Des semaines que je ne t'ai pas vu. Toi qui est pourtant le centre de mon monde depuis des années. Mais voilà tes dernières paroles me restent encoe en travers. Ta réaction me paraît encore démesuré. On ne vivra pas ensemble toute notre vie, il faut se faire à cette idée mais visiblement t'étais pas prêt pour ça. Et puis franchement je ne sais pas comment tu fais pour vivre encore dans cet appartement ? Moi je ne me voyais pas continuer à dormir là bas. Dès que j'ai pu j'ai mis les voiles. Certes j'aurais pu vous avertir en amont plutôt que de partir comme une voleuse mais je pense que mon acte ne justifie en aucun cas toute la rage que tu as pu me cracher à la figure. Bref je met cette histoire de côté pour venir te voir aujourd'hui, parce que je t'aime malgré tout et tes messages guère rassurants me font flipper plus qu'autre chose. Personne n'aime cette fameuse phrase "je dois te parler", ça n'annonce pas de bonnes nouvelles en règle générale. Tu m'as dit que tu commandais à manger mais je ne viens pas les mains vides. J'ai trouvé une bouteille de whisky dans un des placards de Silas alors je l'ai prise. C'est pas comme s'il allait m'en vouloir. Monsieur a de la thune donc il pourra s'en racheter. Donc comme promis me voilà face à mon ancien chez moi, attendant que tu m'ouvres. Putain mon coeur palpite, j'angoisse à l'idée de te retrouver.

Mael l'avait mal pris. Est-ce que Macy allait bien le prendre ? C'était la question. Moi, tout ce que je voulais, c'était le soutien de ma famille, de mes proches. Qu'on soit tous ensemble dans cette nouvelle vie. Mais rien n'y fait, Mael semblait résigné à l'idée de me perdre et j'avais pas envie qu'il vienne à prendre les voiles comme Macy l'avait fait. D'ailleurs, je lui avais enfin envoyé un message dans le but de lui donner des nouvelles. LA nouvelle d'ailleurs. Est-ce qu'elle serait la tata gaga que j'avais en tête ou elle s'en foutra comme de l'an quarante, comme quand elle a choisi de s'en aller vivre avec quelqu'un d'autre que nous. J'avais encore en travers de la gorge ce besoin qu'elle avait eu de s'éloigner de nous. Mais je préférais mettre ça de côté pour l'instant. Les Rowan étaient supposés être tous soudés mais de toute évidence, je m'étais trompé. J'avais mal éduqué ses gamins et maintenant, je me prenais le retour du bâton. La bouffe n'était pas arrivée et je pensais que ça allait être ça quand j'entendais frapper à la porte. Mais non, quand j'ouvrais, c'était ma petite sœur. « Hey, entre » Je regardais derrière elle pour voir si un livreur était là, pas du tout. Bon, pas grave. Je refermais derrière elle, découvrant alors qu'elle n'était pas venue les mains vides. « Qu'est-ce que c'est ? »

Tu sais, être en Afrique loin de toi ce fut difficile. Je n'avais plus mon phare pour me guider dans la nuit, alors oui j'étais heureuse d'enfin te retrouver après ces années passées loin de toi. Je pensais qu'on serait sur la même longueur d'ondes mais j'ai l'impression que n'est plus tellement le cas. Mais on a encore une chance de réparer les pots cassés, si chacun de nous deux fait des efforts. Je refuse qu'une broutille brise ce lien si fort qui nous unit. T'as fait le premier pas en m'envoyant ce message. Enfin il semble surtout que tu es quelque chose d'important à m'annoncer alors je ne vais pas rester chez moi à me ronger les ongles, angoissée à l'idée de ne pas savoir ce qui se passer dans la vie de mon frère. Tu me fais face et je t'adresse un sourire timide. Est ce que je te fais un calin ou je m'abstiens ? Finalement j'opte pour l'option bisou sur la joue, en signe de paix. Passant le pas de la porte, je jette un coup d'oeil à la bouteille de whisky que j'ai en main. J'ai pas trop fait attention à ce que j'ai pris." D'après l'étiquette: un whisky japonais, 20 ans d'âge. J'imagine que c'est du bon. " Sorry not sorry, Silas, si tu tenais à cette bouteille." T'as commandé chinois j'espère ? " Comme au bon vieux temps... Quand tout était bien plus simple.

