" Et à la semaine prochaine " Que je souffle à mon groupe d'étudiants. La semaine à Harvard est terminée et je soupire de savoir la tonne de travail qui m'occupe à la maison. Entre ce qu'il se passe avec Dimitri, la préparation du prochaine cours, Thaïs, Eden et ma vie privée, j'ai l'impression de ne pas m'en sortir. Je remballe mon mac dans ma sacoche, prends soin de ranger les câbles adaptateurs dans leur pochette et regarde mon téléphone. Mes sourcils se froncent en voyant le numéro de Jem sur mon écran. J'ouvre son message et reconnais rapidement le Copley, enfin sa piscine. Mais qu'est-ce qu'il fait chez moi ? J'espère intérieurement qu'il n'est pas là parce que Wesley l'a invité au Gala des cent ans de PI ou je risque de m'énerver bien comme il faut. Un retour par ma chambre, je dépose mes affaires et passe ma main dans mes cheveux pour regonfler ces derniers. Je regarde mon reflet dans le miroir et file vers le restaurant de l'hôtel, mitigée sur le fait que Jeremiah soit là. Pourtant, dans l'ascenseur, j'ai un large sourire sur le visage et trépigne presque d'impatience. Mon téléphone en mains, je verrouille et déverrouille mon écran pour voir si je n'ai pas rêvé. Lorsque j'arrive, je demande une table pour deux dans un endroit calme de la salle et attends mon petit anglais préféré devant les portes du restaurant. On va éviter d'attendre l'un sur l'autre à deux endroits différents. Et quand je le vois arriver au loin, mon sourire s'élargit. Si je suis partagée entre l'idée de lui sauter dans les bras et celle de le laisser venir à moi, après quelques secondes, j'avance de quelques pas vers lui et le prends dans mes bras. Un câlin d'Ella, c'est le début de la fin. " Qu'est-ce que tu fiches là ? " Que je souffle, mon visage enfoui dans son cou. J'embrasse sa joue et me recule rapidement. " Je te manquais déjà ? " Que je demande avec un large sourire. Forcément c'est ça. Qui peut vivre sans Ella Marriott-Wildingham après tout ? Une fois qu'on m'a dans sa vie, c'est difficile de faire sans.

@Jeremiah Hanwell

@Ella Marriott-W. - 9 septembre 2020.

Honnêtement, je suis surpris que Dim n'ai pas craché le morceau plus tôt sur mon arrivée. Ces deux là sont proches et ça aurait pu lui échapper facilement, quand bien même je ne me targue pas d'être le centre de leur conversation. Surpris que Ella soit disponible dans les cinq minutes à venir quand je lui apprends ma présence, j'abandonne ma contemplation à la piscine et enfile mon peignoir de bain afin de prendre la direction de la 406. Je ne fais pas dans la démesure, Ella m'ayant vu dans toutes les tenues possibles et imaginables. Un pantalon de costume noir, une chemise, juste de quoi ne pas faire tâche au resto du Copley. On a beau se connaître par coeur et ce depuis des années, je ne me l'explique pas mais j'appréhende un peu notre rencontre. C'est peut-être ce qui m'a poussé à ne pas la prévenir, en avance, de mon arrivée à Boston. Il fut un temps où Ella Marriott était un livre ouvert. Avec les années, j'ai appris à déchiffrer ses expressions, ses émotions, et la reine de glace a fondu comme neige au soleil, devenant celle que je considère comme l'une de mes meilleures amies. Mais récemment ? J'ai l'impression de ne plus rien connaître d'elle, ignorant si c'est la distance et nos vies respectives qui me donne ce sentiment ou si la jeune femme change. Trop si vous voulez mon avis. Dans l'ascenseur, mes doigts glissent, songeur, sur ma barbe naissante, que je n'ai pas pris la peine de raser - c'est les vacances, après tout! Je me dirige vers le restaurant et mon visage s'illumine à l'instant ou mon regard croise le sien. Son sourire efface mes craintes alors que j'avance dans sa direction, ouvrant les bras dés qu'elle est