Je ne crois pas avoir prononcé cette phrase en attente d'une réaction de sa part. Je ne pense pas qu'il était de mon intention de la faire venir vers moi et de sentir ces lèvres contre les miennes. Parce qu'un baiser, ça se mérite. C'est censé être le reflet, le geste qui traduit des sentiments, des battements de coeur plus puissants pour une personne. Pas un truc commun qu'on fait avec n'importe qui. Et ce soir, ou plutôt cette nuit, alors que j'ai un peu trop bu et que je pourrais presque me noyer, je sais que je ne mérite pas d'être embrassé. On mérite mieux, tout les deux. Si baiser il doit y avoir entre nous, je veux pouvoir en profiter et savourer l'instant. Alors non, pas comme ça; pas maintenant.
J'entends et je comprends sa question. Après tout, ma déclaration pourrait porter à confusion. Et j'ai envie de lui répondre que non, mais peut-être que ce ne serait pas totalement vrai non plus. Cela dit, je n'ai pas le temps de formuler quoi que ce soit, qu'elle arrive déjà près de moi. Son corps presque contre le mien, je sens sur mes épaules, la paume de ces mains.
Je n'ose pas ouvrir les yeux, par peur de briser l'instant, par peur de la couper dans son geste, quel qu'il soit. C'est la curiosité de savoir ce qu'elle va faire, de comprendre jusqu'où elle est prête à aller. Et je ne suis pas déçu. Ces lèvres, refroidies elles aussi par la température de l'eau, délicatement se posent sur ma peau. Je suis conquis par ce geste, si simple et si subtil à la fois. Le contact est aussi froid que chaleureux, c'est un vrai paradoxe. Et je l'entends rire contre ma joue; un joli petit son qui s'échappe de sa bouche et qui finit par me faire sourire en retour.
Je laisse encore quelques secondes passer, alors que le froid commence lentement à faire son effet. Quelques petits tremblements qui secouent mon corps alors qu'elle me demande si je suis réveillé. Je le suis. Elle n'a pas besoin de faire plus. Je ne veux pas plus.
- Je ne saurai répondre à ta question... Je ne suis pas doué et même plutôt maladroit avec les femmes. dis-je finalement avant de rouvrir mes yeux. Je ne sais pas ce qu'on doit dire dans ce genre de situations et voilà que je me retrouve, un peu comme un couillon. Elle est belle Joey, elle est séduisante, c'est vrai. Mais il n'y a pas que l'enveloppe physique qui m'intéresse. Et avant de vouloir penser à plus, je préfère me donner le temps de la connaître. Et je pense qu'une baignade en sous-vêtements, pour une première fois, c'est clairement suffisant.
- Je suis réveillé. Merci pour ce baiser. Maintenant, il est temps qu'on sorte. Sinon on va vraiment l'attraper, la pneumonie. plaisantais-je en lui proposant ma main pour se relever. J'ignore si on se reverra. Mais le fait d'y penser, me fait me dire que j'aimerais que ça arrive.   

Comme la soudaine impression d'avoir dis quelque chose qu'il ne fallait pas. D'avoir été suffisamment maladroit pour répondre à côté de la plaque. Je me sens mal, gêné et quelque peu confus lorsqu'elle déclare qu'elle ne doit pas me plaire. Ce n'est pas ce que je souhaitais qu'elle comprenne. Au contraire. Elle est séduisante, elle est belle. Mais je m'appelle Sean et je n'ai aucunement l'habitude de ce genre de situations avec les femmes. Ni l'habitude de les complimenter, ni de les regarder, ni de les toucher ou... Quoi que ce soit d'autre qui se rapporte à une courbe féminine. Et si j'ai la soudaine envie de lui dire le contraire, qu'elle se trompe ou se méprend sur ma précédente réponse, la demoiselle ne m'en laisse pas le temps.
J'ignore comment interpréter cette soudaine décision de sortir, alors qu'elle avait l'air de se plaire dans l'eau froide. Est-ce parce que j'ai insisté ? Ou plutôt à cause de ce que je n'ai pas dis ? Plusieurs films se mettent à tourner dans ma tête alors que je la vois s'éloigner. La main que je lui tendais, je la ferme en grimacant. Déçu qu'elle ne l'ai pas acceptée pour se redresser. Et ça non plus, je ne sais quoi en penser. Il est si facile de prendre mal des paroles ou des gestes.
Je la suis, plus par obligation que par envie. Au final, j'étais bien dans l'eau. Cette sensation froide sur ma peau, la seule chose qui me fasse comprendre que je suis toujours vivant, même avec le coeur en lambeaux. La demoiselle se rhabille. La baignade; l'instant est terminé. J'hésite vraiment à sortir mes fesses de la rivière. Je pourrais simplement lui souhaiter bonne soirée et rester là, sachant que je ne la reverrai probablement pas. - Puis-je espérer te revoir ? demandais-je sans pour autant me rhabiller. Léger sourire qui s'affiche sur mon visage à l'idée de devenir maître de mon destin. Une partie de moi qui souhaite absolument partager d'autres instants avec elle. L'autre qui veut se protéger et la laisser filer. Au final, je lui laisse le soin d'en décider.