T'explique pourquoi t'as choisi les rangs violets pour ton aventure. Et tu souris à sa réponse. « Alors rejoins-nous. » Toi c'est les scénarios que t'aimes écrire même si t'aimes bien le devant de la scène finalement. Tu la vois bien héroïne de tes histoires sombres. La Solaire à la mauvaise mine. Elle t'explique les raisons de son choix et tu les partages finalement. Parce que si tu dois te parer d'une autre couleur un jour, tu sais que ce sera le vert. « Je suis persuadé qu'on peut être libre. » C'est difficile, c'est une lutte même, mais toi aussi tu t'accroches à cet idéal. Tu te marres cette fois franchement quand elle te qualifie de pyromane. Ça te va bien ouais. Tu crames tout sur ton passage, même ta personne en fait. Tu fais pas attention aux autres autour, t'es bien trop flamboyant pour ça. Mais tu sens que elle aussi, elle partage ce truc avec toi. Elle a du en semer des incendies sur son passage la Frêle Chamberlain. Et là précisément, vous êtes entrain de faire de n'importe quoi dans ce bus. Tu soupçonnes que c'est pas sa première fois et tu souris encore en tournant autour de la barre quand elle te confesse ses crimes. « Voiture de luxe, voyons ça. » Elle tape dans les hautes sphères et t'es pas tellement étonné de ça, elle a pas de limites Louison, un peu comme toi. Elle met finalement la machine en route et vous avancez alors que tu t'accroches à la barre, ta carcasse géante étant parcourue de soubresauts sur le chaos de la route. C'est grisant même si pas autant que la moto. Ça a le goût d'interdit surtout, et celui-ci est bien plus précieux qu'un autre. « Vitesse lumière ! » que tu cries toujours sans doute sous l'effet du truc que tu as pris en te marrant. Vous êtes juste fous, bon à interner. Ou à coffrer va savoir. Vous prenez des risques mais vous en avez aucune conscience. Vous allez peut-être mourir avec vos conneries même, mais t'as pas vraiment peur de ça. Tu la regardes quand elle te pose cette question, tes sourcils de haussent. « J'ai la tête à avoir ça dans mon dressing ? » Une petite amie. T'es trop instable pour ça. T'as essayé faut pas croire, mais c'est juste pas pour toi. La liberté justement. « Et toi Louison, y'a des gens que je dois prévenir sur ton testament ? » On sait jamais, si je suis celui des deux qui survit. Même si baladé au milieu du bus, y'a plus de chances que ce soit l'inverse qui arrive.

J’suis pas d’accord. On est toujours esclave de quelque chose. Qu’on le veuille ou non, à moins d’être un ermite et encore. On sera toujours esclave de soi-même. De notre ventre qui crie à quel point il a faim. De notre vessie qui veut vider sa pisse. On est libre de rien. J’dirais même qu’on est prisonnier à l’instant où on né. Prisonnier du temps qui passe. De tas de trucs. Illusion j’vous dis. La liberté est un sentiment temporaire. Comme maintenant, aux commandes de ce bus. Je me sens puissante. Affranchie de toutes règles. Je démarre péniblement et le véhicule avance. La direction est lourde. Je galère pour tourner. « En avant pour la vitesse lumière » Je passe alors les vitesses une à une, fonçant si vite que le paysage alentour m’apparaît flou. Je cogne une poubelle et explose de rire dans l’euphorie du moment. Je suis dingue. On est dingue. T’as été assez fou et con pour monter avec moi. J’ignorais qu’on faisait encore des modèles dans ton genre. Belle trouvaille le Maverick. Lowell indomptable. « Dans ton dressing » Pardon pour le pare-brise, mais j’éclate si fort de rire que je postillonne partout. T’es pas croyable. « Tu rangerais ta copine dans un placard toi ? Pauvre fille, je la plains. Bon, j’en conclus que c’est négatif. » Je hausse mes épaules et je redirige mon attention vers la route. Je passe devant la confrérie barricadée des Eliots et soupire. « Mon testament ? Carrément ? Eum, sûrement mes frères et ma soeur .. Mes cousins. J’suis pas mariée, mais en couple et fous toi de ma gueule, mais je lui donnerais pratiquement tout. C’est-à-dire pas grand chose. Je n’ai rien à moi. » Juste une penderie bien remplie. Une collection de lunettes de soleil. Des bouquins de droit. Des livres de théâtre. Et la clé de son coeur autour du cou. Cette clé que je tripote en cet instant et qui m’fait subitement ralentir « Tu veux essayer ? » J’peux pas crever, je peux pas crever parce que je l’aime et malgré tout ce qui s’est passé entre nous, j’pense que ma disparition le bouleverserait vivement. J’ai pas le droit. J’suis pas libre tu vois.

