J'avais promis à Kaya de le faire, de parler à Margot et de tenter de la raisonner. J'aurais dû le faire bien avant mais avec les préparatifs de dernières minutes pour le voyage, j'avais été débordée. Me voilà maintenant de retour et j'avais rapidement pris les devants pour aller voir ma petite soeur. C'est donc à la Lowell house que je le rejoignis. Avec un peu de chance, j'allais peut-être y croiser Kaya aussi. Un séjour de dix jours en dehors du pays sans mes soeurs, c'était beaucoup trop long. J'avais hâte de me retrouver face à ma petite soeur.
Comme à chaque fois que je mettais les pieds dans la résidence des Lowells, certains me prenaient pour Kaya et me saluaient. Ça me faisait toujours bien marrer. Je pouvais également entendre ceux qui pratiquaient de leur instruments. C'était agréable de se retrouver ici. Dommage que je n'avais pas un talent artistique aussi développé que mes soeurs. Je monta à la chambre de ma frangine avant d'y cogner trois petits coups. Elle savait que j'étais sur le point d'arriver puisque je lui avais envoyé un texto quelques minutes auparavant et que je me trouvais à la résidence des dunsters où j'avais été remerciée Jimmy et Paris pour le super voyage qu'ils avaient organisé.

Il est juste… Parti. Laissant une simple lettre dans laquelle il me dit qu’il l’avait dit. Qu’il allait me briser. J’ai bien dû envoyer une dizaine de messages, tous sans réponse. Et je l’ai détesté, Adriel, je l’ai détesté jusqu’à en pleurer. J’ai pleuré pendant des heures, et tenté de l’appeler, en vain, m’accrochant à sa lettre qui dit qu’il a fait des choses dont il n’est pas fier, sans m’en dire plus. Il ne peut pas me laisser avec ça. Me laisser avec des aveux dont je ne connais pas le sens, avec un « je t’aime » dont je ne connais pas la véracité, non plus. Et j’ai mariné comme ça pendant 24h, prostrée dans ma chambre, jusqu’à ce que je reçoive un sms de Sofia. De ma grande sœur, qui ne sait même pas que je suis détruite.
J’ai pas eu grand mal à la convaincre de venir me voir à la Lowell House pour m’éviter de sortir. Quiconque me croiserait aurait la sensation désagréable d’avoir affaire à un putain de zombie, et j’ai pas tant besoin de ça. J’ai pas dormi. J’ai été chez lui, puis à la Mather, puis je l’ai traqué sur les réseaux sociaux. Rien, pas un signe, pas un indice sur où il est parti. Puis finalement, j’entends à la porte qu’elle est là. Je me redresse, vais d’une démarche lente vers la porte que j’ouvre. Elle a pas besoin de savoir ce qui se passe, alors je planque la lettre sous mon oreiller, et esquisse un bref sourire, sourire faux, en la voyant. « Alors, la Mexicaine ? » Que je demande en me décalant de l'embrasure de la porte.

Après avoir cogné, je n'attendis pas longtemps avant que la porte s'ouvre sur ma petite soeur. Alors que je m'attendais à voir ma frangine toute rayonnante, pleine de vie comme nous l'étions tous, je tomba face à une Margot qui semblait manquer cruellement de sommeil. Elle souriait malgré tout. Elle devait savoir que je la connaissais assez bien pour savoir quand elle n'allait pas. "J'dirais plus le homard." tentai-je de rigoler alros que tout le monde savait qu'avec une pigmentation comme la nôtre ne devenait pas d'un beau teint basané mais plutôt d'un rouge écarlate. Par chance, j'avais amené plus d'un tube de crème solaire. J'entra dans la chambre de Margot avant de refermer la porte derrière moi. Doucement, j'embrassa ma petite soeur avant de plonger mon regard dans le sien. "Qu'est-ce qui se passe, chérie? T'as pas l'air dans ton assiette." Je connaissais mes soeurs par coeur. On était tellement proches l'une de l'autre qu'il était impossible de ne pas voir lorsqu'une d'entre nous n'allait pas.

