La vente de mes oeuvres progressait, prétexte parfait pour passer du temps avec Abelard, puis il y avait les cours. Si je n'y brillais pas vraiment, je m'étonnais de recevoir malgré tout quelques compliments des professeurs parfois. Et puis je n'étais pas encore viré. C'était en soit le principal. Il y avait plusieurs magouilles qui nécessitaient mon attention pour que je puisse être serein sur la sécurité et la tranquillité de mes proches. Il y avait Lucky que j'allais devoir savamment éviter vu que mon attitude au défilé avait du l'intriguer... Il y avait le boulot au drink aussi, avec une soirée spéciale prévue ce week-end. Et au milieu de tout ça, il y avait Belle. Qu'importe ce que je faisais, qu'importe l'énergie que je mettais pour la chasser de mon esprit, elle revenait toujours. Je m'étais promis de ne pas lui écrire, pourtant à la minute où elle le fit, j'étais déjà en train de lui répondre. Pour finalement l'inviter dans ma petite chambre à la quincy. J'étais rentré depuis quelques minutes, pestant contre le bazar ambiant de la pièce... Pourquoi j'avais suggéré ma chambre comme lieu de rencard ?  Probablement parce que j'avais des idées derrière la tête. Sauf que lorsqu'elle frappa, l'endroit était loin d'être présentable. Je lui ouvris quand même, sans la laisser entrer pour autant. Je fondis sur ses lèvres en guise de salutations et j'avançais, sortant dans le couloir et fermant la porte derrière nous, annonçant après que mes lèvres se soient détachées des siennes : "On va sortir en fait..."

Aussitôt réclamé et aussitôt donné. Le baiser numéro deux ne se fit pas attendre. J'attirai Belle contre moi et l'embrassai avec envie. Plus long et plus intense. Au point d'en regretter de ne pas prolonger ce baiser derrière la porte. A l'intérieur de cette chambre. C'était une fois ses lèvres contre les miennes, son corps tout proche du mien, que je réalisais combien ça m'avait manqué ces derniers jours et combien j'avais envie d'elle. Mais trop de bazar. De risque qu'elle tombe sur une culotte oubliée dans mes draps, une boîte de capotes ou je sais quel autre découverte gênante. Et bizarrement j'avais envie de préserver notre bulle. J'étais prêt à me contenter de sa présence sans passer par la case ébats dans mon lit, si cela nous éviter des explications houleuses et surtout des annonces qui pourraient blesser la jeune femme . La sortie à l'extérieur s'imposait. Je saisis donc sa main pour l'entraîner hors de la quincy house.  Direction mon scooter, annonçant le programme tout en marchant : "j'ai plutôt bien gagné sur mes dernières ventes. Ça te dit d'aller manger dans un grand restaurant ? " Et en arrivant devant mon véhicule ensuite, je lui tendis les clés : "Tu veux encore jouer les pilotes ? " en souvenir de la dernière fois, puisqueprendre les commandes semblait l'avoir amusée.

Deuxième baiser, brûlant, fiévreux... Me faisant terriblement regretter ma suggestion de sortie, surtout que Belle me répondait avec la même passion. Elle avait les joues rosies, ce petit teint qui m'avait fait craquer dès notre première rencontre et je l'entraînais dehors, quand j'aurais préféré aller l'allonger sur mon lit. Mais qu'importe, j'allais profiter de sa compagnie, et puis surtout j'allais pouvoir lui payer le restau, riche des quelques tableaux qu'Abelard avait accepté de m'acheter. Elle accepta l'invitation avec entrain. Et elle s'approchait ensuite pour attraper les clés, les évitant pour venir finalement se saisir de mes lèvres. Souriante en se détachant de moi, amusée, elle reprit à sa sauce ma menace de mains baladeuses, façon d'annoncer qu'elle me laissait les commandes... "Fais toi plaisir, je suis tout à toi." Et en effet, après que je me sois installé et la demoiselle derrière moi, je sentis ses doigts se promener sur mon torse, me soutirant un sourire. Les mains de la jeune femme sur moi étaient loin de me déranger. Ça me faisait juste un peu regretter mes anciens sulfureux trajets sur banquette arrière. Là, quelque soit la balade de ses mains, j'allais devoir me concentrer, guidon en main. Je démarrais ensuite, direction un petit restau italien aux commentaires élogieux. Je me garai dans une rue adjacente, histoire qu'on finisse le chemin à pied. Sauf que je reluquais ma tenue et j'eus un instant un doute : "Tu crois que je suis assez habillé ?  Ils vont pas m'accepter si ça se trouve..." Je réalisais que depuis juillet, c'était peut être la première fois que je me rendais dans un endroit un peu guindé, qu'avec mon jean et ma chemise un peu cheap, j'allais peut-être faire mauvais genre, et l'angoisse de me faire refouler me gagnait à mesure qu'on avançait.