Je stressais et je n'étais pas certain que ce soit un bon stress. Je l'avais envoyé péter depuis deux mois maintenant, j'allais devoir l'updater sur ma vie privée. Putain, c'était ma petite sœur et j'étais incapable de lui parler normalement, tout ça parce qu'elle a préféré partir loin de nous. Mais il était peut-être temps de mettre les rancoeurs de côté. Avancer comme deux adultes responsables. Je ne voulais pas que mon enfant vive sans sa tante à ses côtés. On a toujours été portés sur la famille et ouais, je n'avais pas envie de priver Macy de son neveu ou sa nièce. Porte ouverte, je faisais face à elle et même là, je ne savais pas comment réagir. Câlin, pas câlin ? C'était la grande question. Mais de toute évidence, elle avait résolu le problème puisqu'elle me faisait un baiser sur la joue. Ouais, c'était toujours ça de pris. Mais à la base, c'est moi qui fait la gueule, pas elle. M'enfin. « Wow, ça rigole pas ! T'as trouvé ça où ? » Ouais parce que ça semblait être le truc assez compliqué à trouver, et surtout cher. Mais qu'importe, sa question me bloquait et je buguais. « Ouais... mais c'est pas encore arrivé. Le livreur ne devrait plus tarder à arriver. » D'ailleurs, la porte fermée restait sous mon attention la plus particulière. « Tu veux t'installer..? Ouvrir cette bouteille ? » Ouais, je passais par tous les chemins avant de dévoiler ce que je devais dévoiler. Elle n'était pas prête et je crois que je ne l'étais pas non plus, surtout après le fiasco Mael.

Si on m'avait dit un jour que je me prendrais la tête avec toi, jamais je n'y aurais cru. Pour moi c'était impossible d'être en désaccord avec mon frère. Et pourtant on en est bien là aujourd'hui, stressés comme une une gazelle sur le point de se faire dévorer par un lion. Pour la première fois de ma vie, je pense la moindre de mes paroles avant d'ouvrir la bouche. Terrible sensation de ne pas être moi même. D'ordinaire je t'aurais étouffé avec mes bras musclés, là je me contente d'un petit bisou de rien du tout. Tu te veux curieux de cette précieuse bouteille qui sera notre compagnie pour la soirée." Je l'ai volé à mon coloc. " ... Merde, là j'aurais du me taire. Ne pas évoquer le sujet qui fâche. Alors vite un nouveau sujet. La nourriture. Celle-ci se fait attendre." Les livreurs c'est plus ce que c'était avant " Je suis mal placée pour critiquer les gens qui bossent mais bref passons." Bonne idée. Elle ne va pas se boire toute seule. " Je prends verre et glaçons que je dépose sur la table basse." J'espère qu'une seule bouteille est suffisante pour digérer ce que tu tiens 'tant' à me dire. " Il serait préférable que tu craches le morceau avant que j'ai de l'alcool dans le sang.  

Je n'aimais pas cette situation. Putain c'était ma petite sœur, mon meilleur soutien dans cette vie qu'on avait pu avoir durant notre enfance. On a vécu des merdes mine de rien avec des parents totalement absents. Mais la vie fait qu'on s'est pris la tête et elle s'est juste barrée. Y'a plus de Macy dans l'appartement, et j'en souffrais tous les jours. Elle n'était pas à l'autre bout du monde, elle était juste de l'autre côté de Charles River. « Ah... je vois » Ne pas faire de réflexion, ne pas faire de réflexion. Respire mec, respire. « T'as vu ça, de vrais petits princes ! » Et incapable de respecter un putain de délai. Mais j'allais bien foutre ma merde auprès de ce chinois qui était incapable de donner les commandes en temps et en heure. On récupérait ce qu'il fallait dans la cuisine et on s'installait sur le canapé, la table basse supportant les deux verres et la bouteille que je prenais pour ouvrir et verser ce fameux whisky. Il s'immisçait entre les glaçons, montant le niveau à chaque instant. Finalement, je m'installais à côté d'elle, peur de lui dire. « Mael l'a mal pris alors... peut-être que toi aussi » Enfin, mal pris était un grand mot mais il a pas sauté de joie. Mais merde, Macy elle sait que je rêve de fonder une famille, avec Vega encore plus. « Vega est enceinte... elle porte mon bébé »

Lorsque j'évoque mon coloc. Je m'en veux terriblement au point que je serais capable de me frapper la tête contre le mur mais je ne laisse rien paraître. On est tous les deux butés, campés sur nos positions alors ça ne sert à rien de remettre le sujet sur le tapis. Tout ce qu'on peut faire désormais c'est avancé, sans regarder en arrière. Je me plains du livreur, histoire de faire passer la pilule et ça semble fonctionner. Là dessus, on est d'accord. Heureusement que nous avons l'alcool pour réconforter et patienter. On ne va pas se regarder dans le blanc des yeux. D'ailleurs je t'invite à délier ta langue. Tu me préviens que Mael a mal réagit. Okay ça me semble vraiment être un sujet délicat. J'hausse les sourcils, ouvre grand les yeux. J'attrape le verre que tu m'as soigneusement préparé. Verre qui s'écrase aussitôt au sol, lorsque tu lâches la bombe. Pendant une minute, je reste conne. Vega. Enceinte. Toi, papa. Moi, tata. Ca fait le tour de mon cerveau plusieurs fois." Je n'étais définitivement pas prête. Pardon. " Que je dis en ramassant les bouts de verre jonchant le parquet. Je reporte mon attention sur toi, car une question me brûle les lèvres." Je me doute bien que toi tu es heureux. Mais Vega ? Elle le veut cet enfant ? " Toi papa, ça ne me choque pas le moins du monde, c'est même logique mais elle en tant qu'étudiante, est ce que l'idée lui plaît ? J'attrape un torchon qui traine et je continue de nettoyer mes bêtises attendant que tu me donnes plus de détails sur la situation.

