Je crois que j’avais pas eu de soirées comme ça depuis longtemps. Enfin… j’avais été plutôt raisonnable en ce début de Spring Break, et je m’auto-félicitais ! Je n’avais pas encore été déchiré (et je parle d’alcool ou de drogue), je n’avais pas baisé dans tous les sens comme l’année dernière, et je ne m’étais même pas encore battu ! Si si, pas une seule bagarre. Y’avait de quoi être fière, parce que la fight était devenue une sorte de rituel pour moi au Spring Break. Mais ce soir, je ne savais pas comment ça allait tourner. J’avais prévu la garderie que je ne viendrais certainement pas chercher mon fils à la garderie, car je ne savais pas dans quel état je serais. Je bénissais ce putain d’hôtel qui avait une garderie ouverte la journée, mais aussi la nuit. Heureusement, parce que cette soirée n’aurait pas été possible sans. J’avais donc laissé mon fils à la garderie pour rejoindre mon meilleur ami dans un bar au bord de la plage. Lorsque j’arrivais sur place, je balayais la salle du regard pour au final, le trouver dans le fond. Je lui fis donc signe pour qu’il me voit, m’approchant de lui en lui donnant une tape sur son épaule, « Yo », lançais-je avant de m’asseoir à côté de lui. Je regardais les deux verres en arquant les sourcils, « Tu t’en es pris deux, ou y’en a un pour moi ? », demandais-je en riant un peu. Je n’attendais même pas sa réponse que je prenais un des deux verres, je levant vers lui pour trinquer, « Au Spring Break ! »

J’avoue que ça me manquait parfois cette période de ma vie. C’était pas la plus fameuse, ni la plus belle. C’était même peut-être la période de ma vie la plus lamentable, mais allez comprendre. L’indifférence, la folie… c’était quelque chose qui me manquait. Maintenant, j’étais papa et je devais être responsable pour mon fils et pour Aylin aussi. Mais surtout pour Aaron, parce que je le gardais tout le temps et parce qu’il n’était pas mieux que son papa. Il était malade et putain j’m’en voulais tellement de lui avoir refilé ce gêne maudis. Les gens ont beau me dire que c’pas ma faute, j’me sentirai toujours coupable. J’avais eu une leucémie, et maintenant mon fils souffrait de la même saloperie. La vie devait vraiment se foutre de ma gueule, c’pas possible autrement. Ça allait me faire du bien de passer une soirée avec Alek. Alek c’était mon meilleur ami, c’était mon frère. Il avait toujours été là pour moi et inversement. J’savais que j’allais m’amuser avec lui. No limits ce soir. Quand j’arrivais et que je vis qu’il avait déjà commandé deux verres, un sourire se dessina sur mes lèvres. La soirée commençait décidément merveilleusement bien ! M’asseyant face à lui, je prenais le verre et je levais pour qu’on trinque, "A l'alcool, aux vacances, à la vie bordel !" J’hochais la tête et je cognais mon verre contre le sien avant de boire une grande gorgée de la boisson. « Ouais, à cette grosse salope de vie », lançais-je avant de boire une nouvelle gorgée. "Comment tu vas toi ?" Je posais mon verre, haussant les épaules, « Ça peut aller » Ouais, parce que dans la vie de Jude, les moments de pure bonheur sont assez rares. « Et toi ? Avec Néva tout va mieux ? » Ils avaient eu une petite période de crise mais bon, ça arrive dans tous les couples. Tant que le fossé ne se creuse pas entre eux.

Au fond, même si je faisais n’importe quoi pendant les soirées de folies que j’avais bien pu passer avec Alek dans ma folle jeunesse, je ne regrettais rien. Je ne regrettais rien et je ne pouvais même pas dire que je changerais ça si je pouvais changer quelque chose de mon passé. Même si ça m’avait rendu accroc à la drogue, même si j’avais touché le fond beaucoup de fois, je m’étais toujours relevé et ça, c’était grâce à Alek. Je n’étais pas très démonstratif comme garçon, et je ne montrais peut-être pas assez aux personnes que j’aimais que je les aime. Mais honnêtement, je me voyais mal faire un gros hug à Alek en lui disant à quel point je l’aimais. Oh nooooon, c’était tellement pas mon genre. J’espérais qu’il le savait, au moins. J’faisais tout ce que je pouvais pour lui montrer en tout cas. Comme avoir dit à sa femme que je connaissais à peine que si elle avait besoin de quelque chose, j’étais là, prêt à l’aider lorsqu’Alek avait été mis en quarantaine à cause de cette putain d’épidémie de merde. Sauf qu’aujourd’hui, on ne pouvait pas faire la fête de la même manière qu’avant. Lui, il avait Nevada et moi… j’avais Leandra. Enfin, j’crois. Les choses étaient tellement compliquées entre nous…"Ouais ouais, ça va beaucoup mieux t'inquiète pas !" Je souris un peu et je posais mon verre, regardant Alek appeler le barman pour une autre tournée. "Et toi, c'est Lavender, c'est bien ça ? Elle devient quoi ?" j’haussais les sourcils, « Leandra, tu veux dire ?  » Je ris légèrement et le barman revint avec deux verres. Je pris le mien et je le bus cul sec, grimaçant en secouant la tête. Wow, c’était fort ça. Disons que les choses vont bofs. « On fait un break et…  » Je soupirais, «Elle est méga jalouse. La dernière fois elle m’a fait une scène au beau milieu d’un parc parce que je parlais avec une fille quoi.  »

