 APPEL DE MEGHAN À ELLIOT — le 4 août 2018

j’inspire puis expire lentement. j’peux pas me planquer, j’peux pas éviter la conversation. puis je sais que je te dois au moins ça alors ouais, j’attends sagement que tu décroches. et quand tu le fais, quand j’entends ta voix, j’ai le coeur qui se serre un peu. « hey » que je souffle doucement. j’ai pas envie qu’on tourne autour du pot. ce serait injuste envers toi alors je sais que je dois lâcher un peu tout maintenant. « désolée de pas avoir appelé. j’étais —je suis— avec sullivan. » ok, chaque chose en son temps.

T'as promis d'appeler tous les soirs. Alors quand vendredi, ça a trainé pour que je reçoive finalement un simple texto plutôt froid et évasif... j'ai pas cherché à insister parce que j'me suis dis que tu voulais pas parler mais ouais, j'me suis inquiété. Tu m'as même pas donné le verdict du procès. Ça doit pas être bon alors. Tu me dis que tu viens de rentrer à Boston et... j'ai même pas été prévenu? D'accord. Finalement, tu m'appelles, et comme un gars un peu trop désespéré, je décroche à la première sonnerie. "Hey." Un soupir de soulagement presque. Et un simple 'hey' de ta part en retour. Fair enough. Et là... mon corps se raidit. "D'accord." C'est tout ce que je sais dire. Parce que tu fais que commencer n'est-ce pas? J'le sens dans ta voix que t'as des choses à dire, et tu fonces droit dans le tas. Alors vas-y, j't'écoute.

 APPEL DE MEGHAN À ELLIOT — le 4 août 2018

j’inspire un coup et y a que de la froideur de ton côté. mh, d’un côté ça rends les choses un peu plus facile. j’pense que si t’avais décroché avec des mots d’amour à la clé je me serais décomposée. je m’assois sur le canapé mordillant ma lèvre, gardant le silence pendant quelques secondes qui faisaient office d’éternité. « on devrait garder nos distances un peu » le temps que tout ça s’apaise. qu’on puisse mettre les choses derrière nous. « je ne veux pas le perdre » et je ne veux pas te perdre toi non plus mais j’suis bloquée. j’ai mon meilleur ami et le père de mes enfants de l’autre côté. mais je me suis mise toute seule dans cette situation pas vrai ?

C'est glacial, si on compare cette conversation à nos derniers moments passés. Et... ouais, j'crois que j'le savais au final, que je t'aurais perdue au retour de ce procès. T'as été seule, t'as eu le temps de réfléchir. Enfin, t'étais pas seule à c'que tu me dis. Ose encore dire après que mes doutes étaient infondés. Que je n'étais pas destiné à être "un gars de passage". Le second choix. L'histoire ne fait que se répéter, et ça me gave. Cléo, Vega, toi. Ras le bol en fait. Alors ouais, t'as raison, gardons nos distances. Parce que là, j'ai mal au coeur. J'ai envie de vomir, j'ai l'impression d'entendre les morceaux s'éclater dans ma cage thoracique. "D'accord." Encore une fois. Tu veux que j'te dise quoi d'autre? J'm'efforce de ne rien dire en fait, parce que sinon, ça va péter, et y'aura sûrement des mots qui vont sortir que je finirais par regretter. Autant me taire, renfiler mon armure et prétendre que tout va bien et que non, ça ne me touche pas tant que ça.

 APPEL DE MEGHAN À ELLIOT — le 4 août 2018

alors ouais, je te dis juste les choses parce que j’ai jamais été une menteuse et que je ne veux surtout pas jouer sur deux tableaux. sauf que forcément, je me heurte à ta froideur et c’est pas spécialement agréable à encaisser. il est loin tant « tout ce que je veux c’est que tu sois heureuse ». tu vois, je le savais. je savais que ça ne pourrait pas bien se terminer, que ce n’était pas possible. « d’accord » je répète dans un souffle mais ça me fait mal. je m’attendais pas à ce que tu sois réceptif mais je ne m’attendais pas non plus à.. ça ? j’ai presque l’impression que je peux percevoir du dégoût dans ta voix et c’est horrible en fait. « je.. bah je vais te laisser du coup » vu que visiblement y a pas grand chose à se dire.

J’ai trop la gorge nouée pour parler en fait. Et j’vais dire des mots qui vont te blesser et que j’vais regretter dès qu’ils sortiront de ma bouche. Autant éviter ça, ça sera mieux pour tous les deux. Pas que tu te soucies de ce qui soit bien pour moi ou pas. Sinon, tu te serais pas jouée de moi ainsi. Et ouais, t’es égoiste, on le sait tout les deux, ça n’a jamais été un secret. Mais j’pensais pas à ce point. "Mhmh." T’as raison, laisse-moi. C’est ce que t’es en train de faire de toute façon. Dans tous les sens du terme. "Passe un bon weekend." Faux. J’espère que ton weekend sera à chier. T’as pensé à moi au moins quand t’étais avec lui? Ne serait-ce qu’une seule seconde? J’ai tant de questions auxquelles je ne veux pas savoir les réponses. A quoi bon? Y’aura que de la souffrance en plus. J’ai pas besoin de ça. Vis ta vie, sois heureuse. "Prends soin de tes enfants." Vraiment, ça j’le pense. Parce que j’crois que moi, j’aurais plus de nouvelles d’eux. Autant nommer un autre parrain, ton mec avait raison au final. Et je raccroche. Je raccroche pour envoyer violemment mon poing dans le mur et aller gerber mes tripes dans les chiottes.