Et si une nouvelle porte s'ouvrait?

feat. Feldt Crossroad & Lisbeth Larsson

Lisbeth lisait et relisait l’email reçu il y’a quelques semaines déjà. Une proposition du prestigieux MIT pour y enseigner et faire de la recherche. Pile poil ce à quoi elle aspirait et ce qu’elle recherchait. Elle avait besoin d’un travail qui stimulait sa matière grise et ne la faisait pas stagner. L’offre d’emploi d’Harvard était alléchante mais… Plus elle y réfléchissait et plus elle se disait que le MIT serait plus approprié pour ses compétences. De plus, elle faisait en quelque sorte de la recherche de son côté. Depuis presque dix ans. De manière illégale. Personne n’était au courant de ce petit détail. Personne à part Clay. Il aurait pu la dénoncer il y a des mois de cela mais il avait gardé le secret. Quand elle lui avait parlé de sa proposition d’emploi, elle avait tout de suite compris que son choix se porterait sur le prestigieux institut technologique. Après une relecture rapide de son email, la jeune femme attrapa son téléphone portable et appela son auteur. Elle lui expliqua qu’elle était intéressée par son offre mais qu’elle avait besoin de visiter son hypothétique futur lieu de travail. Elle avait rendez-vous le lendemain à treize heures tapantes.

Le lendemain, Lisbeth fut conviée dans le bureau du directeur à l’heure dite. Cet entretien lui rappela celui qu’elle avait passé pour entrer à Harvard. Plus détendue, elle savait pertinemment qu’elle détenait une sorte de pouvoir : après tout, un chasseur de tête l’avait repérée et apparemment, le directeur la voulait à tout prix dans le corps professoral. La balle était dans son camp. La jeune suédoise, sur son trente-et-un, arborait son éternel regard sérieux et un brin glacial. L’entretien dura bien une heure au court duquel la hackeuse mit ses talents en avant comme jamais auparavant. Elle lui expliqua son besoin d’aller de l’avant, de pousser ses limites au plus loin et surtout de transmettre son savoir. Le directeur consulta plusieurs fois son dossier, jeta un coup d’œil à ses notes extraordinaires, à son travail de doctorat et surtout à son histoire. Celle que tout le monde connaissait. Il la savait surdouée, information que peu de monde connaissait, mais ce fait ne le perturbait nullement. Finalement, il fut décidé que Lisbeth visiterait les lieux et les laboratoires avant qu’elle ne lui remette sa décision.

Elle fut accompagnée jusqu’à un laboratoire où des doctorants travaillaient sur un projet d’intelligence artificielle. Lisbeth regarda autour d’elle et son regard, d’abord dur et inquisiteur, se radoucit pour finalement s’illuminer. Bon sang, toute cette technologie réunie à cet endroit précis, toutes ces machines, toutes… Sans s’en rendre compte, la future professeure faussa compagnie à son futur patron pour s’approcher d’un plan de travail. Elle scruta le travail minutieux avec admiration. Elle commença alors à poser de nombreuses questions aux étudiants penchés sur leur projet, leur demandant sur quoi ils travaillaient, quels étaient les résultats escomptés, depuis combien de temps ils travaillaient dessus et j’en passe. Finalement, elle commença à lire quelques-uns de leurs compte-rendu et regarda quelques équations compliquées. Elle souligna quelques points importants à ne pas oublier et posa quelques questions sur tel ou tel résultat. Au bout d’un temps indéfinissable, une étudiante aux cheveux blonds lui adressa la parole. Lisbeth leva la tête d’un dossier, s’arrachant à sa lecture.