En partance pour votre destination parallèle délirante, vous engagez cette vitesse lumière imaginaire, ravageant une poubelle au passage. T'es pas effrayé Mav', non tu rigoles de bon cœur parce que faire tes conneries c'est ta routine et qu'avec Louison là, tu t'amuses juste trop bien. Et elle te demande si t'as une petite amie à prévenir. Le dressing, ça la fait marrer, mais ouais faut être honnête, tu changes de gonzesse comme de chemise alors la comparaison est plutôt juste. « Mon placard est très grand t'en fais pas. » Que tu rajoutes sourire aux lèvres. Ce que tu peux être con. Mais tu te rappelles d'une infirmière que tu as pris une fois dans un placard justement. Tout est possible ma petite, surtout avec moi. « Tu pourras toujours prévenir Apple va, une meilleure amie, ça fait bien le job aussi. » Y'a elle ou bien ta sœur qu'elle pourrait avertir, mais ça remonterait aux parents et si tu pouvais éviter un sermon de ton pasteur de père dans la mort, houra. Elle te parle d'ailleurs de son entourage et tu la regardes une lueur moqueuse et malicieuse dans les yeux. Elle est en couple et tu vois à son regard qu'il compte. Tu sais pas si ça fera ça pour toi un jour. De façon durable disons. Car certaines ont compté plus que d'autres, on va pas se mentir, mais toi tu vis dans l'instant. « C'est beau. » que tu dis finalement. Parce que ouais t'y crois, mais pas pour toi. « Ouais pousse-toi. » Que tu dis en la regardant se lever et en prenant le volant, tu t'installes et appuie sur le champignon. « C'est lourd et léger en même temps, trop bizarre. » Tu te marres et tentes de faire crisser les pneus, ce qui fonctionne apparemment. « On va à la mer ? » Elle est pas si loin et c'est un bon point de chute non ?

Je pilote une carcasse d’acier toute creuse. Je fais hurler le moteur. Je dépasse largement la vitesse autorisée. J’entends tes semelles qui crissent sur le sol. Furtivement, pour éviter qu’on ne finisse dans l’décor, je jette un coup d’œil à ta tronche derrière moi. Accroché à ta barre de pole dance, tu m’parles de tes conquêtes insignifiantes et du peu de personnes à prévenir si jamais tu passais l’arme à gauche. Et puis soudain, surgit un prénom que je connais bien, Apple. Ta meilleure amie. La bouche grande ouverte, je gobe de l’air à fond et fronce mes sourcils. « J’savais pas que tu étais proche d’une de mes potes. Je parie que t’as déjà louché sur ses seins » Parce qu’Apple, c’est un sacré morceau. Ami ou pas, tout homme normalement constitué et non attiré uniquement par le sexe masculin la reluquerait. C’est un régal pour les yeux cette meuf. Et puis tu retournes ensuite la question à mon encontre et je peux pas m’empêcher de parler de LUI. De mon petit-ami. De ma moitié à ce jour. Je t’entends émettre quelques mots et te connaissant, j’sais pas si c’est de l’ironie. Je préfère alors couper court et te laisser les commandes. Durant quelques secondes, le bus est en roue libre. Je m’installe dans les escaliers et m’accroche tout en zieutant par le pare-brise. Voilà, j’ai plus le contrôle. Je dois me laisser aller et te faire confiance. J’ai plus le choix. « Grave, c’est space comme machin » Comme un petit garçon, tu fais mumuse avec ton gros jouet et je m’éclate contre la porte vitrée. Un petit cri plus tard, je me relève et me réinstalle en te lançant un regard noir « Ouais, amène-moi à la mer Mav’. J’ai besoin de ressentir la nature, mais j’ai pas pris mon maillot » Haussant mes épaules, de retour en position verticale, je te laisse tracer. Je me préoccupe pas ou peu des futures conséquences de cet emprunt. Je me laisse emporter par l’euphorie. J’allume la radio et cours dans l’allée. Je me pends aux sièges. Je chantonne. Au bout de plusieurs minutes, je croule sous la fatigue. Je te rejoins au premier rang et je m’affale sur deux sièges. Le littoral est tout près. Plus de buildings étouffants. Tu ralentis et te gare non loin de la flotte. « Hey, merci .. » Tu peux pas savoir la bouffée d’air frais que tu me donnes. Ces attentats m’ont foutu à terre et toi, tu me relèves grâce à ta folie. « Tu sais ouvrir les portes au moins ? »

