number one

je ne sais clairement pas pourquoi j’ai choisis cet endroit mais par moment, je le trouve plus reposant que la bibliothèque en soit. probablement parce que personne ne pense à faire du gymnase sont QG pour potasser quelques bouquins. sûrement aussi parce que personne n’a pris la peine d’étudier les moments où il était vide. dans tous les cas, je m’estime chanceuse d’en avoir l’accès et de pouvoir vaquer tranquillement à mes occupations sans personne pour me déranger. un bref coup d’oeil à mon téléphone m’indique qu’il est déjà tard et pourtant, je n’ai aucune envie de quitter les lieux. probablement parce qu’éviter yaron est devenu un quotidien et qu’ici, je suis certaine d’avoir la paix. ouais. alors j’me replonge dans mon roman, appréciant sûrement trop les histoires que je ne pourrais jamais vivre et finit par brancher mes écouteurs, créant une ambiance me permettant de laisser mon esprit divaguer ou bon lui semble. un long soupir vient étirer mes lèvres et finalement, je capitule. à continuer comme ça, j’aurais plus de bus pour rentrer et j’étais pas spécialement à l’aise à l’idée d’arpenter les rues sombres totalement seule. coupant la musique, je logeais mon livre dans mon sac avant de descendre des gradins, mes baskets grinçant sur le sol ciré. et l’entrée s’ouvrait subitement, laissant apparaître une puis deux béquilles, me stoppant net dans ma course. oh. est-ce que j’avais le droit d’être ici au moins ? je fuyais les ennuis comme la peste en générale et là, j’avais l’air d’une gosse prise la main dans le sac. pathétique. « je..jeff ? » impossible. complètement impossible. option un, j’avais des hallucinations. option deux, j’étais en train de rêver. option trois, je m’étais cogné la tête quelque part et mon cerveau en devenait totalement détraqué. par réflexe, j’attrapais la peau de mon bras entre mon pouce et mon index, cherchant à me faire revenir à la réalité mais.. non. t’étais toujours là en face de moi et j’souhaitais disparaître sous terre histoire d’échapper à ça.

number one

Plusieurs semaines maintenant que les attentats avaient eu lieu. Plusieurs semaines que j'avais appris la mort de l'un de mes amis. Plusieurs semaines également que j'étais bloqué avec ces stupides béquilles, à les trimballer partout avec moi. Enfin, dans un sens, c'était plutôt elles qui me trimballaient. Ce soir, j'avais envie de faire un tour au gymnase de l'école. Cela faisait longtemps que je n'avait pas mis les pieds dans ce coin, que je n'avais pas foulé le parquet. Ce dernier était un lieu où l'on dansait souvent, même si le plus gros du travail se faisait évidemment dans les salles de danse. J'avais enfilé une veste et était donc sorti de chez moi, direction Harvard. J'arrivais devant le grand bâtiment, le regarda un instant, avant de finalement y pousser les portes. j'avance un peu, puis me retrouve devant la salle principale. La porte est un peu lourde, mais j'arrive à me démerder pour l'ouvrir sans trop d'encombres. J'passe le pas de la porte, avance un peu en regardant où je met les pieds, puis lève finalement les yeux. Une seule personne présente. Une silhouette, très proche de moi, probablement sur le départ. « je..jeff ? » J'arque un sourcil. "C'est moi." J'fronce légèrement les sourcils, la détaille un peu du regard, puis écarquille finalement les yeux. "Addi ?" Impossible. No fucking way. Qu'est-ce qu'elle fait ici ? A Cambridge ? A Harvard ? Dans ce gymnase ? Des milliers de questions se posent dans ma tête. J'sais même pas quoi pensé, j'suis complètement perdu. J'ai été attaché à cette nana comme jamais je n'ai été attaché, et là, elle se retrouve devant moi, après probablement 6 ans sans nouvelle. "Qu'est-ce que tu fais là ?" Ouais, commençons par la question la plus basique.

