C’était une foutue mauvaise idée. Je regarde la chose qui se tient à mes pieds, assis sur ses pattes arrière avec docilité, et moi je ne sais pas vraiment comment je dois me comporter. Cela dit j’ai remarqué que lorsque j’incline le visage sur le côté, il incline le sien. Les coudes plantés dans mes genoux, installée sur un banc du parc, je reste un petit moment les yeux dans les siens, à songer que ça ne sert carrément à rien, de posséder un animal. Je n’arrive même pas à trouver ça normal. Je ne suis pas très fan des êtres que je ne comprends pas, et les chats en font clairement partie. Et oui, j’ai décidé d’amener celui-là se promener quitte à passer pour une illuminée. De toutes les façons, j’y suis habituée, et j’ai appris au fil des années à me moquer de ce que les autres peuvent penser.

Après quelques finalement, je délaisse la boule de poils des yeux pour me concentrer sur mon dernier devoir de l’année. Sur mon carnet à spirales, je commence donc à griffonner, les chiffres défilent, s’enchainent et suivent leur propre logique. J’aime la sensation que ça me fait, comme si mon cerveau était en pleine ébullition. Maitrisée, évidemment. Et je ne vois pas les minutes passées, je me perds dans mes équations, je me laisse emporter, jusqu’à relever le regard et me heurter… A un putain de vide. La chose s’est tirée. Mais au lieu de m’affoler de suite, tout ce que je me demande c’est si je l’avais mal attaché. J’aurais peut-être dû vérifier. Alors je fourre mes affaires dans mon sac avec rapidité, me redresse, la laisse dans la main, j’accoste le premier badaud sur lequel je tombe pour tenter de déterminer quel serait le meilleur chemin, « T’as pas vu un chat ? » Est-ce utile de souligner que la bête n’est pas à moi ? Et qu’à perdre le compagnon d’une de mes connaissances je me dis, que ce n’est pas étonnant que je n’ai pas de véritable ami.