s’élèvent les néons, marque l’entrée sur cette même scène. celle qui m’appartient chaque week ends, sur laquelle je me fais reine. intouchable. de plus être celle qui souffre, qui survit, qui reste en manque d’un autre. de plus être celle qui s’éteint mais devenir celle qui renaît de ses cendres. comme si je n’avais jamais été touché. blessé. comme si les débris s’étaient recollés aux premières secondes de cette mélodie. aux premiers pas qui me hissent vers l’estrade. peu de tissus, assez pour qu’ils brillent, rendent la peau plus attractive. rien ne compte, ni l’endroit ni les yeux qui se gorgent d’appétit sous les courbes qui s’agitent. mouvements entraînés, hanches qui remuent, jambes qui s’alignent. s’écartent en fonction des pas répétés. joue de la barre métallique, froide. comme si elle prenait vie, là, entre mes doigts, paumes qui se brûlent dessus. à peine visible, juste la clarté de mes billes et le pourpre de mes lèvres. s’essouffle dans la danse toxique, passionnée. poitrine qui rebondit plus vite dans l’effort savouré. balaye les demandes indécentes des plus proches, ignore ceux qui pensent qu’ils pourraient avoir une parcelle d’épiderme en échange de pauvres billets. et tout s’arrête, le son, les lumières, les clients embrasés. tous s’évanouissent, ne laisse qu’un souffle épuisé que seule moi peut entendre avant de m’éclipser. avale les escaliers trop rapidement, l’excitation qui devient presque ingérable. engourdissent les membres, donne le tournis jusqu’à ce que je m’enfonce dans le couloir. retrouve l’ombre et tout le reste. me laisse retomber contre le mur, palpitant fougueux comme seul echo.

Let me be there

I can be, there 'til you're whole. you weren't touched by a man in so long
'Cause the last time, it was way too strong. ;;

Horriblement amusant. Quelques petites danseuses, inachevées sur la scène, avec des bataillons salivants, suintants d’une débauche crasse. Autant de billets verts agités dans l’espoir d’un regard. Novices quadragénaires qui scrutent sans cesse les courbes juvéniles, s’imaginant des fantasmes vains pour mieux retrouver leurs quotidiens merdiques, l’âme en peine et l’érection difficilement dissimulable derrière l’attaché caisse. Des feux d’alarmes s’illuminent dans leurs orbes globuleux, appelant au massacre de quelques coups de reins. Tu soupires, las d’un spectacle si minable, une gorgée de bière s’infiltrant dans ta gorge. Appuyé contre le bar, tu ris devant cette situation d’un burlesque dramatique lorsqu’elle apparaît. Sous les néons, abreuvant tes velléités de quelques mouvements graciles contre la barre. Tu dévisages ses courbes, satisfait de cette chorégraphie. Un infime sourire étire ta bouche, décelant dans l’iris céruléen l’éclat d’un même désordre, d’une même gourmandise. Et le spectacle s’achève dans une frustration collective. La tentatrice quitte la lumière, s’enfuyant dans un dédale obscur. Comment l’atteindre Seven ? Après une rapide réflexion, tu abandonnes ta bouteille parmi les ivrognes, préférant t’aventurer dans les couloirs interdits, à la recherche de la naïade. Assise contre le mur, ses cheveux éparpillés sur le visage. Tu demeures témoin silencieux de la descente d’adrénaline avant de te racler la gorge. « — Quel est ton prénom ? »