à ma hauteur pour pouvoir l'y serrer. « T’as encore oublié la date du mariage? Tu me brises le coeur jour après jour. » Je souffle théâtralement, avant de m'écarter pour écraser un baiser en retour sur sa joue. « Tu me manques au quotidien, Ella Marriott. » Je dit, toujours aussi théatrale, bien qu'il y a un fond de vérité. Peut-être pas au quotidien, j'exagère. Mais avoir Ella dans les parages, à Londres, me manque sincèrement. Aujourd'hui elle aura droit à celui qui en fait des tonnes. Demain, ce sera peut-être l'indifférence, tout dépendra du pied duquel je me lève. Les deux sont faux, sur-joué, mais la jeune femme me connait assez pour deviner le fin fond de ma pensée sans que je ne l'évoque. « C’est une longue histoire. Et puis, Boston est toujours une bonne idée. » Un des seuls endroits, hors Europe, ou je peux atterrir et me sentir à la maison, d'une certaine façon. Je lui adresse un sourire franc et glisse ma main dans son dos tout en la suivant à la table qui nous est réservée. « Comment tu vas? »

Quand j'entends sa voix et sens son corps dans mes bras, je souris. Il m'a manqué. Bon sang qu'il m'a manqué. Et son accent anglais me rappelle la maison, ma maison qui me manque tant. Nous devions aller à Londres la semaine prochaine avec Wesley mais avec la rupture, nos plans sont tombés à l'eau. Et ce grand con de Jeremiah ramène la maison à moi. Ah, je pourrais rester là, serrée dans ses bras pendant des heures. " Notre mariage ? Attends, on a déjà 50 ans ? " Que je demande en le regardant droit dans les yeux, ce regard joueur et taquin que j'ai toujours avec lui. Nous n'avons jamais fais cette promesse débile du "si à 50 ans, on est toujours seuls, on se marie" tout simplement parce que le mariage pour moi est loin d'être le but ultime de ma vie. Loin de là. Et ses mots touchent mon coeur. Je connais assez Jeremiah pour savoir que ses mots sont peut-être poussés mais pas tant que ça. En tout cas, j'ai l'impression d'être un peu perdu, prise de cours et folle. Les heures de sommeil se font-elles remarquées de la sorte ? " N'importe quelle ville dans laquelle je suis est toujours une bonne idée " Que je souffle avec un sourire sur le visage. Et si j'avais peur que mon cerveau me joue des tours, quand il pose sa main dans mon dos, le contact chaud que cela procure à mon corps me fait bien comprendre qu'il est là. Et quand une serveuse nous guide à notre table et nous salue tous les deux, je sais que ce n'est pas une tumeur au cerveau qui l'imagine, il est vraiment là. " Fatiguée. J'enseigne à Harvard alors ça rajoute un peu de travail sur mon assiette et j'ai postulé pour être vice présidente de l'association des citoyens de la ville " Que je dis rapidement. Et il sait que cela veut dire une chose : une Ella qui se rajoute des tâches diverses et variées est une Ella qui essaye de survivre avec la réalité de sa situation. Quand je me lance à corps et âmes dans Marriott, tout est normal. Quand j'ajoute des missions qui ne seront pas bénéfiques à mon entreprise et sont chronophage, c'est pour éviter de réfléchir. Assise sur ma chaise, je déplie ma serviette et la pose sur mes genoux. " Et toi, comment vas-tu ? Tout le monde va bien à Londres ? " Tous nos amis communs, la bande. Je ne les ai pas vu depuis mai et n'ai pas eu de nouvelles de leurs parts depuis cette soirée au Club à Soho. Les cartes sont présentées et je pose la mienne sur mon assiette. Je sais déjà ce que je vais faire. " Merci de faire venir Greg pour le service " Que je souffle avant de me tourner vers Jem, ne portant plus aucun intérêt à la serveuse qui va faire venir mon majordome. Il n'y a qu'en lui que j'ai réellement confiance. " Tu veux boire quoi ? " Que je demande. Moi, mon habituel. Du champagne.

