Cœur faible et fébrile qui semble trouver quelques sursauts à ton égard. De quoi rebondir durablement, s'accrocher à la force de mes phalanges et de mon mental. Je n'ai pas voulu t'expliquer par messages, je sens que de t'avoir sous les yeux me donnera la force de dérouler ce fil que j'ai tant de temps voulu garder emmêlée. Fillette aveugle dans ses ombres, j'ai su pourtant déceler quelques fragments de lumière dans la noirceur. Comme lorsqu'un voile se lève dans l'obscurité et que derrière l'ombre, on constate finalement qu'il n'y a que lumière. Elle portera ton nom. Le chemin s'annonce tortueux et long mais je suis décidée à le prendre. Gratter le revers abîmé pour trouver des ressources jusqu'ici insoupçonnées. Le corps exulte cette fatigue que je n'ai pas voulu entendre pendant toutes ces années. Silhouette famélique et orbes bleutées d'être davantage creusées. J'aurais voulu t'offrir un visage plus présentable, quelque chose qui rassure, mais je n'ai plus cette force de faire semblant, de ne pas entendre les messages, dans cette faiblesse, je laisse finalement la véritable force d'admettre les choses s'élever. Je t'imagine inquiet, en colère presque mais je ne veux pas que tu le sois. Car si de reproches tu t'accables, je suis encore debout seulement grâce à toi. Paupières closes et reposées, j'entends tes pas se rapprocher, mince sourire qui vient se perdre à mes lippes alors que je laisse ta silhouette inonder mon regard. « Assieds-toi. » Fauteuil présenté du bout de mon index. Je redresse le buste et laisse finalement ma paume reposer contre ton visage. « Viens plus près. » Gamine incapable de garder sa première idée. C'est contre toi que je veux me sentir, dans ta chaleur, que je te laisse sentir encore un peu de la mienne, malgré le reflet que je peux offrir au monde en cet instant, je veux que tu le sentes. Que je suis désormais plus forte de jamais. Plantée au milieu de mes ruines mais debout et décidée à avancer. Avec toi à mes côtés.

Fébrile. Cette sensation qu'il déteste, plus qu'aucune autre; celle qui vous prend à la gorge, vous donne la sensation d'étouffer; celle qui fait trembler les doigts, battre les jambes sur le sol, et impossible de s'arrêter. Tu n'es pas de celles qui vont facilement à l'hôpital, Shayn en est conscient. Plutôt du genre à refuser l'aide; à te montrer forte en toutes circonstances, encaissant les coups sans broncher. Mais ce n'est là que la surface; la partie visible de l'iceberg. Alors, que s'est-il passé ? Cette question, le ténébreux ne cesse de se la poser. La conversation ne laisse pas de place aux doutes; il a manqué quelque chose. Une évidence peut-être, un signe que tout allait basculer. Qu'il aurait pu te perdre. Et ça, comment pourrait-il le supporter ? Cette retraite spirituelle, Shayn la quitte sans regrets. S'il ne croit pas en ce genre de délire, le jeune homme reconnaitra quand même un point essentiel à tout cela: une forte prise de conscience. Un but à sa vie. Objectif qu'il ne pourra atteindre seul, sans toi. Le gamin se rêve homme, désormais. Fondation d'une nouvelle bâtisse. Pour toi. Pour ce "nous" qu'il apprivoise un peu plus, tous les jours. Garé en catastrophe sur le parking, oubliant même de fermer la voiture. Fonçant au travers des couloirs et harcelant les boutons innocents des ascenseurs. Insolent avec le personnel soignant. Sans qu'ils n'aient mérité un seul mot déplacé. Ce serait même tout l'inverse, si on en croit ta version des faits. Fort d'un nouveau souffle, plus doux et lumineux, en quête d'une certaine rédemption auprès de la vie, Shayn se présente enfin à l'entrée de la chambre. Regard effrayé, préoccupé; âme soeur distraite par