Lleweasley
Ses doigts serrés autour de son téléphone, elle tremble, Margot, alors qu'elle lit le contenu de l'article de Cambridge's Secrets. Étonnée ? Surprise ? Choquée ? En colère ? Non, elle est juste terrifiée, parce qu'elle a vécu ces derniers jours avec un compte à rebours sur le dessus de son couple, et aujourd'hui, ce compte à rebours est enclenché à vive allure, se rapprochant dangereusement d'une fin inévitable. Du moment où elle allait briser le cœur de l'homme dont elle est folle amoureuse. Comme pour s'insuffler une once de courage, la rousse relit les derniers messages qu'elle a reçu, clique sur une conversation au numéro inconnu. Les premiers échanges avaient été houleux, sans pour autant inquiéter Margot. Des menaces en l'air, qu'elle pensait, probablement un bizut qui se jouait d'une présidente sur ordre de son bizuteur, c'était la période. C'était ce dont elle était convaincue jusqu'à ce que les menaces deviennent plus concrètes. Elle glisse en bas de sa conversation, ouvre une photo, où se trouve une copie des analyses qu'Eliot avait fait en début de mois. Avec plus bas, un autre message : Ce n'est que le début. Et enfin, le coup de grâce, l'article de CS, la menace qui devient réelle. Quitte le, si tu ne veux pas que les choses soient pires pour lui. Mâchoire serrée, pulsations affolées, elle lâche le téléphone qu'elle verrouille en entendant la porte de l'appartement, et en entendant le pas d'Eliot qui s'approche de la chambre. Et elle sait alors qu'elle doit commencer à entrer dans le rôle de composition qu'elle a été obligée de créer. Bras croisés, visage fermé, elle le voit arriver et se contente d'un bref hochement de tête en guise de salutation, tandis que le sujet vient déjà. Evidemment, que l'information n'allait pas lui échapper. C'est bien pour ça que l'anonyme avait choisi de la transmettre en passant par CS. Et elle allait devoir jouer le jeu qu'avait lancé son maître chanteur, à contre coeur. Elle avait anticipé le fait qu'il puisse croire à des bêtises. Après tout, ce n'était pas la première fois que de fausses informations étaient relayées par le journal officieux d'Harvard, qui ne vérifiait pas toujours ses informations. La preuve aujourd'hui. En temps normal, Margot, elle aurait râlé après CS, elle aurait même insulté les têtes pensantes derrière ce torchon. Au lieu de quoi, elle balance de but en blanc, sans quitter son visage impassible.. coupable. « Ton pyjama est sous ton oreiller. Eliot... Il .. Il faut qu'on parle. » Elle déglutit, la gorge nouée, serrée, alors que déjà son coeur se fissure alors qu'elle répète les mots qu'elle avait préparés avec soin et répété pour ne pas risquer d'en dévier. De se briser, et de manquer à ce qu'elle s'est promis, coûte que coûte. Le protéger. Il se tourne vers la rousse, sourire qui déjà se gomme un peu, devient soucieux. Elle en a la nausée, Margot, de penser à ce sourire qu'elle ne va plus voir. « Je .. J'voulais pas te le dire comme ça.. Mais j'ai pas le choix. J'ai .. merdé. » Elle passe une main sur son visage, se retient de pleurer. Des larmes sincères, mais des larmes de désespoir, et non pas de culpabilité. « J'avais trop bu, et .. je sais pas, ce type était là.. » Elle n'ose plus le regarder. Elle n'ose plus respirer, alors qu'elle souffle, comme une sentence qu'elle s'inflige à elle-même: « Je crois que nous deux, ça va pas . »
Lleweasley
Elle aurait voulu que tout ça ne soit qu'un cauchemar, que d'une minute à l'autre, elle se réveille, tendrement logée dans les bras d'Eliot, en se disant que toutes les prochaines nuits seraient comme ça. Mais non, elle est bien là, au milieu de cette chambre, devant son futur ex-petit ami qui lui retourne un regard dérouté en l'entendant dire qu'elle voulait lui parler. Se confesser. Avouer un crime qu'elle n'a pas commis. Tromper Eliot ? L'idée même la dégoûte, lui retourne l'estomac. Elle qui déteste la tromperie, qui voue les sentiments les plus sincères au brun depuis qu'ils sont ensemble, et même avant cela. Il a été là pour elle à Séoul, après l'incendie de la Lowell House, cet été, quand elle était au plus bas après la tentative de suicide de sa soeur... Dans tous les pires évenements de cette année, Eliot avait été là, et Margot se répétait toujours la même chose: Elle voulait le brun auprès d'elle dans les meilleurs moments de sa vie à venir. Et comme un rappel à la réalité, ces messages avaient débarqué pour faire sauter sa bulle, lui rappeler que le bonheur n'existe pas. « Ca n'a rien d'une blague Eliot. » Elle essaie de ne pas laisser sa voix trembler, alors qu'elle se redresse, les bras toujours croisés, ses ongles rentrés dans les paumes de ses mains, pratiquement à sang. C'est trop dur, elle ne va pas y arriver. Elle voudrait le prendre dans ses bras, lui jurer que jamais, ô grand jamais elle ne lui ferait de mal. Mais si elle ne faisait pas ça, si elle ne lui brisait pas le coeur, quelqu'un allait tenter de briser sa réputation, et peut-être pire encore.. Et ça, jamais elle ne pourrait le laisser faire. Elle fait les cent pas, évite toujours soigneusement son regard. « C'est pas une blague, et je voulais te le dire, mais .. j'ai été prise de court par CS. » Mensonges. Elle remue le couteau, creuse d'avantage sa tombe, la rousse: « C'était une connerie de venir habiter si vite avec toi. J'aurais pas du. » Mensonges encore. Vivre avec lui, c'était la plus belle décision qu'elle ait pu prendre, et ce malgré ses appréhensions. Chaque matin était parfait, chaque journée était idéale. Un idéal qui vole en éclat. « Je suis désolée.. » Pardonnes moi mon amour. De t'aimer si fort que je n'hésiterais pas à nous détruire, m'anéantir pour te préserver.
