Comme promis, il a mis la main à la pâte. Et c'est peu de le dire. Ce soir, il n'est disponible pour personne. Seule Yeji a le droit à son attention. Le père de famille qui s'est lancé dans la confection de pizza maison, garnissant celle de Yeji comme elle l'aime. Ayant mis de la glace à la pistache au congélateur. Il se demande depuis combien de temps il n'a pas passé du temps avec sa fille. Les derniers échanges étaient houleux mais jamais il ne cessera de l'aimer. Il termine les pizza, les mets au four et se lave les mains. La sonnette retentit et l'homme se précipite pour ouvrir à Yeji, l'attrapant contre lui. Son petit rayon de soleil, son bébé. Celle qui lui a appris à aimer pour de vrai. Des sentiments qui ne s'éteindront jamais, quoi qu'il arrive. « Bonsoir ma princesse ! » Qu'il lance en la serrant contre lui avant de la laisser entrer et s'installer dans le salon. Il sert de quoi boire -sans alcool pour elle- et s'installe. « Alors, tu vas bien ? J'ai fais ta pizza préférée, comme promis ! » Sourit doucement, lui tendant son verre.

et peut être devrait-elle laisser sa rancune s'envoler. cesser d'être en colère contre lui en particulier. tente de faire des efforts quand elle sait avoir été dure ces dernières semaines, les conflits à répétitions quand ils ne semblaient plus capable de s'entendre. sûrement qu'elle avait trop de choses à reprocher yeji. les punitions à répétitions, la dureté du comportement de son père quand elle avait été retrouvée. à avoir eu la sensation d'être enfermée une nouvelle fois pour sa propre sécurité. à avoir fuit le domicile familiale laissant les silences s'éterniser, redoubler de colère quand elle avait apprit le divorce à venir. et la gosse, elle avait prit partie pour sa mère, à agir parfois ingratement envers son père pour le punir. mais le punir de quoi au juste ? doigt qui appuie sur la sonnerie, la porte qui s'ouvre presque à la volée quand c'est tes bras qui l'accueillent. hééééé tu m'étouffes à geindre encore une fois. retire sa veste qu'elle laisse trainer, les doigts qui accueillent le verre offert alors qu'elle se laisse tomber sur le canapé. ça va. t'as l'air d'aller bien aussi peut être trop pour quelqu'un qui venait de quitter la prétendue femme de sa vie. pince les lèvres pour garder les remarques sarcastiques, les opales qui dérivent sur la pièce. maman m'a dit qu'elle avait fait un carton avec des affaires à toi qu'elle a retrouvé. faut que t'ailles le chercher. oh, sûrement qu'elle s'y habituerait pas en réalité.

Gamine précieuse qui virevolte dans son appartement. Il est loin le temps des câlins, des réclamations des bras de son père. Qu'il ne soit qu'à elle. Le cœur qui se fend un peu plus à mesure qu'elle s'éloigne de lui. L'impression irréelle qu'elle ne sera plus jamais capable de l'aimer comme avant, de le voir comme un père qui a sûrement été trop protecteur. Trop sévère par moment quand au final, la paternité n'est pas quelque chose qui s'apprend dans les livres. Sa mère qui a la chance de l'avoir porté neuf mois. Neuf mois d'intimité entre une mère et sa fille, un lien qu'un père peut difficilement tisser par la suite. Pourtant, Yeji est son trésor le plus précieux, sa plus grande fierté. Et peut être que maintenant, il serait tant pour lui de relâcher la bride. De la laisser grandir à sa guise. Oui, je vais bien. J'essaie d'être aussi en forme que possible. Le regarde de sa fille qui en dit long, à se demander si elle ne l'imaginait pas en train de se morfondre et de noyer son chagrin dans l'alcool. C'est lui qui est parti, il n'a pas à se morfondre. Il est plutôt à se noyer dans le travail pour ne pas se rappeler que sa fille semble désormais le détester. Il hoche doucement son visage. Bien j'irais le chercher alors. Et les opales paternelles qui observent son petit bébé. Elle a grandit, s'affirme en femme quand elle conserve malgré tout son air juvénile. Sinon, quoi de nouveau ? Que comptes tu faire l'année prochaine ? Parce qu'il a besoin de savoir. Pas de diriger, loin de lui l'idée de devoir lui forcer la main. Il ne veut simplement pas qu'elle reste à rien faire.