ta présence entre ces murs. Par ton teint, ton allure. Mal en point, c'est une certitude. Pourtant, tu brilles encore avec force. Telle une étoile immortelle. Le sourire s'affiche, se hisse aux lippes masculines; fugace malgré lui. Tu es en vie. L'ombre claire s'avance, sans prononcer le moindre mot; souffle en suspens contre ta paume de main. Le premier contact, comme un retour de loin. Comme si une vie toute entière séparait ce moment de la dernière fois, dans ton bureau. Incapable de lui refuser quoi que ce soit, lui même dans le besoin d'un plus tendre réconfort; Shayn s'avance sur le lit, jusqu'à s'y asseoir, ouvrant ses bras pour t'accueillir, toujours plus près. Comme si tu n'étais jamais partie. Comme s'il ne s'était pas enfui. Phalanges masculines appréciant la chaleur de l'épiderme, la douceur intacte de tes cheveux; tes boucles blondes et leur senteur si particulière, pour lui, ô combien familière. Tout est si évident lorsqu'il se trouve près de toi. Une étreinte qu'il ne compte pas interrompre, reculant simplement son visage pour mieux apprécier le tien. - Ne me quitte pas. un cri du coeur, et une perle salée s'échappe. Un murmure à ton oreille, la peur panique que tu puisses disparaître entre ses doigts. A imaginer une vie sans toi, autant le condamner directement aux enfers.  

J'ai côtoyé les démons toutes ces années, fillette qui a su museler les cerbères, charmer les harpies mais qui a finit par se faire prendre à son propre jeu. De la rose, je suis devenue l'épine. Et j'ai faillit tout y perdre. Jusqu'ici, j'avais été inconsciente des dangers, de la destruction lente et insidieuse que j'avais entamé, prise en spirale dans un requiem interne, final en apocalypse, dans une chute spectaculaire. Abdication agonique du myocarde. Je me suis réveillée. Prunelles bleutées et voilées qui s'étaient offertes encore au monde, le souffle hanté par les songes d'un Ange sombre et doré. Comment te raconterais-je tout ça ? Cette expérience presque mystique dans le chaos ? Ce qui explique aussi la nature changée de mon aura malgré les béances et les blessures infligées. Le corps est meurtri ; fatigué mais l'âme elle, vibre de toute sa puissance. Je suis morte et une nouvelle fois née. Destinée à tes bras, une fois de plus. La force se décuple lorsque tu te présentes dans les parages. Tu ne le sais pas, tu ignores, comme je serai capable d'anéantir le monde pour simplement m'orner de tes lettres. Mon regard se posant dans le tien, je laisse ma paume encadrer également l'arrière de ta tête, souffle contre souffle. « Je ne le veux pas. » Te quitter, c'est le dernier de mes projets. Lèvres dont je viens m'emparer et effleurer de ma tendresse le goût de sel que dans ta vulnérabilité, tu m'offres. Nous n'avons plus le temps, ni l'envie de tricher. « J'étais sur le toit. J'avais pris de la coke encore une fois. Pas mangé depuis des jours, je ne sais même plus. Et il est apparu. Dwayne. Je te le présenterai. Il m'a sauvé. Mon cœur s'est arrêté cette nuit là, et tu sais Shayn, la mort m'a paru si douce. » Je souris mais les larmes se fraient le chemin jusqu'à toi. Ça aurait été si facile de lâcher, de ne pas dire, d'abandonner là. Mais... « Je ne voulais pas qu'elle me prenne, parce que je ne pouvais penser qu'à toi. Il n'y avait que toi. » De ce côté du tunnel, vers la vie, les autres étaient de l'autre côté et pourtant ils n'étaient pas prêt de m'accueillir. Ils me poussaient de ton côté. « Je veux m'en sortir Shayn. Je veux qu'on s'en sorte. Promets-moi. » J'ai jamais eu autant la rage pour une bonne chose, pour m'agripper à quelque chose qui vaille la peine. A toi et à ce nous qu'on va s'efforcer de renforcer.

