Un appel de ta mère t’interpelle. Tu fronces les sourcils avant de décrocher. C’est pas dans son habitude de t’appeler, parce qu’elle est loin d’être le genre de mère envahissante avec son fils. Du moins, c’est ce dont t’étais quasiment certain. Elle te propose de venir à un brunch dimanche prochain et après plusieurs secondes de réflexions, t’acceptes en te disant qu’au pire, si t’avais réellement quelque chose d’autre de prévu, tu décommanderas. Toi t’es pas le gars à t’encombrer d’un agenda, t’essaies plutôt de faire fonctionner ta mémoire. Certes, parfois tu te foires, mais parfois pas. T’as raccroché plus vite que ton ombre, t’as pas tellement cherché à savoir qui était invité à ce brunch, si ça tombe personne à part toi, tes parents et tes sœurs. Ca ne leur ressemblerait pas, à tes géniteurs, mais parfois t’as encore l’espoir d’être surpris. Le jour J, tu enfiles une tenue smart casual et tu rejoins la demeure luxueuse de tes parents. Le personnel est déjà prêt à te cirer les pompes et d’un léger signe de tête, tu les salues sans leur porter plus d’intérêt et tu te doutes que tu trouveras tes parents dans le jardin, par ce temps si ensoleillé malgré ce mois de septembre. Les lunettes de soleil sur le nez, t’arrives dans le jardin et ton regard se pose sur tout ce petit monde. T’étais pas loin, au niveau des invités, si ce n’est que tu n’avais pas pensé à tout le monde. Tu t’avances pour saluer le Grand-Duc du Luxembourg et son épouse, et puis finalement tu t’approches de Camille que tu gratifies d’un sourire avant de te pencher pour lui faire la bise « Bonjour Camille » dis-tu en accompagnant ton geste. Tu portes ton attention sur le bambin qu’elle tient dans ses bras, et tu profites pour lui caresser la joue avec un geste tendre « Tu es de plus en plus ravissante au fur et à mesure qu’on se croise, Camille » glisses-tu à son oreille le temps d'être penché pour porter ton attention sur son fils. Chose que vous ne faites plus beaucoup aujourd’hui, à ton grand regret. Néanmoins, tu respectes la vie privée de la princesse, tout comme tu la respectes trop pour ne voir en elle qu’un potentiel coup d’un soir comme une vulgaire nana que tu ramasserais au détour d’une soirée un peu trop arrosée. Finalement, tu salues le reste de la famille alors que tes sœurs en profitent déjà pour s’éloigner et vaquer à d’autres occupation « Alban, tu as l’air agréablement surpris de voir nos invités, je me trompe ? » tu coules un regard vers ta mère et prends plusieurs secondes avant de répondre « En effet. Mais j’aime les bonnes surprises. » dis-tu sans abandonner ton sourire. Les conversations se croisent, se font et se défont et alors que les parents semblent vouloir changer d’air, t’attrapes une ultime coupe de champagne hors de prix pour la tendre à la jolie blonde, maintenant que vous n’êtes plus que deux. Ou deux et demi. Tu prends toi aussi une coupe et tu viens t’asseoir sur la table basse, presque en face d’elle. « maintenant qu’on est seuls, comment tu vas ? » T’en oublies un peu les principes été ls convenances « Je suis le seul à comprendre ce qu’ils ont en tête ? » dis-tu avec une touche d’humour en parlant de vos pères respectifs. Petit à petit, tu commences à comprendre, oui.

Quand j’ai appris que mes parents venaient sur Boston, j’ai très vite compris qu’il y avait quelque chose qui se tramait là-dessous. La question c’était quoi ? Autant, je n’ai jamais douté de ma mère, mais mon père… c’est une autre histoire. Si Theodore semble fréquenté une jeune femme de bonne famille, mon père attend la même chose en ce qui me concerne. J’ose supposer qu’il a respecté mon temps de deuil suite à ma séparation avec William. Seulement, la princesse que je suis, mère célibataire, ne doit pas convenir à l’image de la famille qu’il se fait.

