refuge nocturne (( gabe & dante ))

« Deux whiskys », lança Gabe en se frayant un chemin jusqu'au comptoir. Le barman, un homme à la carrure imposante et aux cheveux grisonnants, acquiesça sans un mot, habitué à voir ce genre de clients chercher l’oubli dans le fond d’un verre. Le bar était calme, peu fréquenté en cette fin de journée, ce qui convenait parfaitement à Gabe. Il ne voulait pas de distractions ce soir, seulement de l’alcool et du silence. Les verres furent posés devant eux, remplis d’un liquide ambré qui promettait de faire son travail. Gabe en prit un, le leva légèrement en direction de Dante, puis le porta à ses lèvres sans attendre de réponse. La chaleur du whisky se répandit dans sa gorge, brûlant doucement sur son passage, et il soupira de soulagement. « Elle me manque déjà », lâcha-t-il finalement, brisant le silence. Sa voix était rauque, pleine de cette douleur sourde qui l'habitait depuis des semaines. Gabe secoua la tête, se perdant dans ses pensées. Il se rappelait encore des dernières paroles échangées avec Clémence, des larmes qu’il avait dû retenir pour ne pas paraître faible devant elle. Et maintenant, tout ce qu’il ressentait, c’était ce vide immense qu’elle avait laissé derrière elle. Il vida son verre d’une traite, cherchant à étouffer ce sentiment insupportable. Le whisky le réchauffait, mais ne faisait rien pour soulager la peine qui pesait lourdement sur son cœur. Gabe esquissa un sourire triste, mais ses yeux trahissaient une douleur profonde. « Quand tu crois que t’as trouvé la bonne personne, et qu’au final, tout s’effondre… Tu te demandes juste à quoi ça sert de continuer. » Se promettait de ne plus chercher quoique ce soit avec des femmes. Car il le savait, c’était elle ou personne d’autre. Ce soir, il apprécia la présence de Dante. Il savait que ce soir ne serait pas la solution, que l’alcool ne ferait que repousser l’inévitable. Mais pour l’instant, c’était tout ce qu’il avait. Le barman leur servit une nouvelle tournée, et les verres se remplirent à nouveau de cette lueur ambrée qui semblait promettre l’oubli. Gabe fixa son verre, perdu dans ses pensées. « À Clémence », murmura-t-il avant de porter cet énième à ses lèvres.

@Dante Picorelli

Il était mal et il n’y pouvait rien. Clémence était ancrée en lui. Ou alors s’accrochait-il à elle car il savait qu’il comptait pour elle. Il préférait être blessé de la sorte plutôt qu’être repoussé par d’autres femmes. Alors oui, il y avait bien d’autres femmes sur le campus, et sur Terre, mais pour le moment il n’avait d’yeux que pour elle. « Elle est là… j’y peux rien. » Et au lieu de lui montrer l’emplacement de son myocarde, il posa sa propre main sur le torse de l’autre homme. « Mais à croire que t’en as pas toi. » Haussa des épaules. Peut-être valait-il mieux pour les deux jeunes hommes de ne pas parler d’elle. « Eugénie ? » Ouvrit grand les yeux. « Tu comptes te faire toutes les Pastor ou comment ça se passe ? » Et sans même le vouloir, il se mit à penser à Camille. Seulement à cause de l’alcool qui montait assez rapidement.

@Dante Picorelli

Il ne comprit pas sa blague. Deux cerveaux ? Mais de quoi il parlait ? Fronçant des sourcils, il le regarda. « Deux cerveaux ? » Il était paumé là. Généralement il comprend les blagues nulles de son pote, mais pas ce soir. Comme s’il refusait de rentrer là-dedans. Alors que sa main fut retirée du corps de l’autre italien, il en profita pour boire un second verre. Ou plutôt l’ingurgiter, car il ne profitait aucunement de la beuverie. Ne voulait qu’une seule chose : ne pas devoir réfléchir, et juste oublier, le temps d’une soirée. Il avait assez confiance en Dante pour qu’il l’amène chez lui, peu importe son état. « Elle a quoi de spéciale ? » Il tenta de se rappeler de la jeune femme. Mais à côté de Clémence… il ne savait pas ce qu’il lui trouvait. « Pourquoi t’es pas allé au bal avec elle alors ? »

Il y arrivait plus, non. Il arrivait plus à sourire, ni même à rire. Il n’arrivait plus à réfléchir tout simplement. Son seul objectif étant de boire. Chose qui ne lui ressemble clairement pas. Ca lui arrive de boire avec ses amis, mais pas de la sorte. Pas jusqu’à ne plus se rappeler de la soirée, car c’est ce qu’il allait arriver s’il continuait de la sorte. « Ouais peut-être. » Il arrivait même plus à se souvenir à quoi elle ressemblait cette Eugénie. A chaque fois qu’il essayait de se la remémorer, c’était le visage de Clém qu’il voyait. « Pff, t’en es même pas capable. » Il plongea alors son regard dans le sien. « Toi qui prônes le : "les potes avant tout", je t’ai rarement vu sans une meuf au bal. »

Il l'écoutait. Tentait de le faire le plus attentivement possible et de ne manquer aucune paroles. Mais plus il parlait et plus les dents de Gabe grinçaient. Pourquoi il avait l'impression qu'il se foutait de sa gueule ? Qu'il ne le comprenait pas, mais surtout qu'il n'essayait même pas de le faire. Le jeune étudiant ne savait même pas quoi lui dire. Ils avaient decidemment pas la même vision des choses quant aux relations avec les filles. "Ca va j'ai compris." Il bu un dernier verre avant de s'en aller. Se dirigeant alors un peu plus loin du bar, de quoi observer la vue que leur offrait le roof top. Il repensait à ses paroles. Est ce qu'il avait l'air si pathétique que ça ? Sûrement oui. Est ce qu'il aimerait ne pas l'être ? Évidemment. "Je veux juste l'oublier." a nouveau. Parce qu'il avait réussi oui, à l'oublier depuis leur rupture. "Tu veux que je fasse quoi ? Que je l'insulte ? Que je me jette sur la première venue ?" Il était prêt à quasi tout.