Le carnet de la discorde.

mise en page par mad loveAprès avoir discrètement coupé le vibreur de mon portable qui m'avait signalé qu'il était enfin l'heure pour moi de me lever, je quittai lentement le lit en prenant soin de ne pas réveiller Colin, qui dormait encore à point fermer à côté de moi. Une fois de plus, c'était avec lui que j'avais passé la nuit, une nuit des plus agréables il fallait bien l'avouer. Vu que la veille toutes mes colocataires cabots avaient déserté chambre et que je ne tenais pas spécialement à mettre le nez dehors non plus, je lui avais envoyé un sms pour lui demander si on pouvait se voir ce soir-là, sms auquel il m'avait répondu par l'affirmative. Du coup, je l'avais rapidement rejoint dans sa chambre, en toute discrétion bien entendu. Et après avoir beaucoup parlé, rigolé, et mangé un bout, on avait fini, comme à notre habitude par coucher ensemble. Entre lui et moi d'ailleurs, c'était vraiment quelque de libre et sans prises de becs, même si je devais avouer que je montrais un peu jalouse lorsque je l'apercevais avec une autre fille que moi. Mais après tout, nous étions pas ensemble donc je l’acceptais quand même. Néanmoins, je le considérais avant tout comme un véritable ami, même avec ses petits défauts.
Vu que ce matin j'avais cours à partir de 9h30, je m'étais levée vers 8h pour avoir le temps de retourner à la Cabot pour me changer et prendre un petit déjeuner. Rapidement, j'enfilai mes vêtements éparpillés un peu partout près du lit avant de me diriger vers son grand miroir pour me recoiffer un peu. Juste avant de partir, je pris quand même l’initiative de lui laisser un petit mot. Rien de bien exceptionnel, juste un "bonne journée, je te rappelle." signé "Q." et un ps "Tu me dois un repas au restaurant, n'oublie pas. :D" Puis, en reposant son stylo sur son bureau, je fis accidentellement tombé le contenu de mon sac ouvert par terre, suite à un geste maladroit du à la fatigue. « Bravo Queenie. T'y vas fort là... » me sermonnai-je dans un soupir. Soucieuse, je tournai la tête vers le lit et constatai avec joie que je n'avais pas réveillé mon frenchie préféré. Soulagée, je me penchai alors par terre pour ramasser mes affaires. Cependant, mon regard s'attarda sur tiroir dissimulé de son bureau.   « Qu'est-ce que c'est ? Un compartiment caché ? Lui alors... » Je ris légèrement et fixai du regard ce tiroir qui semblait m'inciter à l'ouvrir. Une partie de moi ne voulait pas le faire, car j'avais l'impression que je pénétrerai alors dans la vie privée de mon ami. Mais d'un autre côté... « Hmm... oh et puis zut. Je lui offre déjà gracieusement mon corps. On va dire que c'est une rétribution équitable. » Le regard plein de malice, j'ouvrai le tiroir et y découvris un fin carnet qui n'avait, heureusement pas trop l'air d'un journal intime. Après quelques secondes d'hésitation, je l'ouvris, beaucoup trop curieuse. « ... Mais qu'est-ce que... Quoi ? Nan mais je rêve là ! » Je lâchai çà d'un cri à demi-étouffé par une de mes mains. Mon visage se décomposait au fur et à mesure que je tournai les pages et mon sang ne fit presque qu'un tour. Colin, même malgré son côté très macho, je le trouvais adorable avec moi et je passai également outre beaucoup de détails chez lui. Mais là... Là... Cet idiot venait de dépasser les bornes ! Un foutu carnet d'appréciation où il notait les filles qu'il rencontrait ?! Et en plus de ça les notes indiquaient s'il les trouvait à son goût et si il comptait les revoir. Là, ma fierté de femme et de féministe se prenait une bonne claque. Folle de rage, je me dirigeai rapidement vers le confortable lit double dans lequel monsieur sommeillait paisiblement, presque aux anges et l'air de rien. Enfoiré va ! Moi, son amie, il m'avait affublée d'une putain de note ? Il allait voir ce qu'il allait voir. Une expression de vengeresse sur le visage, je m'emparai de l'oreiller qu'il m'avait prêté pour dormir. Puis, je commençai à le marteler à coup de cousin, en hurlant comme une amazone. Et comme réveil, il y avait plus doux, vous pouvez me croire. Il sursauta et émergea aussitôt, avant d'essayer d'éviter mes coups. En guise de petite pause avant continuer, je lui balançai son misérable carnet à la figure.« Colin. C'est quoi ça ? » Ma voix était froide et ferme. Les bras croisés, j'attendis ses explications. « Comment tu peux faire ça ? Comment tu peux ME faire ça ? Okay on n'est pas ensemble mais je pensais qu'on se respectait un minimum tous les deux ! Est-ce que notre amitié ne tourne vraiment qu'autour d'une note ? Et mes fesses elles valent combien sur vingt ? Dix-huit donc tu t'es dit pourquoi pas ? » Je ponctuai mes mots de grands gestes de mains. « T'es trop pathétique. » Comme las, je m'assis un moment sur son lit, fixant distraitement l'oreiller entre mes mains.