Lleweasley
Les mots faisaient l'effet d'une bombe, et elle avait l'impression de le poignarder à chaque syllabe formulée. Margot, elle va devoir vivre avec le sang de son couple sur ses mains, avec l'image indélébile d'un Eliot détruit sous son regard coupable. Elle n'a même pas besoin de l'entendre parler pour savoir l'état dans lequel il est. Parce que sa peine était sienne, et vice versa. Ça a toujours fonctionné comme ça pour eux deux, et Margot, elle a jamais eu aussi mal que ce soir. Elle en vient même à se demander si elle se sentirait pas mieux si tout était vrai, si elle pouvait y croire elle-même, si elle pouvait regarder Eliot dans les yeux, et se moquer de sa réaction. Mais non. Non seulement elle souffrirait chaque fois qu'elle y penserait, mais en plus, elle allait devoir vivre avec ce mensonge sur le dos, avec une confiance perdue qui n'a pas lieu d'être. Eliot répète ses derniers mots, et sa gorge se serre en entendant son ton. L'information est enregistrée, maintenant, il allait contre attaquer. Et ça risquait d'être les prochaines minutes les plus intenses de sa vie. Et la question tombe: Quand? Jamais. Jamais, qu'elle a envie de hurler, si fort qu'elle en perdrait ses cordes vocales. Elle secoue la tête, presque imperceptiblement, refusant de répondre. Surtout parce qu'elle n'a pas de réponse intelligible. Et finalement, les paroles tombent. Tranchantes, blessantes, une réaction logique, une réaction d'homme blessé. Margot elle garde le silence, serre plus fort ses bras croisés, retient ses larmes comme elle le peut. Il énumère, peu à peu, les derniers événements de leur vie de couple, et la rousse se fait violence pour ne pas dire de connerie. Oh oui, elle l'avait dit qu'elle l'aimait. Et elle en pensait chaque mot. Tais-toi Eliot, tais toi. Elle voulait que ça cesse. « C’ÉTAIT APRES TOUT CA, OK? » Son cri résonne dans la chambre, alors qu'elle lève les yeux vers lui. Qu'elle voie le résultat de ce qu'elle vient de faire, qu'elle voie combien elle l'a détruit. Et elle lutte contre les larmes, mais ne parvient à retenir un voile brillant qui passe sur ses grands yeux verts. « Je pensais chaque mot que j't'ai dit.. Je .. » Son cœur bat trop fort, elle en a le tournis. Et elle se ressaisit, baisse à nouveau les yeux en traversant la chambre pour prendre son sac, jeter ses vêtements dedans. « Je suppose que j'suis juste pas celle qu'il te faut. » Et ça lui coûte tellement de dire ça à voix haute, de mentir de la sorte, de jouer avec le cœur d'Eliot, mais également le sien. Mais à choisir, elle préférait qu'il la déteste, plutôt qu'il risque sa réputation, et pire encore, à cause de l'égoïsme de Margot.