Ce midi, je prépare Louis élégamment, dans un petit costume absolument craquant. Nous brunchons tous les quatre chez les Hoover. Quant à moi, j’enfile une robe de couturier, assez longue pour être remarquée, assez légère pour ne pas faire trop habillée. Arrivé sur place, je sens les regards appuyés de mon père envers le père d’Alban, et qui ne lésinent pas sur les compliments à l’égard de ton père et de toi. D’accord, je comprend mieux ou du moins je commence à comprendre notre venu. C’est avec un sourire aux lèvres que je me déplace à travers les invités, les saluant à tour de bras comme je sais si bien le faire. Quelques révérences à mon égard, et de retour auprès de mes parents, Louis dans mes bras qui ne semble pas perturber par ce qu’il se passe autour de lui. “Bonjour Albin.” que tu salues en rendant la bise. Un des seul que j’ai salué de cette façon il faut dire. Ton compliment me fait baisser les yeux vers le sol. Cela fait des mois que je me donne du mal pour retrouver mon corps d’avant grossesse, alors entendre un compliment d’un homme comme celui-ci est très flatteur. “Je te retourne le compliment. Toujours aussi charmant et gentleman.” Tu as vraiment tout pour plaire, cela va s’en dire. Si l’espace d’un instant je me concentre sur toi, mon père n’en perd pas une miette. Avant d’être avec William, j’ai été clair avec lui, fini les mariages arrangés ou simplement même les arrangements de la sorte tout court. Il faut bien redorer mon image de princesse mère célibataire. Et en parlant de mère, je sens Louis qui s’agite un petit peu. A cette heure-ci, il est censé faire une petite sieste avant son biberon dans une bonne heure. Je m’éloigne en faisant signe à ma mère que je vais l’occuper de mon petit prince. Assise sur un petit salon privé, je berce doucement mon fils qui ferment les yeux. Mais je ne reste pas longtemps seule, et c’est toi qui viens me rejoindre pour mon plus grand plaisir. “Je vais bien, mais j’en connais un qui fatigue un petit peu.” que je dis en riant légèrement. “Et toi, comment vas-tu ?” Simplement et agréablement, la conversation se fait avec douceur. “Rien que le fait que mon père vienne à Boston c’était suspect.” Le rire aux bords des lèvres, des fois ma famille me désespère. “ Mon père m’a tellement parlé de toi depuis hier soir, que si lui-même pouvait se marier avec toi, il le ferait.” Je roule les yeux au ciel discrètement, car une fois de plus mon père observe au loin ce qu’il se passe. Si seulement ce n’était que depuis hier soir, sauf que mon père a toujours apprécié ta famille, une grande amitié avec ton père, et ta situation financière aide aussi. “Je crois que nos pères sont en train de jubiler de nous voir à deux là.” Une main délicate se pose sur la joue de mon fils en train de dormir. Ce moment est d’une douceur infinie, une petite bulle qui risque de ne pas durer avec nos paternels.

T’as conscience que tu n’es pas en compagnie de n’importe qui, alors que tes parents ont organisé ce brunch chez eux. Pourtant, si tu respectes le protocole avec le Grand-Duc de Luxembourg et son épouse, tu évites les courbettes avec leur fille. Tu ne l’as jamais fait, et si tu as beaucoup de respect pour la jolie blonde, tu la vois bien plus que la princesse qu’elle est. Pour toi, une femme n’a de valeur qu’avec sa personnalité, sa manière de penser et d’agir et non pas avec l’argent qu’elle peut posséder, ou encore le statut qu’elle porte. Vous êtes installé à l’extérieur, et tu remarques que vos pères respectifs vous joue le jeu des parfaits entremetteurs. T’as pas non plus besoin de lui pour guider ta vie, mais tu vois bien où ils veulent en venir. Tu te contentes de leur glisser des regards de temps en temps, sans rien ajouter de plus. Ta mère se lance à son tour, en ajoutant une couche d’or à ton blason déjà bien doré et en détaillant ton parcours scolaire et sportif. T’es désormais interne en chirurgie cardiaque, t’as une association pour des enfants orphelins dans les pays défavorisés, t’es reconnu comme plongeur professionnel et sportif passionné.