Il ne comprend pas. N'est pas certain d'intégrer correctement les informations que tu lui offres. Aura différente, corps abîmé, semblant cruellement fatigué; et pourtant, cette rage de vaincre, ce feu brûlant au fond de tes océanes. Shayn semble déconnecté de cette réalité, comme s'il évoluait sur une fréquence différente de la tienne. Un train de retard, au minimum. Tout n'était peut-être pas parfait lorsqu'il t'as quittée, l'autre soir; mais tu ne semblais pas sur le point de tomber. Aurait-il raté un détail aussi important que celui-ci, concernant ta santé ? Oui, bien sûr qu'il l'a raté. Complexe d'accepter qu'il a encore merdé, qu'il s'était isolé suite aux douloureuses confessions. Ca fait mal Lyra, d'être à côté de la plaque. Ténébreux toujours absent lorsque sa présence pourrait faire la différence. Petit-ami en carton, incapable de protéger sa reine, une fois de plus. Combien de fois supplémentaires sera-t-il aux abonnés absents ? La culpabilité s'élève, comme distillée par le coeur à l'ensemble de l'organisme. Refrain d'une mélodie qu'il ne sait digérer. Gamin toujours à la ramasse. Schéma répété; celles qui comptent, il ne sait les protéger. Toi, en particulier. Etreinte à laquelle il se rattache, ombre toujours trop imparfaite pour ta lumière. La peur de te perdre, celle la gronde sourdement au fond de son âme. Alimente cette perle salée sur sa joue. Tu es douce, plus qu'à l'accoutumé. Tu es différente. Plus forte, sans qu'il ne comprenne vraiment comment. Ou pourquoi. - Mais qu'est-ce que tu racontes...? difficile d'encaisser les coups. Sonné par cette déclaration, comme incapable d'en comprendre le sens. Coke. Toit. Rien avalé depuis des jours. Dwayne. Coeur arrêté, douce mort. Quel sens à tout cela ? Bordel. C'est comme si une nouvelle énergie avait pris possession de ton corps. Comme si tu brillais différemment, peut-être même plus qu'avant. Le jeune homme se recule légèrement, comme pour mieux t'observer. Sourcils froncés, les mains s'écrasent sur son visage; comme si rien de tout cela n'était vrai. - Tu allais si mal depuis tout ce temps.. Et je n'ai rien vu ?  Tu aurais pu mourir sur ce toit et.. Je n'aurais même pas été là. comment peux-tu encore vouloir de lui ? La mort fait partie du quotidien, parce qu'ils l'infligent à d'autres. Parce qu'ils jouent avec. Mais la.. Ton coeur s'est arrêté. Et il n'en savait rien. - J'ai l'impression d'être le spectateur de ta vie Lyra.. Je veux qu'on soit.. Nous. Toi et moi, ensembles. Mais je ne veux plus de secrets. Plus de non-dits. Promets le moi. front posé contre le tien, main caressant tendrement l'épiderme sur la longueur de ton bras. De cette volonté de réparer les erreurs, de faire mieux à l'avenir. Pour toi. Pour lui. Pour ce "nous", la seule entité qui tienne encore et toujours dans ce monde. Nous. C'est tout ce que j'ai mon amour.  

