L'union fait la force. & Astarion.

« L'union fait la force.»

« Vous préférez le terme « énergumène » ? Sinon, si vous ne dites pas clown, vous devez sans doute le remplacer par un autre mot. » Je suis surprise par une telle phrase, mais bon, je me dis que je peux aussi essayer de trouver un autre sujet à discuter : « Je suis linguiste, j’aime bien utiliser des mots désuets. C’est plus intéressant, vous ne trouvez pas ? » Je souris, j’aime bien ce zigoto que j’ai en face de moi. Je me dis que je peux aussi essayer de le taquiner un peu plus. « Vous avez bien une expression que vous préférez et que vous utilisez souvent ? »

« Il est vrai que l’on peut se dire doué dans un domaine. Je suis d’accord avec vous, seulement ; je n’ai pas tendance à le dire. Comme quoi, on est tous différents avec l’idée de s’envoyer des fleurs. » Je ne suis pas vantarde, j’ai pris l’habitude de prouver mes capacités avec mon travail et non ma vantardise. « Ne vous inquiétez pas, je ne vous en veux pas du tout, vous pouvez donner votre point de vue. » Chacun peut dire ce qu’il pense, il faut accepter son avis, parfois, c’est même intéressant d’ailleurs, cela permet de lancer la discussion. « L’être humain est surtout complexe. Parfois, j’ai envie de prendre une île déserte et me barrer le plus loin possible d’eux. »

Un éclat de rire tranche l'atmosphère tel un sabre de samouraï. Linguiste, hein... le vocabulaire ne manque pas, en la matière, si je suis votre chemin : ostrogoth est peut-être bien mon préféré. Phénomène ou exalté sont des choix tout à fait intéressants également... zigoto est peut-être familier. Mais si je veux me faire l'avocat du diable, il y a tout de même une différence entre les termes clown qui implique une notion humoristique, et énergumène qui est nettement moins fun. Puisque j'ai une linguiste en face de moi, je pense que vous voyez justement la différence, loin d'être infime dans le cas présent. Autant tu ne la suis pas une seconde sur le terrain professionnel pur en t'attardant sur le dossier nécessitant, d'après ses dires, ton avis circonstancié, mais ton côté prof ressort, et tu ne peux pas t'empêcher de jouer un brin les fanfarons sur les quelques autres sujets que tu maîtrises et affectionne. Le vocabulaire d'une langue en fait justement partie, bien que tu ne sois pas linguiste de ton côté. Une expression fétiche... il va falloir déterminer un sujet car je n'en n'ai pas qu'une, loin de là. Pour tes élèves, par exemple, tu adores particulièrement cet amphi sera le feu de vos enfers une fois que je vous aurais dans mes griffes, surtout en première partie de l'année, face aux nouveaux terrifiés par les rumeurs les plus farfelues courant à ton sujet. Et cela t'amuse ô combien. Vous savez quoi, collègue ? Envoyez-vous des fleurs. Personne ne le fera pour vous. Suffisamment aventurière pour essayer ?

« L'union fait la force.»

« Je comprends votre point de vue. » Le choix des mots est amusant, on peut prendre celui que l’on veut pour dire ce que l’on veut. J’apprécie le faire le plus souvent possible, il m’arrive de prendre des mots que l’on utilise plus. En général, on me regarde d’un drôle d’air. Je m’en amuse. Je ne suis pas âgée, je trouve intéressant d’utiliser des mots qui changent de la norme. « Bien, bien, il faut en avoir plusieurs. Cela donne un peu de piquant à nos propos. Je pense aussi que vos élèves doivent avoir l’habitude maintenant. Je me demande s’ils ne pensent pas à l’avance à vos propos. » Il ne vous ai jamais arrivé de trouver la fin des phrases de vos professeurs ? En général, c’est que vous suivez bien le cours, mais cela peut l’agacer fortement étant donné que vous terminez ces mots. Je ne le fais plus maintenant, mais je me doute que certains n’ont pas vraiment apprécié que je finisse leurs mots. « Je le ferais. Je crois que vous avez raison. Parfois, personne ne le fera à votre place. Je prends note de votre défi. »

Sourire amusé qui ne quitte décidément pas tes lèvres, qui plus est en te rendant compte du sérieux qui entoure la professeure. Vous êtes encore loin de grandes tirades pleines de folies, la demoiselle ne rebondissant guère à tes perches pourtant colossales. Mais ce n'est qu'une première rencontre, après qui sait... Vous devriez vous lâcher, vous savez. Je ne suis pas quelqu'un qui sera choqué si vous mettez merde et bordel dans la même phrase. C'est plutôt le contraire, d'ailleurs... Trop conscient du fait qu'être une femme dans un environnement aussi insensible que le professorat ne doit pas tous les jours être une sinécure, tu prends une grande inspiration avant de finir ton verre. Cette discussion aura eu quelques avantages, à commencer par celui de t'éviter de te mettre trop promptement à la correction de nombreuses copies laissées soigneusement pour compte depuis un petit moment. Mais c'est un débat pour une prochaine fois, je suppose. Il n'est de bonne compagnie qui ne se quitte, chère confrère linguiste. Yeux ténébreux, sourire de façade, tu reprends ton rôle d'insaisissable avec un brio que toi seul connaît. Ce fut un plaisir, en tout cas. Je vais prendre congé mais mon petit doigt me dit que nous nous reverrons.

- fin -