à ne toujours pas comprendre comment est-ce que c'était possible. pourquoi est-ce que soudainement, tout semblait partir à la dérive. et c'était toute sa vie qui s'était écroulée en un temps records. les traumatismes auxquels elle avait du faire face quand au sommet de tout ça venait s'ajouter la séparation de ses parents. la seule chose qu'elle avait cru inébranlable à tord. ouais. presque soupir qui s'échappe quand elle préfère ne pas rebondir sur le sujet, à tenter tant bien que mal de ne pas t'en vouloir quand c'était parfois difficile de ne pas reporter la faute sur quelqu'un. y avait toujours un fautif, pas vrai ? je lui dirais. quand elle ne comprends pas pourquoi est-ce qu'ils ne gèrent pas ça entre eux plutôt que l'utiliser comme pigeon voyageur. j'sais pas hausse les épaules, l'avenir toujours aussi incertain, les doutes pleins la tête quand chaque jour était une nouvelle épreuve. et les gens se rendaient pas compte à quel point c'était difficile pour elle de continuer à avancer. incapable de savoir à l'avance si elle aurait le courage ne serait-ce que de sortir de sa chambre. peut être refaire ma première année pour de vrai cette fois sans en gâcher la majorité par des crises d'angoisses effroyables. mais les gens m'aiment pas trop du moins, pas dans sa promo. calvaire qu'ils lui avaient fait vivre à l'année, à la terrifier assez pour qu'elle n'ose plus mettre les pieds en classe.

Famille modèle durant des années. Un mariage parfait, des hauts et des bas qui avaient animés le couple. Le bonheur à son paroxysme quand Yeji était venu compléter le tableau. Gamine qui, désormais, semble tout simplement bouder son paternel. Sûrement qu'elle lui rapproche mille chose. Sa surprotection -accentuée par une peur de la voir disparaître-, sa sévérité, le divorce dont elle le tient pour responsable. À croire que la gosse ne prend pas conscience que les sentiments ne se contrôlent pas. Il soupire doucement. « Ce n'est pas nécessaire de lui dire, je le ferais. » Et l'avenir incertain de sa progéniture, gamine incapable de trouver sa place quelque part. Elle pourrait bien faire ce qu'elle veut tant qu'elle se prend en main. Les opales paternelles qui dévisagent cette enfant en proie à des conflits, à du harcèlement dont elle n'a jamais parlé. Et le père qui sent la culpabilité le ronger de l'intérieur. Reste cependant impassible. Comme si ne pas montrer ses sentiments ou son ressenti aiderait ce duo qui ne s'entend plus très bien. « Les gens ne te connaissent pas. Ils ont tort de ne pas t'aimer. » Oui, c'est la parole d'un père. Mais il est comme ça Hanzhe, il n'y peut rien. Il sait ce que vaut sa fille et serait capable du pire pour la protéger, pour lui rendre le sourire qu'elle n'a plus quand elle est avec lui.

et qui pourrait comprendre ce qu'elle avait vécut ? les rabaissements à répétitions à la faire passer pour la pire, à l'afficher sur veritas en compagnie d'insultes juste pour la ridiculiser aux yeux de tout le campus. enfer qui était venu la submerger jusqu'à temps qu'elle lâche prise, abandonne l'idée d'assister à ses cours dans l'unique but d'avoir un peu de tranquillité. oublier à quel point elle pouvait être détestée par les autres quand il n'y avait en réalité pas de raison valable à ce déferlement de haine. ok. hausse juste les épaules, à tenter de se tenir loin des problèmes d'adultes quand il était évident qu'elle n'arrivait de toute manière pas à comprendre. peut être mais ils ne m'aiment quand même pas et est-ce que ça n'allait pas plus loin que ça au final ? à constamment la tourner en ridicule ? voler ou abîmer ses affaires, faire courir des rumeurs sur elle pendant toute l'année. les actions qu'elle avait gardé sous silence pour n'inquiéter personne, à penser qu'elle était assez forte pour imperméabiliser le tout quand ce n'était pas le cas. la dernière fois ils ont vidés une bouteille de coca sur moi, ça pique les yeux très fort et c'était sûrement une des actions les plus sympa qu'ils avaient pu avoir à son encontre.

Le cœur paternel qui se sert, à se dire que le monde n'évolue pas. Que sa fille subit les mêmes injustices que lui. Bien que plus petit à l'époque. Moqué, pointé du doigt, critiqué pour ses yeux en amande, pour son teint loin d'être blanc. Et la haine de ne pas être normal comme on aimait lui répéter. À lui dire qu'il fallait qui rentre dans son pays, le traiter de bouffeur de chiens. Lui qui n'en a jamais mangé, à préférer câliner Mochi plutôt que de le voir souffrir. Il soupire doucement, observe Yeji avant de se rapprocher d'elle. Le bras protecteur qui glisse autour de ses épaules, la rapproche de lui. « Les gens sont des imbéciles par moment Yeji. Tu aurais dû m'en parler tu sais, que je sache tout ça. » Être présent pour elle, pour l'épauler. L'aider à ne pas sombrer. L'écart peut être trop important entre eux pour qu'ils arrivent à communiquer. Il caresse doucement l'épaule de sa fille, prend plaisir à la câliner. À se rendre compte que ça fait longtemps, trop longtemps sans doute. Et le regard du paternel qui se pose sur elle, les lèvres pincées. « Je sais ce que tu as vécu, ne crois pas que je ne le sais pas. » Des secrets d'enfance dont il ne parle pas, dont il n'a parlé à personne jusqu'à présent. Se demande si ça le fait passer pour un héros ou un lâche. Il n'en sait rien. Il sait juste que c'est ce comportement envers lui qui l'a poussé à apprendre à se battre.