Pandora’s many boxes

Son père accusé d’évasion fiscale, on avait tout entendu ! Elle savait qu’il avait travaillé dans les services financiers quand il avait épousé sa mère, à l’époque jeune étudiante de l’université de Brown à l’avenir plein de promesses. Katalina, que ses copines d’université appelaient "Kate", tomba rapidement enceinte après son mariage. Katalina quitta l’université six mois avant l’obtention de son diplôme et suivi James, à l’époque un séduisant jeune homme à l’avenir tout tracé dans une grande entreprise se situant à Phoenix, en Arizona. Son père avait choisi le prénom Shane, et sa mère avait opté pour Kalisha. Les premiers mois se sont passés à merveille et "Kate", jeune maman épanouie, prenait son rôle de mère au foyer très au sérieux. Elle préparait le petit-déjeuner avec amour tous les matins et servait le diner tous les soirs pour que "Jim" puisse profiter de sa petite famille modèle après une longue journée de travail. Tout semblait aller pour le mieux…

Ce n’est qu’au bout de six mois après la naissance de Shane que les choses se sont corsées. Après plusieurs semaines où "Jim" semblait éreinté, il y eut du changement. Alors que "Kate" avait emmenée Shane en promenade dans le parc, James rentra chez lui en coup de vent, pris sa valise, récupéra tous les éléments qui lui étaient nécessaires, des papiers aux vêtements. Il referma sa valise, ouvrit le cadre disposé sur la table de chevet, retira la photo et glissa un "Jim" au visage ravie enlaçant une "Kate" épanouie et une Shane de quelques mois riant aux éclats dans son portefeuille. Il agrippa sa valise, descendit les escaliers et jeta un dernier coup d’œil vers son foyer avec regret. "Kate" redevient Katalina et "Jim" redevint James. Katalina ne se remit jamais du départ de James et ne retira jamais son alliance. Elle finit tout de même par repartir à Forks, là où elle avait grandi afin de se rapprocher de ses parents. Elle acheta une maison douillette et cosy contrastant avec l’extérieur, toujours vert et pluvieux. Et la vie reprit son cours à une exception près, son prénom. Sa famille ne l’appela plus jamais Shane, mais Kalisha ou Kali et on ne parla plus de James hormis à de très rares occasions que Katalina distillait sous forme d’anecdotes affectueuses à sa fille encore enfant quand celle-ci s’interrogeait sur son père…

« Si vous avez effectivement regardé mes informations financières, vous avez donc pu remarquer que personne n’essaye d’améliorer mon sort. Ces fameux millions dont vous avez parlé auraient pu m’être utiles à plusieurs reprises ! »

Elle utilisa un ton moqueur, mais l’idée d’avoir une somme pareille lui paraissait totalement folle. Ces millions lui auraient effectivement été utiles quand elle était à la recherche de ses parents, mais à présent elle n’en voyait plus l’utilité. Oh, elle connaissait bien le genre de personnes qui avait autant d’argent, mais généralement cela ne les conduisait pas au bonheur, loin de là ! Et même si son compte en banque n’avait pas souvent dépassé les trois chiffres, elle savait profiter de chaque centime ! Elle n’avait jamais eu de grosses dépenses à faire, sa chambre étant déjà pour l’essentiel meublée lorsqu’elle avait emménagé et elle n’avait pas de loyer à régler si ce n’était les charges communes. L’essentiel de ce qu’elle gagnait partait donc en sorties diverses ainsi qu’en quelques vêtements et accessoires pour améliorer son quotidien. Elle vivait au jour le jour et prenait la vie comme elle venait, avec ses hauts et ses bas. Et c’était bien ça qui la rendait intéressante. Quand bien même aurait-elle eu plus d’argent, elle n’aurait pas su quoi en faire. Des millions de dollars frauduleux, on croyait rêver !

La brunette se croyait dans un film. Ou bien était-ce un canular ? Non, elle avait vu la plaque de l’agent, il faisait bien parti du FBI. Mais les Pandora Papers, ce n’était pas n’importe quoi quand même, c’était quand même une grosse accusation ! Elle ne voyait pas comment elle pouvait être reliée à une telle affaire ! Mais la jeune femme s’interrogea. Etait-ce vraiment si fou ? Après tout son père était introuvable depuis des années et les pistes qu’elle avait suivies n’avaient mené à rien, même si certaines semblaient vraiment prometteuses… Shane, fille de grand criminel, on aura tout vu ! Un nombre incalculable de questions se mêlaient dans sa tête. Elle s’était toujours concentrée sur l’endroit où ses parents pouvaient être, mais jamais réellement sur la raison de leurs départs. Elle avait inconsciemment refoulé ces points négatifs et à présent ceux-ci risquaient de lui exploser en pleine figure, surtout si on considérait que ce que disait l’homme à présent attablé. Il avait l’air plus avenant, plus humain, mais elle n’en oubliait pas moins sa première impression qu’elle préféra garder de côté pour le moment.

« Je vous repose donc la question : avez-vous été en contact avec James Lowel récemment ? »

En contact avec son père récemment… Non, elle avait même essayé d’oublier son existence après avoir sombré quelques temps lors de son arrivée à Boston et qu’elle avait repris sa vie en main, petit à petit. C’est en se focalisant sur elle-même et grâce à l’aide de son nouvel entourage qu’elle avait commencé à aller mieux, petit à petit, mois après mois. Et c’est maintenant, alors qu’elle pensait que toute cette histoire était derrière elle, que cet agent décida de la replonger dans ses souvenirs. Il était plus chaleureux et donnait l’impression que Shane avait pris les rênes de la conversation, mais elle n’était pas totalement dupe. Cependant, cette nouvelle dynamique lui permettait au tourbillon de ses pensées de s’intégrer. Elle regrettait qu’il ne soit pas l’heure de prendre un verre, cela l’aurait bien aidé à mettre de l’ordre dans ses pensées…

« Non… »

Elle marqua une pause, un peu indécise sur la suite de sa phrase :

« Je l’ai recherché, mais ça fait pratiquement deux ans que j’ai arrêté... »

Encore une pause.

« Vous êtes sûr de vous ? Il a vraiment fait ça ou c’est juste une possibilité ? »

Sa voix se cassa. Elle avait toujours sa tasse de thé dans l’une de ses mains, l’autre s’appuya sur la table tendit qu’elle hésitait entre s’asseoir et rester debout. Elle regarda l’homme fixement dans les yeux avec détermination, bien que ses pensées continuaient de tournoyer dans sa tête.

Codage par Libella sur Graphiorum