Je te passe sous le nez, je prends pas la peine de rebondir sur tes mots parce qu’ils ne veulent rien dire. Ils puent le mensonge et l’illusion. Il n’y aura pas de prochaine, pas comme moi, pas comme tu aimes, elles seront jamais assez bien, elles auront jamais mes mots, ni mon parfum. Elles auront peut être ma couleur de cheveux, les mêmes yeux que moi, la même silhouette mais elles ne seront jamais moi. Alors tu partiras à chaque fois, tu ne resteras jamais et tu sauteras de prochaine en prochaine en espérant en trouver une qui me ressemblera toujours un peu plus. Tu te lasseras de chacune d’entre elles, comme je me lasserais des autres. Tu te lasseras à chaque fois en te rappelant à quel point avec moi c’était mieux. Je suis figé au milieu de cette pièce qui regorge de souvenirs, d’un début qui n’a pas de fin. Juste une pause. Une histoire prête à redémarrer dès que je l’accepterais au fond de moi, dès que je serais assez courageuse pour l’accepter à nouveau et laisser filer la seule chance d’être sauvée de toi. Je reste là, j’ai du mal à respirer ici et en même temps, dehors, je ne respire plus. Je me tourne vers toi quand tu m’intrigues, tenant un bout de carton entre tes doigts joueurs. Je fronce les sourcils en faisant demi tour. Mes yeux font des allers retours entre toi et le bout de papier qui danse. - Qu’est ce que c’est ?.. Je demande curieuse en avançant doucement jusqu’à toi. Je bouge les doigts, je sais pas si je peux, si je dois regarder. Je sais pas si après ce sera mieux, ou pire encore. Mais je lève la main, j’ai jamais été saine d’esprit, j’ai jamais voulue survivre en fait. J’attrape la carte et mes yeux ripent sur l’encre qui l’a noircie. Sur mon écriture, sur les aveux que j’ai osé te dire. Sur la vérité, sur tout ce je refoule. Je déglutis, je lis encore, encore et encore sans m’arrêter. Les mots défilent sous mes yeux, ils se mélangent à force et j’ai le cœur qui s’arrête. J’ai les souvenirs qui reviennent comme une putain de balle qui venait de me transpercer le cœur. J’ai les images qui m’assaillent, qui me remplissent le palpitant. J’ai la boule au fond de ma gorge prête à exploser. Je ressens tout en même temps et tout trop fort. Je ressens ce que j’ai oublié et l’oubli, devient néant. L’oubli n’est plus et je me souviens de toi. De cette chambre, de cette coupe de champagne autour de laquelle tout a commencé. Je me souviens de toi sur ce lit, de moi sur toi, de toi sur moi. Je me souviens des affronterions, des mots cruels, des mots qui font mal et ceux qui soignent. Je me souviens du mur, de cette fois contre ces briques et de la fin de nuit dans ton lit. Je me souviens encore de la dernière fois, de la toute dernière avant le fossé. Je me rappelle comme c’était beau, malsain, destructif. Comme on aimait ça, combien j’aimais ça. Combien je.. Et je ferme les yeux dans un sursaut, peur de le penser, de le dire. Peur de ce que j’aurais pu me dire à l’instant, de ce que j’aurais pu m’avouer. Je laisse tomber la carte par terre, je te regarde et j’ai une rivière au bord des yeux. - Pourquoi tu m’as faite me souvenir ? La voix faible, qui déraille par cette boule qui grossit encore au fond de ma gorge. Je bats des cils rapidement, aspirant l’air pour faire sécher mes yeux qui me trahissent une fois de plus avec toi. - Tu voulais pas le faire, pourquoi tu l’as fait ? Et ça sonne comme un reproche, comme si je t’en voulais de l’avoir fait.

