bonnie était peut-être l'une des seules en classe à garder le silence, les yeux baissés sur son bureau –il était difficile de distinguer si elle était plongée dans sa concentration ou si au contraire elle s'était perdue dans une fascination vague pour la surface plate de la table. les heures de cours étaient chaque jour des moments compliqués à passer, où elle se retrouvait seule devant son travail et se sentait souvent bien incapable de s'y mettre ; et elle avait désormais bien peu d'amis en classe qu'elle osait déranger pour un coup de main. alors tant pis, parfois elle laissait son esprit vagabonder tandis qu'elle s'enfermait dans un mutisme qui devenait récurrent, et il lui fallait toujours un peu plus de temps que les autres pour réagir à toute interruption.
sans piper mot, elle se leva lentement et traversa la salle de classe pour partir de l'université et se laisser guider vers les rues. d'un pas réluctant, elle suivit le parcours qu'elle avait fait plus tôt dans la journée, les yeux fixés vers l'autre bout de la rue. quand elle avait fini de travailler, elle avait plutôt envie d'un bon petit remontant. une boisson chaude pour elle. un café ferait l'affaire pour qu'elle puisse tenir encore un peu plus longtemps dans la journée. normalement, elle n'avait plus rien à faire si ce n'est le montage de l'une de ses vidéos. elle doit poster une vidéo sur youtube dans quelque jour. elle avait fait l'exploration d'un hôpital abandonné. ce soir-là, elle fut épuisée à cause de l'énergie de certains esprits. elle s'approche de son café de d'habitude, entre dans l'établissement, commande facilement son café. elle s'installe, en profite pour sortir son ordinateur et terminer le fameux montage vidéo. elle avait le temps pour le faire sauf si on venait la déranger.

Les affaires de la brune tournaient plutôt bien en ce moment et son agenda commençait à bien se remplir, peu à peu. Après des mois difficiles, elle commençait enfin à vivre de sa passion, devenu son métier, l’art qu’elle était fière de réaliser. Révéler la beauté des corps, la douceur des âmes, la sincérité des émotions, c’est ce qui la faisait s’éxulter, ce pourquoi elle avait décidé ce changement de voie. Une voie qui lui ressemblait, qui la faisait vibrer, enfin faire quelque chose qu’elle aimait vraiment au quotidien.
Et aujourd’hui elle avait décidé de se poser dans un café assez calme pour travailler sur le côté administratif de son travail : plusieurs photoshoots enfin traités à envoyer et des dizaines de mails en attente, ainsi que les photos de la veille à trier et traiter. Un peu de boulot donc, surtout qu’elle se mettait un point d’honneur à mettre son portfolio à jour pour que ses clients puissent se faire une idée précise de son univers.
Plusieurs heures qu’elle était là, absorbée par ses tâches, comme hypnotisée par son écran, plusieurs cafés avalés ainsi qu’un cupcake, lunettes sur le nez et air pincé. Un « low battery » s’affiche sur son écran qu’elle balaie rapidement avec sa souris et se penche vers son sac pour attraper son chargeur. Absent. Une insulte en albanais lui échappe, heureusement même que sa mère n’est pas là pour entendre son verbe fleuri sans quoi elle se serait fait tirer les oreilles. Mais l’heure était grave : une galerie complète se sauvegardait sur son site et elle risquait de devoir recommencer si elle ne branchait pas vite son ordinateur. Son regard clair balai la salle et se pose sur une jeune femme qui venait de sortir son ordinateur : elle devrait pouvoir la dépanner. « Excusez-moi de vous déranger, mais est-ce que vous auriez votre chargeur, j’en aurais juste besoin le temps d’exporter une galerie, vous m’aideriez beaucoup. » Les relations sociales n’avaient jamais trop été son truc et la panique se lisait dans sa voix. « Et je vous offre votre prochain café… » ajoute-t-elle toute penaude. Elle n’avait même pas osé fixer la jeune femme, peut-être même sa sauveuse, dans les yeux.