Lleweasley
Elle s'enfonce dans son mensonge, sans trouver l'issue la moins douloureuse. Probablement parce qu'il n'y a pas d'autre solution. Elle aimerait pouvoir lui dire que tout n'est que mensonge, poudre aux yeux, Margot. Mais qu'est-ce qui allait attendre Eliot, si elle lui apprenait pour les messages, le chantage, les menaces ? Elle n'avait pas la moindre idée de qui était responsable, et ne pouvait pas risquer que l'anonyme poste des informations douteuses à propos d'Eliot, simplement parce que Margot a refusé de se plier à sa volonté: Le quitter. Pourquoi ? Pourquoi de tout ce qu'on pouvait lui demander de faire, il fallait qu'elle se sépare de sa moitié ? Moitié qui, lentement, s'affaisse, disparaît sous un amas d'amertume. Eliot accuse, la traite de menteuse, demande si ce week end, elle couchait avec un autre, et elle garde le silence. En réalité, ce week end, elle avait passé la soirée avec sa soeur, pour se changer les idées, ne plus penser aux messages douteux qu'elle recevait. Jamais elle n'aurait cru que sa sortie en famille deviendrait un alibi pour son mensonge. Mâchoire serrée, elle encaisse, comme des coups de poings, les mots du brun. Qui remet en question tout ce qu'elle a pu lui dire jusque maintenant. Chaque je t'aime, chaque regard, chaque étreinte. Sans un mot, elle continue d'entasser ses affaires, ne voulant plus qu'une chose: Fuir au plus loin de cet appartement, de lui, du fantôme de leur couple qui trône dans cette chambre. Et ouais, c'est la seule chose qu'elle trouve à dire: Qu'elle n'est pas faite pour lui, qu'elle n'est pas celle qu'il lui faut. Elle n'en pense rien, mais elle garde le regard baissé sur son sac qu'elle ferme, avant de rester immobile. « J'ai pas d'autre explication à te donner, Eliot. » Dit-elle d'un ton égal, en passant son sac sur son épaule. « Tout simplement parce que j'ai pas de défense. Tout est ma faute, et tu mérites quelqu'un qui saura te rendre heureux. » Sa gorge se noue au fil des mots, alors qu'enfin elle se redresse pour lui faire face, sur le pas de la porte. Les larmes au bord des yeux, elle souffre comme elle n'a encore jamais souffert, Margot. Et le pire dans tout ça, c'est qu'elle ne peut rien changer, absolument rien.
Lleweasley
Spirale infernale dans laquelle la rousse s'enfonce, préférant garder son regard rivé sur son sac pour ne pas regarder Eliot, ne pas lire la rage dans ses yeux, rage qu'elle devine déjà à son ton. Oh oui, il la déteste plus que jamais probablement, tout comme elle peut se haïr de lui infliger ça. Mais que pouvait-elle faire de plus ? Elle a été piégée, tout simplement. Et tant qu'elle ne saurait pas qui était cette personne qui semblait connaître leurs habitudes, à elle et surtout celles d'Eliot dont elle avait reçu des photos régulièrement ces derniers jours, elle ne pouvait rien faire, les mains liées. Margot, elle avait peur, et son pire cauchemar était en train de se réaliser. Elle passe son sac sur son épaule, la main crispée autour de sa poignée, elle sent qu'elle pourrait si facilement tout lâcher pour courir dans ses bras, nicher son visage dans son cou, humer son parfum en lui répétant combien elle l'aime, et que jamais, jamais elle ne pourrait lui faire de mal. Peut-être un jour comprendrait-il. Peut-être qu'elle trouvera qui est derrière ces menaces anonymes, et peut-être qu'il lui pardonnera. « A quoi bon remuer le couteau dans la plaie ..? » Elle parle d'une voix blanche, la gorge nouée, le regard vide. Margot, elle ne sait même pas ce qu'elle regarde, elle ne sait plus quoi dire, quoi penser, elle est sur pilote automatique, pour éviter de sombrer. Parce qu'elle le sait, ce n'est qu'une question de temps avant qu'elle ne sombre lourdement, le tout était simplement de ne pas le faire devant lui. Lui qui reprend la parole, pour dire les pires paroles qu'elle puisse entendre. Va-t-en, je ne veux plus te revoir. Et c'est un coup de couteau à chacun de ses mots, si bien que Margot se fait violence pour ne pas fondre en larmes, se mordant l'intérieur de la joue jusqu'au sang.
T'as raison, nous deux, ça ne va pas. Eux deux, ça a toujours été l'évidence même, si bien que lors de leur rencontre, à Séoul, il n'avait fallu que quelques heures pour qu'ils se rapprochent. Elle aurait voulu savoir dès le début, Margot. Savoir qu'elle n'aurait pas du lui parler, à ce brun ténébreux qui semblait venir du même coin qu'elle aux Etats Unis. Elle aurait voulu savoir que tout allait la conduire à cet instant précis, où son coeur allait lui être arraché pour être réduit en bouillie.
Nous deux, c'est fini.
Sans un mot, Margot ouvre la porte de la chambre, se détourne. « Au revoir, Eliot. » Et elle traverse l'appartement comme une ombre, un fantôme, qui se précipite vers la sortie de l'appartement, du bâtiment. Elle passe le pas de la porte, court sur quelques mètres vers sa voiture, s'arrête dans une ruelle où elle s'effondre, prise de nausées, de soubresauts. C'était fini. Elle l'avait perdu.
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