Je sais très bien que je dis vrai et Tony aussi. Il n'a peut-être pas vu le cinéma avec ton précédent chauffeur mais il a du en entendre parler parce que c'est avec marqué qu'il a quitté les locaux pour ne plus jamais revenir. Et puis, Tony aussi a goûté à ta force et ta colère. Je me souviens encore de ce moment et c'est bien pour cela que je baisse les yeux sur Eden à ce moment précis. Le kidnapping. Je n'arrive toujours pas à y croire et j'ai toujours beaucoup de mal à me remettre de ce moment. Il m'arrive d'avoir peur le soir, quand je suis seule avec Eden, ce qui est toujours le cas d'ailleurs. Peur qu'on le subtilise sous ma garde, qu'on lui fasse du mal à cause de ma mégarde. Mais, une chose est sur, les coups que j'ai pris, je les prendrai une centaine de fois encore pour venir au secours de mon petit amour. Il n'y a pas beaucoup de monde pour qui je me mettrais volontairement en danger mais lui, il occupe le haut de la liste. C'est un peu mon étoile en haut du sapin et j'ai hâte d'être à l'année prochaine et de voir ce qu'il va me faire pour le sapin. Tata les activités créatives pour petit ourson. Des souvenirs uniques et singuliers pour lui et moi. Et toi aussi. Parce qu'on prend toujours le temps d'en faire un de plus pour toi, comme pour te montrer qu'on pense à toi quand on fait ce genre de chose, que je pense à toi parce qu'Eden n'a aucun mot à dire là dedans. On croirait presque des parents divorcés qui se partagent la garde de leur enfant, faisant passer le bébé d'une maison à l'autre mais en pensant toujours à l'autre. Nous ne sommes pas les parents de ce bambin que je récupère dans mes bras mais on a longtemps joué au tonton et à la tata que c'est un instinct maintenant. Et des fois, je me dis que j'aimerais qu'il soit mon premier, qu'il soit le tien, qu'on ait ce lien pour toujours nous lier. Parce que, quoi que tu dises ou tentes de me faire voir, je sais bien qu'un jour, ce n'est pas de la vie d'Eden que je devrais m'éclipser mais bien de la tienne. Il y a bien un jour où mon parfum ne sera qu'un souvenir, un peu comme la madeleine de Proust. Une odeur singulière et particulière qui ramène à de doux et beaux souvenirs d'un passé regretté et a jamais inachevé. Mais ce soir, je ne veux pas penser à cela. J'aurai bien assez le temps de le faire quand je serai toute seule dans mon lit dès qu'Eden dormira à nouveau et que tu auras retrouvé ton aile du manoir. Alors, plutôt que de faire face à tout cela, comme j'ai pu le faire hier, j'enterre toutes ces pensées, tous ces corps encore chauds et vivants pour les faire taire. C'est loin d'être satisfaisant parce que je les entends toujours mais de plus loin et moins intensément alors ça me convient pour le moment. Je gèrerais tout cela dans les heures et jours à venir ; les rendez-vous chez le psychologue devant doubler rapidement. Surtout quand on vit des moments de la sorte parce que j'ai l'impression d'être au bord du gouffre. Sauter, me laisser aller c'est souffrir et j'en ai assez fais de ce côté. Non, tu es la princesse en détresse. Ou le prince en détresse si tu préfères. Et ça me fait doucement sourire tout cela. Parce qu'on pourrait croire que l'on retrouve notre complicité d'antan, celle qui ne nous faisait que trop de bien. Seulement là, je le sais, pour toi comme pour moi, chaque moment de douceur est suivi d'un moment de doute, d'une écharpe qui s'enfonce un peu plus dans notre muscle cardiaque. La gangrène, voilà ce qu'on attend je crois. Une infection du sang et puis la mort. Au moins, ça nous libèrerait de tout cela et en Enfer, on y serait les Roi et Reine. Ne mets pas Otis là dedans. Il n'a rien demandé ! Et si l'émasculé lui semble trop difficile, le faire avec mon plus fidèle compagnon passe un peu mieux ? Je ne crois pas non. Enfin, si tu as envie de nous tuer Eden et moi et d'embrasser Otis, vas-y. Je souris légèrement et te regarde à nouveau. Nos yeux accrochés, comme deux partie d'un bijou qui s'accroche pour ne plus se briser. C'est ce qu'on était avant ça ; indispensable à l'avancée de l'autre, un lien indéniable qui faisait peur aux personnes autour de nous. Ils savaient de quoi on était capable ensemble. Et ils ont aussi vu ce dont tu étais capable sur ma personne. Et puis, toujours plus dans l'excès, je commence à chantonner le générique / jingle de Mario Bros. Tu sais quoi mon amour, je suis Mario et t'es Luigi. On fera ça pour Carnaval, je te le promets. Et peut-être que là, il va accepter d'être cette putain de Peach. Il se rendort. Que je souffle sentant bien moins les doigts d'Eden agripper mes cheveux. Et mon coeur fond un peu plus. Beaucoup plus même. C'est une guimauve au sommeil. Dieu que je rêve d'avoir le mien aussi. Mon bébé, mon ange, mon amour. Mon tout. Et aucun doute qu'Eden sera le grand frère / mentor de ce mini moi. Parce que si boucle d'or ne sera jamais mon enfant, il est trop important pour moi pour être relégué à je ne sais quelle place.