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basile et louve
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Lundi 8 avril, 18h30. L’heure fatidique. Quatre semaines, c’est la durée depuis laquelle t’as la sensation que ton petit monde a cessé de tourner rond. T’as merdé, tu peux pas le nier. T’es allée à poil à cette manifestation, à fond dans ton délire, peut-être un peu pour te rendre intéressante, comme toujours. Mais le plus important, c’est que tu lui as caché ça. Tu l’as pas dit à Basile, à ton mari, à celui qui partage ta vie depuis le début de cette nouvelle année. Tu lui as caché le fait que tu comptais y aller nue comme un ver alors que, en toute logique, t’aurais dû le lui dire. Ca se fait pas de cacher ce genre de chose. Et résultat, ça t’est retombé sur le coin de la gueule. Des photos, des vidéos, tout prouve Ô combien t’as été conne encore une fois, pour pas changer de tes mauvaises habitudes. Sauf que c’est allé plus loin qu’habituellement. C’est allé si loin que tu t’es retrouvé dans les journaux et magazines français. Ah, ben oui, la nouvellement Mulliez qui se trimballe à poil et se fait tripoter les seins par un mec tout aussi peu vêtu. Super pour la réputation de vos familles respectives, déjà que ce mariage n’a rien de prémédité et est tout bonnement le fruit d’une folie passagère. Folie que t’as pas regretté, folie que t’as assumée, que t’as appréciée et consumée comme il se devait. Sauf que, là, t’es dans de beaux draps. Ca fait quatre semaines que t’attends que Basile explose parce que tu le connais, il a été trop calme jusqu’ici. T’es partie te réfugier chez ta mère une bonne semaine et demie, au Brésil, pour y réfléchir. Pour savoir quoi faire, comment réagir face à tout ça, parce que tu supporterais pas de le perdre. Sauf que tu l’as pas revu depuis ton retour il y a une semaine et il t’a demandé de venir chez lui pour parler sérieusement. Bordel. T’as cette boule au creux de ton ventre, tu flippes comme jamais auparavant. Tu flippes de ce qu’il peut bien avoir à te dire, de la décision qu’il a bien pu prendre. Tes doigts s’articulent machinalement sur la porte d’entrée de son appartement alors que tu prends une profonde inspiration, absolument pas prête à le confronter.

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Délicatement, tes doigts s’articulent autour de la poignée de la porte d’entrée. Tu l’ouvres comme si tu comptais entrer à tâtons, pour être certaine de ne pas te prendre un coup de batte derrière le crâne une fois un pied dans l’appartement. T’as cette boule au creux de ton vente qui se fait plus grosse à mesure que t’entrouvres la porte, jusqu’à ce que tu te figes en reconnaissant sa silhouette. Merde. T’étais pas prête. Pas prête à tel point que tu sursautes, un cri de surprise s’extirpant d’entre tes lèvres. Il te dit qu’il a tué personne, que t’entres pas sur une scène de crime. Quelle ironie. Et déjà il disparaît dans le salon, avant même que t’aies le temps de pénétrer entièrement dans le duplex. Tu soupires, ça commence bien. Dès lors, tu te hâtes davantage, refermant la porte derrière toi pour le suivre dans la pièce adjacente. Il ne te jette pas un seul regard, te demande comment est le temps au Brésil. Sérieusement ? Tu sais qu’il t’en veut. Tu sais qu’il a pas dirigé. Tu l’entends au son de sa voix. Alors, tu réponds pas à sa question. T’en vois pas l’utilité. Il pourrait le savoir en y allant avec toi, pour une fois. « Je suis désolée. » chuchotes-tu presque. Oh, ce que ça peut t’écorcher la bouche. Mais t’es consciente que si vous en êtes là, c’est de ta faute, seulement de la tienne. Tu peux rien lui reprocher. Tu t’approches, doucement, presque féline, à tâter le terrain, à te demander ce que tu risques si tu l’approches un peu plus. « Je suis désolée Basile… » Ta voix est plus forte cette fois, alors que tu te trouves à deux mètres de lui. Et tu te laisses glisser sur le canapé, t’approchant doucement de lui. Putain, ce que t’es ridicule. Elle est où la louve à la grande gueule ? Loin. « Je m’en veux… j’aurais pas dû. J’ai merdé, je sais. Mais je veux pas te perdre… pas pour une histoire pareille… » que tu reprends alors que ton regard tente de capter le sien. Ce regard humide, ce regard fragile, ce regard qui n’est pas le tien. Ou du moins, pas de la louve forte. Celui de la louve fragile, celle qui trépasse, celle qui en est arrivée à se dire qu’elle était bien, dans son coma. « Je t’aime, tu le sais, pas vrai ? J’en dors plus… j’en dors plus parce que t’es pas là. » La seule chose que tu veux, c’est te réfugier dans ses bras, y retrouver la protection qu’il t’apportait depuis que vous vous êtes laissés cette chance, y retrouver la chaleur de son corps, la douceur de sa peau contre la tienne.

