Cela fait bien longtemps que nous ne nous sommes pas retrouvés rien que tous les deux. Et pour la première fois depuis longtemps, il fallait que ce soit dans ce contexte. Toi et moi, entre tristesse et colère, à se faucher d'alcool dans ce bar qui nous a vu rire, se chamailler et se retrouver de plusieurs manières. Ce soir, les choses sont différentes. C'est toi et moi, juste nous deux, des retrouvailles comme on n'aime pas les faire. Nous avons toujours eu cet incroyable manie de faire les choses différemment de ce les autres font, mais c'est aussi ce qui fait notre singularité, pas vrai ? Dans un coin isolé du bar, sur une table dans l'ombre pratiquement, je sirote déjà mon second verre en perdant mon regard sur les réseaux, tentant tant bien que mal d'oublier la peine qui s'installe en moi. Elle est arrivée si vite, si brusquement, et je la hais. Cela ne devrait pas arriver, c'est bien trop tôt. Et pourtant, elle est là. Lorsqu'une ombre arrive et ne semble pas bouger, je relève les yeux et t'aperçois. Mine de rien, cela me fait plaisir, énormément plaisir, et je me lève spontanément pour t'enlacer fermement. Ce contact me plaît, me rappelle que nous avons été proches au delà même d'avoir été amants un moment. Solal... Ça fait plais' murmure-je en te serrant fort, mon menton posé dans le creux de ton cou. Tu vas devoir subir bien plus cette soirée, car ni toi, ni moi ne sommes en état de réfléchir normalement. Nous sommes deux idiots perdus dans les limbes de l'amour, perdus dans nos propres histoires qui nous torturent. Je finis par te lâcher et me rassoir machinalement. Commande, et pose-toi te lance-je ravi de pouvoir braver ma peine à deux. Et par la même occasion, je vais pouvoir écouter la tienne.

Je suis lessivé, je suis dépité même, et pourtant, ce n’est pas parce que je manque de sommeil. A chaque fois que çà va, j’ai l’impression qu’il y’a toujours quelque chose qui nous empêche de continuer d’avancer avec Carla. J’ai mauvais caractère, je suis speed, et je peux être très rentre dedans, et très têtu, tout comme la jeune femme, et je fonce dans le mur sans même prendre le temps de réfléchir à deux fois… comme aujourd’hui. Çà me fatigue, je tiens à elle, j’en suis fou même, et je n’ai jamais encore eu le courage de lui avouer l’amour que je pouvais lui porter. La seule et l’unique femme qui a réussi à me faire oublier mon penchant pour la gente masculine, celle qui a réussi, avec ses conneries, et sa spontanéité à faire basculer mon coeur. Mais voilà, je suis un vrai boulet et je sais que çà peut aussi courir à ma perte mais je suis comme çà et il est très compliqué de changer du tout au tout. Je sais que ma connerie finira par me faire perdre Carla, et d’ailleurs, j’ai l’impression de déjà l’avoir perdu. Soupir prononcé quand je récupère mes affaires, j’appelle mon chauffeur pour qu’il m’emmène jusqu’au bar. Flemme de conduire, ou même de marcher jusque là, j’arrive rapidement, prêt à te retrouver après tout ce temps. Toi, le premier homme qui m’ait vraiment fais comprendre que j’avais aussi envie de voir plus. M’engouffrant à l’intérieur, manteau bien plaqué contre moi, je ne te cherche pas longtemps. D ! m’exclame-je à mon tour, te laissant me serrer, sans pour autant te serrer comme tu le fais. Comme une soudaine impression qu’on ne s’est jamais vraiment quittés, comme cette impression que je ne devrais pas non plus être ici, qu’il faudrait que j’essaie de recoller les morceaux avec Carla. Mais ce soir, c’est l’appel de l’alcool qui me fait chavirer. Récupérant la bière que je viens à peine de commander, je me place à côté de toi, un nouveau soupir profond, ma main passant dans ma chevelure. comment vas tu ?