C'est la culpabilité qui t'assaille et je ne veux pas que tu tombes dans ce travers. C'est aussi moi qui t'ai maintenu à l'écart, qui t'ai dissimulé à quel point j'allais mal, puisque moi-même j'ai été incapable d'être lucide là dessus. Je caresse doucement ta main dans la mienne. Tu me guéris bien plus que tu ne le penses Shayn. « Je ne t'ai pas laissé le voir Shayn, ça fait des années que ça dure, depuis la mort de ma famille. Ça a été progressif et insidieux. » Pas si marquant pour qui me côtoie fréquemment, ce genre de traumatisme change une personne et je pense que n'importe qui aurait pu passer à côté. « J'ai commencé la drogue à leur mort, d'abord de l'herbe, souvent la plupart du temps. Me nourrir c'était un luxe à cet instant, j'ai appris à mon corps à s'en passer. Et puis tout s'est décuplé quand j'ai fréquenté Devon, il m'a révélé autant qu'il m'a abîmé. » M'initiant aux drogues plus dures malgré lui de par ses fréquentations, ses habitudes, cette soif de violence dans laquelle je me suis laissé entraînée. Il fallait endormir les démons, ne plus sentir, me punir à ma façon et pourtant rester opérationnelle. « Tout ça c'était pour moi le seul moyen de tenir. » Et j'ai encore peur de m'écrouler tu sais. Regard qui vient se perdre dans le tien. « Mais maintenant, tu es là. » Et peu importe les horreurs qui nous entoure, ce qu'on a est suffisamment beau pour me donner envie d'essayer. Tu veux qu'on se dise les choses, qu'on ne se dissimule plus nos secrets, et quelque part, je viens de le faire en t'avouant tout ça . « Je te le promets. Et toi, tu me promets aussi ? » Parce qu'on avait été en miroir dans cette histoire. Reflets qui ne veulent pas s'avouer leurs failles et qui pourtant s'opposent autant qu'ils se complètent. C'est face à la perte qu'on comprend que finalement l'un n'existe plus sans l'Autre. « Je t'aime entièrement, dans toutes tes parts, dans toutes tes ombres. » Et n'est-ce pas là, l'ultime aveu d'amour inconditionnel ?

Si difficile d'aimer, de prétendre à le faire correctement. Si complexe d'accepter d'être passé à côté de ce qui semble, désormais, évident. La souffrance du corps, poussée à son extrême, au point que l'organe de vie lui-même décide de rompre sa belle symphonie. C'est déchirant d'imaginer un monde sans toi. De penser que, sans cet inconnu - peu importe qui il est pour l'instant -, tu ne serais plus là. Oui, Shayn se sent coupable et c'est un sentiment qu'il n'effacera pas pour le moment. Mais c'est bien cette prise de conscience, obtenue à l'écart du monde, qui l'incite à revenir vers toi. Parce qu'il t'aime si fort, qu'il ne peut que chérir ce moment; cette bénédiction de te compter, toujours, auprès de lui. - Peut-être, mais.. J'aurais dû.. Je sais pas, remarquer quelque chose. Un signe, n'importe quoi. c'est l'après coup; le moment où il cherche dans ses souvenirs, une marque, un indice de cette détresse intérieure, celle qui te rongeait silencieusement. - D'accord. Je comprends. Maintenant, tout cela est derrière toi. On va avancer, et je vais t'aider à te remettre sur pied. il a laissé la colère dans les forêts du Massachusetts; troqué sa sombre personnalité pour une nuance plus claire. L'impulsivité est calmée, Shayn en ressort plus grand; meilleur sans doute, plus proche de ce que l'on appelle communément un "homme". Il sait que l'adaptation est la clef de leur monde; que chacun trouve l'échappatoire qui lui est propre. La drogue, l'insomnie et l'absence de nourriture pour toi, la rage par les poings dans son cas. Il comprend. Acquiesce doucement. L'important est dans le présent, dans ce second souffle que tu trouves ici, après la tempête. Et bien sur qu'il restera présent. Vois comme la flamme brûle dans le regard, écoute la course folle du myocarde, plus décidé que jamais à battre pour toi. - Je promets. que dans ce champ de ruines, il restera à ton côté. Quelle que soit l'épreuve, quel que soit l'obstacle à franchir, Shayn se tiendra près de toi. Démon incarné en ange, pour la première fois de sa vie. Tu lui offres les ailes pour voler, ne vois-tu pas ? Shayn apprend, comprend enfin qu'il peut vivre sans n'être que ténèbres; mais en acceptant aussi cette part lumineuse, transmise par sa mère. Et c'est ce qu'il souhaite être, à ton côté; ni trop sombre, ni trop clair, seulement équilibré. - Je t'aime entièrement Lyra, dans toutes tes parts, dans toute ta lumière. et c'est bien là l'aveu ultime de l'amour, le plus pur qui puisse exister. Tu es l'unique, l'élue, la destinée. Tu es son ombre et sa lumière, cette faiblesse qu'il incarne en force; tu es simplement son évidence. 