Tu finis toi aussi par abandonner vos parents, cherchant la jolie blonde du regard que tu retrouves un peu plus loin, au calme sans doute. Un petit sourire se dessine sur ton visage quand tu poses ton regard sur le bambin qu’elle tient dans ses bras. « Moi je vais bien. Beaucoup de boulot mais je vis, je respire, j’ai une vie sociale, j’ai pas besoin de beaucoup plus » et contrairement à elle t’as probablement plus de liberté. Tu lui adresses un sourire, elle aussi commence à comprendre le jeu auquel vos pères respectifs sont en train de jouer « beaucoup de classe, mais avec tout le respect que je lui dois, il est un peu trop viril pour moi » dis-tu avec un petit rire. T’es pas tourné homme, tu ne l’as d’ailleurs jamais été. « Je vois que le mien essaie souvent de m’attraper pour me faire ton éloge, mais en général je lui sors l’excuse du ‘ j’ai pas le temps, une autre fois ’ » non pas que t’as pas envie d’entendre parler de Camille, mais t’as surtout pas envie d’entendre parler d’elle par ton père qui ne veut qu’une seule chose, que tu la demandes en mariage et que vous puissiez vivre heureux et avoir beaucoup d’enfants ; et tout cela, sous le signe de la royauté. Tu connais Camille depuis bien des années maintenant, et si tu n’as jamais papilloné autour d’elle comme le ferait n’importe quel homme, c’est sans doute pour la simple et bonne raison que tu la respectes trop pour te transformer en gentil petit toutou capable de la suivre partout où elle va, dans le seul et unique but de pouvoir la mettre dans ton lit.  D’autant plus que tu te respectes beaucoup trop pour ça, toi aussi. Tu lances à nouveau un regard sur les deux hommes de famille en train de discuter, qui vous observent aussi de loin. « Ils sont en train de s’imaginer une montagne de scénario, alors qu’en fait on est en train de parler d’eux. S’ils savaient… » tu ris et tu regardes Camille avec tendresse alors qu’elle continue de bercer son petit homme « comment il vit sa vie de petit prince ? » tu marques une pause, et tu t’enfonces un peu plus dans le siège de salon dans lequel t’es installé en repensant à toute cette mise en scène qui vous concerne « on pourrait entrer dans leur jeu. De toute façon, aussi bien toi que moi, on sait ce qu’on veut réellement. Eux, s’ils ont du temps et de l’énergie à perdre là-dedans, qu’ils le fassent, mais au moins ils nous foutrait un peu la paix. Et chacun de nous vivrait sa vie comme il l’entend »

J'apprécie les manières que tu emploies devant ma famille, et ta façon d'agir à mon égard. Si je tiens à respecter les protocoles quand il s'agit de ma famille et de mon statut, j'accorde des exceptions uniquement pour les gens proches de moi. Alors oui, on ne se fréquente pas régulièrement, mais il n'empêche que cet été là, celui où on s'est vu pour la première fois garde une grande place dans mon esprit. Je sais bien que ces différences d'agissements, mon père l'a repéré à dix mille lieux. Je sens son sourire et son regard quand nos yeux se croisent, son petit mouvement de tête me disant de venir vers toi. Sauf que je ne suis pas une de ses princesses que l'on dirige aux doigts et à l’œil. Dans les affaires oui, dans mes relations non., même si le Grand-Duc désespère de me voir aux bras d'un homme de renom. Pas comme William, le père de mon fils, ''simple'' fils de banquier du Luxembourg. Simple entre guillemets car il a toujours représenté bien plus que cela à mes yeux et je me pardonnerai jamais notre séparation dont je suis responsable.