Elle est dure la vérité qui me foudroie. Le courant électrique qui me traverse le corps de haut en bas. Qui crame au passage tous mes organes vitaux, je sais plus respirer, j’ai plus d’oxygène qui passe et le cœur qui bat à en exploser. Je lâche le morceau de papier qui tombe à terre, je le lâche comme si il était brûlant. Fiévreux de nous et qu’il était clairement en train de me brûler les doigts. Je passe ma langue sur mes lèvres. Tu me rappelles ma crise de folie, la force que j’avais mis pour te retrouver, pour savoir ce que j’avais perdu. Pour me souvenir, j’étais même prête à m’ôter la vie pour l’inconnu. C’est la preuve qu’au fond, je le savais, je l’ai toujours su. La preuve que c’est jamais partit. Et tu t’approches encore, je te regarde juste du coin de l’œil le souffle court et les yeux qui peinent même à cligner. La bouche entrouverte, juste assez pour faire un appel d’air, pour essayer de respirer mieux quand ton parfum vient m’étouffer encore plus. - Basile.. Je murmure ton prénom sans te regarder. Les yeux droits vers cette porte derrière toi, ma seule issue de secours qui m’appelle, qui s’offre à moi et que je suis encore incapable de saisir. - Même quand j’ai voulue me foutre en l’air l’autre soir, que j’étais à deux doigts de crever fauchée par cette caisse.. T’as pas bougé. Je lance la voix bizarrement neutre. Peut être le déni, le choc, l’adrénaline ou juste le désespoir. A quoi bon crier des mots qu’on ne sait pas dire. - T’as pas voulu m’aider à me souvenir. Alors pourquoi ce soir Basile ? Pourquoi maintenant ? Je déglutis, ma voix dégringole quand elle prononce ton prénom. Je pince les lèvres pour retenir un sanglot. Et je fous mes mains contre mon visage, penchant la tête en arrière pour faire reculer les larmes, leur faire faire marche arrière. Je tourne en rond, lâche un rire nerveux incontrôlable. - Et maintenant ? Que je sais tout, que je te ressens comme avant, pire qu’avant même. Qu’est ce qu’on fait ? Où on va ? Hein..

Je n’ai toujours eu droit qu’à des silences de ta part, qu’à des sensations de rejets, qu’un dos tourné ou encore de l’ignorance quand ça devient trop pesant pour moi. Encore ce soir, tu préfères te taire. Ne rien dire, le contraire m’aurait étonné mais le contraire, je le voulais tellement au fond. Je bouge la jambe nerveusement, un spasme que je ne parviens pas à arrêter. Ça me stresse, ça m’oppresse, tout m’oppresse ici alors je bouge, je tourne. À la recherche de tes mots, d’un bout de toi, un bout de ce que tu me donnes jamais. Une âme perdue, tout qui explose à l’intérieur de moi, qui vole en éclat et les morceaux de verres viennent s’accrocher. Des morceaux de notre histoire qui se reconstruit, ils viennent se remettre en place, là, écorchant ma peau. Je passe du chaud au froid, des larmes au rire, du rire aux larmes mais rien à faire. Tout reste bloqué et me rend dingue. Tu m’arrêtes dans ma folie, mes yeux se posent sur ta main sur mon bras, ils remontent rapidement pour capter les tiens qui me scrutent de manière menaçante. - Et maintenant.. Je répète dans un souffle, le regard voyageant sur le sol autour de nous avant de le relever accompagné d’un sourire gourmand à la commissure de mes lèvres. Dans la foulée je retire mon bras de ton emprise, pousse ton corps avec le mien jusqu’au mur juste derrière toi. Brutalement. Sans aucune douceur. Non.. Aucune, on est là que pour se faire mal non ? Que pour se détruire ? Alors je veux que tu émiettes mon corps et mon âme ce soir. Encore. - Fais moi me souvenir encore. La respiration haletante, mon avant bras sous ton menton, contre ta gorge et les doigts de ma main attrapant un bout de ta veste de trop. Les lèvres contre ta joue, les mots qui s’échouent sur ta peau en fin murmure chaud.

