o1. palerme, capitale de l'île sicilienne et paysage de ses premiers souffles. on la baptise lior pour l'orginalité, ana-sofía pour les racines. prénom emprunté à sa grand-mère maternelle. le décor est implanté, la gamine est plantée entre les murs colorés de l'italie. ça chante dans les ruelles pour couvrir les moteurs des vespa, ça berce l'unique héritière. là-bas, on parle avec les mains et on vit avec le cœur. le train de vie est modeste, mais la vie est belle. o2. mais la beauté est éphémère et lior l'apprend à deux ans quand mamma s'éteint et que papà est en colère. en colère contre le monde, mais le monde n'est pas là alors c'est sur elle que ça tombera. ça chante plus dans les impasses, les mains ne racontent plus rien et les cœurs se calcinent, ce n'sont plus les pneus des scooters qui fument, c'est eux qui sentent le brûlé. o3. fille d’illusionniste, enfance souillée par les mirages d'un père manipulateur. lior est utilisée, oubliée pour satisfaire ses intérêts à lui. seule face à la puissance du géniteur, malmenée souvent psychologiquement, brusquée physiquement parfois. il fait des promesses, mais il ne les tient pas. il hurle quand elle a raison, il l'enferme dans le noir quand elle ose protester. morsures de cigarettes tatouées sur ses omoplates quand elle ose lever les yeux au ciel. elle y cherchait juste sa mère. 04. c'est dé là que démarre sa soif de défendre, de sauver ceux qui ne comptent pas ou pas assez. l'italienne déverse sa rage dans des cris étouffés, pleure sa douleur dans les plumes de son oreiller. elle se construit une bulle invisible, des murailles invincibles pour pouvoir s'y cacher. elle se fait petite à la maison, elle explose quand elle sort. elle se promet de se sauver, de réussir partout où il la voit échouer. o5. l'hyperactive retient l'énergie, elle se bride face à son père qui ne la connaît pas, qui ne la voit qu'aux travers de ses traits qui ressemblent un peu trop à ceux de sa mère. souvenir douloureux, colère meurtrière. alors, elle encaisse lior, elle se blinde et renforce les parois des murailles. elle s'invente une vie qu'elle ne vivra pas. o6. quinze années siciliennes durant lesquelles elle se plonge dans les cours, repliée sur son lit pour mieux se faire oublier. quand elle en sort c'est pour rejoindre ses amis, famille composée, cousue sur mesure. seul repère dans son néant. mais, il trouve un moyen de le lui arracher, un déménagement soudain. lior ne pleure plus, elle devient raj. elle bouillonne face à sa pile de cartons. traverse l'océan. boston, ville amère. il la déracine la gamine, la prive de ses rayons de soleil. le rêve américain qu'il lui répéte. peut-être, mais ça a jamais été le sien. o7. le caractère s'affirme, la lionne s'émancipe. elle s'accroche à ses rêves, ses convictions et y met toute son énergie, suffisamment pour ne pas avoir une seule seconde de répit. pas une minute pour penser au chaos qui décore ses murs. o8. elle parvient à intégrer la prestigieuse harvard, sourire factice aux lèvres, celui qu'elle porte depuis trop longtemps. l'italienne acharnée est finalement parvenue à le faire mentir. elle le quitte, se sépare enfin du magicien pour réparer ses ailes. vivre la vie qu'on lui a toujours interdit, exploser des émotions qu'elle n'a jamais pu exploitées. elle est libre lior, indomptable. caractérielle sur fond de douceur, refusant de laisser les drames de sa vie la faire glisser dans les abîmes de la noirceur.