Ta culpabilité est inutile, elle ne fera que gêner notre route. Puisque je ne t'avais pas laissé voir le mal qui m'étreignait, j'y étais moi-même aveugle. Soumise à nos démons. « On était trop pris dans nos noirceurs pour le voir. » Et on s'habitue aux misères les plus sombres, n'est-ce pas ? Nous persuadant qu'elles sont normales. Si un nouveau souffle m'anime, je sens la réciproque véridique. Je te trouve apaisé, en quelque sorte, changé ? « Je veux guérir oui. » Et je sais que j'y parviendrai avec toi à mes côtés. « T'es le plus puissant des remèdes. » Le seul qui m'importe. Parce que pour la première fois depuis leur mort, j'ai envie de construire au profit de la destruction. Main dans la main, on avancera ensemble. Laissant mon regard se confondre au tien, mon corps reposer contre ton corps. T'es ma fin et le début de nouvelles promesses, qu'importe les ombres qui rôdent, on saura éclairer le chemin. « Je sortirai bientôt et on prendra les choses en main. » On ne laissera plus les ténèbres nous happer, on apprendra ensemble à simplement les apprivoiser. Y'a rien qui puisse m'effrayer tant que tu te tiens à mes côtés. Promesses mutuelles, que je viens sceller d'un nouveau baiser. Je laisse mon souffle s'apaiser contre ta silhouette, le silence nous envelopper et nos simples présences venir nous réconforter. « Et toi, comment tu vas ? » J'ai besoin de connaître ton état d'esprit, la façon dont tu envisages les choses, l'avenir. « Je dois me rendre au mariage d'un ami dans quelques jours, ce n'est pas à côté. » et je viens formuler indirectement mon envie de t'avoir à mes côtés, parce que je me sentirai plus solide si tu es là.

Tu as raison, et son entêtement ne vous permettra pas d'avancer; Shayn en prend doucement conscience. Alors, il s'abstient de tout commentaire, tente simplement de refouler cette culpabilité, laquelle n'apportera rien de bon à la suite du parcours. Il hoche simplement la tête, apprivoise doucement ce calme qui lui est inhabituel, tente d'en faire un nouvel allié. Pour toi. Pour avancer plus loin. Ne pas reproduire les erreurs passées. - La réciproque est vraie. toi seule est capable de tirer le meilleur de sa personne. Son esprit était devenu malade, addict des violences et de la haine, sauvage. Tout cela semble être de l'histoire ancienne, à l'heure actuelle. Le corps respire à nouveau, les plaies se sont refermées; l'esprit demeure presque apaisé. Refuser de voir, d'accepter la part de lumière dans ce monde, c'est prendre le risque de te perdre, de ne pas t'accepter dans toutes tes nuances; Shayn ne veut même pas y songer. Et cela semble si facile, tellement évident; d'être tendre avec toi. Dès lors que tu reposes contre lui, dès lors que les regards s'accrochent, il comprend que quelque part, tout ira bien. L'ombre claire acquiesce en silence, ne trouve rien à rajouter, apprécie simplement cet instant, lorsque les problèmes semblent s'enfuir et que le meilleur pointe le bout de son nez, là devant eux; l'avenir. Un baiser pour sceller cette promesse; comme un nouveau départ qui les attend, à la sortie de cette chambre d'hôpital. Le souffle ralentit au contact de ta peau, paupières closes un instant, tandis que les phalanges glissent le long de ton dos, suivent l'arc dessiné par la colonne vertébrale. - Ces quelques jours à l'écart du