Pourtant, il n’avait pas envie d’y aller à cette soirée. Si les fêtes de médecine étaient d’un ennui mortel, il avait été convié à une soirée organisé par un bar non loin de l’université. Et si Victor avait très peu d’amis –volontairement- l’alcool était la seule motivation qui le poussait à sortir de son trou à rat, où sa mère pleurait de n’être qu’une pauvre incomprise, monde qu’elle haïssait autant qu’elle aimait. Il s’était habillé rapidement, un peu comme un adolescent. Rien n’avait moins de valeur à ses yeux que sa santé, et cette soirée, il allait la passer à se défoncer et à boire jusqu’à en vomir. Il entrait alors chez cet ami d’un ami d’un ami qui lui avait permis d’entrer dans ce taudis, et il se dirigeait droit vers le bar après avoir salué un connard qu’il connaissait de vue. Signe de tête, solitaire et nerveux, Victor n’avait pas envie de parler, encore moins à des inconnues. Gobelet rouge rempli de vodka et de coca, alcool de gamin, il se dirigeait vers l’extérieur pour prendre l’air, et s’appuya sur la rambarde, la clope au bec qu’il avait roulé au préalable.

Voilà maintenant un moment que son monde ne tournait plus rond, à Victor. Il était perdu entre essayer de sauver sa mère qui choisissait de se scarifier à longueur de journée et trouver un peu de tranquillité dans les drogues qu’il écoulait dans son sang ou auprès de ses clients. Parfois, il aurait aimé que sa mère meure le jour de ses douze ans. Parfois, il se tapait la tête contre un mur pour éprouver des pensées aussi symptomatiques d’un déséquilibre mental concret. Avait-il ces pathologies de l’esprit dans le sang ? Il faisait des tests, Victor. Il se renseignait sur l’hérédité des maladies mentales à longueur de journée, espérant ne pas être cet homme qui sera capable du pire avec sa propre histoire. Il aurait voulu être en France, dans son pays d’origine pour continuer à fréquenter les mêmes personnes, ne pas avoir abandonner sa petite amie qui devait le haïr et putain, il souffrait tellement de l’avoir laissé là-bas, seule. Il s’en rendait dingue et ce petit trou qu’il avait entre l’index et le majeur, percé par une seringue, l’aidait à oublier une seconde toutes ces conneries. Une nana, joli minois, apparu dans son champ de vision. Elle était plutôt jolie, le teint d’une mauvaise nuit et la voix d’une mourante, mais elle avait le mérite de lui tenir compagnie quand il ne regardait que les étoiles. « Vodka-coca, rien de fou. » Il n’y avait pas grand-chose à cette soirée étudiante à la con, alors il se contentait de ce qu’il y avait pour oublier un peu ce qui se passait sous son crâne. « Tant que c’est meilleur que ce que j’ai, ça m’va. » Et il prit le verre de la nana, en lui passant le sien. « Tu comptes enterrer un proche demain ? On dirait que tu vas chialer, détends-toi, on est à une soirée. » Il haussait les épaules, en frottant les doigts de sa main droite ensemble, réflexe inhérent à ses addictions à la con.