Début novembre 2017.
Jonas repensait sans cesse à cette mystérieuse femme qui l’avait complètement envoûté. Iris. Au travail, elle envahissait ses pensées tout comme cet été quand il s’était absenté quelques semaines pour se rendre à New York. En observant sa mère de loin, il avait ressenti une pointe de regret à ne pouvoir l’approcher et lui demander des conseils. Ça aurait été la première fois qu’une telle chose arrivait, lui qui était plutôt une tête dure à l’époque. Mais ce Jonas-là (ou plutôt Ethan Davis) avait complètement disparu. Du moins, c’est ce que le New-Yorkais croyait. Ayant hésité à de nombreuses reprises à l’accoster en douce, il était finalement rentré à Boston, la mort dans l’âme. C’était mieux ainsi, pour leur sécurité à tous les deux. Et Iris avait recommencé à accaparer toute son attention. Heureusement qu’elle faisait partie de sa vie sinon il serait devenu fou. Enfin… Elle n’avait plus donné de signe de vie depuis sa visite impromptue chez lui, dans ce magnifique manteau rouge et ses sous-vêtements noirs en dentelle. Était-elle finalement passée à autre chose ? S’était-elle lassée de lui ? Il est vrai qu’il s’était montré plutôt timide, peu entreprenant, un peu effacé. Mais malgré cela, il n’avait su résister à ses charmes. Une femme comme elle avait besoin d’un homme, d’un vrai et il avait été tout sauf ça. Il s’était presque mis à penser que cette facette de lui l’avait attirée mais il s’était royalement trompé.

Au fil des mois, alors que le silence s’éternisait entre les deux amants, le caractère de Jonas s’affirma de plus en plus. Une fissure avait brisé sa carapace depuis son retour de la Grosse Pomme et ce n’était pas que Iris qui en était la cause. Il souffrait déjà assez comme ça de devoir vivre loin de la seule famille biologique qui lui restait et de devoir arborer une autre identité que la sienne alors pourquoi changer de caractère ? Au travail, il s’affirma et laissa ses collègues surpris mais en bien. Jonas restait toujours poli et courtois mais il voulait affirmer son opinion et surtout qu’elle soit prise en compte. Il n’avait pas réussi brillamment ses études pour des prunes. Enfin, il se réveillait ! Puis il décida de sortir de l’ombre et de rechercher lui-même sa belle créature. Il retourna au Nirvana un après-midi et demanda où il pouvait trouver Iris. Il apprit alors qu’elle étudiait à Harvard. Une véritable aubaine pour lui. Toutefois, jamais il n’aurait pensé qu’elle était étudiante et qu’elle travaillait au Nirvana. Ah, les préjugés ! C’est à ce moment-là que son histoire commença à l’intriguer. Mais il arrêta là ses recherches et se rendit l’après-midi même sur le campus de la prestigieuse université.  

Campus de l’université, près des dortoirs des Eliot.
Jonas était bien renseigné. Toutefois, il ignorait si celle qu’il recherchait se trouvait à proximité des dortoirs, si elle avait cours ou si elle était autre part. Il hésita quelques secondes avant de monter les escaliers menant au bâtiment puis posa sa main sur la poignée de la porte pour l’ouvrir. Au même moment, une personne située de l’autre côté eut la même idée et la poussa. Jonas eut le temps de se dégager avant de se recevoir la porte et tomba nez à nez avec… Celle qu’il recherchait. Comme à chaque fois qu’il la voyait, son souffle se coupa un instant, laissant le temps à son cœur de s’emballer. Il la trouvait tout simplement magnifique, c’était indéniable. Sur le moment, il ne sut comment réagir alors il resta immobile, à la fixer comme un idiot fini. Puis finalement, sa langue se délia.

« Bonjour… »

Il aurait voulu lui dire à quel point elle lui avait manqué, qu’il était désolé de son silence (même si elle était restée discrète de son côté, elle aussi) et qu’à présent il s’interdisait de ne pas lui donner des nouvelles chaque jour. Mais ça aurait été trop mélodramatique, non ? Alors il se contenta de faire un pas vers elle et de la prendre dans ses bras, peu importe les gens qui les verraient. Il passa une main dans ses cheveux de jais et la garda encore un moment contre lui avant de la relâcher et de lui sourire.

« J’espère que je t’ai manqué. »

☾ anesidora

Jonas n’avait pas pensé tomber aussi facilement sur celle qu’il recherchait depuis quelques heures déjà. Pourtant, ça n’avait pas été plus compliqué que ça : une porte qui s’ouvre et la voilà en face de lui, dans toute sa beauté et splendeur. Un instant sous le choc, il resta immobile avant de se décider à la prendre dans ses bras pour la serrer contre lui. Au passage, il avait noté ses traits tirés, ses cernes et son teint un peu plus blafard que d’habitude. Était-ce dû à des insomnies à répétition ? Il était loin de se douter qu’il lui avait manqué autant qu’elle. Il profita de l’étreinte qu’il lui offrait pour enfouir son visage dans sa chevelure et s’enivrer de son parfum. Dieu, comme cela lui avait manqué ! Mais bientôt, il dut se rendre à l’évidence et la relâcher, à contrecœur. Ce long silence de plusieurs mois semblait l’avoir affectée bien plus qu’il ne l’avait pensé au départ. Ses interrogations sonnaient désespérément mais avec un certain soulagement. Le jeune homme se sentit bête et il passa une main dans ses cheveux.

