si demain le monde devenait à l’envers ça t’étonnerais même pas, ça serait qu’la suite logique des événements. Déjà que y’a plus de saisons, la fonte des neiges, Trump président ... l’monde va mal. Et ça s’améliore pas en fait, tu fais rien pour lutter contre ça. T’y participes dawie, tu ruines l’équilibre si fragile d’la terre. Et l’pire dans tout ça, c’est que ça t’indiffère totalement. T’es fou, pas comme d’habitude, là on pourrait te diagnostiquer sans soucis et te faire enfermer. T’as négocié avec un collègue pour qu’il prenne ta place pour le service du soir, t’as dis qu’tu te sentais pas bien depuis l’matin et qu’il valait mieux qu’tu rentres chez toi. En soit ... c’est pas faux, tu vas bien chez toi, puis ailleurs après ? Possible qu’elle bluffe la roxane, qu’elle te teste pour voir jusqu’où ta loyauté va, savoir si tu étais sincère cette nuit où tu lui as fait cette demande improbable. Si tout l’monde pense pareil ses proches ont du la prévenir, la mettre en garde, tenter de la raisonner comme avec toi. L’soutien il avait été maigre et tu comprends, parce qu’on parle de roxane nesbitt et dawie sears. Les deux côtés d’une pièce, pile et face. Le pire cheval de course sur lequel parier si on vous donnait, encore plus si ils connaissaient la véritable histoire de stratégie que c’tait à l’origine. Mais toi dawie, tu restes le même, fidèle à ton caractère de feu et tes pulsions. Un animal sauvage. Jamais il a été aussi rapide ce trajet entre Harbor area et city center. Tu fixes l’heure sur le cadran, les mains qui sont crispées au volant comme si ta vie en dépendait. Presque hein, haha.  Voiture que tu gares approximativement, tu cherches ton chemin parce que t’as jamais mis les pieds ici. j’suis là ! cri poussé en même temps qu’la porte quand tu te jettes à l’intérieur, les mains sur les genoux pour reprendre ta respiration. dix-huit heure vingt-neuf et quarante secondes. tu soupires en te laissant tomber contre la porte, t’en peux plus, ton front qui est perlé d’sueur avec les mèches qui s’y collent. putain. tu passes ta main dans tes cheveux en regardant roxane debout, elle finira vraiment pas te tuer.

T’as l’air d’un mec qui vient d’se faire tirer sa caisse là, l’souffle court et le regard hagard. Tu t’attends à ce que la sécurité te saute dessus et te maîtrise avant d’te renvoyer dehors. T’as aucune classe dawie pour un mec qui est à la mairie. Alors ouais t’as ton costume de travail, tout noir et simple, mais avec des taches de javel et d’autres dont tu connais pas l’origine. Ton noeud papillon il est de travers après ta course et tu vas pas vérifier mais ouais, on a bien une évacuation d’eau au niveau des aisselles. Ça a aucune importance quand tes yeux croisent les siens. Ça tape fort dans tout ton corps, t’as les mêmes sensations qu’après un saut en parachute, ok t’en as jamais fait mais t’imagines que ça y ressemble. T’as les paupières qui se baissent quand sa main vient trouver ton visage. bah oui jsuis venu. ça sonne comme une évidence, si tu lui avais demandé de t’épouser c’était pas daté, aujourd’hui ou dans quinze ans, tu serais venu. Tu tousses un peu, faut pas cracher ses poumons dans une mairie c’est pas l’plus conseillé. deux minutes juste, j’crois que j’vais vomir. la prestance et le charisme c’est sur côté, toi t’es dans l’vrai. Tu respires profondément avant de te relever, normalement ça tourne pas aussi vite autour de toi. mais roxane, tu pleures ? et rien qu’ça avec ses mots ça te force le sourire pendant que tes doigts passent sur ses joues pour essuyer ce phénomène que tu pensais ne jamais voir. ça détonne, l’calme de son visage de poupée avec les larmes qui en découlent, puis toi et cette dégaine de barista d’un vieux pub. j’ai pas l’temps de me doucher ou d’me changer hein ? question con parce que dans tous les cas t’as pas pris d’affaires, mais faut bien détendre l’atmosphère là, vous êtes deux gamins en plein rêve.