C’est vrai que c’est quand on regarde notre passé qu’on se rend compte qu’on en a vu des vertes et des pas mures Alek et moi. J’crois que mes meilleurs souvenirs de soirée, c’était avec lui. Enfin, si j’en gardais des souvenirs parce que bien souvent, je m’étais trop déchiré la gueule pour me rappeler de quoi que se soit. Mais malgré que je parte en couille, Alek n’avait jamais cessé d’être là pour me relever. La drogue, l’alcool, le sexe, ça avait vraiment rythmé notre vie à un moment donné et je crois que c’est à ce moment là que ma mère n’était pas très rassurée que je sorte avec Alek. Mais dans un sens, il était le seul ami que j’avais depuis l’enfance qui ne m’avait pas laissé tomber à cause de mes conneries. Je lui devais beaucoup, vraiment. Sur le coup, je me demandais s’il avait fait exprès d’oublier le prénom de ma copine. Enfin.. .ma copine, si on veut. Parce qu’on faisait un break alors. Putain, cette idée me donnait encore plus envie de me déchirer la gueule ce soir. "Ouais voilà ! C'est ce que je voulais dire en plus !" Je levais les yeux en ciel en riant. Bien sur, c’est ce qu’il voulait dire. Je lui expliquais qu’on faisait un break elle et moi parce que ses crises de jalousie commençaient à me rendre barge. J’sais même pas pourquoi ça le faisait sourire, mais bon, vaut mieux en rire qu’en pleurer nan ? "La dernière fois que j'ai eu une crise de jalousie, j'ai dormi deux semaines dans le canapé, et deux autres en quarantaine !" [...] "Mais... J'sais pas, elle te reproche quoi en fait ?" J’haussais les épaules en regardant le fond de mon verre.« Le truc, c’est qu’elle a même pas de quoi être jalouse ! J’veux dire.. j’passe ma vie à bosser, à aller à l’hosto pour Aaron et à être avec elle ! Elle m’a vu parler avec une fille dans un parc et tout de suite, elle m’a fait une crise. » Je soupirais et je regardais Alek, « Bon, j’veux pas parler de ça. J’veux qu’on s’amuse, comme avant. Tu crois que c’est possible ? » Okay, ça sera pas exactement comme avant puisqu’il avait Nevada et que je devais être un miiiiinimum responsable pour Aaron, mais bon. On va se rapprocher le plus possible d’avant ?

Parfois, je m’en voulais d’avoir été aussi lâche. Parce que c’était ce que j’avais été au mois de novembre quand j’avais fait cette tentative de suicide. J’avais voulu abandonner mon fils, et abandonner les gens que j’aimais. Les gens qui avaient tout fait pour me garder en vie malgré toutes les épreuves qui s’étaient interposées sur mon chemin. Et parmi ces personnes, il y avait Alek. Parfois, j’avais envie de m’excuser de l’avoir fait. Mais c’était un geste désespéré et je ne pouvais pas m’en excuser de trop, parce que si je l’avais fait, c’était en étant conscient des conséquences. "Ah... Elle se rendra compte qu'elle a merdé et elle reviendra si elle tient vraiment à toi, t'inquiète !" J’haussais les épaules, tout ça avait rendu les choses tellement compliquées entre Leandra et moi que ça me désespérait un peu. Nous faisions un break et ça nous faisait du bien, je pense. Je prenais conscience que je l’aimais vraiment et que j’avais envie d’être avec elle. Je prenais conscience qu’elle me manquait, et je crois que c’est important. Il fallait juste qu’on fasse tous les deux des efforts. Mais ce soir, je ne voulais pas penser à tout ça. Et je savais qu’Alek serait la personne parfaite pour me faire oublier cette merde. "Tout est possible putain, TOUT !" Je ris et je le vis commander deux autres verres. Et oh, moi aussi j’voulais payer des tournées wesh ! « La prochaine, c’est la mienne », précisais-je en prenant le verre tout fraichement servi par le barman. "On va pas pouvoir trouver une fille a baisé, j'ai pas le droit, et toi non plus, alors... Faudrait trouver un gars qui joue un peu trop le malin et qui regarde mal pour lui tomber dessus !" Je me tournais vers les gens derrière nous pour analyser chaque mec. « Nous faut une tête de Turc. », ajouais-je en buvant une gorgée de ma boisson. Je finis par pointer un mec du doigt un peu plus loin qui draguait une minette. Je regardais Aleke n souriant, « Bon, plan d’attaque ? » Cette soirée allait mal finir !