J’étais déjà bien moins fier… Si j’avais, au début du SB, des ailes dans le dos et l’illusion d’avoir berner mon monde sous tous les plans, je faisais nettement moins le malin désormais. Vol de téléphone et mes dernières conneries révélées au grand jour, j’essayais comme je pouvais de temporiser, d’amortir les pots cassés. Et lorsque mon regard se posa sur une cascade de cheveux fauve, mon sourire réapparut un peu : Margot. Déjà quelques temps que j’avais tenté une approche, profitant que la rouquine souffre d’une peine de cœur, me plaçant à ses côtés et m’imposant vite comme un confident précieux et une oreille attentive. C’était stratégique bien sûr, je ne comptais pas me reconvertir dans les courriers du cœur, merci bien. Non, j’avais en tête l’idée que de me mettre la petite sœur de la présidente dans la poche m’assurerait sans nul doute une alliance. Entre mes frasques récentes, mes boulettes avec la Cabot pendant ma phase tarée, parano, et la rupture de notre amitié avec la quincy House, en grande partie par ma faute, je me devais de prouver à Oks que j’avais quand même ma place en tant que VP, que je pouvais apporter du positif à la confrérie et comment mieux le faire qu’en liant un nouveau pacte avec une autre confrérie du campus ? Nouvel objectif du jour, une distraction parfaite dans ma journée pour changer de mes magouilles contre Léo, Agathe et son chien de garde de mec. Je m’approchai donc de Margot, en espérant secrètement qu’elle n’allait pas encore pignouser sur son mather d’ex, mais prêt néanmoins à jouer encore les amis attentionnés si il fallait. Oscar du meilleur acteur : Cole Smythe Wildingham messieurs dames ! « Hey Margot ! Comment se passe ton début de spring break ? » l’interpellai-je d’une voix amicale, sourire aimable aux lèvres, m’approchant d’elle. « T’as un moment on pourrait aller se balader ou boire un verre ? » proposai-je, avec surtout l’idée en tête de savoir si cette fichue pétition circulait aussi chez les violets.  

 Sourire jovial, intonation faussement amicale, je m’approchais de la rouquine en l’interpellant pour attirer son attention. En cette période tendue pour ma personne, avoir des infos venant de l’intérieur des autres confréries étaient primodial… Sauf que je n’avais pas beaucoup d’amis dans les autres confréries, à part chez les Cabots. Enfin maintenant, j’avais Margot. Pauvre petite chose larguée, la fin de sa liaison avec l’autre enflure tombait à pique, ça l’avait rendue vulnérable, ça avait facilité mon approche. Puis c’était pratique quand même, parce que c’était la petite sœur de la présidente. Mon sourire s’élargit donc lorsqu’elle se retourna vers moi, aussi  souriante, aimable et sympathique qu’à l’accoutumée. Naïve. Mais c’était bon signe, c’était que les propos à mon sujet qui circulaient en ce moment même n’étaient peut être pas si calomnieux que ça. Je m’intéressais à son début de SB, enfin je faisais semblant de… Ecoutant à peine sa réponse, on n’avait d’autre chose à se dire que de parler météo, je me contentais d’hocher la tête : « Oui, oui, c'est très chaud la Jamaïque… » Ca pourrait presque se comprendre au second degré. Elle acceptait de m’accorder un peu de son temps, et on commença à avancer côte à côté, s’éloignant de l’hôtel. Et naturellement, elle me retourna ensuite la question… Sauf que son regard m’indiqua qu’elle avait déjà une petite idée de ce qui se tramait. Prenant les devants, bien décidé à ne pas perdre ma pseudo amitié avec mini Weasley, je pris un air attristé pour lui répondre : « Et bien en fait, non, ça ne se passe pas très bien… » Mine tracassée, regard soucieux se perdant vers la mer, me donnant un air pensif et véritablement préoccupé, j’expliquai : « Une de mes bizutes est tombée amoureuse de moi, et comme je ne répondais pas à ses avances, elle a décidé de s’en prendre à moi en faisant tourner une espèce de pétition contre ma personne, en inventant une fausse histoire d’harcèlement… » Mon visage se tourna de nouveau vers Margot, scrutant dans ses yeux sa réaction face à mes révélations. 