Sauver les appparences, coûte que coûte. Sofia n'a pas besoin de savoir qu'Adriel est parti, qu'il m'a abandonnée à mon triste sort, avec rien de plus qu'une lettre faisant office d'excuses. Tout ce que je voulais, c'était oublier la douleur, mais quoi qu'il arrive, je ne pensais qu'à ça, à un point tel que j'en manquais de sommeil, de vie, tout simplement. C'est un automate qui ouvre à ma grande soeur, mais je force un sourire, balance un coup d'humour, je feins même un rire en l'entendant se qualifier de homard plus qu'autre chose. Les joies d'être une rousse. Je hausse les épaules, referme la porte derrière nous, et j'enlace délicatement Sofia qui vient m'embrasser, répondant d'une bise sur sa joue. Mais dès lors qu'elle pose son regard sur moi, je devine qu'elle a déjà compris que quelque chose ne tournait pas rond. « Rien, rien, t'en fais pas.. » Marmonnais-je en balayant l'air de ma main comme si je cherchais à chasser ses paroles. C'est sans compter sur mes nerfs en pelote, alors que je sens déjà les larmes qui viennent border mes yeux. « C'est juste.. Adriel est parti.. » Je passe une main sur mon visage, et j'essaie, tant bien que mal, de ne pas montrer combien ça m'affecte. Sauf que j'ai jamais été douée pour cacher mes émotions, me mettant simplement à pleurer comme une enfant.

Ma soeur voulait se montrer forte. C'est une des choses que j'admirais chez elle. Peu importe la situation, elle voulait passer par dessus la tête haute. Parfois, j'aimerais avoir la même force de caractère qu'elle ou que Kaya. Au lieu de toujours me réfugier dans ma zone de confort. J'avais beau dire que j'en avais marre qu'on me traite comme la petite soeur qu'on devait protéger mais j'en avais tellement l'habitude que je finissais par agir ainsi. Ma petite soeur commença par dire qu'il n'y avait rien, que je ne devais pas m'inquiéter pour elle. Chose impossible à faire pour moi. Que ce soit elle, Kaya ou Emma, je m'inquiétais sans cesse pour mes soeurs. Je ne poussa pas les choses malgré tout, je savais que brusquer Margot n'était pas la chose à faire. Elle allait finir par avoir besoin de parler et à ce moment-là, je serais là. Surtout que pour l'heure, j'étais venue lui parler de Kaya et Nicholas. Mais finalement, Margot laissa tomber la bombe. Adriel était parti. "Oh ma pauvre." dis-je en attirant ma petite soeur sur le lit où je pouvais la prendre contre moi. "Il t'as dit pourquoi?" Je savais que ce garçon allait finir par faire du mal à Margot. Je savais qu'il n'était pas la bonne personne pour elle. Mais il devait avoir au moins eu le bon sens de lui dire pourquoi il partait, de la prévenir, non?

J'étais pas encore prête à en parler, et je savais même pas si j'allais être prête un jour. A dire que je me suis fait abandonner par le seul type en qui j'avais confiance. J'ai décidé de passer par delà son "histoire" avec Lara, d'aller outre mes sentiments ambigus pour Eliot, j'ai tout dépassé pour lui, même cette foutue lettre avant la Saint Valentin qui sous entendait qu'il me trompait. Tout ça pour être en couple avec lui quelques jours avant qu'il ne disparaisse. Et fallait que j'arrête de penser à ça si je ne voulais pas partir en vrille devant Sofia, sauf que... Trop tard. Voilà que je retient un sanglot, devant l'air décomposé de ma grande soeur qui m'attire contre elle, assises sur mon lit, en me demandant si je savais les raisons de son départ. Pour toute réponse, je haussai d'abord une épaule. « Il a juste... laissé une lettre. » Murmurais-je en serrant Sofia contre moi, balayant d'un revers de ma main libre les larmes aux coins de mes yeux verts. « Mais honnêtement ça m'a pas aidé du tout... »

Et moi qui venait ici pour discuter du cas de notre soeur, Kaya. Ça allait devoir attendre. Ma petite soeur avait besoin de moi en ce moment tout comme Kaya avait eu besoin de moi pour la soutenir dans sa décision. C'est fou à quel point mes soeurs avaient le don de se mettre dans des histoires d'amour qui les faisaient passer par de nombreuses émotions, autant positive que négatives. Alors que je l'avais attiré sur le lit avec moi et que je la serrais contre moi, je sentais que ma frangine retenait ses larmes. Margot n'aimait pas paraître faible. Ce n'est pas aujourd'hui que ça allait changer. Je venais de lui demander s'il lui avait dit quelque chose avant de partir et elle répondit par la négative. Il avait seulement laissé une lettre à son intention. Lettre qui ne l'aidait pas du tout à comprendre ou encore à accepter son départ précipité. C'est dans des moments comme ça que j'aurais envie de lui balancer mon poing à la figure à ce Adriel. Il avait fait tellement de mal à Margot et alors qu'elle lui avait tout pardonner, il lui en faisait encore. Décidément, Kaya et Margot avait beaucoup plus en commun que ce qu'elles voulaient avouer. "Chérie, s'il a même pas eu le culot de te le dire en face, il ne mérita pas que tu pleures comme ça pour lui. Je sais que c'est dur, je l'imagine. Mais t'es une fille forte. Et tu sais que je serai toujours là pour toi. Peu importe ce que tu as de besoin."