shape of us
w/ @ace kang
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c'était parti de rien, quelques messages, une proposition sur un coup de tête, et voilà qu'ils s'étaient retrouvés à l'aéroport, prenant leur envol direction la louisiane, le bayou, le jazz et le quartier français de la nouvelle orléans où ils avaient réservé un air bnb pour le week-end. c'était étrange, comme situation. après avoir passé pratiquement un an écrasés entre les murs d'une clinique sans permission de sortie, voilà qu'ils voyageaient sans obstacles, sans personne pour leur dire qu'ils n'étaient pas encore "prêts" à sortir affronter le monde extérieur. mais la question c'était : est-ce qu'ils l'étaient aujourd'hui réellement ? est-ce qu'ils le seraient un jour ? ce week-end, jules elle avait envie de croire qu'ils étaient juste deux étudiants comme les autres. et la présence d'ace à ses côtés annihilait tous ses doutes.

quelques heures après être arrivés à leur hébergement , la nuit commençait déjà à tomber sur la ville, le ciel se teintant d'un jaune ocre quand le binôme se décidait enfin à sortir pour visiter le quartier français. les balcons fleuris, les rues animées par les rires et le jazz qui s'échappe des bars. « alors, par quoi t'as envie de commencer ? » elle avance à reculons, la blonde, fait front au coréen, mains dans mes poches de la fine veste noire qui couvre ses épaules. « après tout... c'est ton anniversaire. » sourire mutin qui vient naître sur ses lippes. non ace, j'ai pas oublié tu sais.

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il savait pas vraiment ce qui lui était passé par la tête mais ace, il avait surtout eu l’envie féroce de s’évader. quitter boston, s’éloigner un peu de tout, respirer ailleurs que dans la folie de la ville. et jules était sa meilleure option. c’était avec elle qu’il voulait partir, personne d’autre. peut être pour rattraper le temps perdu, peut être parce qu’elle avait toujours été celle la plus apte à le comprendre. peu importait les raisons en soit, c’était à elle qu’il avait fait la proposition et lui avait prit les billets quelques minutes plus tard. direction, la nouvelle orléans. et après un voyage plutôt long, ils avaient enfin pu commencer à découvrir les paysages s’offrant à eux, déposant leurs affaires dans le lieu choisit pour le week end. et maintenant, tout ce qu’ils leurs restaient à faire était de profiter des moments qu’ils pouvaient s’offrir. ━ manger ? la bouffe dans les avions était immonde. mais avant qu’il ne puisse réellement proposer quoi que ce soit, un sourire venait étirer les lèvres de la thailandaise qui laissait tomber que le jour était.. spécial. ━ on s’en fiche de ça il ne l’avait jamais fêté, ne souhaitait pas le faire. sa naissance était pas franchement le souvenir qu’il aimait se remémorer, encore moins les conditions de sa venue au monde. et bien sûre que jules ne savait pas. ━ c’est un jour comme les autres

elle aligne un pas devant l'autre, mains dans les poches, suit du regard le brun qui propose le plus efficace : manger. sourire qui étire les lippes de la blonde qui hoche la tête. « manger, sounds like a good plan. » les rues semblent ne pas manquer de restaurants en tout genre, ou bien ils pourraient tout aussi bien acheter tout un tas de trucs différents à manger dans un coin tranquille. elle a envie de tout essayer, jules, mais avant tout, elle mentionne la date, et ace, son sourire il se gomme, se tarit, s'efface. sourire de l'écossaise qui finit par ne former plus qu'une fine ligne droite, quand elle s'avance vers lui, enroule son bras autour du sien. « c'est un jour comme un autre. » elle confirme, va dans son sens. elle sait que son anniversaire, c'est un sujet tabou, un de ces non dits entre eux, de ces secrets qu'ils gardent sous scellé, instinct de préservation, sécurité. pourtant juliette, elle prend la main d'ace dans la sienne, précise tout de même : « mais ça reste le jour qui m'a permis de t'avoir dans ma vie. » et sans lui laisser le temps de la contredire, elle le tire, la blonde, déambule au milieu des touristes et autres locaux qui se promènent dans le quartier français. « je sais même pas c'est quoi la spécialité ici, je veux goûter à leur spécialité ! excusez moi ? » elle s'arrête devant un serveur à la terrasse d'un restaurant, demande, bouille enfantine et sourire sur les lippes « quelle est la spécialité ici ? » L'homme lève la tête, observe tour à tour les deux jeunes, puis répond poliment, sourire avenant placardé sur son visage -sourire qui vend- : "la soupe de tortue mademoiselle ! vous êtes combien ?" le sourire de l'écossaise se fane, devient contrit, quand elle précise « ah, euh.. en fait c'était pas pour ce soir, on reviendra ! » et elle s'éloigne, vite, tire encore sur la main d'ace pour finir sa phrase « ... jamais. on reviendra jamais. finalement mcdo c'est peut-être bien ? »