avoir la tête à l'envers pendant une soirée c'est une chose, mais là quand c'est roxane qui t'la retourne on parle pas du même effet. t'es clairement proche d'te coucher par terre en boule jusqu'à ce que ça passe. trop chaud, les vêtements qui collent à ta peau, plus jamais faire une course avec l'uniforme du restaurant, c'est nul. t'aurais envie d'la taquiner, faire semblant de rendre ton déjeuner, mais tu vas t'retenir pour aujourd'hui, l'occasion est pas bien choisi. parce qu'elle pleure ta roxane, c'est pas ses yeux qui brillent à cause d'une colère qui vient d'la faire se déchaîner. t'avais eu aucun doute d'sa sincérité jusqu'à présent, et même si ç'avait été l'cas, ça c'tait la preuve ultime qu'elle y tenait à faire ça. si t'avais pas eu la réaction que t'attendais quand t'avais fait ta pseudo demande l'autre nuit, là c'tait bien plus. t'as raison roxane, ça doit être d'la poussière. elle se laisse jamais déstabiliser la reine nesbitt, même accablée par les preuves elle niera, et toi ça t'tire juste la bouche en un sourire tendre. tu voyais autre chose pour la cérémonie, un truc énorme, trop grand pour toi, impressionnant, la moitié d'la ville sur son trente et un endroit incroyable et roxane dans une robe digne d'un défilé d'mode. pourtant rien de tout ça, juste vous deux, tout ce qui est l'plus important tout compte fait. tu t'saisis de la bague pour la mettre dans ta poche, l'instant d'après c'est comme si tu venais d'être foudroyé. j'ai- tu tapes sur ton pantalon et ta chemise, l'regard dans l'vide. j'ai pas la mienne. parce qu'avec l'entraînement et la plonge que t'étais censé faire ce soir t'avais pas intérêt à la porter alors tu l'avais laissé quelque part, en sécurité, mais c'tait sans compter sur ta mémoire à court terme. t'es bloqué, l'cerveau qui fume comme une locomotive. j'reviens vite, ok ? de toute façon d'accord ou pas, tu dois la retrouver et t'as déjà fait demi-tour pour retourner à ta voiture. quel con, fallait bien qu'toublies un truc mais t'avais prévu l'coup faut croire, l'dawie du matin il l'avait rangé dans sa boite dans ton sac. tu reviens en trombe, décidément t'auras jamais l'temps de sécher avec tes sprints infernaux. la bague fièrement dans la paume de ta main tu la lui donnes. eh, la frayeur hein. tu plaisantes à moitié, mais t'sais que roxane elle te l'aurait jamais pardonner. j'ai ça pour toi aussi, j'sais pas si t'avais prévu quelque chose. de ton autre main tu sors d'ton dos un mini-bouquet, pas quelque chose d'impressionnant avec des millions d'fleurs, mais un que t'avais trouvé mignon, c'est tout.