Et si une nouvelle porte s'ouvrait? | @Lisbeth Larsson

Depuis plusieurs semaines maintenant, tu jonglais entre la galerie et ton travail de doctorat. C’était difficile parfois de balancer tout ce qui se passait en ce moment dans ta vie, mais tu faisais de ton mieux pour t’occuper de tout ce que tu avais à faire. Tu passais la nuit à la galerie, et tes journées à l’université, et tout le reste avec tes enfants. Tu ne dormais que très peu depuis l’ouverture de la galerie. Ce besoin de perfection que tu adonnais t’empêchait d’abandonner quoique ce soit. Ton doctorat était important pour toi, tout comme la galerie avec Annalynne, et tes enfants, tu ne pouvais pas les abandonner. Peut-être qu’il faudrait que tu fasses un choix. La galerie ou ton doctorat. Tu ne voulais pas y penser, pas aujourd’hui alors tu te trouvais au laboratoire. Assise derrière ton bureau, tu avais passé la matinée à régler un soucis avec ton programme. Ce n’était pas spécialement compliqué. Tu avais juste à reprogrammer certains aspect de ton code, avant d’envoyer des nouvelles informations. C’était un processus assez long que d’apprendre à une machine. Pourtant, l’intelligence artificielle était le nouveau hip depuis quelques années maintenant. Soudain, il y avait de l’agitation dans le reste de la salle. Une jeune femme sillonnait entre les bureaux, parlant à plusieurs élèves. Tu restais dans ton coin, concentrée sur ton travail. Etait-ce une nouvelle doctorante? Elle semblait jeune, peut-être un peu plus âgée que toi. Tu ne pouvais pas exactement mettre un âge sur son visage, elle ne t’était pas familière. Ton professeur arriva, te demandant d’aller parler à la jeune femme. Tu ne savais pas pourquoi. Il te disait qu’elle était une ancienne étudiante d’Harvard, mais pour toi, elle te restait inconnue. Elle n’avait pas été la-bas pendant tes années. Elle avait dû arriver après ton transfert au MIT. Tu te levais, ajustant ta robe et vient retrouver la jeune femme. « Bonjour, je m’appelle Feldt. On me dit que tu es une ancienne étudiante d’Harvard. » Lui demandas-tu poliment, histoire de commencer doucement.

Et si une nouvelle porte s'ouvrait?

feat. Feldt Crossroad & Lisbeth Larsson

Lisbeth avait fait la connaissance d’un des professeurs s’occupant des doctorants et elle n’avait pas hésité à le bombarder de questions. Elle avait redonné le dossier couvert de calculs savants à son propriétaire et arpentait la spacieuse salle en jetant des coups çà et là sur les travaux des étudiants. Elle se sentait déjà à sa place dans cet environnement studieux et, petit à petit, elle se détendit. Les quelques retenues qu’elle avait eues à l’idée d’enseigner ici s’étaient évaporées comme la pluie sur un bitume brûlant. Même si elle savait qu’il lui faudrait certainement une période d’ajustement, elle n’en ressentait pas moins cette impatience caractéristique à l’idée de stimuler sa matière grise. Faire de la recherche dans ces locaux ? Une aubaine ! Enseigner à des étudiants motivés et intéressés ? Un privilège ! Le professeur s’approcha alors d’un plan de travail et aborda une de ses élèves alors que Lisbeth était à nouveau penchée sur un compte-rendu d’un étudiant. Visiblement, ce dernier semblait content que quelqu’un d’extérieur s’intéresse à son travail. Elle releva la tête quand la demoiselle blonde lui adressa la parole. Elles semblaient avoir à peu près le même âge, à un ou deux ans d’écart. La jeune suédoise lui sourit.

« Effectivement, je viens de terminer mon doctorat en informatique, maths appliquées et chimie. Je m’appelle Lisbeth. »

Elle lorgna un court instant sur l’espace de travail de Feldt et remarqua qu’elle travaillait sur un ordinateur. Elle remercia l’autre étudiant et lui rendit ses feuilles avant de se diriger vers la machine. Et oui, que voulez-vous, Lisbeth Larsson sera toujours attirée par le chant de sirène de ces engins !

« Tu travailles sur un projet d’intelligence artificielle ? » demanda-t-elle en scrutant les codes compliqués.

Lisbeth regarda l’écran de longues secondes avant de reporter son attention sur la demoiselle.

« Désolée, je suis incorrigible quand il s’agit de technologie. Ton professeur me faisait visiter les lieux en vue de mon futur poste de professeur. Et, en parallèle, je ferai de la recherche avec un groupe d’étudiants. Pile poil de quoi stimuler mes neurones en manque. »

Un léger rire lui échappa et elle poursuivit.

« Ça fait longtemps que tu étudies ici ? »

Elle ignorait que Feldt avait étudié à Harvard ni même qu’elle avait suivi un cursus presque semblable au sien. Elles ne s’étaient jamais croisées dans les couloirs de la prestigieuse université simplement parce que Lisbeth avait débarqué en août de l’année passée à Boston et qu’à cette période, Feldt étudiait déjà au MIT.