c’est ce qu’il répétait sans arrêt. un jour comme les autres. ce qui aurait pu être vrai si dans ce foutu centre ils n’avaient pas mit un point d’honneur à fêter des choses que d’autres voulaient oublier. voilà comment juliette savait pour son anniversaire. mais ace, il avait pas le coeur à voir ce jour comme quelque chose d’extraordinaire. probablement parce qu’on lui avait répété toute sa vie que c’était une erreur et qu’avec toutes les informations en main, il se considérait comme tel aussi. et il lui est reconnaissant de ne pas insister. de ne pas chercher plus loin. c’est sûrement ce qui rend leur relation aussi profonde. ne jamais allé trop loin, ne jamais chercher à comprendre. ━ ouais il grimace légèrement, détourne le regard. il aurait été probablement mieux qu’il ne soit dans la vie de personne. de toute façon, conversation close. jules le tire dans les rues jusqu’à s’arrêter devant un restaurant aux airs chics, interpellant le serveur. ━ la quoi ? ace il est devenu livide à la réponse. on mange pas les tortues, si ? soudainement, son estomac se tord, probablement qu’il n’a plus si faim. de la tortue ? qui mange de la tortue ? interrogations vaines, juliette l’entraîne à nouveau mais cette fois, loin du restaurant. ━ hamburgers adieu la tortue, son ventre gargouille à la simple énonciation du sandwich. ━ attends… tu crois qu’ils mettent de la tortue dans les sandwich ? air effaré qui vient se placarder sur son visage. ━ pourquoi j’ai choisi la nouvelle orléans déjà ?

elle balaie, jules. balaie d'un geste de la main la date, d'une main tendue vers la sienne, paume d'ace qu'elle étreint entre ses doigts tout en le tirant à travers la ville. s'il voulait que ce soit un jour comme les autres, ça serait un jour comme les autres. de toutes manières, jules, elle chérissait chaque journée passée avec lui depuis leurs retrouvailles. chaque seconde était importante, empreinte de cette liberté qui leur manquait cruellement à l'adolescence. un passage en coup de vent au restaurant, et la blonde, elle grimace, entraîne vite son asiatique loin de la soupe à la tortue, aussi livide qu'elle et peu emballé par le plat local. un hamburger, c'est bien. un hamburger, c'est une valeur sûre. et à la question du brun, elle fronce le nez, secoue la tête d'un air dégoûté. « on vérifiera la composition à la loupe. » et s'il fallait qu'elle dépiaute son sandwich avec les mains, elle le ferait. « t'aurais pu choisir la chine, là bas ils mangent le poulpe cru il paraît. » c'est pas si mal, la nouvelle orléans. ils traversent les rues, se perdent entre les touristes, jusqu'à atteindre, enfin, un restaurant avec le saint hamburger graal. « j'ai super super faim. » les iris qui balaient le menu, l'envie d'acheter cinq hamburgers et tout autant de frites. « par contre... t'as retenu le chemin qu'on a fait ? » parce que jules, elle sait absolument plus d'où ils viennent.

