Dean n’avait pas oublié de recontacter Sumalee, une jeune thaïlandaise rencontrée juste avant son départ de Boston, qui lui avait promis de lui faire découvrir les origines qu’ils partageaient, mais dont le militaire n’avait aucune idée. Il lui avait envoyé un message dès qu’il avait trouvé le temps de se refaire à la vie « normale ». Elle lui avait répondu, et ainsi avait échangé quelques messages avant de se décider à se revoir. La question qui avait subsisté était : où ? Il y avait énormément d’endroits propices à des retrouvailles amicales, mais les deux thaï désiraient commencer l’éducation du brun sur sa contrée natale dans la foulée. Ce dernier ayant de nombreuses heures libres, il les avait mises à profit d’une recherche approfondie des activités proposées en rapport avec la Thaïlande. Il avait eu vent d’un musée qui proposait une salle destinée au sud est de l’Asie et avait proposée cette sortie à Sumalee qui l’avait acceptée avec plaisir.

C’était ainsi que Dean attendait sagement devant l’établissement public. Habillé en civil, ne portant que son pendant militaire autour du cou, il s’était planté sur le trottoir, mains dans les poches, décontracté. Si revoir Sumalee pouvait être stressant, - puisqu’ils ne se connaissaient pas vraiment - , son aisance relationnelle l’aidait à ne pas craindre leur virée. Il observait la rue, ne sachant pas d’où apparaîtrait la jeune femme. Ce ne fut qu’après plusieurs coups d’œil sur la silhouette d’une asiatique que son visage lui parut familier, et son corps se tourna naturellement vers la serveuse, un sourire inscrit sur le visage. Ça fait longtemps, s’exclama-t-il, heureux d’avoir cette occasion de passer du temps avec elle ; plus de quatre mois, mine de rien, comment tu vas ? Il se rappelait de leur furtive conversation concernant ses ambitions et projets qui n'étaient pas du goût de ses parents, et il espérait pouvoir avoir des nouvelles un peu plus réjouissantes à apprendre.

Il avait laissé ses mains dans ses poches pour ne pas la mettre mal à l’aise. Incapable de lui serrer la poigne ou lui offrir une accolade à cause de sa religion – et davantage de son engagement envers une femme, récemment -, il préférait garder ses distances, comme il l’avait toujours fait ; question de respect. Je suis pressé de faire des découvertes, avoua-t-il, j’sais pas si ça se voit ? Il piétinait sur place, bien sûr que ça se voyait. T’es déjà venue dans ce musée, lui demanda-t-il en l’invitant à se rendre à l’intérieur à ses côtés. Le « Museum of fine arts »  était connu des fans de l’Asie dans sa globalité, mais les touristes asiatiques eux-mêmes ne s’y rendaient pas forcément, plus intéressés d’aller à la rencontre d’objets qui leur étaient inconnus.

(tenue.) Ces derniers mois ont été un vrai tumulte pour la brune. Enfin, les choses avançaient pour la fleur qui priait désespérément qu'elle puisse mener au bout son projet artistique. Aussitôt qu'elle a soumis ce dernier auprès des responsables d'un site webtoon très réputé, elle fut approuvée pour publier sa bande à dessiner sur leur plateforme. Les premiers chapitres mirent en ligne, elle ne s'attendait pas a que son webtoon provoque tout un émoi au sein de la communauté de lecteur et se retrouver parmi les webtoons les plus populaires. À peine une semaine, qu'elle avait obtenue un bon nombre d'admirateur qui sont fan de son travail. Pour ne pas les décevoir et les laisser sur leur faim, elle publie régulièrement de nouveaux chapitres. De ce fait, elle passait une majorité de sa journée, penchée sur sa tablette à dessin, à créer un panel après l'autre pour arriver à temps à la date de sortie du prochain chapitre. Perfectionniste comme elle, tout devait être à son goût et passer au peigne fin. Rien n'était mis en ligne si ces standards n'étaient pas atteints. Des lourdes heures de travail qui semblent rien face à l'amour et au dévouement des lecteurs. Bien qu'elle touche une minime partie d'une communauté, elle se sent pas moins choyée par cela. Elle ne s'attend pas à atteindre la même notoriété que d'autres artistes bien établie depuis des années dans l'industrie des bande à dessiner, mais tout de même elle ne passe par inaperçu pour son travail.

Ce tandis, il lui arrive des jours, comme aujourd'hui, de prendre un peu de temps pour elle et ne pas s'enfermer comme un ermite dans sa chambre sans y sortir. Elle continuait à aider ses parents au restaurant et tout comme elle servait encore au Myung  Dong, mais elle avait réduit ses heures pour se concentrer sur son , car elle n'a jamais autrement. Cette fois, elle sortait pour passer une journée en compagnie de Dean, un jeune homme qu'elle avait rencontré il y a quelques mois de cela. Une amitié a vite pris naissance entre les deux adultes. Sumalee lui avait même proposé de découvrir plus sur la culture de leur terre mère, car le jeune homme, étant adopté à un très jeune âge, n'avait pas grandi dans cette dernière, mais voulait mieux la connaître. De ce fait, ils avaient convenu de se rejoindre au musée où il y a une exposition sur la culture de l'Asie du Sud-Est, incluant la Thaïlande.