elle ne sait pas pourquoi elle a choisi cet instant précis pour finir son montage vidéo. les abonnés de celle-ci, lui réclament de sortir énormément de vidéos lorsqu’elle sort quelque part. elle va un peu partout, elle fréquente beaucoup d’endroit et le fait de voir qu’elle ressent plusieurs choses dans les endroits abandonnés rend la vidéo plus croustillante. elle reçoit beaucoup de commentaire positif, mais aussi négatif. elle fait en sorte de prendre en compte tous les commentaires malgré qu’elle fait en sorte d’ignorer ceux des personnes trop détestable. elle sait faire la part des choses, elle sait voir une critique négative et un commentaire rempli de haine. généralement, elle demande aux personnes qui travaillent avec elle de supprimer toutes les insultes qui peut y avoir en dessous de son contenu.
assise tranquillement dans son coin, elle est concentrée sur son travail. elle ne laisse personne rentrer dans sa bulle. elle aime être une personne banale, qu'on ne remarque pas ou peu ; lorsque l'on se soucie parfois d’elle, la curiosité s'efface rapidement quand on découvre qu'elle est différente des autres. quand on découvre son don, on s'en va aussi vite qu'on est arrivé, parce que d’après certaines personnes, elle n'en vaut pas la peine. son regard se perd sur son ordinateur, elle ne sait pas si le ciel est devenu gris, ou bleu, elle ne sait pas s’il y a de la pluie. et en quelques instants, elle est déconcentrée par quelqu’un. elle lève légèrement la tête et voit une femme qui lui demandait si elle peut lui prêter son chargeur d’ordinateur. elle fouille dans son sac et lui tend en souriant. – voici. un petit ricanement s’échappe avant qu’elle ne relance. – je ne suis pas contre le café, ça va me rebooster je pense. c’est vrai qu’une boisson chaude est bienvenue.

Déjà plus d’un an qu’elle consacre tout son temps et l’intégralité de ses économies à son métier de photographe, presque à y laisser la santé. Et même si c’était un peu plus facile depuis qu’elle partageait son quotidien avec Alyss, qui la rappelait souvent à la réalité. Mais voilà ce qui arrivait lorsqu’elle enchaînait les nuits avec trop peu de sommeils, alors qu’elle croulait sous le travail, elle en oubliait de vérifier l’état de sa batterie et de garder son chargeur sous le coude. Heureusement, finalement, qu’elle avait opté pour un modèle d’ordinateur assez standard, sans quoi jamais elle n’aurait pu trouver un chargeur similaire. Mais ça l’embêtait un peu, parce que sa sauveuse avait l’air occupée, et elle semblait la couper en plein élan de travail. « Merci beaucoup… » souffle-t-elle avant de s’empresser de brancher son ordinateur avant qu’il ne s’éteigne. Puis elle se dirige vers le comptoir, commande deux cafés et retourne s’asseoir sur la banquette face à sa sauveuse, posant ses lunettes, plus très utiles à présent, à côté d’elle, se massant doucement les tempes. « Le café est un allié utile ! » rajoute-t-elle, elle qui en faisait une consommation presque excessive. « Surtout quand notre métier oblige à être dehors, parfois dans le froid, parfois très tôt, et à veiller jusqu’à tard derrière un écran d’ordinateur pour ne pas crouler sous le travail… » Du vécu. Et d’ailleurs, elle était bien contente de quitter l’hiver pour ne plus avoir à grelotter de froid en attendant ses clients.

l'amabilité de bonnie est toujours aussi présente. malgré le harcèlement qu'elle a pu subir quand elle était plus jeune n'a jamais détruit son espoir de rencontrer de merveilleuses personnes. le fait d'aider quelqu'un lui apporte beaucoup. elle se rend compte que sa bonté ajoute quelque chose de positif en elle. et qui est-elle pour refuser une chose qu'une personne a besoin ? le travail est quelque chose d'important. l'écossaise faisait ses vidéos youtube et elle y consacre énormément de temps, elle veut que tout soit parfait pour ses abonnés. et elle pense que c'est pareil pour tout le monde. les personnes veulent que le travail soit parfait pour que les autres puissent être émerveillés devant le chef d'œuvre que chacun d'entre eux a pu réaliser.
elle ricane et elle acquiesce en entendant celle-ci dire que le café est un allié utile. cette boisson chaude l'a sauvé plus d'une fois. elle parvenait à rester éveillée pour continuer les montages de ses vidéos ou bien les cours qu'elle devait réviser. elle se permet de faire des pauses lorsqu'elle a tout terminé. on pourrait presque croire qu'elle se tue à la tâche, mais ce n'était pas le cas. – c'est mon meilleur allié ! parfois, elle en abusait et elle le savait. une fois, elle a bu sept cafés seulement parce qu'elle avait soif. pourtant, il y a de l'eau et tout un tas d'autres choses, mais la feignantise fait qu'elle se rabat sur son café. – personnellement, je suis dehors lorsqu'il fait nuit et parfois il fait très froid là où je vais. les explorations urbaines qu'elle fait avec ses camarades finissent toujours par une chasse aux fantômes. le don de la jeune femme permet de savoir s'il y a quelqu'un avec eux ou non. elle voit des choses que d'autres ne voient pas.

