15/10/2023

Si le moral n'était pas bon, mon inspiration en revanche était prolifique. J'avais envoyé un message à Elfy pour avoir son avis sur ce que j'avais écrit et qu'elle vienne mettre sa touche dans tout ça.

Je me trouvais dans le studio que j'avais aménagé dans l'une des pièces de la maison. Insonorisé, équipé, tout ce qu'il y avait meilleur.

Installé devant le pc, j'étais en train d'aider les filles pour leur devoir. Une tisane pour elles, un café pour moi. Ce n'est pas comme si je comptais passer une bonne nuit de toutes manières.

La sonnette de la demeure se mit à retentir à l'arrivée de notre invitée.

ta guitare embarquée dans sa housse de transport, t’as abandonné tes dessins dès l’instant où tybalt t’a proposé de le rejoindre, bien décidée à les reprendre plus tard à ton retour à l’appartement. tes colocataires prévenus de ton départ, c’est sur ta harley que tu t’es lancée comme à ton habitude pour conduire jusqu’à chez lui. la sonnette que tu fais retentir une fois sur place, t’attends qu’il vienne t’ouvrir pour pénétrer dans son antre et enfin le retrouver.

Sortant du studio pour rejoindre l'entrée, j'allais ouvrir la porte à la belle brune qui me servait de guitariste et de tatoueuse. Comment va ma Sombre Epine ? L'embrassant avant de la laisser entrer dans ma demeure. Montant dans mon studio, les filles la saluèrent avant de se mettre dans un coin. Tu veux boire un truc ? Lui tirant une deuxième chaise pour s'installer devant le pc.

la porte s’ouvre, laissant apparaître la silhouette de paz qui t’arrache un sourire. « toujours bien. » t’as pas à te plaindre, ta vie pourrait être pire. l’embrassade qui passe, la distance qui se remet naturellement entre vous. « et toi ? » ses jumelles que tu salues, ta carcasse qui suit la sienne jusqu’au studio pour prendre place à côté de lui après avoir déposé ta guitare dans sa housse à côté de toi. « tu poses encore la question ? une bière. » le sourire amusé qui se place sur tes lippes, ta guitare que tu déhousses finalement.

Cela faisait plus de dix ans qu'Elfy partageait ma vie et malgré notre proximité il n'y avait aucune d'ambiguïté. Elle se rapprochait plus d'une petite soeur que d'une target. Je jette un rapide coup d'oeil aux filles avant de lui répondre. Ca va. Ce n'est pas comme je pouvais réellement répondre autre chose de toutes manières. Mais savoir les projets de la soirée me changeait déjà les idées.

Tu pourrais peut être avoir envie changer pour une fois ! Mais très bien, tu auras la même bière jusqu'à la fin de ta vie dans cette maison maintenant ! Ricanant légèrement avant d'aller lui chercher sa demande pour la poser sur le bureau. J'en pris également une pour moi et deux limonades pour les filles. Revenant devant le pc, je lui fis lire ce que j'avais posé sur papier. Je pensais cette partie sur ce rythme là... Tapant sur la table pour créer la tempo en commençant à chanter acapella.

t’as un jour commencé à te dire que paz devait être ton frère dans une autre vie ; et t’en es toujours persuadée. mais tu t’es bien passée de lui dire, tu mises sur votre prochaine vie pour recréer le lien familial entre vous, éternellement soudés. parce que votre relation est de celles que le temps n’anéantit pas. « et la vraie réponse ? » que tu demandes quand il te dit que ça va. t’insisteras pas, comme d’habitude ; mais à voir son regard se porter de la sorte sur les jumelles, tu te poses la question. le studio atteint, ton corps installé, tu parles de cette éternelle bière que tu prends à chaque fois que tu le rejoins ici. « on change pas une équipe qui gagne, je dois te le rappeler ? » le rictus s’étire et rapidement sa silhouette réapparaît avec ton dû. la guitare branchée à l’amplificateur avant de prendre une gorgée de la boisson ambrée. tes yeux parcourent avec intérêt ses notes, sa main finissant par rythmer les paroles qui se glissent entre ses lèvres. le médiator qui se place entre tes doigts, les premières notes qui se dessinent. « dans ce genre-là ? »

Non. Mise à part la mort, je ne pense que rien ne pourrait nous séparer. Nous avions des visions assez similaires sur beaucoup de domaines. Il me suffisait de lancer la bouteille à la mer pour qu'elle la récupère immédiatement derrière, répondant à mon attente. J'en avais encore une fois la preuve à l'instant... Me mettant à mettre du rythme sur les paroles que j'avais écrite, elle m'accompagna presque instinctivement. Oui, c'était exactement ça ! La laissant chercher ses notes, je continuais de taper du doigt sur la table, plaçant parfois des fragments de phrase.J'imaginais cette partie plus gutturale. Me levant de mon fauteuil avant de prendre une grande inspiration pour faire le hurlement que j'entendais pour cette partie. BREAK THE FUCKING CHAINS, TAKE BACK YOUR LIFE ! Les filles ne bougèrent même pas, trop habituée à ce spectacle mais elles avaient un regard intrigué en revanche. Tournant la tête vers Elfy pour avoir son avis sur la question.

dix ans depuis que tu l’as rencontré et dix ans qu’il est continuellement à côté de toi. il a été là quand ton père t’a été arraché, quand tu t’es retrouvée seule du jour au lendemain, quand tu t’es lancée dans l’ouverture de ton shop. à chaque moment important de ta vie, paz a été là comme un soutien sans faille malgré vos fortes personnalités. les cordes vibrent au rythme de tes coups sur ces dernières, le son devenant plus franc lorsqu’il hurle les paroles, t’emportant dans la mélodie qui te vient comme une évidence. « je pense qu’on tient un vrai truc là ! » que tu lances en plaquant tes doigts sur le manche de ta guitare pour stopper les vibrations. « faut qu’on rameute les autres, ils vont suivre c’est sûr. » la basse, la batterie, ça rajoutera du cachet. la bière que t'attrapes de ta main de libre pour en prendre plusieurs gorgées avant de la reposer sans délicatesse.

L'inverse était vrai également. Elfy avait vu mon premier mariage, mes conneries capillaires, la naissance de mes filles, ma remise de diplôme et la cuite qui allait avec, mon divorce, l'ouverture du cabinet. Il n'y a qu'avec elle que j'avais autant de souvenir en commun. Et étrangement, on se complétait plutôt bien tous les deux. Même avec nos caractères de merde.

Laissant ma voix s'éteindre alors que la guitare avait déjà cessé de vibrer, je la regardais avant d'acquiescer. Attrapant le téléphone, je composais sur la conversation de groupe qu'on avait pour les invités à se pointer. Attendant leur réponse, je repris le texte pour m'entrainer à le répéter de plus en plus rapidement, tapant le rythme du pied. A force de répétition, j'arrivais à faire rentrer quatre syllabe en un temps.

M'arrêtant finalement, je pris une gorgée de bière avant de la garder. Quoi de neuf sinon ?