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En venant ici ce soir, t’as clairement accepté de mettre ta fierté de côté. Cette fierté habituellement omniprésente qui t’empêche de t’excuser pour des choses légitimes, t’en as clairement pas besoin si tu veux pas aggraver la situation et perdre Basile. Parce que tu le supporterais pas, t’as aucun doute là-dessus. Tu voyais déjà difficilement ta vie sans lui autrefois, ce serait encore moins le cas aujourd’hui. Pas maintenant que vous avez déjà traversé tout ça. La fusillade, ton coma, tes peurs, son soutien, le mariage… C’est trop pour que vous puissiez simplement tourner la page de votre histoire. En tout cas, c’est trop pour que tu puisses le faire. Alors tu t’approches de lui doucement, comme si tu t’attendais à ce qu’il te saute au cou pour t’achever. Il t’a dit que t’as vraiment merdé, qu’il t’aime aussi mais… Ce mais. Ce mais, tu le détestes déjà avant même d’avoir entendu la suite. Tu te figes sur le canapé, ta main se porte machinalement sur ton ventre sous la douleur que ce simple mot te procure. Bordel, t’as jamais été aussi stressée de ta vie. T’observes ce qu’il jette sur la table, hors de cette enveloppe. Et tu déglutis. Des magazines, des mails… T’as pas loupé ton coup cette fois. Si ça concernait que toi, t’aurais probablement ri. Mais là, c’est pas le cas. T’es loin d’avoir envie de le faire. « Je te cache rien… rien d’autre Basile. Je te le promets. Je suis désolée, j’avais pas envie qu’on se prenne la tête pour une simple manif et je pensais pas que ça en arriverait là… » Ah, ça, pour pas y avoir pensé, t’y avais vraiment pas pensé. La seule chose qui avait pu te passer par l’esprit, c’était une dispute avec Basile que tu voulais à tout prix éviter. Manqué. « Tu sais que je te fais confiance mais je connais aussi ton caractère… je sais que ça t’aurait énervé. » que tu reprends. Si tu savais, pourquoi tu l’as fait dans ce cas ? Bonne question. Probablement parce que t’es une gamine qui agit avant de réfléchir. « Je te promets que ça se reproduira plus Basile, je te cacherai plus rien. Mais pardonne-moi, je t’en supplie… On peut pas tout arrêter pour ça, pas vrai ? On a connu pire, non ? » C’est certain que vous avez connu beaucoup de bas, plus que de hauts. Mais en réalité, t’as jamais mis dans l’embarras sa famille jusqu’à présent. La tienne, oui. Et Dieu sait combien de fois ton père a dû rattraper les pots cassés, mais ça tu t’en fous. Le problème, là, c’est que ça a touché directement sa famille, les Mulliez, et pas uniquement la tienne.

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Depuis que les photos ont été publiées, depuis que tout a changé entre Basile et toi, ça te bouffe de l’intérieur. T’as pas cessé de réfléchir à ce que tu pouvais faire pour te rattraper mais, concrètement, tu peux rien faire. Tu peux pas retourner en arrière ni effacer ces photos, tu peux pas racheter l’image que tu t’es faite en un quart de seconde. La seule chose qui t’est encore donnée de faire, c’est t’excuser. T’as dû fuir, partir auprès de ta mère au Brésil, retrouver un peu ce dont t’as le plus besoin dans ce type de moment pour pouvoir reprendre un tant soit peu du poil de la bête. T’es installée là, à quelques centimètres de lui, à t’excuser, à tenter de te racheter tant bien que mal, à vouloir apaiser la situation coûte que coûte. « Je suis désolée… j’avais fumé, beaucoup. Je suis conne d’avoir trouvé ça drôle mais je comprends totalement que ça puisse t’énerver Basile. Ca m’aurait probablement aussi énervée… je peux pas t’en vouloir pour ça. » Et puis, t’es mal placée pour lui en vouloir pour quelque raison que ce soit d’ailleurs. Sa main sur ta cuisse pourtant, elle te fait espérer son pardon. Ta main à toi se glisse machinalement sur la sienne, tes doigts se faufilant entre les siens sans le quitter du regard. Puis il reprend la parole, te dit qu’il te pardonne, qu’il veut que t’aies entièrement confiance en lui. Mais que si ça venait à se reproduire, sa réaction sera loin d’être la même. « Je sais… je comprends… » Sauf que quand tu penses que les choses peuvent se régler, il dépose des papiers sur tes jambes. A peine tes yeux ont-ils le temps de parcourir vaguement ces derniers que tes larmes prennent le dessus. Une première vient machinalement couler le long de ta joue tandis que tu baisses la tête, tes cheveux venant camoufler ton visage de poupée. Alors, c’est ça ? A ce point-là que t’as réussi à pousser les choses ? Bravo Louve.

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C’est plus fort que toi, ces perles liquides qui glissent sur tes joues lorsque tu décryptes le document qui se trouve sur tes cuisses. T’as merdé, tu le savais. Mais tu pensais pas que ça en arriverait là, que Basile aurait obtenu ces papiers. Il aurait pu les signer, faire annuler ce mariage sans une once de remords et, pourtant, ils sont là, devant toi. Pas de trace de signature, pas un seul coup de stylo de la part de ton mari. Il remarque bien vite que ça ne va pas, glisse sa main sur ta cuisse à nouveau, te force à relever ta tête pour l’observer. T’as les yeux humides et déjà rougis par la peur de le perdre, encore une fois, la fois de trop. Tu le supporterais pas, tu peux pas vivre sans lui, tu peux plus. Il t’avoue qu’il comptait pas les signer, que c’est qu’une dispute parmi d’autres au sein de votre mariage, que vous vous relèverez. Et toi, t’es là, à ne pas oser bouger, à contenir ces fichues larmes qui menacent de s’écouler de plus belle sur ton visage de poupée. Le français en vient même à s’excuser d’avoir installé ce climat froid entre vous… mais c’est de ta faute et de la tienne uniquement. Comment est-ce que tu pourrais lui en vouloir ? T’es clairement pas en bonne posture pour le faire. « Je suis désolée… » que tu répètes faiblement, la gorge nouée par ton envie de craquer, les lèvres tremblantes. Bordel, t’as jamais été dans cet état pour un homme, pas même pour lui… alors c’est ça, hein, l’amour ? C’est ça d’aimer, de souffrir d’un amour incommensurable ?

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