number one

sûrement que tu me détestes, pas vrai ? j’en sais rien. je sais pas du tout. t’aurais des raisons de le faire dans tous les cas. j’veux dire.. j’ai mis fin à notre relation en un claquement de doigt de la façon la plus lâche qui soit et puis.. on a juste perdu contact. sûrement que j’aurais pas dû faire les choses de la manière dont je les ai fais mais.. j’pourrais pas promettre qu’en retournant en arrière ce serait différent. parce que j’étais moi et que j’avais toujours détesté les confrontations. que j’avais été incapable de t’expliquer que j’étais juste terrifiée à l’idée de t’aimer parce que j’étais carrément nulle en relation et.. ouais, c’est compliqué. et en soit, j’pensais clairement pas te retomber dessus un jour. je crois qu’avec le temps, je m’étais juste dit que tu faisais partie de mon passé et qu’on ne se recroiserait plus jamais. fallait croire que le destin préférait largement être un farceur et me mettre dans ce genre de situation. « j’ai.. j’ai enfin eu une bourse » ni plus ni moins. une bourse conséquente m’ouvrant les portes de la plus grande université au monde. et si harvard n’avait jamais fait parti des priorités que je pouvais me fixer, j’avais eu mes raisons de finalement la choisir. mal à l’aise, je resserrais mes bras autour de moi laissant mon regard se perdre au niveau de mes baskets. et donc ? qu’est-ce que je suis censée te dire maintenant ? c’est pas comme si.. comme si on avait des tas de choses à se raconter. c’était probablement l’inverse même. « t’..t’as pas changé. » enfin si. j’veux dire t’es plus.. homme ? bref, peu importe pas vrai ? puis ça aurait été stupide de dire ça. alors j’me pince les lèvres me balançant maladroitement d’une jambe à l’autre avant de soupir.

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Je l'ai détesté. Pendant de nombreuses semaines. De nombreux mois. Je la voyais comme cette fille qui n'allait jamais me faire souffrir. Je l'aimais, plus que tout, à cette époque. C'est cette nana, celle qui m'a redonné foi en la vie. Qui m'a montré que je pouvais aimer et être aimé. Elle m'avait beaucoup fait avancer. Donc forcément, j'ai fini par lui pardonner, avec le temps. Les blessures de son départ se sont refermés. Je n'avais pas cherché à la recontacter, préférant me dire qu'elle faisait simplement partie de mon passé dorénavant. Et voilà que je lui tombe dessus, ici, à Harvard, le dernier endroit où je pensais pouvoir la recroiser. « j’ai.. j’ai enfin eu une bourse. » C'était donc officiel. Elle était à Harvard. J'allais donc potentiellement la croiser dans les couloirs de l'université. C'était bizarre, comme sensation. Je ne saurais pas dire si j'étais heureux de la nouvelle, à vrai dire. « t’..t’as pas changé. » Je souris légèrement, me regarde. J'avais déjà perdu pas mal de poids quand on s'était mis ensemble, mais j'en avais encore perdu par la suite. Sa vision de moi à l'époque devait être un peu embelli. "J'avais pas de béquilles, la dernière fois qu'on s'est vu." Je relève les yeux vers elle, souris légèrement. "Toi, t'es encore plus belle.." Celle là, j'ai pas vraiment pu la contrôler. Je regarde vers les gradins. "Ça te dérange pas si on va s'assoir un peu ?" J'ai du mal à tenir sur ma jambe. "Sauf si t'as quelque chose à faire." Quand j'y pense. T'étais sur le départ en me croisant. Puis, surtout, t'avais peut-être pas forcément envie de me voir.

number one

c’était exactement le genre de moment étrange dont je préfèrerais me passer. probablement parce que je suis déjà assez mal à l’aise en règle générale pour apprécier me retrouver dans ce genre de situation. puis quel était le taux de probabilité pour que je tombe sur toi là maintenant tout de suite, ici ? « vrai » et probablement que je devais te demander comment tu te sentais, ce genre de chose. est-ce que c’était l’attentat qui t’avais offert cette position ? est-ce que tu allais avoir de graves séquelles ? en fait, je crois que j’avais complètement perdue tous mes moyens. et y avait soudainement ce compliment qui claquait dans l’air me faisant monter le rouge aux joues. alors mon regard, il partait se river sur le sol alors que je jouais maladroitement avec mes mains. sûrement que je devrais m’en aller maintenant. prendre l’air, mettre de l’espace entre nous. peu importe en fait. « je.. mh, non. okay. » j’inspire lentement, décalant une mèche de cheveux derrière mon oreille, bifurquant pour retourner petit à petit vers les gradins. et une fois ayant pris place, je regardais partout autour de moi sauf en ta direction. y avait prescription depuis tout ce temps, non ? j’veux dire.. est-ce que t’allais en reparler ? de notre relation, de cette manière lâche que j’avais eu de te laisser tomber ? à vrai dire, je crois que je ne préfèrerais pas. mais est-ce que l’on pouvait réellement prétendre que rien ne s’était produit ? j’en étais pas aussi certaine. « t’en as pour longtemps comme ça ? » je meuble la conversation comme je peux, tu m’excuseras.