Je ne sais pas vraiment ce que j'attends de ce voyage, de nos retrouvailles, mais une chose est certaine, je suis heureux de la serrer dans mes bras. Ces dix dernières années, Ella a été un pilier dans ma vie et son absence se ressent chaque jour, à Londres. « Non, mais j'en ai parfois l'impression. » Je dis dans un sourire, m'étirant le dos comme si ce dernier souffrait de mon (jeune) âge. « Londres plus que Boston, mais je ne peux qu'approuver. » Dis-je, ne pouvant m'empêcher de lui rappeler qu'il y a mieux que Boston ici bas. Certaines personnes rêvent toutes leur vie de s'évader, bien loin du lieu qui les a vu naître, afin de vivre une grande ouverture et trouver "mieux". C'est apparement humain de chercher bonheur ailleurs... Mais pour ma part, Londres est et restera toujours mon premier amour. Je ne m'en suis jamais éloigné pour plus d'un mois consécutif et si j'ignore pour combien de temps je me trouve sur le sol américain, je prévois bien de retrouver assez rapidement mon appartement à Hampstead. La seule personne qui pourrait me faire changer d'avis à ce sujet se trouve face à moi, et je suis bien conscient qu'il y a peu (pour ne pas dire pas) de chance pour que le vent tourne en ma faveur. Je m'installe à table, remercie d'un signe de tête la serveuse qui nous as installé avant de reporter mon attention sur la propriétaire des lieux. « Toujours plus, Ella. Tu penses à reprendre ton souffle dans tout ça? » Et je ne fais pas allusion à sa rupture, mais bien de manière générale. Entre sa dévotion pour ses proches et celle pour sa carrière, Ella ne s'arrête jamais... Et dans la situation actuelle, ça lui ferait surement le plus grand bien de prendre un peu de temps pour elle. Se poser, accepter les derniers événements, plutôt que de plonger la tête dans deux nouveaux projets et faire l'autruche sur sa vie privée. « Je ne savais pas que les citoyens de Boston t'importaient à ce point !  » J'ajoute, ne voyant pas ce que ça peut lui apporter de consacrer du temps à ce genre d'association - je pensais d'ailleurs que ça n'existait que dans les films, ces conneries. Je jette un coup d'oeil au menu alors qu'elle me retourne la question. « La routine, ou presque. Lewis t'embrasse. » Je viens à peine de la retrouver, il sera encore temps d'aborder ma relation avec mon paternel plus tard. « Ali va être papa, je ne sais plus si je t'en ai parlé. C'est un peu précipité mais il a l'air assez heureux de la nouvelle. A part ça, rien de spécial à signaler. » Que le plus fêtard / queutard de la bande soit casé et prêt à devenir père, c'est déjà énorme. La question est combien de temps il va resté perché sur son nuage, lui qui était en couple avec une autre il y a trois mois à peine. J'arque un sourcil lorsqu'elle requiert le service d'une personne en particulier, puis referme le menu afin que ce fameux "Greg" sache que je suis moi aussi prêt à commander. « Ça dépend, tu as encore beaucoup de boulot cette aprem' ou on peut s'autoriser une coupe? » C'est déjà bien qu'elle se soit libérée pour le repas, je m'attends à ce qu'elle m'abandonne dés ce dernier terminé.