Ses lunettes à présent rangées dans leur étui, pour éviter de les perdre ou de les abîmer, elle jette un coup d’œil à sa sauveuse. Une jolie brune, cheveux coupés au carré et une tenue qui lui allait bien. Le genre de personnes qu’Erza adorait shooter, dans un univers un peu inhabituel, en contraste avec elles. Elle aimait jouer avec ça, trancher un peu, sans que ça jure, jouer sur les lumières, assumer la contradiction totale au sein de son univers. Et la jeune femme face à elle correspondait bien aux profils qu’elle cherchait, pour ses sujets qu’elle préparait à exposer. Ne pas rentrer dans une case, ne pas se contenter de ce qui paraît évident, profiter de chaque petit élément pour trancher.
Elle sourit. Il y a des éléments qui lui rappellent sa propre expérience, à attendre sous la pluie, dans le froid, parfois même à rejoindre l’eau glacée qui lui mordait la peau, pour ses besoins artistiques. Rien ne l’arrêtait, ou presque. « Et le pire c’est quand il pleut, l’humidité donne encore plus froid… » Les pulls étaient devenus ses meilleurs alliés, ainsi que le k-way, quitte à avoir un look un peu douteux le temps d’une séance de photos. « Au fait, je m’appelle Erza Bennett, je suis photographe ! » Elle allait pas rester impolie et ne pas se présenter, c’était l’essentiel.

concentrée sur son ordinateur, mais également sur la conversation qu’elle avait avec l’inconnue. elle pouvait gérer deux choses à la fois. bonnie est comme son père, le fait de discuter et de travailler en même temps, c’était quelque chose de tout à fait naturel. à quoi bon travailler si on ne parle avec personne. en regardant du coin de l’œil, elle a l’impression qu’elle ressemblait un chouia à la demoiselle. elle a l’air d’être calme, tout comme notre jeune écossaise. - j’ai l’habitude maintenant. j’arrive à supporter le froid, la pluie, l’humidité… et bien d’autres encore. parfois, elle est obligée de se mettre en danger pour faire ses vidéos. grimper, sauter, se faufiler… les endroits qu’elle visite sont abandonnés et elle fait face à de nombreux obstacles.
certaines personnes ne comprennent pas sa passion pour l’exploration urbaine, mais c’est son train de vie. elle essaye de communiquer avec l’autre monde, elle essaye d’avoir un signe d’un être surnaturel. elle qui est peut voir certaine chose que d’autres ne peuvent pas voir. elle veut venir en aide aux personnes qui veulent être en paix, c’est quelque chose qui lui tient à cœur. sa tête se relève lorsqu’elle entend celle-ci lui dire qu’elle est photographe. - enchantée. je m’appelle bonnie cunningham, étudiante et youtubeuse spécialisée dans l’urbex et la chasse aux fantômes. comment faire fuir une personne en une phrase. mais peut-être que ça peut l’intriguer.

Erza observait sa voisine. Brune, cheveux coupés au carré, un regard semblant assez assuré. C’était définitivement une belle femme, le genre de femme qu’elle aimerait voir passer devant son objectif, pour une séance, pour un de ses projets. Mais il fallait bien qu’elle gagne sa vie, alors actuellement, ses projets persos devaient passer après ses clients, pour avoir de quoi vivre. C’était parfois dur pour elle, qui avait mille idées, mais elle ne pouvait se permettre d’autres choix, surtout depuis que le contrat qu’elle avait déniché l’avait lâché pour un photographe qui acceptait de travailler à temps plein pour eux. Ce n’était pas son genre à elle, elle voulait conserver un semblant de liberté, et si ça ne leur convenait pas, tant pis pour eux. Elle se reconcentra sur son interlocutrice. “Vraiment ?” La jeune femme qui ne tarda pas à se présenter l’intriguait. Comment pouvait-elle ignorer que tant de personnes qui arrivaient à se mettre dans la même situation qu’elle, presque par plaisir, pouvait résider à Boston ? Enfin un grand sourire s’étala sur son visage quand elle se présentait. De l’urbex ? Voilà de quoi aiguiser sa curiosité. “ De l’urbex ? J’en ai fait un peu, avec des amis, mais c’était surtout des choses faciles d’accès, pour des photos…” Elle avait jamais vraiment eu froid aux yeux en même temps, peut-être le fait que ce soit la petite dernière, surprotégée, qui pense que rien ne peut lui arriver. “Chasse aux fantômes ? C’est-à-dire ?” Elle n’y connaissait rien, mais ça l’intriguait, vraiment. Elle finissait son café et regarda Bonnie. “Tu veux boire ou manger quelque chose ?” Peut-être qu’elle l’embêtait, mais elle voulait en apprendre plus maintenant.