Je souris à sa réplique, démarrant le véhicule ensuite, appréciant le côté baladeur de ses mains. Je parvins quand même à me concentrer sur ma conduite et on arriva rapidement à destination. Sauf qu'après avoir garé le deux roues, alors que nous finissions le reste du chemin à pied, je songeais à ma tenue, qui pouvait détonner avec le côté huppé des lieux... Et si on se faisait refouler. Je ralentissais même le pas. Sans vraiment m'en rendre compte.  Belle tenta de me rassurer, elle mit en avant que sa propre tenue n'étais peut-être pas assez bcbg, chose que je ne validais pas "Elle est parfaite cette robe. " et elle l'aurait été encore plus une fois en boule, au pied de mon lit. Et son évocation d'une soirée plus intime me fit réaliser que mon impulsion pour fuir le chaos de la chambre m'avait fait l'entraîner dans un plan qui ne lui correspondait probablement pas. Un restaurant de renom serait sûrement bondé à cette heure et Belle ne m'avait jamais caché sa peur de la foule. Je le compris encore plus lorsqu'elle me rassura encore sur mon allure, et qu'elle suggéra en plan b un endroit plus isolé. "T'aimes pas l'idée du restaurant pas vrai? Je suis désolé, j'aurais pas du te proposer ça..." Et lorsqu'elle s'approcha ensuite pour me voler un baiser, mes mains s'ancrèrent sur ses hanches pourla retenir près de moi. "Dis moi ce que tu veux et où tu veux aller ? " Lui demandai je, histoire de ne rien imposer et de ne pas la mettre dans une situation déplaisante. J'aurais privatisé le restaurant si j'avais pu...

Elle, elle était très élégante. Elle était bien. Même plus que bien. Parfaite. Et probablement que même dans un sac à patates je l'aurais qualifiée ainsi. Seulement moi, je le savais, j'allais faire tâche. J'avais fréquenté ce genre d'endroit, c'était même pas dit qu'ils nous laissent entrer et cette perspective me frustrait. Puis mon obsession textile passa soudain lorsque je réalisais que ma suggestion de sortie était à côté de la plaque.  Belle m'avait réclamé un bar désert pour notre premier rencard alors l'emmener dans un restau grouillant de monde ?  Stupide idée. Sauf que Belle m'assura que si c'était ce que je voulais, elle me suivrait, malgré ses démons. Mais je ne la relachais pas. On était à deux pas de l'établissement mais je la retins contre moi, mes mains emprisonnant ses hanches pour la questionner sur ce que elle, elle aurait souhaité. Ses doigts effleuraient ma joue et elle m'avoua être indifférente au lieu, ce qui lui importait c'était qu'on passe la soirée ensemble car je lui avais manqué. Touchante, attendrissante, irrésistible. Je me penchais pour l'embrasser avec douceur, restant tout contre ses lèvres : "j'ai juste envie d'être avec toi aussi. J'sais même pas pourquoi je t'ai entrainée ici. Je voulais sûrement t'en mettre plein la vue maintenant que j'ai vendu quelques tableaux. J'ai oublié de prendre en compte ton rejet des foules... Je suis trop nul. "