Je n’ai jamais vécu. Depuis mon plus jeune âge, les personnes présentes autour de moi n’ont fait que me dicter mes agissements. Aucune trace d’amour, aucune trace de joie. Juste des robots formatés selon les règles du savoir vivre. Dans n’importes quelles circonstances, il fallait que je me tienne correctement. Durant les repas de famille, durant les excursions au parc, et même le soir, lorsque mon père me lisait une histoire avant que je ne m’endorme. Les règles de bienséance m’ont toujours pourri la vie. Alors maintenant, moi, j’emmerde les bonnes manières.

Je suis née le vingt deux novembre mille neuf cent quatre vingt douze à Berlin, capitale de l’Allemagne. Cette ville est à mes yeux la plus belle qui puisse exister. Ma mère était Allemande, mais mon père était Américain. C’est pour cette raison qu’après mon sixième anniversaire, nous sommes partis nous installer à Phoenix, ville étouffante où règne chaleur et sécheresse toute l’année. Je n’ai jamais réussi à être heureuse là bas. Pour moi, ce n’était rien qu’une ville de pierres, sans aucune âme, sans aucune histoire. Je me trompais peut-être. Je m’en fiche. La seule chose importante pour moi, c’était de réussir à me barrer le plus vite possible de cet enfer. C’est pourquoi je demandais à mes géniteurs d’aller étudier en France, où le rythme scolaire était important. Tout pour me rapprocher un peu plus du climat Allemand que je chérissais tant. J’étudiais donc à Paris, capitale française et ville de l'amour et des lumières, dans un institut religieux, et ne rentrais chez moi que durant les vacances d’été. Ca me suffisait largement. Pour moi, mes parents, ma mère surtout, n’était plus que des traîtres qui m’avaient arrachés au seul endroit au monde où j’avais l’espoir de me sentir à ma place un jour .

J’ai passé la plus grande partie de ma scolarité à Paris. Je suis seulement rentrée pour mon année de Senior. Je pense surtout que j’ai été acceptée à Harvard grâce à ma diversité culturelle. Je parle 4 langues couramment, et mes notes dans les matières scientifiques ont toujours étés excellentes. Ajoutons à ça le fait que mon père, médecin réputé, ait été étudiant à Harvard, et mon acceptation n’a pas été réellement difficile, ni surprenante. Je suis en seconde année dans mes études d’anthropologie. Mon père a toujours voulu que je suive une voie médicale. Mais la médecine classique ne m’attirait pas vraiment. C’est pour cette raison que j’ai choisi ce cursus. Les études me passionnent, et même si je ne travaille pas, je sais très bien que j’aurais mon diplôme haut la main. Je suis assez intelligente pour ne travailler que la veille des devoirs, et pour le moment, ça marche très bien. Et ça ne m’empêche pas de m’amuser, bien au contraire. Je suis fatiguée de l’image de petite fille parfaite que je dégage. C’est pourquoi à partir de maintenant, je me fous des apparences. Même si c’est plus facile à dire qu’à faire. Une erreur et je me retrouve seule, sans argent et sans famille. Le choix est difficile, mais je sais que je pendrais la bonne décision, quoiqu’il arrive. Mon nom de famille n’est pas Hasting pour rien.