore que son vrai nom était Simeas, mais peut- être qu’elle te le dévoilerait un jour, qui sait. Elle semble douce, inoffensive, mais tu aurais juré que ses yeux foncés te considéraient comme un danger à surveiller. Animés d'une étincelle que tu aurais qualifiée de mystique, ils semblaient chercher à déceler la moindre erreur fatale dans ton comportement. Tu te sentais jugé en permanence, bien que son sourire ne suffisait pas à dissiper tes doutes. Tu te perdais dans ses iris, si bien que tu aurais juré qu'elle voulait t'hypnotiser. Et tu te dis sans doute que s'était déjà fait.
Extrait de: «Le jour où j'ai rencontré Simeas Hayes » éditions hachette, jamais publié.

JE SENS DES BOUMS ET DES BANGS AGITER MON CŒUR BLESSÉ
Un an. Un an exactement quand tu avais quitté ta Norvège natale, pour venir t'installer ici avec ta mère. Elle t'avais dit que c'était mieux pour toi, que tu parlais bien là langue, et que rester là bas lui faisait trop mal. Tu avais rit en lisant le questionnaire bizarre pour entrer aux États-Unis, avant de te souvenir que tu ne connaissait rien là bas. Absolument rien. Ta mère t'avait répété qu'elle ne supporterais pas de rester dans votre maison, lui rappelant trop de souvenirs de son défunt mari Tu avais accepté à contrecœur, ruminant ta peine dans l'avion. Perdue, tu avais foulé le sol américain les larmes aux yeux, alors que les touriste eux arboraient un éternel sourire. Tu dépérissais, le Massachusetts étant trop différent d'Oslo, rien n'était pareil. Et ta mère, qui osait te demander d'arrêter l'alcool et les boîtes, continuait à faire comme si de rien n'était, ne disant rien sur sa culpabilité de t'avoir emmenée ici.