et si la lumière s'éteint, on la rallumera demain (jinah)

il ne sait plus comment ils en sont arrivés là. ici, au milieu de toutes ces lanternes, à prétendre que ces derniers mois ne les ont pas tenus à l'écart l'un de l'autre. à prétendre que rien a changé, que leur relation sans nom ne s'est pas fragilisée par l'absence de mots ou moments partagés ensemble. le sourire qui tarde à venir lorsque ses yeux rencontrent les siens, le reflet de toutes ces lumières perceptible à travers leur regard. il pourrait faire mine que tout va bien, mais il n'en a pas envie. pas cette fois. l'impression que l'honnêteté ne fait plus partie de leur deal, à tous les deux. à mois que ce soit lui, le problème. à ne pas saisir la définition du mot ex, parce qu'ils semblent en avoir une bien différente. — Tu sais déjà ce que tu vas dessiner ? coup d'oeil porté sur sa lanterne, encore vierge de toute couleur ou décoration. un peu trop romantique à son goût comme activité, si vous voulez son avis.

cette intensité qui parcourait chaque nerf, qui amplifiait chaque battement. je la ressentais. intensément. avant. quand est-il maintenant ? quand on fait semblant que tout va bien ? plaçant ce masque implaçable. n’comprenant pas depuis quand notre lien s’était autant fissuré ? l’silence qui souligne davantage cette atmosphère pesante. l’regard gêné qui tente d’éviter le tien. à plusieurs reprises. perdue, dans ces émotions inconnues. lanterne piégée entre mes doigts. — pour le moment, j’suis pas inspirée. on est censés dessiner quoi ? notre avenir ? l’sous-entendu placé subtilement. la lèvre supérieure tiraillée. au même titre que l’esprit assailli.

privilégiée ? sans doute l'est-elle un peu, la belle. parce que jonah blum n'a jamais été du genre à marcher sur des œufs avec qui que ce soit et surtout pas elle. l'envie qui le démange pourtant de jouer cartes sur table et de mettre les choses au clair une fois pour toute. une envie dont il retarde l'échéance, seconde après seconde, parce que ça voudrait dire de prendre un risque. celui de perdre ce qu'ils avaient jusque là. de la perdre, elle. — Ouais, pourquoi pas ? Je suis curieux maintenant. comment est-ce qu'elle imagine la suite ? est-ce qu'il en fait encore partie même ? — Et moi je dessine des papillons et des fleurs, comme ça tout le monde est content. inspiration tout autant absente de son côté, une première pour son esprit habituellement tout feu tout flamme.

ta curiosité piquée au vif, quand j’demeurais interdite. ayant cette désagréable impression de marcher sur une corde raide. qu’à tout moment, un mot, un geste pouvait tout faire s’effondrer. depuis quand notre lien était-il devenu si fragile ? si instable ? le crayon détenu entre les doigts, j’commence à dessiner ton visage. grotesque. l’talent inexistant. mais l’intention était là. n’oubliant cette chevelure d’or pâle. comme un rayon de soleil captif. — t’en penses quoi ? c’est plutôt réussi non ? laisse le sourire éclairer le visage. léger éclat d’espièglerie suspendu sur les lippes. ose observer le tien. hausse l’sourcil, étonnée. — m’dis pas que t’as vraiment fait des papillons ? ça t’inspire pas ? l’avenir ? dessin qui n’peut que décevoir en réalité. m’frappant mentalement d’avoir pris l’initiative de te dessiner. de penser à toi. quand la réciprocité n’était pas d’actualité. au moins le message était clair. limpide. pince la lèvre, tâchant de cacher ma déception. voile de désillusion qui passe dans mon regard. ombre fugace ternissant sa lumière.

De toutes les choses qu'elle aurait pu dessiner, il ne s'attendait certainement pas à un portrait. Son portrait, tout particulièrement. Enfin, c'est ce qu'il devine lorsque le regard de la Shipley se pose sur lui, trop heureuse pour oser prononcer le moindre mot qui viendrait interrompre cet état d'esprit. Est-ce que ça veut dire qu'elle l'associe, lui, à son avenir ? Une idée qui lui semble un peu trop irréelle pour y croire véritablement. Les papillons de couleur, simples et abstraits. Sans la moindre signification. Un quiproquo qui vient briser  malgré lui la lumière qui illuminait un instant plus tôt le visage de la belle. — Nan... Je pensais que c'était toi qui devais dessiner ton avenir, c'est tout. Réponse peu crédible, bien qu'honnête. Mais à y réfléchir, il n'a pas la moindre idée de ce qu'il aurait pu dessiner pour illustrer son futur, celui-ci bien trop incertain à l'heure actuelle. — De toute façon j'aurais jamais pu te dessiner aussi bien que toi tu l'as fait. Le ton qui se veut taquin, comme pour tenter de rattraper l'erreur commise, son simple sourire lui faisant oublier qu'à la base, les rôle étaient inversés.