Assise un peu plus loin dans un des salons de jardin qu'il y a, j'en profite pour bercer Louis qui s'endort dans mes bras, m'isolant un peu de la lourdeur de mon père. A l'écouter au près des gens présent, et surtout au côté de ton père, je suis la huitième merveille du monde. Même si je n'en pense pas forcément moins, je ne le crie pas pour autant sur tous les toits. Je souris tendrement en te voyant arriver. J'aurai pu lever les yeux au ciel, priant pour que la mascarade s'arrête. Mais j'aime ta présence, elle est agréable. « Tu es sûr ? Non parce que si tu rêves d'une vie dirigée au doigts et à la baguette, c'est l'homme idéal. Il faut juste être un peu sado-masochiste, mais on s'habitue. » Je ris légèrement. Si le Grand-Duc est loin d'être tendre avec ses enfants, il reste cependant un père formidable. Je regrette juste que le Grand-Duc prenne plus souvent le pas sur le père de famille. Enfin bon, je compense avec ma mère, même si elle n'a pas de pouvoir, elle est aimante, et toujours là pour nous, l'épaule sur laquelle on peut se reposer. « C'est si désagréable que ça que de parler de moi ? » Il faut reconnaître que si j'ai une allure d'un ange tombé du ciel, mon caractère est tout autre. Caractérielle, aussi bien dans la vie et dans les affaires, je sais ce que je veux, et si je ne porte aucun intérêt à cette personne, c'est mon côté hautaine et froide qui prend le dessus. Rare sont ceux qui peuvent réellement m'approcher, m'atteindre. Avoir ma confiance est loin d'être gagné, et une fois perdue, c'est terminé. Ma famille m'a souvent reproché d'avoir ce cœur de pierre, et il m'est arrivé de regretter qu'il devienne plus doux avec le temps. Je jette un coup d’œil à nos paternels quand tu m'en parles, riant en cœur avec toi. « Tu vois le regard de mon père, il m'imagine déjà m'emmenant à l'autel, il a déjà réservé le wedding planer qui s'occupera de nous. » Berçant mon petit prince, l'attention se porte sur lui. La plus belle des attentions. « Il ne se rend pas encore compte du monde qui l'attend, alors il profite de sa vie de bébé, et il a raison. » J'aimerai tellement le protéger de ce monde qui est parfois sans limite, d'une telle cruauté. Le couvrir de mon amour inconditionnel, que je sois sa mère et sa meilleure amie, sa confidente, celle qui n'hésitera pas à le conseiller, à le remettre dans le droit chemin si nécessaire. Lui laisser vivre sa vie comme il l'entend. Je veux tellement le meilleur pour lui que je pourrai me sacrifier s'il le fallait. Et dans le fond, c'est peut-être ce que je m'apprête à faire quand je t'écoute. Louis dort, le dos appuyé contre le dossier du canapé de jardin. Je réfléchis un instant, regardant mon fils endormi en réfléchissant. « ça serait la clé de notre liberté ? Mon père n'abandonnera pas comme ça, mais on peut essayer de gagner tout le temps qu'on a à gagner justement. » Ce qui n'est pas négligeable à la longue. Car je sais pertinemment que si ce n'est pas toi, ça sera quelqu'un d'autre. « Puis il faut reconnaître que tu ferais un fiancé très charmant.» Tu es un très bel homme, personne ne peut le nier. « Je suis d'accord. » que je dis comme si je validais un contrat mais avec le sourire. Et quoi de mieux pour commencer, que de montrer devant nos parents que je peux te confier la plus belle chose à mes yeux, mon fils. « Tu veux le prendre ? » Je sais que tu as l'habitude avec les enfants, il n'y a ni photographe, ni presse. Juste le regard curieux de nos pères qui ne sont pas discrets.