Les mots blessent, laissant cette désagréable sensation que la conversation ne mènera nulle part, si ce n’est droit dans le mur. Elle aimerait ne pas se fermer, mais c’était peut-être la seule façon de se protéger et de préserver leur amitié. Ses yeux azur croisèrent de nouveau les siens alors qu’il déversait ses explications, maladroitement. Elle le connaissait trop bien pour ne pas voir qu’il peinait à s’exprimer, mais qu’il n’avait aucune intention de la blesser. Pourtant, elle secoua doucement la tête. Elle essayait de comprendre ses mots, mais peut-être qu’au contraire, cela embrouillait davantage ses pensées. Je sais très bien que t’es pas lui, et que tu le seras jamais, Jules. Mais t’y as pensé, une seconde, que je mérite peut-être un peu de sérénité ? Qu’après tous ces connards, tous ces gars qui m’ont brisé le cœur, j’voulais juste être aimée sans avoir à souffrir pour que ça compte ? Les mots s’échappaient, emportés par l’émotion qu’elle peinait à contenir. Elle avait toujours clamé son indépendance, mais dans le fond, tout ce qu’elle voulait, c’était retrouver ce bonheur qu’elle avait perdu depuis longtemps. Elle écouta Jules, percevant dans sa voix ce doute de lui-même, ce manque de confiance. Et même si elle doutait de beaucoup de choses, elle savait que lui serait toujours là, prêt à la protéger, à l’aider, à rester à ses côtés. Elle ne pouvait pas le voir de la façon dont il se décrivait. J’te verrai jamais comme un connard. T’es peut-être la meilleure personne que j’fréquente. C’est moi qui ai toujours pourri ta tranquillité, pas l’inverse. Elle inspira doucement, cherchant à calmer la tempête intérieure. Les mots étaient difficiles à trouver, mais au moins, ils semblaient s’accorder sur une chose : ils n’avaient aucune envie de se perdre. Je t’aime aussi… t’imagines pas à quel point. souffla-t-elle, sa voix légèrement tremblante. Mais cette situation me fait flipper. Je déteste quand on se dispute ou qu’on arrive pas à s’comprendre. Et pourtant, cette conversation, elle m’tient trop à cœur. J’arrive pas à tout effacer comme ça. Son regard, sincère, s’accrocha au sien, sa carapace fêlée laissant entrevoir la vulnérabilité qu’elle s’efforçait souvent de cacher. Elle savait déjà que cette discussion n’apporterait sans doute pas de véritable réponse. Peut-être parce que la vérité était trop complexe, trop douloureuse à accepter.
(Poppy Shipley)