L'avoir ici, à Boston, est un cadeau du ciel. Je ne peux pas le nier. Je suis tellement heureuse qu'il soit là. Un peu de lumière et de gaieté dans ma triste vie qui consiste entre voiture-boulot-dodo ces derniers jours. Le couple que forme mon frère et Thelio a été mis sur le devant de la scène et depuis, je m'attèle à une réponse médiatique qui me prend des heures et des heures de question. J'ai envie d'étriper tous ces gens qui vont contre mon frère, qui critiquent son orientation sexuelle. Ce qu'il fait au lit n'influence pas ce qu'il est et la manière dont il gère l'entreprise. Enfin, je vais pouvoir mettre cela de côté pendant le temps du repas et pour la moitié de la journée. Parce que je vais kidnapper Jeremiah pour quelques heures. Je ne sais même pas combien de temps il reste. Alors profitons. Je ne veux même pas mettre de date de péremption sur nos retrouvailles et son séjour à Boston. Qui vivra verra. " Tu sais ce qu'on dit, non ? On dormira quand on sera mort " Que je souffle en haussant les épaules. " Et puis, le poste de vice présidente, je ne l'ai pas encore " Je ne sais même pas qui sont mes concurrents, c'est pour dire. Je n'ai même pas le temps de me renseigner et cela ne me ressemble pas. Il faudra que je prenne le temps histoire de voir si j'ai mes chances ou non. Je ne fais pas l'unanimité ici mais c'est eux qui perdent et non moi. " Ce n'est pas eux qui m'intéressent. Mais plutôt le poste. Et ça fera toujours une bonne publicité pour le groupe et l'hôtel " Parce qu'il sera facile d'organiser les réunions ici, les votes et les différentes d'assemblées générales. J'ai toujours un agenda en tête et ne fais rien sans gagner en face, Jem devrait le savoir. Et avec moi, c'est le Groupe avant tout. Je le regarde, l'écoute et manque de m'étouffer avec ma salive quand j'apprends la bonne (?) nouvelle pour Ali. Lui, papa ? Mon dieu. C'est comme si je venais à tomber enceinte, l'horreur ultime. Je crois qu'il n'y aurait pas pire nouvelle que ça, un putain de squatteur dans mon utérus. Et rien que d'y penser j'ai un frisson. " Et ta mère, comment va-t-elle ? " Parce qu'elle est plus importante pour mon ami que n'importe quelle information qu'il vient de partager avec moi. Un vrai petit fils à maman, comme j'étais la petite fille à son papa. " Tu seras ma journée de repos dans cette semaine de folie alors on peut s'autoriser la bouteille complète " Que je lance en regardant la serveuse de loin et lui fait signer de venir. Greg ne devrait pas tarder mais pour le moment, il n'y a que ça sous la main. " Une bouteille de mon champagne préféré " Et fissa. Sauf qu'elle me regarde avec un regard interrogateur et je soupire. " Demande à Greg quand il arrive " Et comme toute à l'heure, elle perd le peu d'intérêt que je lui ai accordé jusque là. " Madame Marriott-Wildingham, Greg est en vacances " Et c'est là que je me rends compte que je vis ma vie tellement vite que je ne me souviens même pas de l'absence de mon employé préféré. " Et bien son remplaçant ! " Sers toi de ton cerveau, crétine. C'est au bout de mes lèvres mais je me retiens. Pas en public. Ça ne le fait pas. Alors je me tourne vers Jeremiah, retrouvant instantanément mon calme. " Non, sérieusement, je suis toute à toi aujourd'hui. Je veux profiter de ta venue, ne sachant pas jusqu'à quand tu seras là. Tu es le bienvenue ici en tout cas, aussi longtemps que tu le souhaites " Et il va falloir que je prévienne la responsable des hébergements de l'hôtel de garder sa chambre aussi longtemps qu'il le souhaite.