et en même temps, choisissait-on réellement un endroit pour la nourriture ? oh,  c’était probablement la raison qui poussait les gens à choisir la france comme destination numéro un tout compte fait. peu importe. à aucun moment en regardant des sites sur la nouvelle orléans il n’avait entendu parler d’une quelconque passion pour les tortues. probablement un truc qu’il tentait de garder bien enfoui pour ne pas faire fuir les gens comme eux. ━ peut-être qu’il y a de la tortue dans la sauce ouvre grand les yeux avant de secouer la tête. ━ et s’ils font frire les frites dans de la soupe de tortue ? haut le coeur. relation avec la nature complètement gâchée. ━ paraît aussi que les ventouses s’accrochent à tes organes et paf complètement dingue les chinois. les même étrange personnes qui s’étaient dit un jour qu’ils allaient cuisiner du chien. ━ tu crois qu’on peut aller en cuisine pendant qu’ils préparent ? juste pour être sûr.. air inquiet qui se lit sur son visage. rapport à la nourriture toujours aussi compliqué. ━ regarde, sauce secrète y a écrit. ça sent pas bon secoue la tête, ventre qui proteste contre la désertion. inspire, expire. ━ hein ? le chemin ? regarde à droite, gauche, ne décèle que le flot de touriste sans réussir à se souvenir s’ils étaient arrivés d’un sens ou de l’autre. ━ regarde, des nuggets changement de sujet soudain, sa main qui se referme autour de celle de jules l'entraînant dans le dit restaurant. le chemin ? quel chemin ?

le week end commençait mal. enfin.. du moins d'un point de vue culinaire. ni l'un ni l'autre ne semblaient particulièrement ravis par la perspective de manger de la soupe de donatello. et à l'image des tortues ninja, préféraient de loin la pizza, se dirigeant vers un fast food, classique américain inébranlable. et la blonde elle ne cache pas sa grimace à la théorie d'ace, baisse un regard perplexe sur le menu du restaurant. « boh, ils préviendraient quand même pour ce genre de chose, hm ? » n'est-ce pas ? mais ace, plus ça va, plus ses théories sont louches, et jules, elle se sent obligée de mettre une main sur sa bouche quand il commence à s'étaler sur les poulpes qui s'accrochent aux organes. « please. don't. » elle tenait à son appétit, et là, il était en train de le lui couper. et peut-être que surveiller les cuistots, c'était la solution, solution que la blonde commence à prendre sérieusement en considération, quand... et comment ils rentrent ? interrogation qu'elle partage avec ace, qui.. saute au dessus de la question et détourne l'attention de juliette en disant le mot magique. « nuggets ? » qu'elle demande comme un chiot auquel on aurait dit "gâteau", entraînée par le coréen à l'intérieur du restaurant. « on prend la grosse grosse boite à partager ? avec des sodas. » elle parcoure l'affichage, les yeux ronds comme des billes, et tape l'épaule du brun. « n'empêche qu'on est perdus. » ouais, il a tenté hein, mais elle a pas oublié.

━ tu crois ? moi j’sais pas les sauces secrète, on donnait pas la recette. c’était le genre de truc censé attirer l’oeil, faire poser des questions mais auxquelles on ne donnait jamais réellement de réponse. alors ace, il parierait pas sur ça. il parierait pas sur grand chose compte tenu du fait qu’ils étaient capable de servir de la soupe de tortue ici. pays étrange. ville étrange. si c’était toute l’histoire autour de la musique qui l’avait en premier lieu attiré, il commençait fortement à regretter de ne pas avoir fait de recherche plus approfondi avant de réserver les billets. ━ nuggets de tortues même qu’il plaisante devant l’air effaré de la blonde qui donne l’impression de vouloir l’enterrer six pieds sous terre. et il se pince les lèvres, retient un rire, se félicite intérieurement pour le subterfuge visant à lui faire oublier qu’il n’avait strictement pas regardé le chemin. ━ grave. on prends même.. deux grosses boîte à partager sait-on jamais. ace et son rapport à la nourriture. toujours dans le besoin constant d’en avoir plus. d’en avoir quelque part. d’être sûr de pouvoir avoir quelque chose à se mettre sous la main. ━ mais noooon. tous les chemins mènent à rome expression qu’il avait toujours trouvé idiote. à quoi bon aller à rome si c’était pas le chemin qu’il cherchait en premier lieu ? bref. ━ on a l’adresse de l’hôtel pas vrai ? quelque part sur le téléphone, perdu entre les soixante mail de réservation. bien sûr qu’ils avaient ça. un petit coup de maps et ils retrouveraient le chemin sans la moindre difficulté. bienvenue au vingt et unième siècle. et face à l’écran tactile, il sélectionnait les boîtes de nuggets, penchant légèrement la tête sur le côté. ━ on devrait prendre des desserts non ? et des frites. tu veux des frites ?

