Quick errands and heavy bags ft Anya (08.07)

Dix années. Ça faisait plus ou moins dix années qu'il étudiait et il aimait le travail qu'il y faisait. Peut-être un peu plus la pratique que la théorie maintenant qu'il s'y connaissait. Il ressentait à présent le besoin de se voir voler, de ne plus avoir un pied à l'université et d'évoluer par les expériences qu'il ferait. Quant à la modestie, il était certain de ne pas en faire partie, mais il sourit. Il préféra retourner la question, savoir quelles étaient ses passions. Il apprit de son hôtesse qu'elle ne faisait pas dans la paresse. Dame du foyer, elle avait somme toute quelques activités et il imaginait que c'était ce qu'il fallait pour ne pas se lasser d'une maison de laquelle on s'occupait. Je dois avoir participé une fois à un gala, il leva les yeux, pensif, tentant de se rappeler, mais il ne se souvint que des enchères étudiantes lors desquelles il s'était bien plus marré. À croire que, finalement, l'ambiance Harvardienne saura lui manquer. Du bénévolat vous disiez, il enchaîna, car c'était peut-être mieux de se lancer dans ce sujet là, où ça ? Est-ce qu'elle faisait partie de l'Église ? Qu'elle s'occupe d'animaux ne serait pas non plus une surprise. Elle semblait aimer donner, à moins que c'était son éducation qui faisait ? Qu'importait, une bonne action était la générosité. Je donne un coup de mains à ma Marraine parfois, il fit – et qu'est-ce qu'elle était impliquée, elle n'avait pas idée, c'est étrange que je ne vous ai pas une seule fois croisée. On faisait un peu plus attention aux visages qu'on connaissait plus qu'à ceux que l'on croisait. Je serai plus vigilant maintenant, il lui sourit gentiment.

Précieux qui s'étaient posés sur la bague qu'elle portait, il s'excusa aussitôt de s'être ainsi exprimé, mais n'en fut pas moins intéressé ; quel âge avait-elle ? Il la regarda, essaya de deviner, en vain. Pour ces choses-là, il n'était pas très doué le brun. Il est effectivement très joli, il affirma. Bien plus par le symbole qu'il représentait que pour le nombre de dollars qu'on y avait consacré. Il ne se doutait pas que l'interrogation lui soit retournée, mais il lui assura que c'était lui qui avait été indiscret le premier. Je fréquente quelqu'un, il confirma, puis ajouta : c'est récent, moins d'un an. Parce qu'il n'avait pas le temps de se consacrer à une relation avant, qu'il avait un portrait familial en tête qu'il désirait absolument, puis il avait grandi alors ses exigences aussi. Il porta la tasse à ses lèvres prêtes à boire le soluté, à mi-chemin les gâteaux lui furent proposés. Ils m'ont l'air délicieux, il supposa en les fixant des yeux. Ça ne faisait pas partie de son régime, mais une friandise lui paraissait si infime. Je cède, il rit, cédant à la tentation qu'elle lui présentait avec attention. Il croqua dedans, sentit les saveurs se disperser, et ne put réfréner une exclamation. Il termina sa bouche avant de parler : j'aurais été bête de ne pas les goûter. Où donc les avait-elle achetées ? Vous n'auriez peut-être pas dû les sortir, il fit, plaisantin, après un deuxième croc dans le fameux biscuit, lèvres bien plus élargies.

La discussion suivait son cours, à la fois naturelle et aisée. Portant le café à ses lèvres, la jeune femme écoutait son convive répondre à ses questions et relancer la conversation. « Ah oui ? Vous étiez jeune quand c’est arrivé ? » demanda la brunette, se rendant compte que l’homme, songeur, tentait de retrouver l’information quelque-part dans ses pensées. Il rebondit et lui demanda en quel lieu elle avait pratiqué du bénévolat. « Je suis actuellement bénévole pour la Boston Cares, mais il m’arrive également d’en faire pour d’autres organismes. ». Il relança en indiquant qu’il aidait sa marraine par moment. « Que faites-vous pour l’aider ? » demanda-t-elle, ne pensant pas l’avoir déjà croisé dans ce type d’évènements. D’après ces propos, lui non plus ne pensait pas l’avoir croisée. Il indiqua par ailleurs qu’il serait plus vigilant en ponctuant ses mots d’un gentil sourire. « Je le serais également. » approuva-t-elle d’un sourire délicat.

Le brun sembla apprécier le bijou et ajouta qu’il était dans une relation plutôt récente, datant de moins d’un an. Elle le remercia pour son joli compliment. Elle songea qu’elle s’était mariée très tôt comparé à la longévité de sa relation avec son époux. Peut-être aurait-elle dû y réfléchir à deux fois si elle avait su ce qui l’attendait avec cet homme. Les premiers mois étaient souvent "tout beau, tout rose" comme le disait l’expression. C’était une sorte de période de lune de miel où l’on ne voyait pas ce qui n’allait pas chez l’autre, ou bien que l’on ne voulait pas le voir. Dépaysée, elle se rendit compte que ses choix n’avaient que peu été les siens. « C’est beau le début d’une relation » répondit-elle, ne souhaitant pas particulièrement exposer la sienne et ses déboires à quelqu’un qu’elle connaissait à peine. « Je vous souhaite que celle-ci soit harmonieuse et vous apporte de la joie ». Elle lui fit ensuite goûter les biscuits qu’elle avait préparé avant de faire les courses. Attiré par ces jolis cookies à la forme de fleur à cinq pétales arrondis, le brun craqua pour l’un d’entre eux et en prit un croc, poussant une exclamation involontaire. Une fois sa bouchée avalée, il confirma qu’il était satisfait d’avoir pu en goûter, ou plutôt selon ses dires, "qu’il aurait été bête de ne pas les goûter". Ses yeux couleur de pluie se plissèrent sous le compliment et la brunette esquissa un sourire alors qu’il ajoute qu’elle n’aurait peut-être pas dû les sortir. Il s’agissait là d’un beau compliment. « J’en ai fait un peu trop, il serait dommage qu’ils se perdent, la floraison des fleurs est éphémère. » plaisanta-t-elle à son tour. « Il y en a d’autres, n’hésitez pas à vous resservir. » lui dit-elle alors qu’il n’avait pas encore terminé son premier biscuit. La deuxième bouchée étira un sourire sur les lèvres de son invité qui semblait satisfait.

