Les bars étaient toujours un endroit propice aux rencontres. Qu'elles soient bonnes ou mauvaises. Rencontres qui finissaient dans ton lit, ou qui te collaient leur poing dans la figure. Cette dualité, ces possibilités paradoxales, c'était ça que je trouvais cool dans ce genre d'endroit. Tu sais comment t'y entres, mais tu sais pas comment t'en sortira. Seul? Accompagné? Bourré? Amoché? Qui sait? Et puis, y'avait ces autres rencontres. Ces personnes que t'avais pas vu depuis un bail, depuis si longtemps que tu ne savais même pas si t'étais content ou saoulé de les revoir. Comme toi, Alaïa. Quand j'posais les yeux sur toi après t'avoir entendu souffler mon prénom, j'savais pas ce que je devais penser. Non, ta vision ne me réjouissait pas. Au contraire, ça me rappelait notre ancienne amitié et comment tu y avais mis fin. Comment tu m'avais blâmé pour je-ne-sais quels on-dit, alors que tu aurais du mieux me connaître. Tu aurais du savoir que j'étais un gars honnête, que si j'avais quelque chose à dire je le disais en face et que je n'étais pas un crétin hypocrite qui parlait dans le dos des autres. Mais non, t'avais préféré te fier aux bruits de couloir plutôt qu'à mes mots, que t'avais carrément refusé d'entendre. Soit. C'était ton problème, pas le mien. "Wow, tu te souviens de mon prénom? J'suis ému." Ouais, je t'en voulais. Ouais, j'étais rancunier. Alors j'sais pas ce que t'espérais en entamant une discussion, mais ça allait certainement pas te plaire.

J’étais pas heureux de te revoir, Alaïa, et je ne comptais pas te sauter dans les bras. Alors range tes espoirs, tes attentes, parce que ce qui allait se produire n’allait probablement pas te plaire, à toi et tes petites sautes d’humeur. Mon ton est cassant, mon regard intimidant et transperçant. Je ne compte pas te faire de cadeau, puisque tu avais détruit sans aucune gêne ni peine une amitié que je pensais solide. Je ne donnais pas ma confiance facilement malgré les apparences et t’avais réussi à foutre ça en l’air à cause de petits bruits de couloir infondés. Ben tu sais quoi? Va te faire foutre. J’ai pas de temps à perdre avec tes conneries, avec des personnes qui changent d’humeur comme le vent change de sens, qui disent un jour oui et le lendemain non. Je fais parti des fantômes de tes regrets? Bien fait. « Y’a qu’une seule personne à blâmer pour ça ici. » Et cette personne, c’est toi. Toi qui a décidé, toi qui a décidé à ma place de ma légitimité, qui a refusé d’écouter mes explications et qui m’a repoussé sans chercher à comprendre le pourquoi du comment. Merde Alaïa, si tu m’avais écouté ne serait-ce que trente secondes à l’époque, on aurait pu éviter tout ça. Parce que je t’aurais dit que les rumeurs étaient fausses, que j’étais pas un hypocrite, et que je tenais trop à toi pour te poignarder dans le dos. Non, à la place, t’as préféré être une petite égoïste et impulsive pourrie-gâté qui décide de qui elle mérite dans sa vie ou non en jouant à pierre-feuille-ciseaux. T’avales ton verre d’une traite, à croire que mon honnêteté a du mal à passer en travers de ta gorge. « J’ai merdé, je le sais… » À mon tour d’avaler le contenu de mon verre, visage de marbre, légèrement trahi par une contraction de la mâchoire. « Ouais, t’as merdé. Et en beauté, en plus. C’est tout ce que t’as à dire? » Parce que si c’est le cas, cette conversation était inutile et j’ferais mieux de me barrer de cet endroit qui m’était devenu tout de suite moins agréable.

Y’a qu’une seule personne à blâmer pour tes mauvaises décisions et tes regrets Alaïa, et c’est toi. C’est pas moi qui t’ai abandonnée du jour au lendemain pour des rumeurs infondées, c’est pas moi qui ai pas su suffisamment croire en notre amitié pour essayer de chercher le pourquoi du comment, c’est pas moi qui ai pas su être loyal et croire en toi. « tu veux que j'dise quoi elliot ? que j'suis profondément désolée et j'men veux à mort ? c'est le cas. mais toi comme moi, on sait que ça changera rien, pas vrai ? » T’avais tort. C’est les ‘désolé’ vains et hypocrites qui ne servent à rien. Les excuses sincères, les demandes de pardon authentiques, c’est jamais inutile. Ça prouve ta bonne foi. Ton envie de te racheter. Bien sûr, faut que ça soit réel, honnête. Sinon, c’est pire. « Oui, j’veux t’entendre dire que t’es désolée. Que ce que t’as fait c’était pas correct. » Mais seulement si tu le penses, Alaïa. Parce que réellement, si tu craches des mots que tu ne penses pas, je vais perdre mon sang-froid. « j'suis humaine elliot et j'fais des erreurs comme tout le monde. et tu sais comment j'suis; à me laisser emporter pour un rien. dis-moi ce que je dois faire pour gagner ton pardon et je le fais sans hésiter. » J’aurais aimé te répondre. J’aurais aimé avoir la solution miracle. J’aurais aimé ne pas avoir retrouvé cette partie de ma mémoire après le crash. Ça m’aurait évité bien des soucis. Mais bizarrement ton souvenir m’était revenu dans un flash et depuis, j’étais amer. Alors j’avais pas de solution miracle. Mais j’finissais quand même par parler, parce que j’étais une grande gueule curieuse et que j’savais pas me taire. Et que t’avais des comptes à me rendre. « Pourquoi? » Juste… Pourquoi? Oui, c’était la première question qui sortait de ma bouche. « Pourquoi t’as cru à ces rumeurs de merde? J’pensais que tu me connaissais un minimum. J’pensais que tu savais que j’étais pas le genre de mec à parler dans le dos des autres, que j’étais trop honnête pour ça. » Et le pire, c’est que j’avais du mal à donner ma confiance. Mais toi tu l’avais eue, un jour, et tu l’avais envoyée valser d’un revers de la main quand t’as décidé que t’avais fini de t’amuser avec moi. C’était pas cool, Alaïa. Pas cool.

Tu me fais — enfin — tes excuses. Oui, enfin, parce que j’les avais attendues depuis le jour où tu m’avais lâchement tourné le dos. « Merci. » me contentais-je de répliquer. Ouais parce que malgré tout, j’savais que c’était pas facile pour toi de t’avouer vaincue, d’accepter ta défaite et de rendre les armes. Et tu lâches un rire mêlé d’un soupire à ma demande d’explications. Fais pas la maligne, j’attends toujours moi. Tu trouves ça drôle? Pas moi. Alors je te lance un regard lourd de sens pour te pousser à l’action au lieu de ricaner et te morfondre. Tu t’exécutes finalement, tu m’expliques sans réellement rien expliquer. Et au final, j’sais pas vraiment quoi te dire. Est-ce que notre amitié est récupérable? J’en sais rien. Comment j’pouvais savoir? J’étais pas devin. J’te ferai sûrement plus jamais confiance. Parce que ma confiance, elle était dure à gagner, facile à perdre, et presque impossible à récupérer une fois perdue. « T’attends quoi de moi en fait? » Que je sache. Que tu me donnes au moins une piste du chemin que t’espérais que je prenne. J’avale une grosse gorgée de mon verre — assez grosse pour le finir en fait, cul sec. T’as vu dans quel état tu me mets avec tes conneries Alaïa?