J’ai le droit de te demander plus, de vouloir plus, de le réclamer parce que j’ai pas envie d’être comme toutes les autres. J’ai pas envie que tu fasses comme avec toutes les autres. Je veux pas non plus que tu me traites comme elle, je veux que tu me montres juste un peu qu’avec moi, c’est différent Qu’avec moi, c’est sincère, qu’avec moi c’est l’inédit auquel tu goûtes. Bordel, pourquoi tu me donnes pas ce que je veux ? Juste un tout petit peu, n’importe quoi que ce serait suffisant pour moi, ce sera mieux que rien. Mieux que l’indifférence. Parce que j’ai jamais su, y’a que tes yeux qui parlent et si, moi, j’imaginais tout à l’intérieur ? Si tout ce qu’ils me disaient n’étaient que le fruit de mon imagination ? Que moi qui avait envie de me rassurer, de me dire que je suis pas seule dans ce tourbillon de sentiments. Montre moi que moi, je suis pas les autres. Que moi, c’est quelque chose. Qu’avec moi, tu pourrais crever aussi. Ici, maintenant. J’ai le cœur en feu, le corps en flamme et mon choix il est fait. Je peux perdre la raison, mais tant que je t’ai, je peux parler d’avenir sans devoir dire « peut être ». J’ai la poitrine qui bat contre ton torse, le cœur qui tente vainement de communiquer avec le tient. Je desserre l’étreinte de mes doigts, déconcentrée par tes doigts qui découvrent ma peau à nouveau. Je me laisse bêtement distraire et je me contracte d’un coup quand tu me forces à baisser le bras. Ton visage qui se rapproche du mien, tes lèvres qui me chuchotent des mots contre les miennes et mes yeux qui se ferment doucement face à la douce mélodie de ta voix qui me berce. - Ne me baise pas alors.. Je caresse tes lèvres avec les miennes, sans les attraper, sans les toucher vraiment. - Fais moi l’amour Basile. J’ouvre les yeux pour croiser ton regard. À toi de choisir maintenant, soit je suis quelqu’un, soit je suis personne. Toutes les autres. Je soupire rien qu’à m’en souvenir, rien qu’en écoutant ton bref récit. Je me pince les lèvres, passe ma langue dessus par gourmandise. - Je me souviens pas.. Le bout de mon nez caresse le tient, mon corps vient se presser un peu plus contre toi. - Les gémissements.. Les griffures.. La passion.. Je m’en souviens pas du tout. Je cité chacun des mots en marquant une pause, une pause pour me raviver les souvenirs à moi-même. Pour m’en délecter.

Tu m’énerves à croire que tu me connais par cœur, avec tes yeux qui me jugent en connaissant qu’une partie de moi. Que la meilleure. Parce qu’elles sont rares les fois où je t’ai montré le pire moi, elles sont rares les fois où je ne t’ai rien montré Basile. Tu t’es toujours servis, t’as toujours pris tout ce que je pouvais t’offrir comme un ingrat sans me faire croquer une seule fois un peu de toi. Et je comprends maintenant pourquoi j’ai voulue oublier, pourquoi j’ai voulue t’effacer. Je comprends que je mérite mieux que ça, mieux que tes silences qui vont un temps, mieux que ton absence et ta présence que tu décides de m’imposer quand ta petite personne le veut bien. Je brûle pour toi, je meurs pour toi Basile, je crève d’envie de te dévorer ici et tout de suite et tout te le révèle. Tout te le montre ce soir. Regarde, mes jambes qui tremblent, qui se serrent pour ne pas succomber. Regarde plus près encore, mon cœur qui ne bat que pour toi, qui se réveille que pour toi. Regarde encore putain, dans mes yeux là tout au fond, ils te disent que le jeu, au fond je m’en branle. Tout ce que je voulais c’était toi, c’était Nous. Mais tu seras incapable de me le donner, tu pourras jamais assumer, te lâcher. Tu pourras pas t’arrêter de faire comme si je ressemblais à toutes les autres. Je comprends pourquoi j’ai voulue oublier. Je te regarde dans les yeux, à tour de rôle, un par un pendant de longues secondes en attendant que tu cèdes enfin. Que tu me retiennes pour une fois. Mais non, des espérances qui partent en fumée. Encore et toujours. Je ferme les yeux, serre les dents et mon front retombe sur le tient alors que mes membres se relâchent tous un par un. - Ramène moi chez moi Basile. Je souffle encore face à tes lèvres. Je profite d’un dernier instant près de toi, près de ton corps, de ton cœur parce que ça sera sûrement le dernier. Tu ne me retiendras pas, tu ne m’as jamais retenue et c’est sûrement mieux comme ça de toute façon. - Je t’attends en bas. Je te regarde plus, je me dépêche juste de remettre ma veste comme il faut. Je prends même pas la peine de reprendre mes esprits, de réfléchir, d’attendre que j’ai déjà claqué la porte. Que je suis déjà dans le couloir, titubante, agrippée à l’un des murs de l’hôtel. Je suis à bout de force, à bout de Toi.