whisky lullaby
with @Casper Valentine and @Haley Stryder
warning : abandon d'enfants, alcool, incendie.
18.08.2022 A random bar.


Après des mois à ne rien oser dire sur le sujet, Haley ose enfin discuter de ce qui lui ronge le plus les sangs : son bébé. Enfin, ce n’est plus le sien, pas le moindre du monde, elle n’est que le vaisseau qui lui a permis d’arriver sur cette planète et rien d’autre. Naïve à tous les égards apparemment, l’ancienne étudiante en médecine vétérinaire n’a pas imaginé, en prenant sa décision, qu’elle la regretterait aussi amèrement. Ce n’est pourtant pas faute d’y avoir réfléchi pendant des mois et d’avoir retourné la situation dans tous les sens. Elle a imaginé tous les scénarios possibles et s’est dit, pleine de conviction, qu’une adoption fermée était la meilleure chose pour ce bébé. Une part d’elle en reste convaincue mais elle n’avait pas prévu, à aucun moment de sa réflexion, d’avoir autant envie - besoin, même - d’avoir des nouvelles de cet être qui, pendant neuf mois, avait vécu avec elle, dans la plus intime et étrange des colocations. A la réflexion, c’était sans doute prévisible : Haley n’est pas du genre à oublier les gens qui croisent sa route, ou à délaisser qui que ce soit alors vivre du jour au lendemain sans plus aucune nouvelle de ce bébé, on se demande bien à quel moment elle a cru que cela pourrait marcher.
Toujours est-il qu’en parler lui a fait un peu de bien, enfin surtout d’entendre qu’elle n’était pas folle (même si la folie n’existe pas dans le langage médical). Sa psy l’a écouté et l’a invité à en parler plus régulièrement mais lui a aussi conseillé un groupe de paroles tenu par l’un de ses collègues qui se concentre sur les parents ayant perdu leurs enfants, d’une façon ou d’une autre. Si Haley ne se sent pas vraiment légitime à ouvrir la bouche quand leurs histoires sont terribles et ne résultent pas, pour la plupart, d’un choix, elle y va plusieurs fois la même semaine, et finit, sous l’insistance d’un.. animateur (?), par parler de son histoire. Tout le long de son récit, ce sont ses chaussures qu’elle regarde et elle reste aussi factuelle que possible. Les gens ne se gêneront sans doute pas pour porter un jugement ; Haley ne compte pas les inspirer, elle se juge bien assez elle-même.
Dès que la réunion se termine, elle prend la poudre d’escampette, sans s’arrêter au “café/cookie” qui fait suite à la discussion et bien décidée à rentrer chez elle. En marchant cependant, elle se dit qu’elle n’a aucune envie de se retrouver dans son appartement vide et même si elle regarde vite fait son portable au cas où Evie aurait subitement décider de rentrer, elle sait que ses espoirs sont vains. Quand elle passe devant un bar, elle hésite une seconde puis pénètre dans les lieux. C’est peut-être bien la première fois qu’elle va seule dans ce genre d’endroits. Dans un réflexe sûrement salvateur, elle met son téléphone en mode avion pour éviter l’envoi de message malencontreux et commande un mojito. Elle est en train de le finir quand quelqu’un au visage familier s’installe à ses côtés. Elle fronce les sourcils le temps de le reconnaître, et réalise, après quelques secondes qu’il était dans le même groupe de paroles qu’elle. Elle lui fait un petit signe de la main, “Hey”, avant de commander un nouveau cocktail.

Casper ne sait toujours pas pourquoi il se fatigue à se rendre à ce genre de meetings, imposés par le juge afin de l’aider à prendre conscience de la stupidité de son acte. Il sait parfaitement qu’il a évité le drame l’été passé et n’a certainement pas besoin de personnes qui pleurent leurs enfants, d’une manière ou d’une autre, pour le réaliser. De plus en plus, il se dit que jamais on ne lui rendra son droit de visite et que tout ceci n’a aucun autre but que celui de l’anéantir. Entendre parler chaque semaine des erreurs des autres l’aide, certes, à accepter qu’il n’est pas le seul parent à avoir commis une grave erreur mais c’est profondément déprimant. C’est à peine s’il écoute encore ce qui se dit, ne sortant de ses pensées que lorsqu’on a le malheur de s’adresser à lui et demander qu’il raconte pour la centième fois son histoire pour les petits nouveaux. Par chance, son tour ne vient pas aujourd’hui. Il se contente de jeter un coup d'œil au groupe de temps en temps, d’écouter d’une oreille, mais a surtout les yeux braqués sur l’horloge dans l’attente de la fin du meeting. Quand vient enfin le moment d’applaudir - de quoi se félicitent-ils au juste, si ce n’est d’avoir tout perdu ? - il se lève et rejoint un père qui se trouve dans une situation relativement similaire à la sienne et avec qui il a sympathisé il y a de cela quelques semaines. Ils partagent un café, parlent de tout et de rien mais surtout pas de la raison de leur présence ici, avant que leur route se séparent pour rentrer chacun chez sois.
Casper traîne les pieds, n’ayant pas forcément hâte de retrouver son appartement vide, et s’arrête une bonne demi-heure chez un des rares disquaires encore disponibles à Boston. Ici, il se sent bien. Dans une bulle, avec des gens qui partagent sa passion pour la plupart. Cela lui fait d’ailleurs bizarre d’être reconnu par une jeune femme dans la boutique, n’ayant jamais été la tête d’affiche. Ce rôle était pour Baz qui raflait la gloire et sa rançon, pendant que les autres profitaient d’un pseudo anonymat en dehors des fans à proprement parler du groupe. Bordel que ça lui manque. Composer et écrire avec les gars, passer des heures en studio ou chercher le titre parfait, être sur scène. C’est comme si tout ceci appartient à présent à une autre vie, à laquelle il n’a jamais souhaité renoncer. Ses pensées le mènent à envoyer un message à Baz, qui lui manque terriblement, puis à Lennox pour savoir s’il est dans le coin. Il n’a pas vraiment gardé contact avec le reste du groupe mais peut-être est-il temps pour Kaz de remédier à cela. Dans l’attente d’une potentielle réponse de la part du batteur, le français entre dans le premier bar qui croise sa route et se dirige droit vers le bar. Il se promet, en franchissant la porte, qu’il ne s’accordera qu’un seul et unique verre et qu’il rentrera immédiatement chez lui si son ex-collègue ne peut pas le rejoindre. Que Len vienne ou non, Casper ne finira en tout cas pas à terre, puisqu’il en a fait la promesse à Ivy durant leurs vacances. Il s’agit d’un faible prix à payer pour l’avoir elle, ainsi que Milo, dans sa vie. Ce n’est pas sa famille mais c’est mieux que rien et à terme, ils pourraient très bien le devenir. Lorsqu’on l’interpelle, le brun tourne la tête sur la droite et sourit à la jeune femme, sans la replacer tout de suite. Salut. Installé sur le tabouret libre à ses côtés, Casper l’observe un peu plus longtemps pour tenter de savoir d’où il a déjà pu l’avoir avant de se frapper la tête mentalement. Ils étaient ensemble il n’y a pas une heure, c’est un peu bête de ne pas avoir su immédiatement. C’est quoi ton poison? Un bref coup de menton vers le verre qu’on lui prépare, il commande une bière pour sa part afin de rester soft.