tu t’apprêtes vraiment à épouser une fille qui passe des larmes aux menaces de mort ? Ouais, c’est bien ça, et t’en as bien conscience. Quel regret ? T’sais dans quoi tu t’embarques, ça fait sept mois que tu subis ses foudres alors un peu plus ou un peu moins ça va pas changer ta décision. Au contraire ça te rassure, roxane elle reste la même et ses tentatives d’intimidation en dehors de te rappeler à quel point elle peut t’amuser, ça fait pas plus. Peut être que les gens présents autour de vous ils sont outrés d’entendre un couple prochainement marié s’parle, mais c’est la routine. gardes tes mots doux pour quand on échangera les vœux roro. clin d’œil avant d’te faire tirer comme un enfant par sa mère vers votre destin. Dingue non ? D’se dire que ta journée a commencé banalement, t’as joué au foot, t’as bossé et l’soir même tu vas te marier. Si ça c’est pas un couple qui rajoute du piment j’sais pas comment dire autrement. j’ai juste super envie d’courir aux toilettes mais ça va autrement. parce que t’es pressé par l’temps depuis qu’elle t’a posé cet ultimatum. T’sais que c’était pas ça sa question, alors tu serres tes doigts autour des siens en te penchant vers elle. la seule raison qui m’ferait fuir ça serait pour te courir après. et tu l’ferais s’il le fallait, comme en plein match tu serais derrière elle à pas la lâcher. Les couloirs qui se ressemblent et les pièces aussi, tu sens ton coeur qui danse un peu plus quand tu penses que vous arrivez à la bonne porte, jusqu’à ce que ça soit le cas. t’es ... prête ? bah ouais debile autrement elle serait pas là, mais là vous êtes littéralement à un pas d’sceller votre sort à tous les deux. Tu t’en fous maintenant d’avoir les cheveux mal coiffés, tes mains qui sont moites au point d’en échapper une plaque de beurre ou encore ton ventre qui s’tord dans tous les sens. T’as pas peur dawie, t’as jamais peur et c’est pas dans l’immédiat que ça va arriver. T’es excité, comme un cheval de course dans son starting-block qui attend le coup de sifflet pour s’élancer tête baissée vers la victoire. Parce que roxane c’est ta plus belle victoire, avoir réussi à t’frayer un chemin jusqu’à son coeur et l’avoir remporté, c’était inédit. Alors oui dawie aujourd’hui tu t’sens grandi, les yeux plein d’malice qui sont plongés dans les siens alors que tu tiens fermement sa main pour partager votre courage et surtout ce coeur qui bat à tout rompre, pas par crainte, mais par amour pour elle.

depuis le début t'as vraiment peu penser aux autres, en dehors de ceux qui sont prévenus parce que roxane avait déjà fait la grande annonce à ses followers. toi t'es resté sobre, le strict minimum, mais t'avais rien dit à ta mère encore. t'allais passer pour quoi ? en l'espace de deux semaines vous vivez ensemble, tu la demandes en fiançailles, elle vous avance le mariage. bienvenue dans l'monde de rowie où la logique n'a aucun charme et est punissable même. tu vois pas plus loin qu'le bout de ton nez et à présent ça s'arrête à roxane, la seule que t'as jamais eu dans la tête et la peau. t'assumes tes responsabilités, la main qui se saisit du stylo une fois qu'on t'a expliqué où et quoi écrire, les multiples pages qui défilent sous ta signature et la date que tu inscris inlassablement. t'as dû lâcher sa main, mais t'aurais aimé la lui tenir quand tu faisais ça, lui montrer que vous étiez ensemble. tu vois flou à force de recopier la même chose, à moins que l'émotion te submerge petit à petit aussi ? Dernières lettres à apposer et c'est fait. tu tournes la tête vers roxane qui ressemble à une sainte les yeux fermés, elle regrette déjà ? discrètement tu viens lui toucher le bras pour la rassurer, t'es toujours là. procédons aux voeux si vous le voulez bien ? monsieur ? t'sais que c'est pas l'église et qu'avec le retard que vous avez, y'a pas l'temps pour vos beaux discours tout mielleux, va falloir que tu te réserves pour l'after. tu relèves la tête vers le maire, la bague de roxane qui tourne entre tes doigts. monsieur dawie sears, consentez-vous à prendre pour épouse mademoiselle roxane sears ici présente ? tu pourrais avoir peur qu'une boule te bloque la gorge, que le vomis en suspens se décide à venir s'étaler sur les chaussures des gens autour de toi ou même que tes jambes faillissent sous ton poids. Oui je le veux. t'hésites pas une seule seconde, il a à peine fini sa phrase que tu renchéris, tes yeux se portant immédiatement sur la principale concernée, ton visage plus sérieux que jamais. t'es pas fou dawie, t'es décidé et ça depuis le moment où pendant la nuit tu lui avais exposé ton idée farfelue, immature, déjantée, à ton image. tu le veux oui, là, tout de suite, maintenant, t'as envie d'la secouer pour qu'elle réponde aussi au plus vite à la question qui va lui être retournée dans quelques secondes.