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Les deux dernières semaines ont été corsées. Douloureuses. Après votre dispute, Aaron et toi avez décidé de "faire une pause" ou du moins, il a décidé de réfléchir de son côté. Et bizarrement, malgré ta honte et ta culpabilité, ça t'a fait du bien de te retrouver seule quelques jours. Et puis... quand il est revenu, une révélation a bousculé tout ce que tu croyais savoir de votre couple. Tu sais déjà que rien ne sera plus jamais pareil, et la nostalgie se mêle à une douleur sourde, mais un autre sentiment remonte doucement à la surface, petit à petit. Le soulagement.
Postée devant l'entrée de Lexie, tu attends qu'elle t'ouvre, emmitouflée dans une veste rembourrée. La pluie tombe dru derrière toi et bien évidemment, tu n'as pas pensé à prendre un parapluie. Lexie apparaît en T-shirt blanc et salopette en jean tachée de peinture.
— Mais t’es trempée ! s'exclame-t-elle en t'ouvrant. Entre, tu vas attraper la mort !
Tu lui emboîtes le pas à l'intérieur, découvrant des boîtes de carton un peu partout, et retires ton manteau sans trop savoir où le poser. Lexie t'en débarrasse avec un "donne" avant que tu ne te rende chèvre en essayant de trouver une surface libre.
— Qu'est-ce qui se passe... tu déménages ?
— Ouais… je t’expliquerai… c’est pas important tout de suite. (Elle pose sa main sur ton épaule droite.) Tu dois avoir froid, tu veux boire un truc chaud ? J’ai encore la bouilloire de branchée dans la cuisine, si tu veux… ou si tu veux juste un câlin…
Comment résister à une telle offre ? Tes yeux parcourent rapidement son visage, cherchant à déterminer son humeur. Est-ce qu'elle t'en veut...? Est-ce qu'elle... te déteste ? Tu en étais persuadée et pourtant, ses SMS et son attitude semblent indiquer le contraire. Alors tu t'élances vers elle pour la prendre dans tes bras, tes mains s'agrippant à sa nuque.
— Je suis là. Je te lâche pas, souffle-t-elle en serrant ta taille contre elle.
Tu souffles enfin - métaphoriquement et littéralement -, rassurée de la sentir, de la savoir là, à tes côtés. Les larmes te montent aux yeux, et tu te demandes bêtement comment c'est possible qu'il t'en reste encore.
— T'as pas du chocolat chaud, par hasard ? marmonnes-tu.
Elle rit doucement contre ton épaule.
— J’ai ce qu’il faut. Mais va falloir que je te lâche pour aller te préparer ça… (Elle se recule légèrement, t'observe avec tendresse, dépose un baiser sur ton front, puis sur tes lèvres.) Je reviens. Installe-toi sur le canapé…***
Paumes serrées autour de ton mug, tu lèves un regard prudent vers la blonde.
— Je sais pas par où commencer... mais tout va bien ? Où est-ce que tu t'en vas ?
Elle soupire, boit une gorgée puis grimace.
— Le père d'une pote va m'héberger le temps de trouver un autre logement, plus petit et moins cher. (Elle reprend avec un sourire en coin.) J'ai... dit à mon oncle d'aller se faire foutre. Ça fait un bien fou, mais du coup j'suis obligée de quitter l'appartement. J'ai pas les moyens de me payer ce palace. J'ai trouvé un job étudiant, j'entraîne des ados au basket non loin d'ici... ça fait toujours une rentrée d'argent.
Tu encaisses la nouvelle qui te rend muette pendant quelques secondes. Elle l'a envoyé paître...? Une lueur de fierté allume ton regard, très vite remplacée par un froncement de sourcils inquiet.
— Oh, Lexie... mais... et Harvard ? Tu vas pouvoir finir tes études ?
— Je t’avoue que j’ai pas encore réfléchi à la question… admet-elle sur un haussement d'épaules désinvolte. J’ai un peu agi sur un coup de tête... (Une pause.) J’crois que j’arriverai à jongler entre les deux, bon, ça va considérablement réduire mes heures de sommeil mais… j’ai pas trop le choix. Il me reste juste cette année à finir… c’est pas si long à tenir. Et… toi ? ajoute-t-elle, un éclat incertain dans le regard. Comment tu te sens ?
— Bien sûr que tu vas y arriver. Si t'as réussi à supporter ton oncle pendant tout ce temps, ça devrait être du gâteau maintenant que tu en es débarrassée ! renchéris-tu avec une pointe d'humour avant de détourner les yeux. Moi, je me sens... étrangement légère. Même si j'ai mal en même temps. C'est étrange.
Un long silence s'installe, pourtant dépourvu de malaise. Elle finit par s'éclaircir la gorge avant de te demander avec un faible sourire :
— Tu devrais peut-être commencer par le début plutôt que la fin… (Son sourire s’efface et elle murmure en baissant les yeux, ses doigts tripotant maladroitement sa tasse.) C’est lui qui te fait du mal ? Ou… c’est moi ?
— Non... c'est... moi qui m'en suis fait toute seule, je crois. (Ton regard se balade dans la pièce pendant que tu rassembles tes idées et alignes tes mots dans ta tête avant de les formuler à voix haute.) À force de nier l'évidence. De blesser les gens que j'aime sans m'en rendre compte. De faire ce que je croyais être juste. Mais tout ça... c'était pour me protéger, au final. Et j'en ai marre de vivre comme ça. Je ne veux plus de mensonge ou de vie cachée. Je ne veux plus être dans l'illégalité. (Tu plantes un regard résolu dans le sien.) Je veux être avec toi. Et c'est pour ça que... je vais demander ma démission.
(c) mars.
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