C’est plus fort que moi, mon coeur s’emballe doucement au sourire qui se dessine sur les lèvres d’Ella. Un regard dans sa direction suffit à me rassurer sur ma décision de sauter dans un avion et venir la retrouver, laissant derrière moi les problèmes qui m’accablent depuis quelques jours. Au fond, ils seront toujours là demain, presser le bouton pause ne peut m’être que bénéfique - j’aimerais d’ailleurs que ma meilleure amie le comprenne, elle aussi. « Exactement. » J’approuve, ignorant ce que c’est de faire des nuits de plus de six heures depuis aussi longtemps que je m’en souvienne. Il n’empêche que ralentir lui ferait le plus grand bien, sans forcément plonger dans les bras de Morphée. Une petite voix me murmure qu’elle peut toujours plonger dans les miens, mais je l’ignore. L’intention derrière ce voyage est de venir la soutenir moralement après cette rupture, et non d’essayer de gagner du terrain. Après dix années à essayer sans succès, je sais au fond de moi que c’est peine perdue… Le problème est que abandonner ne fait pas partie de mon vocabulaire et qu’à chacun de ses sourires, je plonge un peu plus. Pathétique, mais vrai. « Mais je doute que qui que ce soit t’arrive à la cheville. » Si elle n’a pas encore ce poste, nous savons tous les deux que ce n’est qu’une question de temps. Ce que Ella Marriott veut, Ella Marriott obtient. Je hoche la tête lorsqu’elle me dit que ça ne peut être que bénéfique au groupe. Certes, mais est-ce que ça l’est pour elle, qui ne sait ce que c’est de pousser la pédale de frein de temps en temps ? Je ne fais aucun commentaire, conservant pour moi le fond de ma pensée - elle ne ferait que m’envoyer balader si je partageais mes songes. Un sourire naît sur mes lèvres lorsqu’on en vient à ma mère. La femme de ma vie. « Ça va. Avec le retrait de mon grand-père au conseil d’administration, on est tous un peu sous pression en ce moment mais tu la connais. » Aucun signe de faiblesse, Jane Williams ne sait que sourire et a toujours le contrôle quel que soit la situation. Je ne peux m’empêcher de me demander comment elle déciderait de gérer le petit chantage de mon père… Peut-être que la conserver de cette histoire est ma première erreur. Aucun doute qu’elle saurait comment le remettre à sa place mais c’est plus fort que moi, je ne souhaite pas l’y mêler et lui enlever la fierté d’avoir eut son fils sur la troisième place du podium en fin de saison. « Va pour la bouteille! » Dis-je, retrouvant de suite mon engouement lorsqu’elle glisse avoir plus de temps que je ne pensais à m’accorder. Une journée à l’ancienne. Un sourire en coin prend place sur mes lèvres lorsqu’elle s’adresse à son employée ; elle ne changera jamais. « Pour être honnête, j’en ai pas la moindre idée. Je me suis dit que quelques jours nous feraient du bien. » Me ferait du bien, c’est certain. « Et si être dans les parages suffit à te faire oublier le boulot quelques heures, j’vais peut-être décider de m’éterniser. » J’ajoute, accompagné d’un clin d’oeil. Ou pas, parce que si je peux travailler de n’importe où, je ne suis pas un friand des rendez-vous d’équipe via zoom et préfère de loin qu’on se retrouve tous dans la même salle. Lorsqu’un jeune homme vient prendre notre commande, je lui demande le filet de saumon et lève ma coupe de champagne dés que nous sommes servi. Un petit ‘à nous’ qui se lit dans mes yeux à défaut d’être sur mes lèvres. « Comment vous gérez cette histoire avec Dim? Il m’a assuré que ça allait mais j’ai lu pas mal de merdes à son sujet. »

Des dizaines d'envies et d'idées en tête, je ne prends jamais le temps de me poser. Appuyer sur pause n'est pas dans mon vocabulaire. Et c'est bien pour cela que j'arrive à m'endormir dès que ma tête se pose sur l'oreiller. Parce que lorsque mes cheveux touchent l'oreiller en soie, c'est qu'il ne reste que cinq à six heures à dormir. Les masques, patchs et le maquillage m'aident à garder bonne mine quand le sommeil se fait minime voire inexistant. " Je n'ai qu'un opposant mais c'est un de trop " J'aime la compétition mais je crois que j'ai eu ma dose ces derniers temps. J'ai juste envie que les choses soient faciles. Mais éprouverais-je le même attrait et la même passion à gérer cette association avec Taylor si ça m'était tombé tout cuit dans la bouche ? Clairement pas. Alors, ainsi soit-il. Il ne reste plus que quelque chose de votes, de toute façon. Des nouvelles de Londres et nous voilà à commander la boisson. Je suis ravie de savoir que tout le monde va bien - si tenté qu'on va bien quand on va avoir un rejeton - et m'inquiète plutôt de la suite de la journée