« Regarde Ali, regarde .. non chut. » Son doigt se posa sur sa bouche pour faire comprendre à sa petite soeur qu'elle devait rester calme et silencieuse. Esteban arrêta de marcher et stoppa le fauteuil roulant d'Alison par la même occasion. Les deux Lindley regardaient ensemble dans la même direction, vers un petit arbre non loin d'eux. Les yeux du jeune garçon se posèrent sur Alison tandis qu'un fin sourire se dessina sur ses lèvres. Il la regarda avec un énorme pincement au coeur, il était partagé entre le débordement d'amour qu'il éprouvait pour elle et la peine qu'il pouvait ressentir à l'idée de bientôt la perdre. Les médecins n'étaient pas optimistes quant à l'état de santé d'Alison. Handicapée depuis sa naissance, sa maladie s'était nettement aggravée ces derniers mois. Elle n'en avait plus pour très longtemps, quelques mois, quelques jours peut-être. Cette science là n'était pas exacte. Âgée de seulement dix ans, la petite Alison n'en avait plus pour longtemps, la vie semblait vraiment injuste. « C'est écureuil ? » demanda-t-elle, la voix déformée, abîmée par les traitements qu'elle devait subir et parfois même les tuyaux respiratoires. Esteban vint se placer juste à côté de sa soeur et déploya son plus beau souvenir. « Oui Ali, c'est un écureuil .. ou peut-être une écureuil. » s'amusa-t-il à dire pour la faire sourire, pour lui changer les idées. Une légère brise souleva les longs cheveux d'Alison qui sentait bien que la situation n'était pas normale, que la présence de toutes les blouses blanches autour d'eux était préoccupante. « 'Ban, j'vais mourir ? » lui demanda-t-elle, les larmes aux yeux, les mains jointes. Esteban s'humidifia les lèvres et lutta pour ne pas pleurer. « Nan Ali, tu ne vas pas mourir, tu vas pouvoir enfin visiter le ciel, voir les oiseaux et puis Pouny, tu vas retrouver Pouny, tu vas pouvoir retrouver notre ancien chatte. Tu te souviens de Pouny ? » La brunette haussa la tête de haut en bas, des étoiles dans les yeux. « Tu lui feras un gros bisou de ma part, ok ? Puis tu verras papy, mamy, tu vas retrouver tout le monde .. et puis je te l'ai promis, moi aussi je viendrais te rejoindre, plus tard. J'serais jamais loin de toi, jamais, j'serais toujours à tes côtés. » Esteban la rassurait, comme tous les jours depuis environ six mois. Perdre sa soeur était l'épreuve la plus difficile qui lui ait été donné d'affronter. Parce qu'en plus de devoir jouer le rôle du paternel, il dû faire face à une petite amie absente et méprisante.

Esteban est venu au monde il y a vingt-cinq ans, dans une banlieue plutôt riche de Paris. Ses parents n'ont jamais été très présents dans son enfance. Issu d'une famille très aisé, son père est huissier de justice et sa mère, une couturière pour un grand styliste. Ils étaient, bien souvent, absents et ont un peu laissés leurs deux enfants se débrouiller par eux-mêmes. Pourtant, Alison, la petite soeur d'Esteban était handicapée. Atteinte de trisomie depuis la naissance, elle ne pu se reposer que sur son frère et sur certains spécialistes de temps en temps. Grand frère très protecteur, il a été très présent pour la petite Ali, jusqu'à son dernier souffle. A dix ans, la petite décéda des suite d'une maladie. Esteban l'a aidé à surmonter sa maladie et a essayé d'être le plus rassurant possible pour elle. Sa disparition a été un véritable choc pour le Lindley qui noya son chagrin en flirtant avec des filles, beaucoup de filles. Après l'obtention de son bac, il partit faire un petit tour du monde avec deux de ses potes, durant un an et demi. Esteban parcouru beaucoup de pays, à la recherche de communion avec la nature, de liberté et de folie. De retour à la réalité, il fit quatre années d'études à Londres avant de débarquer à Boston. Il a intégré Harvard en septembre 2016 avec énormément de facilité et s'est imposé à la Mather House. Il étudie la médecine vétérinaire, un domaine qui le passionne depuis qu'il est petit. C'est sa vocation, sa motivation.