Assis sur le canapé du salon qui sent encore le cuir neuf, tu regardes autour de toi d'un air apaisé. T'es immensément soulagé d'avoir déménagé. C'était trop douloureux de vivre dans ton ancien appartement, celui-là même que tu avais partagé toutes ces années avec Rhiannon. Sa présence se ressentait encore dans chacune des pièces, comme si son esprit se baladait entre les murs. A tout moment, tu t'attendais à entendre sa voix chantonner dans la cuisine pendant qu'elle se préparait à manger ou bien pousser une gueulante quand tu laissais traîner encore et toujours tes affaires dans le salon. Illusion dont tu devais absolument te détacher. Rhia est morte, et plus jamais tu ne la reverras. Tessy ayant également décidé de quitter la colocation, c'était l'occasion ou jamais de repartir à zéro. Quelques recherches d'appartement, une petite annonce postée sur internet et un camion de transport plus tard, te voilà donc dans ce loft récemment rénové près du campus, en compagnie de deux jolies femmes. Parmi elles Nina, et c'est une surprise au vu de votre première rencontre mais dans le fond, tu ne sais pas grand chose d'elle. Cela fait quelques jours à peine que vous êtes là et vous n'avez pas encore vraiment eu l'occasion d'apprendre à vous connaître, ce que tu regrettes. Mais elles se sont toutes les deux montrées enthousiastes lorsque tu leur as proposé une petite soirée à l'appart entre colocs pour discuter autour de quelques verres et de pizzas. Elles ne devraient plus tarder à te rejoindre puisque tu sais que chacune est dans sa chambre, et en attendant tu vas te chercher une bière au frigo et reviens te poser sur le canapé en sortant ton téléphone.  

C’est toujours mieux de vivre dans une maison de confrérie. Et Nina a de la chance d’être dans l’une d’elles. Pourtant, ce n’est pas assez. Ou alors, parce que les années passent, son âge avance et qu’elle a besoin de se sentir un peu plus indépendante ? C’est peut être l’une des raisons qui la poussent à prendre une chambre en colocation. C’est mieux que de vivre seule. En fait, ça fait quelques économies. Pour le moment, c’est un appartement pour trois personnes, un loyer à se couper en trois, c’est quand même pas mal. Pas de quoi se plaindre. Puis, de nature sociale, Nina a besoin d’être entourée, tout comme elle a besoin d’avoir du temps pour elle, pour réviser ses cours. Chaque chose à une place bien particulière. C’est hier dans l’après-midi, qu’elle a pu amener toutes ses affaires dans sa nouvelle chambre. Et aujourd'hui, c’est la première réunion entre les colocataires. C’est important de bien s’entendre. Surtout que tout trois ne se connaissent pas vraiment ! C’était un risque mais bon à prendre. Ouais, elle veut y croire. Après avoir rangé un peu sa chambre et se dire qu’elle fera le reste, plus tard, Nina sortit de sa chambre pour rejoindre le salon. Salut salut ! qu’elle dit d’un petit sourire, venant au frigo pour s’attraper à boire. Un verre de vin. Une bouteille que ses parents lui ont offerte, il y a quelques jours. Je ne sais même plus si je me suis présenté, la dernière fois ? Mais au cas où, moi c'est Nina. Large sourire, l'air amicale, elle le rejoint dans le salon. Ce qu'elle trouve bien, c'est que tout les trois sont de la même université.

C'était bien beau d'avoir sa propre chambre à la Eliot house et d'avoir en plus de ça ton appartement à côté mais tout avait un prix. Tu voyais ton compte se réduire un peu plus chaque mois sous les dépenses, même si tu n'avais clairement pas à te plaindre là-dessus. Rendant ton appartement et vivant un petit temps à la confrérie tu t'aperçus bien vite que ce n'était pas une vie alors te promenant sur internet tu avais décoté une annonce pour une nouvelle colocation. Les nouvelles étaient les meilleures, tu n'arrivais pas dans un groupe qui allait te juger dès ton arrivé. Non là c'était un nouveau départ pour vous trois. Une colocation, voilà bien longtemps que tu n'en avais pas fait. L'indépendance, le respect, l'entraide c'était les maitres mots d'une cohabitation qui allait réussir. Ayant croisé ceux avec qui tu allais vivre lors de la signature du bail, le garçon que tu avais déjà vu sur le campus vous aviez convié à une soirée entre colocataires. C'était une façon d'en apprendre plus sur vous. Alors que tu poussais ta valise sous le lit, tu entendis déjà quelques bruits dans le salon. C'était l'heure, l'heure fatidique qui allait t'apprendre si la cohabitation allait durer. "Moi c'est Rosalie, mais vous pouvez m'appeler Rosie" déclaras-tu alors que tu apprenais que l'autre fille s'appelait Nina. Un petit tour dans la cuisine pour t'attraper de la limonade avant de t'asseoir à ton tour sur le canapé, tu te tournas vers eux. "Je vais appeler le livreur, vous voulez quoi comme pizza ?" C'était la plus simple des manières pour savoir leur gout, voir aussi si vous pourriez dans le futur vous retrouver de nouveau autour d'un repas commun. C'était la soirée, celle qui allait tout déterminer entre vous.

Tu savais qu'en quittant ton appartement, tu aurais pu emménager avec Elias, Maxine, Eliot et Margot si tu l'avais voulu. D'ailleurs c'est la première chose qu'Elias t'a dite lorsque tu lui as annoncé déménager. Mais quelque chose t'a poussé dans le sens contraire, comme une envie de repartir à zéro dans un nouvel endroit avec des personnes que tu ne connais pas. En postant ton annonce, t'as eu l'impression de jouer à la loterie. Seul le temps te permettra de dire si tu as décroché le gros lot mais pour l'instant, t'as l'impression d'être sur la bonne voie. Reste à savoir s'il y a moyen que vous deveniez de bons amis. La base d'une colocation, à tes yeux du moins, c'est de se taper des fous rires par milliers sur fond de soirée jeux vidéos ou netflix and chill. T'as donc hâte de savoir si vous allez avoir des atomes crochus tous les trois. La première des deux filles, Nina, vient te rejoindre dans le salon avec un verre de vin à la main. Elle te rappelle au passage son prénom, comme tu avais été capable de passer toute une soirée sans le lui demander avant de finalement l'apprendre le soir du bal Thanksgiving... pour aussitôt l'oublier. « Philip » réponds-tu dans un sourire alors que la troisième colocataire vient s'installer avec vous. Tu te concentres pour associer le bon prénom au bon visage. Avec ta mémoire de poisson rouge pour les noms, ce ne serait pas surprenant que tu te trompes en inversant les identités durant vos premiers jours ensemble. « Je suis pas difficile niveau nourriture moi, je prends tout tant que vous ne me mettez pas de l'ananas dans la pizza. » Parce que clairement, les gens qui font ça ne méritent pas de vivre. Tu les scrutes du regard, espérant qu'elles ne fassent pas partie de cette bande d'hérétiques. « Ça vous dit de jouer à un jeu ? J'pensais à "je n'ai jamais", pour qu'on apprenne à se connaître un peu. » Et puis c'est plus sympa que de raconter sa vie comme si on faisait un exposé à l'école primaire.