Le pas pressé pour ne pas être en retard et faire attendre son ami après elle, Sumalee fini par le rejoindre devant le building. Le sourire aux lèvres, elle est contente de retrouver Dean après quatre mois à ne pas croiser ce dernier depuis son départ en mission. " À qui le dis-tu ! Je faillis ne pas te reconnaître" plaisante-t-elle, car le jeune homme n'avait pas changé tant que cela au point d'être méconnaissable. " Je vais bien et toi ?" Demande-t-elle sincèrement. Bien qu'elle ne connaît pas les circonstances qu'entour le quotidien d'un soldat, elle s'imagine tout de même que cela ne devait pas être aisé. " Tu vas finir par allumé un feu sous tes pieds si tu continues comme ça" se moque-t-elle gentiment en le voyant ne pas être en mesure de se tenir tranquille sur place. " Il m'arrive souvent d'y venir, dépendamment des exposions. Histoire d'admirer un peu les œuvres et me tenir inspirer." Le musée était sa deuxième maison. Quand l'angoisse de la réalité de sa vie lui prend à la gorge et l'enfonce dans un dénouement émotionnel, elle vient trouver refuge au musée pour retrouver toujours cette poussée qui la fait continuer à vivre de sa passion. " Et toi ? Tu y viens souvent ?"

@Dean Hassani

À ce point, s’était-il permis la réflexion. Ils ne s’étaient vus qu’une seule fois, mais tout de même. Si ses cheveux avaient poussé depuis, son visage restait identique. Il avait toutefois bien senti l’air plaisantin titillé ses cordes vocales, et n’avait eu aucun mal à comprendre qu’elle plaisantait. Ça fait une semaine que je suis de retour sur Boston, j’ai eu le temps de récupérer depuis, avait-il affirmé. Oui, et non. C’était vrai, dans le sens où il avait repris du poil de la bête, avait comblé ces endroits où les os s’étaient voulus plus visibles grâce aux bons plats de maman Hassani. Mais il subsistait quelques réflexes lorsqu’il entendait certains bruits, et les réveils étaient très matinaux. Un rythme qu’il n’arrivait pas à casser, mais qui n’avait pas entaché sa bonne humeur, fort heureusement. Je suis content que t’aies pu te libérer surtout, dit-il, parce qu’il avait besoin de voir des gens et de se laisser aller à une vie normale ponctuée par des sorties où les peurs n'existaient pas autant que dans les pays où il avait pour habitude d’être déployé.

Pardon, avait-il ri en tentant de ralentir les mouvements de ses jambes, c’est juste que te rencontrer il y a quatre mois m’a un peu mis la salive à la bouche. Opportunité non négligeable de rencontrer son pays natal et d’en apprendre davantage sur ce qui fait la Thaïlande. Sumalee était le seul pilier qui le raccrochait à ses racines, et elle semblait être enchantée de pouvoir avoir ce rôle-ci auprès du militaire ; ils étaient ainsi tous deux gagnants. Tu serais donc une demoiselle plus cultivée que je ne l’avais supposé , fut-il épaté. Leur première conversation l’avait mené à croire que la demoiselle était une fille qui savait emmagasiner tout un tas d’informations pour varier son travail d’artiste, mais il n’aurait pas pensé autant. Ils s’avancèrent côte à côte jusqu’à l’entrée et firent la queue. Pas vraiment…, laissa-t-il en suspens, pour tout avouer ce n’est pas dans ce genre d’endroits que je passe le plus de temps. Il préférait profiter de l’extérieur plutôt qu’être enfermé, c’était un homme qui avait besoin de mouvements.

Figure-toi que j’ai connu ma première séance de cinéma il n’y a pas si longtemps que ça , avoua-t-il sans honte, et il existe énormément de choses desquelles je n’ai aucune expérience. Les plats que lui avaient servi Sumalee en janvier étaient les premiers qu’il avait goûté d’Asie du sud-est, par exemple. Et toi, y’a des choses que t’as jamais essayé , demanda-t-il, histoire d’en apprendre plus sur sa guide du jour. Elle restait une personne qu’il ne connaissait pas encore, et comme tout homme avenant et curieux, il désirait en apprendre davantage sur elle. Et le truc le plus fou que tu serais amenée à faire, ça serait quoi, questionna-t-il la Thaïlandaise, parce qu’il était un adepte des sensations fortes, même en-dehors de son métier. T’es plutôt du genre « les hommes doivent être galants », ou « parité homme-femme en toute circonstance , posa-t-il ensuite, en sortant son portefeuille. Est-ce qu’elle acceptait qu’il paye leurs tickets à tous deux, ou voulait-elle faire cinquante/cinquante ?