que je lui accorde gracieusement - et parce que j'en ai besoin. Discuter, boire, rire et oublier. " Jem, Jem, Jem… Tu sais que si ça devient un séjour longue durée, j'aurais plus de facilités de reprogrammer. Alors garde moi la surprise " Que je souffle, quelque peu joueuse et espiègle. C'est le seul avec qui j'accepte d'être dans le flou. Tant qu'il passe me dire au revoir avant de filer, ça me va parfaitement. Poisson, légumes et riz commandé, coupes versées, je remercie le remplaçant de mon majordome et porte la coupe à mes lèvres. Je bois une gorgée, laisse le liquide glisser le long de mon oesophage et glisser dans mon estomac vide. Ça brûle très légèrement. Mais ça va. " Il me dit la même chose. Son petit ami a l'air de gérer aussi " Que je souffle. Ils sont soudés et si j'avais peur que les mots de ma mère le déglingue, tout va bien. " Les mots de notre mère l'ont préparé au pire alors là, les avis d'inconnus, il s'en fiche " Enfin, je pense. C'est difficile de savoir avec Dimitri lorsque Thaïs est là. Parce qu'on ne parle pas vraiment de ça devant elle. Et Thelio est là tous les soirs j'ai l'impression alors c'est qu'entre eux, ça roule. " On gère quoi " Et est-ce qu'on en attend moins de la part des Marriott-Wildingham ? Non. Clairement pas.

De discussions en discussions, nous sautons d'un sujet à l'autre et je demande au majordome - qui n'a littéralement rien à faire ici, si ce n'est répondre à tous mes désirs - de nous faire monter une bouteille ainsi que nos desserts. " Allez, montons manger ça sur la terrasse de ma suite " Que je dis en laissant une grosse partie de mon riz sur l'assiette, posant la serviette sur mes couverts. Je me lève et l'attend pour monter. Un petit tour d'ascenseur et nous sommes là. " Bon allez, dis moi, t'es là pour quoi ? Triste qu'on ne vienne pas avec Wesley, comme c'était convenu ? " Que je ris en passant ma carte sur le lecteur. Déverrouillée. La maison. Mon cocon.

« Un peu de compétition ne t’a jamais fait peur. » Et j’ose espérer que c’est toujours pas le cas. Ma Ella aurait-elle changé à ce point ? Impossible. Rendez-moi la version originale tout de suite. Quoi qu’on obtienne dans la vie, c’est toujours bien plus glorifiant lorsqu’on s’est battu pour l’avoir - raison pour laquelle j’ai toujours travaillé d’arrache pied pour en arriver là, quand bien même le poste que j’occupe actuellement aurait tout aussi bien pu me tomber dans la paume de la main juste parce que j’étais ‘le petit fil de’. Au lieu de quoi, j’ai commencé à travailler pour Silverstone avant d’arriver chez Williams, afin de faire mes preuves. Je sais qu’Ella est similaire sur ce point, mais peut-être que la fatigue commence à peser sur son âme. Nous laissons le boulot de côté un petit moment - c’est, après tout, la raison de ma venue à Boston, entre autre - et je souris à la réflexion de l’anglaise. « Dis tout de suite que tu veux que je sois dans un avion dés demain. » Dans ma voix, on pourrait croire que je suis vexé, mais il n’en est rien. Il n’y a qu’à voir son sourire pour savoir que j’ai fait le bon choix en débarquant à l’improviste. « Je devrais repartir d’ici quelques jours. Je sais que ton programme est chargé, mais tu ne vas pas avoir le choix de te libérer, ce serait con que j’ai fait tous ces kilomètres pour un repas… Pense à la planète. » On a toujours le choix et je sais que pour elle, c’est sa carrière. Je ne m’attends pas à ce qu’on passe ces quelques jours ensembles du matin au soir, parce qu’elle a du boulot… et moi aussi, que je le veuille ou non. Il n’empêche que tous les arguments sont bons pour qu’elle s’octroie une petite pause, à commence par les litres de kérosène versés pour moi être là. Quand je peux, j’essaye de prendre des vols commerciaux pour éviter de ruiner le peu de ressources qu’il nous reste, mais autant dire que je n’ai parfois pas d’autres choix que de sauter dans un jet pour être en temps et en heure où je suis attendu. Je lui fais un signe entendu de la tête lorsqu’elle me confirme que Dim va bien, ce qui me rassure définitivement - par message, c’est assez facile de prétendre ne pas être atteint par le venin des autres, mais la réalité est parfois toute autre. Je ne fais aucun commentaire sur sa mère et les mots qu’elle a pu avoir, tant envers Ella que Dim, me passant de lui préciser que je l’ai eut au téléphone il n’y a pas si longtemps et que ma présence ici ne lui est peut-être pas totalement inconnue. Je l’ai poliment envoyé balader, ce qui ne m’a pas empêché de sauté dans un avion au final. « Comme toujours. » Conclus-je lorsqu’elle assure qu’ils gèrent.