« Je te cherchais… Tu me manquais. »

Comme si ces simples paroles expliquaient tout. Et s’ils avaient tous deux cru que l’autre s’était lassé de sa compagnie ? Une méprise bien grande ! S’il se trouvait là, ce n’était pas à cause d’une envie soudaine de s’envoyer en l’air, loin de là. La présence physique de la magnifique créature lui avait terriblement manquée. La savoir assise à ses côtés aurait suffi à étouffer ce manque mais non, Jonas avait attendu, encore et encore, jusqu’à ce que l’attente soit insupportable. Alors il avait pris les devants et le voilà planté devant les dortoirs des Eliot. Heureusement qu’il était directement tombé sur celle qu’il recherchait car les autres étudiants l’auraient très certainement regardé bizarrement, voire viré comme un malpropre.

« J’étais… Occupé cet été. Et puis après, j’ai attendu comme un con un signe de vie de ta part, sans rien faire. »

Se rendant compte du sens que ses mots pouvaient avoir, il rectifia rapidement.

« Dans le sens où j’aurais dû te contacter plus tôt au lieu d’attendre. J’ai cru que… Enfin… J’ai pensé que je n’étais pas ton type d’homme, au final. »

Tu t’enfonces, Jonas, tais-toi ! Tout ce qu’il espérait, c’était qu’elle ne lui en veuille pas trop.

« Et toi, comment vas-tu ? » Demanda-t-il, un peu inquiet vis-à-vis de sa mine.

☾ anesidora

Jonas tentait de justifier son silence de plusieurs mois et il espérait que la Belle ne lui en voudrait pas trop. Même si elle semblait heureuse de le revoir, il savait que la rancune pouvait être tenace. Il se sentait maladroit dans ses explications, se disant qu’il utilisait les mauvais mots et qu’ils entraîneraient très certainement l’éloignement de la demoiselle. Il se trompait amèrement puisqu’elle rétorqua sur un ton assuré. Il ne put s’empêcher de sourire quand elle lui donna raison, avouant qu’il n’était pas son genre d’homme. Quoi de plus normal ? Pas toutes les femmes apprécient la compagnie d’hommes aussi timides et réservés. Voilà le bon exemple que les contraires s’attirent. Depuis que ses yeux s’étaient posés sur elle, la demoiselle ne cessait de tourmenter ses pensées par sa présence quasi-constante.

« Effectivement, tu n’es pas mon type de femmes habituel mais il n’empêche que tu hantes mes pensées… »

Il savoura la caresse qu’elle lui offrait avant de prendre sa main et de déposer un baiser au creux de sa paume. La joie de la voir, de la savoir près de lui envahissait tout son être. Il se doutait qu’elle devait très certainement réviser et qu’il perturbait ses plans mais il ne le regrettait pas. Comment il l’avait retrouvée ? Un petit sourire mystérieux se dessina sur ses lèvres alors qu’il prenait sa main dans la sienne.

« Je suis passé au Nirvana et j’ai fortement insisté pour savoir où je pouvais te trouver. Finalement, on m’a dit que tu étudiais ici. Et c’est un miracle de t’avoir retrouvé aussi rapidement. »

Le campus était grand et Jonas aurait pu tourner en rond des heures. De plus, il ne connaissait toujours pas la véritable identité de la mystérieuse et troublante Iris. Et puisqu’apparemment personne n’avait vent de sa double vie, il aurait galéré un moment. L’énigme autour de cette magnifique jeune femme se renforça. Pourquoi menait-elle ces deux vies radicalement différentes ? Mais pour ne pas la faire fuir, il ne lui posa aucune question à ce sujet. Il semblait l’avoir apprivoisée alors il ne voulait pas tout gâcher.

« Ne t’inquiète pas, ton secret est bien gardé avec moi. » Tenta-t-il de la rassurer.

Il commençait à découvrir l’autre facette de cette fille de la nuit et il ne se lassait pas d’en apprendre toujours davantage. Toutefois, il aurait aimé avoir une petite information puisqu’il faisait maintenant le lien entre le jour et la nuit.

« Je pourrais connaître ton prénom ? »

Sur le coup, il ne se sentait pas très fair-play car lui-même cachait sa véritable identité aux yeux du monde. Mais ceci était un autre sujet qu’il aborderait peut-être un jour.

☾ anesidora