dos au mur. sans en chercher d’échappatoires, médiocrité suffisante dans ce couloir inanimé. ombre au milieu d’un rien obscur, d’une profondeur abyssale dans laquelle je me satisfais. sentiments partagés pour ces chorégraphies, pour ce lieu qui m’offre pourtant un semblant d’épanouissement. la sensation de n’être qu’un vulgaire morceau de viande jeté en pâturage, pour faire saliver, augmenter le chiffre d’affaires. seule alternative que j’ai attrapé pour danser encore. danser un peu. derrière le dos d’un paternel à la dureté infaillible. pathétique gamine, rêveuse d’un autre avenir que celui qu’on avait déjà tout tracé pour elle. au millimètre près. m’acharne à trouver de quoi m’évader, me perdre, avancer à contre sens en sachant que je finirais sur la même ligne d’arrivée. parce qu’il n’y a pas d’autres choix que celui qu’il a décidé. docile gamine. ou pas assez. me laissant entraîner par les vices incertains. hostiles. comme toi, à qui la voix m’appelle. relève la tête, choc des orbes qui s’interpellent. toi aussi, t’es pas du genre à suivre les règles, à acquiescer devant les interdits. puisque t’es là, dans ce même trou à rats. - t’sais pas lire ? c’est réservé aux employés. désigne l’écriteau d’un bref signe de tête.

Let me be there

I can be, there 'til you're whole. you weren't touched by a man in so long
'Cause the last time, it was way too strong. ;;

« — T’sais pas lire ? C’est réservé aux employés. » L’écriteau ceinturée de rouge. L’évidente interdiction, ignorée superbement. Ta nonchalance ricane allègrement derrière ton sourire, usée de respecter les ridicules restrictions. Quatre années à suivre les directives sans sourciller, obéir aux ordres aboyés et éviter la moindre dérobade. Les horaires et les règlements arbitraux, les jouxtes et débordements. La solitude et l’attente, interminable attente révulsant tes viscères, brûlante sous ton épiderme comme une mauvaise fièvre. Tu acquiesces ses propos en t’approchant. Adossé au mur, demeurant debout devant elle. « — Apparemment pas, employée. Étrange comme prénom d’ailleurs. Plutôt exotique je dirais. » Les mains soigneusement glissées dans les poches de ton jean, tu résistes à l’envie d’allumer une cigarette. Le briquet fétiche coincé contre ton index. Ton regard scrute le sien, à la recherche de l’étincelle décelée plus tôt, mais tu ne rencontres que l’abyssale néant. La lassitude propre à l’absence d’échappatoire, l’adrénaline s’échappant avec les dernières lueurs de plaisir. Tu connais bien, cette sensation-là. « — Déjà fatiguée, employée ? »

les pensées qui se brouillent, ne forment qu’un tas de mots jetés aux oubliettes. te laisse t’imposer, prendre leurs places dans l’encéphale. rétines qui imprime un visage, un de plus. deviendra un de moins dans quelques heures. ne laissant de toi qu’un bref souvenir à peine mémorable. ta langue laisse glisser quelques gouttes de venin, souligne une passion souillée. pointe du doigt la dérive amère. - déçue qu’il ne te plaise pas.. mélange entre ironie et nonchalance. me redresse, les spectres qui volent dans tes yeux attisent la curiosité. me donne envie de m’approcher, d’en déceler les histoires. les entailles qui les abîment. eux, qui paraissent pourtant si beaux. avance un peu, laisse une ligne imaginaire entre nous deux. toujours adossée contre le mur. face à face entre deux démons. succubes qu’on a délaissés. relève la bretelle de mon soutient gorge sur l’épaule. - j’suis pas à vendre. timbre de voix est sec, détourne le regard vers l’ailleurs. le vide, moins hypnotique que toi.

Let me be there

I can be, there 'til you're whole. you weren't touched by a man in so long
'Cause the last time, it was way too strong. ;;

