inutile, mal et impuissante. voilà comment je me sens à cet instant, voyant l'homme fort que tu es habituellement, n'être plus que l'ombre de toi même. je voudrais faire plus, je voudrais essuyer ta douleur, calmer ta peine. et pourtant je sais que ce ne serait pas à moi de faire ça, parce que notre relation est bien trop complexe pour que ce soit normal que je me dévoue à ton bien être de la sorte. pourquoi t'es pas avec elle ? celle qui te comble de bonheur dernièrement et que tu as eu la gentillesse de me rappeler lors de certains sms. mais je suis ton amie avant tout. enfin non, je ne sais pas réellement ce que je suis, ce qu'on est. je sais juste que c'est chez moi que tu te trouves et que je me dois de t'aider, d'essayer de te soulager. et puis alors que je me sens plus impuissante que jamais, je vois les larmes couler le long de tes joues. je m'attendais pas à ça. mes mains qui saisissent ton visage.« hey, respire Eli. » je me lève du canapé et je pars te chercher un verre d'eau. je me rassois à côté de toi et je te tends le verre. « si t'arrives pas à parler c'est pas grave. quand t'auras besoin de quelque chose, tu me le dis. » en attendant, je me contente de rester assise à côté de toi, ramenant mes genoux contre ma poitrine, une main sur ton épaule que je caresse doucement. tu n'es pas seul.

 Corps qui trépigne, esprit dans la tourmente et cette enflure de Morphée qui se joue de toi, qui te rejette de son royaume sans aucune douceur, pas même une caresse. Tu te demandes sincèrement pourquoi rien ne peut suivre son cours dans ta vie. Prunelles qui s’ouvrent, respiration saccadé, corps brulant, trop cuisant même pour cette chemise qui t'entrave. Long soupir qui s’extirpe de tes lèvres alors que tu t'acceptes ce verre d'eau qu'elle te tend sans attendre, ça sert à rien d’attendre tu sais déjà que ta nuit est terminé, bouteille qui te fait de l'oeil. ultime larme qui s’écoule le long de ta joue alors que tu prends ton téléphone pour consulter tes messages. Mine enfariné, grognon, tourmenté, rien de bien glorieux, cheveux en bataille et mèches pendantes devant tes yeux, la grande forme. « Je suis pas d'humeur ce soir, Crystal. Je rentre directement à la maison, je t'aime. » Mots tapés et envoyé directement, le destinataire ne dort sûrement pas et puis au pire, ce n'est pas avec ce genre de chose que tu l'as sortirais de son lit, c’est pas la première et sûrement pas la dernière fois que tu essayais. J'ai revu mon ex-femme aujourd'hui. Semblerait-il qu'elle ait refait sa vie.   Flot incontrôlable de mots, ca déferle sans que tu ne puisses en saisir la moindre intention. Sans que tu puisses t'en empêcher, il faut que tu en parles sans quoi tu risques d'en perdre la raison Elijah.

j'essaie d'être une bonne amie, une épaule sur laquelle tu peux te reposer. je voudrais faire plus mais t'es en état catatonique. tu ne réponds pas, tu fixes le mur face à toi. je n'imagine pas tout ce qui doit te passer par la tête à cet instant. j'avais du boulot ce soir, mais ça peut attendre, tout peut attendre quand je vois à quel point t'as l'air de perdre les pédales. je te caresse l'épaule au moment où tu me sors ta bombe. je m'arrête net, geste qui se fige, comme le temps. il me faut quelques secondes pour avoir l'impression que le temps s'est remis en route. « attends quoi ? » tu vois des fantômes maintenant ? tu m'inquiètes vraiment.. « c'est pas possible Eli, ta .. ta femme est décédée. » je me souviens quand tu m'as parlé de ça. moment de confidence ultime entre nous, moment où on a baissé nos gardes, posé les armes et osé poser des mots sur nos vies. alors forcément, quand tu me dis que ta femme est morte et que là tu l'a revu je comprends pas.

Installés dans le canapé, tes yeux sont rivés sur ce qui t’entoure. ils ne les quittent pas. La tranquillité de l'appartement, où les affaires d’Arizona étaient maintenant presque toutes là. Cette même quiétude qui fait écho à la facette tempétueuse qui s’agite en toi  « Je sais. Je m'efforce de me dire la même chose depuis que je l’ai croisé. » Et silencieusement tu te remets à cogiter. Les sens en alertes, le sang qui ne fait plus qu’un tour - qui se mêle à l’alcool à son tour. Tu ne sais décidément plus ou te mettre, hoche la tête comme un enfant. Comme si tu acquiesçais au moindre de ses mots. Bien sur que ca parait absurde. Bien sur que tu sais ta femme décédée ; tu étais là à ses obsèques. Tu as fais face (lamentablement) à sa famille et toutes les médisances qu’ils ont proférés à ton encontre, toi le mari absent.  Alors oui, Elijah tu peux soupirer doucement, te tournant vers le plafond. Ne sentant que cette main chaleureuse qui glisse sur ton épaule - geste affectueux. « Mais la vérité est là. Laura est vivante. Je l’ai vu de mes propres yeux. Je l’ai touché, l’ai senti contre moi. » lèvres tremblantes ; accablante vérité. qu’avais-tu donc fait pour qu’elle puisse disparaître tant de temps ?