monde m'ont fait du bien. Je me sens un poil.. Différent ? la silhouette se redresse, le sourire s'offre sur les lippes; de cette chaleur qu'il ne comprend pas encore, mais qu'il apprivoise peu à peu. - Mademoiselle Bain à un mariage ? Wow, je suis impressionné. taquin, pointe du nez qu'il pose contre la tienne, dans un élan presque joueur, léger. Heureux de te voir reprendre goût à ces choses, aussi simples puissent-elles être. - Si le médecin est d'accord.. Je pourrais t'y conduire ? suggestion qui semble si logique, lorsqu'il y pense. Lèvres pincées une seconde, joie intérieure qu'il peine à contenir, soumis à des désirs aussi intenses que profonds. - D'ailleurs.. Mmh.. J'aurais un truc à te demander. Enfin, à te dire. Bref, il faudra qu'on trouve cinq minutes, un tête à tête et.. Voilà. le myocarde bombarde dans la poitrine, les mots s'emmêlent dans la gorge; gamin prêt à devenir homme, à poursuivre ce chemin à ton côté, voulant t'offrir son âme sur un plateau d'argent.

Tu as su t'attarder sur tes noirceurs, t'effrayer de tes propres démons, te penser trop sombre pour ce monde et même pour moi. Attirée par tes chaos, par cette rage qui exulte entre tes poings, la colère pure, la vie tout simplement. Mais si le diable s'invite dans tes danses, c'est bien le paradis que tu m'apportes entre tes paumes. C'est aussi simple qu'inattendu. Je m'efforçais de ne plus croire en l'amour, en ces sentiments aussi tendres que dévastateurs. Mais vois-tu, il ne prévient pas. Et c'est exactement ce qui m'est arrivé avec toi. Dans nos ombres s'entrechoquent de singulières lueurs, qui ne parleront que pour nous. Pour la première fois depuis la mort de ma famille, je nourris ce souhait de m'en sortir, de retrouver les hauteurs, tout bonnement l'air de la surface. Et pour ce faire, c'est à tes phalanges que je souhaite m'accrocher, à ta force. Je te souris tendrement lorsque tu m'avoues que la réciproque est vraie. Ça me console de savoir que dans cette dépendance finalement, on s'entraîne mutuellement. Et je te trouve changé oui, plus apaisé, comme lorsqu'on réalise ces quêtes initiatrices, comme si la destinée nous offrait un nouveau point de vue. « Tu as fait quoi ? » Sourire singulier sur mes traits, de ceux qui trahissent une saine et ouverte curiosité. Je pourrais me formaliser de ton absence mais ce n'est pas le cas, j'ai toujours respecté ta liberté, ce besoin d'indépendance même si c'est auprès de moi que j'aimerais te voir rester. Je veux que tu sois heureux tout simplement. Je ris cette fois, cachant furtivement mes paupières de mes phalanges avant de te regarder. « Je sais... tout arrive n'est-ce pas ? Et Lukas est un ami important. Il m'a toujours épaulé, offert un toit quand je me suis séparée de Devon et que le Sidh démarrait à peine. » Un toit, je n'en ai toujours pas retrouvé mais peu importe, j'ai mon établissement et quelques refuges éphémères. « Ce serait super et je pense qu'il accepterait si tu m'accompagnes. » Ils ne voudront pas me relâcher sans surveillance mais en même temps, je n'ai pas les moyens de payer davantage de soins alors ils n'auront pas vraiment le choix. « Oui ? » Prise dans l'interrogative, je me demande ce que tu pourrais avoir à m'avouer, mais une infirmière interrompt notre échange et fait savoir que pour aujourd'hui, je dois me reposer.