Autant être honnête, vous faites n'importe quoi mais vous êtes prévoyants au moins. Digne de ces formulaires des personnes à prévenir, c'est naturellement que tu évoques ta meilleure amie qui ne semble pas inconnue de cette chère Louison. Normal en même temps, on se connaît et se fréquente entre verts. Tu souris cette fois franchement quand elle te parle de la plastique parfaite de ta parfaite Meilleure amie. « J'ai pas fait que les reluquer si tu veux savoir. » Honnêtement, quel mec normalement constitué résisterait à Apple ? Et puis toi et Elle vous êtes bien plus, même si elle te connaît trop bien pour exiger davantage de sa part. Tu tiens à ta liberté mais ça tombe bien puisqu'elle aussi. Et tu te glisses derrière le volant alors que tu parlais de sa relation avec son mec. T'es pas du genre à t'épancher sentimentalement parlant mais tu comprends. Et tu fonces alors qu'elle fait n'importe quoi sur les sièges, toi tu danses à l'occasion et chante de concert avec elle. Elle revient près de toi puis reprend la place conducteur et les immeubles s'absentent de votre paysage d'acier pour laisser dévoiler la mer, les vagues et les embruns teintés de sombre. C'est fascinant presque de voir cette merveille naturelle qui ne dort jamais. Un peu comme vous. La carcasse d'acier s'arrête et tu souris à sa remarque. Ton pied s'abat sur les deux portes et s'ouvrent d'un coup sec. « Voilà. » Simple et efficace même si pas très respectueux du matériel. Tu tends ta main alors qu'elle est toujours en haut de l'escalier du bus. « Viens. » que t'engages un grand sourire aux lèvres, tu cours avec elle jusqu'à cette naissance de sel et d'eau qui vient lécher là les orteils sous le cuir des chaussures. T'es bien là, avec Elle. Aussi folle que ta sombre personne. Aussi sombre que tes songes les plus fous. Tes bras s'écartent, sa main suspendue à la tienne, et tes paupières se ferment, tu inspires à plein poumons, les embruns qui se déversent dans ton souffle et tu hurles là, au silence du monde, comme un dégénéré, cette vie  et cette rage qui t'embrasent et qui te torturent à la fois, tu hurles et t'espère que oui, elle hurlera avec toi. Elle est suffisamment comme toi pour le faire.

Ok, je suis pas sûre d’avoir saisi le sous-entendu après tout ce que j’ai consommé ce soir. Tu as peloté les nichons d’Apple ? Ma Apple ? La poupée de dix mètres de haut au regard de braise ? Comment elle t’a laissé l’occasion en fait ? T’es complètement taré dans ta tête. Je dégringole de mon perchoir là. Je suis abasourdie, un couple serait-il sur le point de naître ? Je sens que tu fais moins le malin sur ce sujet, t’as de la chance, j’ai pas les neurones correctement connectés pour avoir une discussion sérieuse à propos de cette nana époustouflante. Je te laisse le privilège de conduire le bus à la direction niqué et je m’envole à l’arrière. Je me déchaîne. Je libère toutes les tensions accumulées post-attentat sur le chemin nous conduisant vers « la mer ». Oui, j'ai mis des guillemets, ici, c’est juste un bout d’océan qui lèche le continent. Rien à voir avec les plages françaises, rien du tout. À bout de forces, je reviens ensuite à l’avant du véhicule et je m’assagis. Je laisse voguer mon regard ici et là sur le paysage changeant du tout au tout. Je somnole et sursaute lorsque le moteur s’arrête. Et maintenant ? Maintenant tu défonces les portes du bus de tes deux pieds et j’éclate de rire au ralenti. « Excellent, rien à redire » Le pouce levé pour valider ton accès de violence, je descends l’escalier et me munis de ta main avant de sauter sur le bitume. Ma tête tourne dans tous les sens. Cependant, je fais un effort pour te suivre dans ta folie jusqu’à l’eau qui grignote le sable et qui repart en sens inverse. C’est le calme plat. Juste la nature qui s’exprime. Mes chaussures s’inondent. Ma température corporelle baisse. T’élèves mon bras dans les airs avec le tien, symétriquement et tu gueules. Tu brises le rythme incessant des flots de ta voix rauque. À moi. Je mêle mon cri au tien et m’arrache les poumons et les cordes vocales. J’expulse ma haine. Ma peur. Mes sentiments négatifs et je m’écroule sur le sable en t’emportant avec moi. « Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort .. » Un murmure et j’enfonce ma joue rebondie sur ton épaule saillante. Mes prunelles décollant des vagues, je les élève jusqu’au ciel et fixe une étoile peinant à illuminer la voûte céleste au-dessus de nous. « Je .. Je m’endors Mav' » J’sais pas si je tiendrais toute une nuit par ce froid, j’sais pas si tu auras la force de me ramener quelque part, mais mon organisme n’arrive plus à lutter contre la fatigue. Je me déconnecte, déconnecte toi aussi, ça m’est complètement égal.

hj : désolée pour le retard, on peut archiver comme ça, histoire que ça te traîne pas dans les pieds