Le fait d'être habituée au froid, à la pluie, à l'humidité faisait de Bonnie une aventurière. Elle n'avait pas froid aux yeux et se glisse un peu partout dès qu'elle le pouvait. Elle ne veut rien prouver, elle veut seulement montrer qu'elle peut faire des choses toute seule. – vraiment ! Ce n'est pas si exceptionnel que ça. Le seul souci que l'écossaise peut avoir, c'est de tomber malade. Et ça peut arriver très souvent. Surtout lorsqu'il pleut fort ou lorsqu'il y a énormément d'humidité. Attraper des allergies à cause de l'humidité, c'est le quotidien de la jeune femme. – je vois… faites attention quand vous faites de l'urbex. vous pouvez tomber sur des personnes qui ne sont pas là pour visiter mais pour vous faire peur et/ou vous faire du mal. C'est déjà arriver à son petit groupe de tomber sur des personnes malintentionnées. L'équipe est toujours équipée si ça se passe mal dans tous les cas. – généralement, je fais de l'exploration, mais ce n'est jamais facile d'accès. Elle visite des manoirs, des parc attractions etc… c'est toujours difficile pour elle d'être tranquille dans ce genre d'endroits, car parfois, il y a des caméras et la sécurité du lieu peut débarquer à tout moment. – c'est-à-dire que je débarque dans un lieu hanté. et je fais en sorte que l'esprit qui rôde dans le bâtiment puisse partir en paix. Dit comme ça, on pourrait croire qu'elle est folle. Mais c'est quelque chose qu'elle fait tous les jours. – je veux bien un autre café ! Elle va carburer et elle en avait besoin

Erza appréciait cette discussion, venue d’un peu nulle part, qui mêlait deux passions différentes et qui, pourtant, avaient des points communs. Et elle était contente de pouvoir en vivre, même si certains moins étaient plus difficiles que d’autres, même si sa famille lui aurait préféré une voie plus conventionnelle, moins atypique et à l’origine d’un revenu plus sûr. Mais elle aimait ce quotidien fait de surprises, de nouveautés, d’aléas. Elle n’aimait pas le côté conventionnel des autres métiers plus classiques qui s’offraient à elle et le fait de ne pas pouvoir se renouveler comme elle le souhaitait. “Je t’avoue que je suis bien contente de pouvoir travailler en intérieur quand il fait vraiment mauvais ! Enfin ça ne m’empêche pas d’aller faire trempette dans l’océan en plein hiver !” Grand sourire aux lèvres, et heureusement pour ça qu’elle n’était pas de constitution fragile et qu’elle était assez courageuse pour ça. “Oui, ne t’en fais pas, mes amis sont un peu plus expérimentés et font assez attention. Plus que moi, même, je m’émerveille trop facilement devant tout, c’en est presque dangereux au quotidien…” Combien de fois Erza avait-elle manqué de se prendre une personne ou un poteau parce qu’elle passait trop de temps à contempler le monde autour d’elle, toujours à la recherche d’un point de vue, d’une vision nouvelle. “C’est assez beau je trouve…” Elle savait à quel point dans sa communauté la mort avait une place essentiel et à quel point il fallait respecter ses morts, mais ce n’était sûrement pas le genre de choses qui serait condamné, surtout si c’était fait dans le respect des défunts. Bonnie accepte un autre café qu’Erza s’empresse de commander, ainsi qu’un autre pour elle aussi et reprend place. “La mort, les fantômes, c’est quelque chose qui a une place importante dans la communauté de mes parents, alors c’est quelque chose qui m’a toujours fait me questionner…” Et au grand jamais elle ne se permettrait de considérer la brune comme étrange ou folle.