ace il remet tout en question, si bien que jules, elle en vient à se demander si elle va finir par manger quoique ce soit. observe le menu d'un œil dubitatif, se demande pourquoi finalement elle irait pas s'acheter un paquet de doritos dans une grande surface. les doritos, au moins, ça te trahit pas avec une "recette spéciale". l'air effaré qu'elle lui adresse quand il parle de nuggets de tortue renforce son envie de s'éloigner à toutes jambes loin de l'établissement. « ace.. » ton menaçant que la blonde adresse en coréen, agrémentant le tout d'un coup d'épaule accompagné d'un sourire en coin. ouais, deux boites de nuggets, c'est sympa. mais retrouver le chemin vers leur hébergement du week-end, c'est encore mieux. « j'suis à peu près certaine que rejoindre rome depuis ici ça va être compliqué. » non pas qu'y ait un océan à traverser mais... si. juliette elle sort son téléphone de sa poche, appuie sur le bouton central. écran noir. « notre retour à destination repose sur tes frêles épaules, kang. » rire qui secoue ses épaules, alors qu'elle s'avance vers l'écran tactile et regarde la liste des menus par dessus l'épaule du brun. « y a des frites sur du cheddar fondu ? les glaces, peut-être après non ? on peut demander à les récupérer après ? » sur la pointe des pieds, elle dodeline de la tête jules, sourire sur les lèvres. elle rayonne, la blonde, au fond elle pourrait passer le reste de la nuit dans les rues sans trouver leur hôtel, que ça lui irait tant qu'il y aura ace. « demain, on va dans le bayou dis ? j'veux voir si c'est comme dans la princesse et la grenouille. » quoi, elle l'a vu y a pas si longtemps, au même titre que tous les autres films disney. une enfance entière à rattraper à grande vitesse.

et peut être qu’il devrait arrêter. de parler des tortues à tout bout de champs, des les imaginer à toutes les sauces -ce qui était risible vu qu’il avait parlé d’une sauce goût tortue. parce que la seule chose qu’il faisait présentement était se dégoûter et dégoûter son acolyte par la même occasion. le week end risquait d’être plutôt compliqué si le rapport à la nourriture se transformait en une phobie extrême les empêchant d’avaler quoi que ce soit. ━ pardon, j’arrête qu’il souffle, mimant de fermer sa bouche comme une fermeture éclair, les yeux rieurs. ━ peut être, peut être pas. n’oublie pas la téléportation qui finirait forcément par exister un jour même si présentement, seul les films futuriste pouvait prétendre user de ce stratagème. et puisque jules semblait traîner la poisse avec elle, elle montrait son téléphone déchargé alors qu’il secouait la tête de dépit. ━ je suis toujours le super héros de l’histoire répétition éternelle où il se devait d’être le sauveur, peu importe la situation. pour sa mère, pour jules. ━ je crois ? va pour les frites clique dessus pour les ajouter, sors sa carte bleue pour payer l’addition, heureux de la voir heureuse. il lui en fallait peu en réfléchissant bien à ace. peu pour que sa vie semble plus légère. quand elle était là, tout semblait bien moins compliqué. ━ j’suis la princesse et toi la grenouille ? rit à sa propre blague, se sent obligé d’en ajouter une couche. ━ ou alors, je suis la princesse et toi la tortue le faux air désolé qui prend place sur son visage alors qu’il s’éloigne vers le comptoir, évitant un coup dans son épaule que la blonde avait probablement envie de lui donner. ━ mais va pour le bayou si ce soir on assiste à un concert de jazz dans le quartier français parce qu’ace et la musique était sûrement la plus grande histoire d’amour pouvant exister.