Le repas arrive, Ella me met au courant des derniers événements et j’évite soigneusement les raisons de ma présence à Boston… Si je n’ai jamais caché grand chose à ma meilleure amie, je ne suis pas certain d’avoir envie de lui avouer que cette troisième place sur le podium, qui m’a valut un contrat en F2, n’était peut-être pas due à mon talent au volant. C’est con parce que ça ne change rien et qu’elle n’était même pas dans ma vie à l’époque, mais si je parviens à maitriser mon père, ai-je vraiment envie que plusieurs personnes soient au courant de cette affaire? C’est plus une question de fierté que de confiance. J’entre dans sa suite et ne peut m’empêcher de froncer les sourcils à l’évocation de son (ex?) petit-ami. « Si tu savais… » Je pourrais ajouter qu’il me manque chaque jour mais je vais garder mon ironie, d’autant plus que j’ignore encore à quel point il a pu la blesser puisqu’elle garde la tête haute. « Je me suis dit que ça te ferait du bien d’avoir ton meilleur pote pour une chasse au trésor. » Je m’installe sur une chaise et prépare déjà mon bras que je n’ai plus qu’à lever pour me protéger d’une gifle que je vais surement me prendre. « J’ai cru comprendre que ta fierté et ta dignité s’étaient fait la malle main dans la main. » Je dis dans sourire, tentant d’alléger le poids de mes paroles - peut-être que cet air de petit con lui fera passer l’envie de m’en retourner une. C’est bas et mesquin, oui. Mais c’est surtout le fond de ma pensée, ne comprenant comment après le coup que Wes lui a fait, Ella n’a pas complètement coupé les ponts avec lui.

Ça ne me fait pas peur, la compétition. C'est juste que je n'ai pas la tête à ça en ce moment. Entre la bisexualité de mon frère dévoilée aux yeux du public - et les répercussions de cela sur le Groupe - la faculté, ma rupture… Je n'ai plus une seconde à moi. Alors si ça pouvait être facile, ça serait vraiment sympa. Mais j'ai presque peur de ne pas être si heureuse que cela de mon élection si c'est trop facile. À peine contrariante. Je l'écoute et lève les yeux au ciel comme une enfant. Le faux vexé, la fausse énervée. Mon dieu, on fait la paire tous les deux. " Je ne suis pas disponibles les mardi et mercredi matins, le reste est à toi " Que je lance avec un large sourire. Je suis donc à cent pour cent disponibles pour lui puisque nous sommes mercredi aujourd'hui. C'est magique, il est arrivé pile quand il le fallait, en quelque sorte. À croire que quelqu'un lui a dit que c'était le moment parfait pour débarquer et avoir cet anglais anglais qui me chatouille les oreilles. J'ai l'impression d'être à la maison et c'est tellement agréable. La voix de mon meilleur ami est un peu comme mon doudou préféré : rassurant, réconfortant et ça me fait beaucoup de bien.