l’inconnu. dans toute sa splendeur. devient attrayant, envoûtant, chasse l’indifférence en quelques instants. transforme l’ennui en distraction captivante. à croire que tu l’avais deviné, la manière dont j’aime être capturé. comme si, d’avance, tu savais où toucher. comment toucher, pour me vendre l’illusion qu’il y a quelque chose à espérer. n’importe quoi, même si ce n’est qu’un regard éraflé. qu’une âme vagabonde. qu’un moment éphémère. - lena. c’est le prénom qui restera coincé quelque part dans ta tête. l’intensité qui se prononce, ton pas en avant vole ma part d’oxygène. l’a rend rare, laisse à la place, un souffle chaud l’a remplacer. c’est c’que tu cherches pas vrai ? que je ne vois que par toi ce soir ? que tu deviennes ma seule source d’intérêt au milieu de tout ces cadavres. tes doigts qui s’autorisent à me frôler, faisant retomber à nouveau la bretelle. ramène l’attention de mes billes sur toi, dévisage les traits à la forme autoritaires. la gueule attirante, tu dois l’savoir, pas vrai ? que t’es de ceux qu’on prend plaisir à regarder. - je t’écoute alors.. louve inconsciente. s’approche encore. - qu’est ce que t’as à me dire ? inspire moi. j’ai envie de m’égarer ce soir.

Let me be there

I can be, there 'til you're whole. you weren't touched by a man in so long
'Cause the last time, it was way too strong. ;;

« — Lena. C’est le prénom qui restera coincé quelque part dans ta tête » L’enjôleuse n’est désormais plus une anonyme. Lena. Prénom qui semble familier à ton esprit... Néanmoins, cette proximité nouvelle ouvre sous tes pieds un tel enfer que tu repousses immédiatement les pensées parasites. Pourquoi s’encombrer de la moindre réflexion ? Inutile considération, l’amusement trônant à tes pieds. Quatre années de solitude, de frustration. Tu serres légèrement la mâchoire. Seven, tu refuses d’obtempérer à la mise en garde raisonnable… Les résonances rythmiques de la scène vous atteignent étouffées par la respiration brûlante qui atteint ton visage à mesure que tu te rapproches. Qu’elle s’intensifie sous la tension. Dans l’obscurité, tes canines de prédateur semblent particulièrement acérées, créature affamée réclamant de goûter la chair observée. « —Enchanté Lena. » Un murmure que tu délivres de tes lèvres à ses lèvres. Après la légère pression pour éloigner la bretelle, tes doigts poursuivent l’exploration de son épiderme, s’appropriant un territoire inconnu. Tes yeux ne quittent pas les siens, encrant ta noirceur dans le cobalt. « — Je t’écoute alors.. qu’est-ce que t’as à me dire ? » Ton sourire s’élargit lorsqu’elle essaye de s’approcher, tu la repousses contre le mur… La prison imaginaire dressant maintenant ses barreaux. « —Tu as envie de discuter maintenant ?... Je disais donc, déjà fatiguée ? »

pénombre étouffante. tension accablante. toi qui règne sous mes pupilles qui t’assiège, regard conquis. t’es exactement le genre qui me fait faiblir. nocif. le jeu qui se dévoile dans un mutisme assourdissant, là où les mots deviennent presque encombrants. ressens une légère incertitude qui ne te ressemble pas voiler tes pupilles, comme si ton cerveau servait un combat à la raison qui a perdue d’avance. j’aperçois le détail de ta mâchoire qui se contracte, avalant un semblant de bonne volonté. regard qui s’adoucît face à la satisfaction quand tu abdiques. accepte de perdre ou de gagner ce soir. lippes mordues s’étirent dans un sourire, insolent, un brin victorieux quand tes lèvres se démêlent. que tes doigts poursuivent leur balade le long de mon derme réceptif. - et toi ? comment je dois t’appeler pour ne pas oublier.. absorbe l’incandescence de tes orbes, sans jamais quitter ton regard. même quand, dans ton élan, mon dos heurte le béton. - apparement t’avais des choses à me dire. murmures à ton visage. figée contre ce mur, proches. trop proches pour que tu ne puisses pas discerner mon palpitant se gonfler violemment. - danse avec moi. comme un ordre. où je ne te laisse pas le choix. te repousse férocement, tu fais quelques pas en arrière. sans te laisser l’occasion de réaliser que je suis déjà revenue à toi.

Let me be there

I can be, there 'til you're whole. you weren't touched by a man in so long
'Cause the last time, it was way too strong. ;;