Comment ne pas voir que tu ne vas pas ? C'en est presque impossible. Et je pense que tu sais aussi bien que moi que malgré ma gentillesse, je ne te laisserai pas me débiter des conneries pour être au calme. Écoute, bof, bof, hein ? Juste envie d'oublier ma vie le temps d'une soirée, tu vois ? Je finis par en lâcher un rire presque défaitiste, blasé. Là, de suite, je n'ai plus d'amis, plus de famille, plus de coeur, je ne suis qu'un être humain à un bar qui redécouvre le monde sous un nouvel angle. Que cela puisse paraître étrange mais à tenir sans cesse le bon bout, à être tête droite, corps tendu, moral au top, les choses doivent bien redescendre à un moment. Et je sais que ce moment est temporaire. Il ne peut pas en être autrement. Et toi ? Me dis pas que ça va, sinon je te fous ma bière à la gueule plaisante-je sans vraiment rigoler. Là, de suite, j'ai besoin de ta sincérité car si je peux t'apporter un minimum de soutien, ce dont tu aurais besoin pour te sentir mieux, même si cela est minuscule, ridicule, alors je me sentirai mieux aussi. Te revoir aussi proche de moi me donne envie de te serrer à nouveau, passer ma main dans tes cheveux, t'embêter presque. Ce n'est pas tant que ta beauté demeure intacte au même titre que ton charme, il s'agit simplement d'une envie de te retrouver. Je t'ai toujours apprécié et cela est toujours le cas. Tu étais un ami avant que nous n'osions plus, et j'aurai voulu que tu le demeures. Je porte mon verre à la bouche, le repose après avoir bu, plantant mon regard dans le tien sans grande expression. Dis moi ce qui te pèse, Sol... T'as pas à te refermer sur toi avec moi. On a dépassé ce stade depuis longtemps... Oui, tu peux être froid, tu peux être distant, tu peux être si peu expressif et aussi si maladroit de part ton silence que cela a joué dans notre relation également. Mais j'ai vu aussi ce soleil qui brille en toi, ces sourires sincères que tu as pu me partager, et cette lueur de lâcher prise que j'ai déjà lu dans tes yeux. Je connais ton potentiel, laisse moi le titiller encore et toujours. Et tu trouveras la paix un jour.

L’esprit bien trop chargé ces derniers temps, et cette séparation que je viens de causer. Parce que je sais que c’est de ma faute, c’est moi qui ait fais comprendre à Carla que c’était fini. Parce que je suis un petit con, que je suis bien trop impulsif pour me taire et réfléchir. Savoir qu’elle voulait voir d’autres hommes parce que je ne voulais pas faire de mal au bébé qu’elle porte, savoir qu’elle a pensé ne serait-ce que deux secondes qu’un autre homme pourrait la touche m’a vraiment foutu en rogne, et il fallait que je fasse quelque chose. Était-ce la meilleure solution ? Non je ne pense pas mais c’est sorti tout seul et maintenant, me voilà, face à toi, en train de m’apitoyer sur mon sort. qu’est-ce qu’il se passe pour que tu sois comme çà ? déjà en train de changer de sujet, ne pas vouloir parler de moi, tu me connais, je préfère écouter les gens que de devoir parler de moi. raconte moi au lieu de boire à en perdre la mémoire demain matin je dis çà, mais j’aurais bien pris plusieurs verres. Préférant tout de même me contenir et ne commencer que par un verre, je n’ai pas envie de faire n’importe quoi. Levant les yeux au ciel, je vais pas commencer à faire genre çà va, sinon je le sais, tu pourrais devenir violent. Soupirant, je prends une gorgée de ma bière j’ai pas envie de me recevoir une bière dans la tronche, on va pas exploser une si jolie tronche, tu veux bien, du coup, je vais te dire que ouais, çà va pas fort, mais que j’ai pas vraiment envie de parler de çà en premier tu vois peut-être qu’après avoir parler de tes soucis à toi, je finirai par te dire ce qu’il se passe dans ma vie en ce moment. Je déteste être comme çà, je déteste cette situation, parce que je suis du genre à me renfermer sur moi même, mais j’ai accepté de venir te retrouver pour boire une bière et pour me détendre, et je sais que je vais finir par avoir le droit à interrogatoire si je ne dis pas grand chose. tu sais que je suis pas du genre à dire quoique ce soit je suis froid, je suis fermé, je montre plus du tout les sentiments que je peux avoir parce que çà m’a porté préjudice auparavant et j’ai plus envie de çà. Carla et moi on a rompu, elle est enceinte, je voulais pas faire de trucs chelous au bébé tu vois, et elle m’a dit qu’elle allait aller voir ailleurs si je continuais… et j’ai fini par câbler. C’est tout moi quoi.