Et une fois que nous sommes en haut, je suis un peu plus décontractée, n'ayant plus du tout peur que qui que ce soit me voit vraiment comme je me sens ces derniers jours ; un peu vide d'énergie et démoralisée. Putain de relation amoureuse. J'aurais du m'arrêter aux relations purement sexuelles, je gérais si bien depuis toujours. Pourquoi tout compliquer ? C'est la question que je me pose dès que mon cerveau décide de prendre quelques secondes pour lui. Je fronce les sourcils quand il me parle de chasse au trésor. A-t-il eu vent de notre chasse aux trésors avec Wesley ? Celle, où au bout de longues minutes de chasse, je me suis retrouvée à héritier de très -trop- nombreuses choses ? Je le regarde s'asseoir sur la chaise et quand je l'entends me dire qu'il est là pour m'aider à retrouver ma fierté et ma dignité, je le regarde quelques secondes, complètement abasourdie. " De quoi ? " Que je souffle plus pour moi que pour lui. Je le regarde et ma main finit par s'écraser contre sa joue. " T'es pas plutôt venu voir si tu pouvais enfin me mettre dans ton lit à nouveau ? " Que je lâche en le dévisageant, me mettant sur la chaise face à lui. Si c'est l'heure des règlements de compte et des reproches, autant se mettre assise.

Le temps et la distance ont beau être deux facteurs mortels dans toute relation, je suis ravi que ça ne nous aie jamais réellement impacté avec Ella. Est-ce qu'elle me manque à Londres ? Définitivement. Je ne crois pas finir une seule journée sans avoir eut, au minimum, une pensée pour mademoiselle Marriott. Mais lorsque je la retrouve (pas aussi souvent que je ne le voudrais), c'est comme si elle n'était jamais partie. Au delà des heures à se résumer les faits marquants qui n'ont pas déjà été échangés par téléphone. « Je me sens privilégié, je ne sais même pas ce qu'on va pouvoir faire de tout ce temps ! » Que je dis, moqueur, n'étant pas habitué à ce que ma meilleure amie puisse se libérer si facilement. Ce temps, on trouvera toujours comment l'occupé ceci dit. Sa simple présence a toujours eut le don de m'apaiser et même partagé un espace de travail elle, chacun plongé dans nos tâches respectives sans échanger plus d'un mot ou deux de temps en temps me convient.

On arrive à l'étage et je pince les lèvres lorsqu'elle me demande la raison de ma venue. Il y en a deux, mais ce serait se voiler la face de dire que les soucis avec mon père est la principale... J'aurais pu me contenter de monter quelques jours à Oxford, ou descendre sur Monaco, pour réfléchir à cette situation, ce qui m'aurait évité de traverser l'Atlantique. Disons que le timing était au rendez-vous. J'accueille sa gifle en me retenant de sourire pour lui passer l'envie d'équilibrer sur l'autre joue. Je l'ai vu venir avant même d'ouvrir la bouche - et elle est méritée. « Si tu proposes... » Que je souffle en laissant mes lèvres s'étirer dans un sourire en coin. Non, ce n'est pas le but du déplacement mais elle sait autant que moi que je n'ai besoin que d'un geste de sa part pour être à sa merci. Peut-être que ma fierté s'est fait la malle avec la sienne... Si ce n'est que la concernant, la mienne s'est barré il y a une dizaine d'année et a surement perdu le chemin pour renter à la maison. Rien de nouveau, donc. « Mais oublions deux minutes que j'ai toujours voulu être à sa place. » Je n'ai aucun mal à en parler, ce n'est un secret pour personne. « Depuis quand tu laisses quelqu'un te manquer de respect à ce point Ella ? » Ma voix s'adoucit, étant là pour la soutenir et non pour lui claquer les erreurs de Wes au visage. Il n'empêche que sa réaction face à toute cette histoire me laisse pantois et que je ne peux pas me contenter de la regarder souffrir et accepter tout ça.