 J’aimais bien ce jeu, j’adorais ça… Comment se victimiser c’est tout un art vous voyez… En faire un peu, mais pas trop. Et il fallait avoir le bon partenaire, un peu crédule, un peu naïf, Margot était parfaite. D’ailleurs à mes révélations elle se stoppa et souffla sa surprise. Je dus faire appel à mes talents d’acteur pour ne pas sourire d’amusement devant sa réaction. Parce qu’aussitôt, en bonne amie, la rouquine s’inquiétait de savoir ce que j’allais entreprendre pour ma défense, suggérant que je contacte l’administration. « Le problème Margot, c’est que cette fille a diffusé une sorte de pétition contre moi auprès des présidents des autres confréries, si je contacte la direction de la fac, je crains que ça ne leur retombe dessus. Je suis ami avec la présidente Cabot, mon ex est la présidente Quincy… Je ne voudrais pas que cette histoire de pétition calomnieuse ne leur retombe dessus. » Sortez les violons. Cole au grand cœur, Cole qui se sacrifiait et laissait dire sur lui pour protéger les présidents des confréries qui avaient diffusé le papier d’Agathe… Jouant ainsi les innocents, comme si j’ignorais que Kaya, la présidente des violets, était apparentée avec mon interlocutrice, espérant ainsi pousser cette dernière à retirer le papelard de la Lowell. « Je pense qu’il est dans l’intérêt de tous les présidents et VP de ne pas prendre part à cette histoire et de détruire très rapidement cette pétition… » Mon regard se porta alors de nouveau sur la demoiselle et je lui fis un petit sourire en reprenant : « Mais je ne veux pas t’ennuyer toute l’après midi avec mes soucis… Viens je t’emmène boire un verre. » fis-je en l’entraînant vers l’un des bars tout prêt, mon chéquier en poche. 

  Cole prévenant, Cole attentionné, Cole altruiste… On est d’accord que ces adjectifs qualificatifs ne se mariaient pas du tout avec mon prénom. Mais ça ne choquait pas mon interlocutrice qui buvait mes paroles et excuses et se laissait berner par mon excellent jeu d’acteur. Je l’avais bien investi, ce rôle de faux ami. Je finis par clôturer la question, prétextant ne pas vouloir l’embêter davantage, l’entrainant alors vers un bar pour lui payer un verre. On me pardonnera l’omission sur l’alcool interdit aux mineurs, c’était parce que j’avais oublié l’âge de la rouquine. FAUX ami on a dit, donc oui, je plaidais coupable et je n’allais pas tilter puisqu’elle acquiesçait en me suivant. Et alors qu’on s’installait, c’est d’elle même qu’elle ramenait le sujet et je dus me mordre l’intérieur de la joue pour retenir un sourire victorieux. L’art de la manipulation expliqué par CSW. Je pris un air touché pour lui répondre : « Margot, ça me touche énormément… Tu sais si… beaucoup de personnes l’ont signé chez les violets ? » demandai-je en prenant un air inquiet. « J’ai beaucoup d’affinités avec les membres de ta confrérie… » Foutaises, la seule amie que j’avais eu là bas avait pris ses clics et ses clacs et avait rejoint la EH. « …même si c’est toi ma préférée. » ajoutai-je avec un clin d’œil avant de reprendre très vite une mine soucieuse : « Ca me fendrait le cœur de perdre des amis à cause de cette histoire de pétitions. » Allez, sortez les violons à nouveau. Le serveur débarquait et prenais nos cocktails alors que tout content de la tournure que prenait cette discussion, j’annonçai : « C’est moi qui régale. » Pas de carte bleue sur moi, qu’importe, j’avais mon chéquier, que je sortis fièrement, commentant l’irréparable sans réfléchir. Crayon en main, j’inscrivis la somme à régler sur le papier sans penser que mon écriture risquait de me trahir, de rappeler à Margot une certaine lettre que je lui avais envoyé pour la saint Valentin…

Je ne soutirais aucun nom à ma Lowell rousse, tant pis. La ruse semblait prendre quand même, puisqu’elle me promit d’agir au maximum dans mon intérêt, ce qui m’arrangeait bien parce que dans les faits, j’avais zéro contact chez les artistes. Bon, y’avait bien eu Malicia par le passé, mais désormais elle était chez nous, chez les bleus, et ses tentatives pour nouer une alliance avec les violets avaient toutes échouées. Donc Margot en petite espionne oeuvrant pour ma cause, c’était parfait. Fier de mon jeu d’acteur et de cette promesse de la demoiselle, je l’entraînais vers le bar, nous trouvant rapidement une table libre. Le serveur prit notre commande, et je me proposais de régler la note, sortant mon chéquier, m’appliquant de mon écriture tout à fait caractéristique d’Anglais appliqué à remplir les champs avant de remettre le papier à l’employé qui s’éloigna préparer nos cocktails. Je rangeai le chéquier dans ma poche, croisant alors le regard de mon interlocutrice qui m’adressa un sourire doux en me remerciant. Pauvre petite chose naïve, que je pensais alors, sans rien ne laisser percevoir, loin de me douter du revirement qui était en train de s’opérer, de la place d’attrapeur à celle d’attrapé à laquelle j’allais finalement me retrouver. « C’est normal. Faut savoir prendre soin de ses amis. » Sourire tout sauf sincère et je repris alors, histoire de faire semblant de m’intéresser à sa vie : « Comment vont les amours ? Ca s’arrange un peu ? » Sa rupture avec l’autre racaille de mather qu’elle fréquentait avait été le point d’appel pour que je l’aborde, la console et me la mette dans la poche, donc c’était sur ce thème que j’enchainais aisément ensuite, feignant de m’inquiéter pour son moral et sa vie sentimentale… Comme si j’en avais quelque chose à faire.