Cela faisait un moment qu’Anya n’avait pas vécu un moment aussi pur et des réactions aussi simples. Elle avait eu grand plaisir à voir la réaction de l’homme qui l’avait aidée quelques instants plus tôt. Ses compliments la touchait et lui faisait plus plaisir qu’elle ne voulait bien l’admettre et ce même si un joli sourire avait animé ses joues. Elle se rendit compte qu’en dehors de son masque, ses véritables sourires demeuraient rares ces temps-ci et cette pause dans sa vie lui faisait du bien. Le hasard faisait bien les choses. Si elle était partie cinq minutes plus tard, si elle avait choisi de faire ses cours dans un hypermarché plutôt que dans cette supérette, si elle avait fait moins d’achats ce jour-là... Tous ces petits choix l’avaient conduite à rencontrer l’un de ses voisins, probablement l’un des plus sympathiques de son entourage. Il était vrai que peu l’auraient aidée dans ces circonstances et probablement qu’elle n’aurait pas accepté l’aide d’une autre personne. Elle avait été bien inspirée d’accepter la sienne en cette chaude journée d’été. Elle réalisa alors qu’elle ne connaissait pas le nom de cet homme qu’elle avait convié chez elle pour le remercier de son acte de bonté et lui posa la question : « Puis-je vous demander votre nom ? ».

Que faire pour l'aider ? C'était souvent l'hiver qu'à l'association Ji-hun se rendait, pour préparer les espaces à coucher, car il n'y avait jamais assez d'hommes pour porter le mobilier de fortune que les bénévoles savaient récupérer. Il aménageait tantôt un sous-sol, tantôt un rez de chaussée. Parfois c'était le premier étage et parfois le dernier. On ne savait jamais vraiment quels endroits ils pourraient louer, l'association n'était pas vraiment sédentarisée – le gros problème, si on lui demandait. Il donnait un coup de mains au service lorsque le coup de rush était lancé et que, sur place, il avait un peu traîné. Les kits de survie étaient distribués à ceux qui ne désiraient pas y passez une nuitée, avec la promesse de leur rouvrir demain les portes pour un petit-déjeuner de qualité. C'étaient les principales missions qu'on lui avait confié, mais à d'autres il ne de refusait jamais en réalité. Bijou ensuite repéré, compliments donnés, le Nord-coréen évoqua la relation toute récente dans laquelle il s'était engagé et il hocha la tête sans vraiment acquiescer. S'il avait été de ceux à se confier, il lui aurait clairement dit que la sienne avait très mal commencé, mais ce n'était pas une information à exploiter lors d'une conversation avec un étranger. Il était assez secret et comptait bien un minimum le rester. Biscuits au motif floral dégustés, une chose était sûre c'était qu'elle était douée. Il comprenait son mari d'avoir voulu l'épouser. Une femme qui s'occupait ainsi d'un foyer et de ses invités, il valait mieux ne pas la laisser filer.

Jay, il répondit dans la foulée lorsqu'elle vint demander son prénom, appelez-moi Jay. Nul besoin du nom. Et vous, il interrogea en retour ; comment l'interpellait-on depuis toujours ? Une bon e gorgée de café fut avalée, il en dégusta les arômes et sa voix vint à vibrer. Vous avez bon goût, il affirma avant de pointer la tasse brune d'un coup, quand j'ai commencé à étudier ici, j'étais serveur dans un café italien. D'où sa passion pour les grains – il s'y connaissait bien. La Luna Caffè, je ne sais pas si ça vous dit quelque chose, il l'introduit, avant de croquer à nouveau dans le biscuit, les meilleurs, si vous voulez mon avis. Clin d'œil bref mais osé, marquait peut-être un peu trop la complicité ? Vous devriez vous y rendre à l'occasion, il lui conseilla, ou je pourrais vous y accompagner, si vous craignez de ne pas trouver. Proposition de se revoir, sans le savoir. Ji-hun était à l'aise pour se sociabiliser, ce n'était pas les interactions qui manquaient, et il adorait. D'autant plus depuis qu'il était conférencier, un orateur qui comptait bien évoluer, parce qu'il lui en faudra pour expliquer ses idées lorsqu'il sera embauché en tant que chercheur diplômé. Le meilleur moment pour s'y rendre, c'est quand les touristes affluent en été, ou à la rentrée, lorsque les étudiants envahissent toutes les terrasses proches de l'université pour y étudier, il se rappelait, les nombreuses effluves ne manquent pas de vous caresser le nez. Une expérience à ne surtout pas manquer.