Bien sûr que je redoutais ce moment. Mael avait assez mal réagi et je crois que ça sera pire si Macy réagissait mal elle aussi. Disons que pour moi, la réaction unique qu'ils devraient tous avoir, c'est sauter dans mes bras et être heureux, me féliciter et féliciter Vega aussi. Mais pour l'instant, j'ai rien eu de tout ça et ça me frustre assez je l'admets. L'alcool versé dans les verres, on se rendait sur le canapé afin de passer sur la petite table. Je m'étais dit que ça faisait un peu plus cosy, un peu plus... famille en somme. Et quand finalement la bombe tombe... ouais, pas vraiment la réaction que j'avais espéré non plus. Le verre tombe dans un fracas, se brisant par la même occasion sur le sol, tandis que ma sœur semble être dans un bug total. Et si cette fois, la réaction n'était pas égoïste, elle était plutôt concentrée sur la future maman. J'esquissais un sourire avant de l'aider à ramasser les bouts de verre — heureusement que Walker n'est pas là — tout en haussant les épaules. « Elle a du mal... j'essaye de la rassurer, de lui dire que ça va mais elle flippe alors.. je tente de lui prouver que je vais rester là, la soutenir et l'aider à accepter tout ça » Sans me rendre compte qu'elle le ferait bientôt d'ailleurs. Mais qu'importe. « À la base, c'était pas dans ses plans... j'étais pas dans ses plans non plus » Elle organise tout, fait des plannings à la journée et je chamboulais tout ça, pour les dix-huit années à venir. Je crois que c'est l'effet Rowan. Perturbateur de vie. « Tu crois que j'y arriverais...? À lui prouver qu'on peut y arriver j'veux dire »

Je le savais qu'un jour tu deviendrais père, c'est dans tes gênes et d'une logique implacable. J'ai toujours souhaité que tu fondes ta famille mais que tu m'annonces ça maintenant sans détour m'a prise de court. Mon cerveau a bugué le temps d'une minute, pour digérer l'information. Je ne m'inquiète pas pour toi mais plus pour la maman. Toi je te connais, je te fais confiance à 100% mais pas Vega. J'espère vivement qu'elle veut aussi de cet enfant, faire de toi un papa comblé. Nettoyant mes bêtises comme je peux, je t'écoute d'une oreille attentive. Je fronce les sourcils à ta première réponse. Visiblement c'est pas gagné d'avance parce qu'elle est bouleversé par ce bébé inattendu. Ca peut se comprendre mais il faudra bien qu'elle fasse un choix un jour. Je t'adresse un sourire compatissant." Jax, t'es fait pour être père alors bien sûr que tu arriveras à la convaincre. T'as déjà élevé deux monstres dans ta vie, t'es rodé. Et puis il sera bien entouré cet enfant. Après tout vous n'êtes pas seuls. Vega a sa famille et toi tu m'as moi et Mael. Lui aussi, on arrivera à le convaincre que ce bébé est un merveilleux cadeau. " Je suis peut être un peu trop optimiste mais c'est sûrement dû à l'excitation d'être tata pour la première fois." Je suis heureuse pour toi. Vraiment. " Mes yeux sont sans doute envahis de paillettes parce qu'enfin le destin a bien fait les choses. Du coup t'as mérité un câlin, un énorme même.

Je ne savais pas tellement si le verre se trouvant au sol, totalement explosé, était une bonne chose ou pas. Après l'épisode Mael, je m'attendais à tout venant des Rowan. Putain, j'allais être papa, mon deuxième rêve après celui de devenir joueur de baseball professionnel. Et comme ce rêve là était devenu impossible depuis la détection de ma maladie à l'épaule, j'avais pas le choix que de combler ma vie par un autre rêve. Pas un enfant. Et c'était même pas fait exprès dans le fond, c'est arrivé, on ne s'est pas protégé une fois et elle est tombée enceinte. J'y peux rien si elle est fertile moi. « C'est vrai que Joy était plus calme que vous deux » Je la taquine, en vrai j'ai élevé trois monstres, c'est tout. « Je veux juste... qu'on soit la famille unie qu'on a toujours été... mais tu t'en vas, Mael veut pas du gamin et... je sais plus quoi faire pour que tout le monde regarde dans la même direction » C'était plus simple à Miami. C'était plus simple à la Nouvelle Orléans. Ici, c'était chacun pour soit. « Tu crois que c'est parce qu'il est jaloux ? De moi et Vega ? » Parce que j'avais appris y'a pas si longtemps qu'il a couché avec elle plusieurs années auparavant, qu'il avait de nouveau couché avec elle ici. Mais là, ça m'importait peu ces questionnements puisque Macy, elle venait me prendre dans ses bras. Ok, elle était vraiment heureuse pour moi. « Tu vas être tata gaga ? » que je disais en me reculant, haussant les épaules. Ouais, enterrons la hache de guerre. T'es une Rowan merde, ça vaut tout l'or du monde.