Le cul sur le sol et les yeux perdus sur les lignes dévorées. Billie, elle aime cette bibliothèque. Enfin, non, cette librairie. Ce lien où elle n’est pas censée faire ça. Poser ses fesses sur le parquet après avoir attrapé un livre, et le lire jusqu’à ce que toi, le mec aux cheveux bouclés, tu débarques en grognant. A chaque fois, je m’exécute avec un fin sourire ; et je reviens. Toujours. Puisque ces livres sont trop chers, puisque mon compte en banque est trop vide, et puisque cette étagère est bien trop garnie pour que je résiste à la tentation. Puis, ton regard réprobateur me fait rire. Même quand j’veux faire les choses bien, je finis par trouver trop de titres attirants, ne pas réussir à choisir, et me dire qu’à cette place-là, bien cachée, tu mettras un peu plus de temps à me trouver. Une heure cette fois, je dirais. Merci aux quelques clients qui ont défilé, et se sont occupés de tes prunelles. Les miennes sont toujours occupées, jusqu’à ce que : "C'est pas une bibliothèque ici, mademoiselle." Toujours partagée entre l’amusement de cette phrase, répétée, toujours sur le même ton, et la frustration de ne pas être arrivée à la fin du livre. « Il me reste un chapitre.. » Les lèvres s’arment d’une moue enfantine, et les jambes n’ont pas l’air d’avoir envie de se déplier. « Et ça a l’air d’être le meilleur. » Le meilleur, c’est toujours celui qu’on a pas encore lu. « Et franchement à part moi, personne s’intéresse à ce bouquin. » Un sombre bouquin d’écologie, qui prenait la poussière. « On peut aussi s'dire que j’lui fais un peu de pub, en le lisant. » Billie, elle tente tout. Et parfois le culot ça marche.