Sérieusement ? Bordel, ça me gavait en vrai. Ok, c'est moi qui suit en froid avec lui et lui qui veut améliorer les choses sauf que merde, s'il ne dit pas qu'il a un jumeau, comment j'peux savoir s'il veut vraiment m'avoir dans sa vie, hein ? Cette Tamsin ne connaissait pas mon existence, ne savait même pas que Sam avait un jumeau et.. ouais, non, elle était étonnée alors qu'ils avaient l'air d'être plutôt proche vu comment elle avait agi avec moi. C'était en pétard que je voulais retrouver mon frère. Bon, je ne m'étais pas mis en quête de le retrouver tout de suite, mais si jamais je le voyais, il allait en entendre parler de son frère jumeau qui n'existe pas auprès de ses amis. Et en fait, je crois c'est mon jour de chance parce qu'il était là, à la bibliothèque de la fac et je le voyais face à moi. Bon, il était concentré dans son bouquin et je pouvais le comprendre. Sauf que je ne lui ferai pas le plaisir d'attendre qu'il ait terminé ses révisions. Marchant droit vers lui, je fermais le bouquin juste face à son nez, le forçant alors à lever le regard sur moi, moi en colère et totalement pas enclin à avoir une discussion calme avec lui.

✰ LINCAËL ✰

Je ne pensais pas que Lincoln rencontrerait malencontreusement Tamsin un jour. Je ne pensais pas non plus, qu'elle le prendrait pour moi. Je n'avais pas eu le temps de lui dire que j'avais un frère. Je n'ai pas eu le temps de lui parler de moi tout court. Y a de choses que Tamsin n'est  pas au courant. Je n'ai plus vu Tamsin depuis une rencontre inattendue au starbuck coffee du lycée début septembre. Je suis à la bibliothèque de l'université. Je rédige un devoir que je dois rentre impérativement avant vendredi soir. Faut dire que je dois mettre les bouchées doubles pour pouvoir le finir à temps. Je ne m'imaginais pas voir mon jumeau débarqué à la bibliothèque pour me réclamer des explications. Puisque je pourrais en faire de même à son encontre. Il avait simplement dit qu'il avait un frère à Holly et, basta. Aucune explication, aucun nom. Rien. Je continue à écrire quelques lignes sur mon devoir quand je vois la silhouette de Lincoln devant mes yeux. Je dépose mon stylo pour ancrer mon regard dans le sien. Je reste stoïque face à-lui. S'il veut me parler, à lui d'entamer la discussion. Puisque la dernière fois que je l'ai fait. J'en ai pris pour mon grade et, j'en ai marre de toujours faire le premier pas. Certes, je suis le coupable dans toute l'histoire. Sauf, qu'il faut savoir tourné la page de temps en temps.

Copyright Clochette

J'étais arrivé vers mon frère comme une furie, parce que j'étais prêt à taper une scène, ici même dans la bibliothèque de la fac. Moi même qui suit le premier à rappeler à l'ordre les troubles fête, j'allais en être un. C'était assez ironique n'est-ce pas ? Que celui que j'étais supposé ignorer parce qu'il m'a bien trop blessé finisse par être celui qui m'énervait le plus. Le fait qu'il soit là, sans rien dire à me regarder m'énervait encore plus je crois, parce que mon coeur avait un rythme cardiaque qui frôlait la tachycardie. « J'veux bien qu'on soit plus en contact ou quoi, mais vraiment, tu pourrais ne serait-ce mentionner au moins une fois à tous tes potes que t'as un frère jumeau et qu'il n'est pas toi » Recevoir des gens sur mon dos comme ça, en pleine rue alors que je demandais rien à personne, c'était pas forcément l'idéal pour moi, vraiment pas. « Non mais parce que finir avec une petit brune sur le dos en croyant que je lui faisais une blague quand je ne la reconnaissais pas, non merci, j'en ai ma claque » C'était pas forcément la première fois que ça m'arrivait et je suis persuadé que si un de mes proches était tombé sur Sam, il saurait que c'était pas moi. Style différent, études différentes. Ouais, pas moi quoi.

J'aurais dû me douter qu'un jour où l'autre, j'aurais eu une deuxième confrontation avec mon frère. J'ai blessé mon jumeau à un point que je n'imagine même pas. Je ne sais pas quoi faire pour recoller les morceaux entre nous. Je pourrais faire n'importe quoi. Je suis persuadé qu'il trouvait encore quelque chose à redire. Alors, je me contente de le regarder dans les yeux. J'attendais qu'il commence à me dire ce qu'il me reprochait que d'entamer une énième excuse qui n'aboutirait à rien. « Je ne savais pas que tu étais de retour avant que je te croise au summer camp. Et, depuis cet été je n'ai croisé personne de mon entourage. Donc, excuse-moi si je n'ai pas eu le temps de le mentionner à qui que ce soit. » Il peut parler finalement. On m'a crié dessus en plein couloir de l'université en me prenant pour lui. Ce n'est pas l'idéal pour moi non plus. Surtout quand on sait que mon frère me manque mais, que celui-ci refuse catégoriquement de me parler. « Si tu parles de Tamsin, désolée mais, je ne l'ai pas recroisé suite à une dispute pendant le summer camp. De ton côté, tu pourrais mentionner à ton amie proche le prénom de ton frère. Étant donné que me faire gueuler dessus dans un couloir de l'université puisqu'elle me prenait pour toi, très peu pour moi. » Je ne pouvais pas lui en vouloir de ne pas me mentionner. Il avait déjà avoué qu'il avait un frère. On va dire que c'est un bon début pour une réconciliation. D'un autre côté, je ne veux pas brusquer les choses.

Qui étais-je pour faire des reproches ? Personne, mais là c'était une goutte d'eau. J'veux dire, j'avais parlé de Sam autour de moi, c'était pas le genre de choses que tu peux garder caché, quand bien même il n'avait pas été dans cette fac. J'avais parlé de lui et mes proches étaient au courant que j'avais un jumeau. Là, c'était comme si elle n'était même pas au courant et que c'était la surprise du siècle. Il clame vouloir m'avoir de nouveau dans sa vie, mais il ne fait aucun effort. « Oh tu deviens associable on dirait. Ça fait genre déjà deux mois qu'on est rentré du Summer Camp, me dis pas que t'as passé deux mois dans une grotte » Sam avait toujours été le plus sociable de nous deux, la tête pensante de nos soirées démentes. Ouais, j'avais du mal à croire qu'il était devenu renfermé et sans amis. « Puis j'sais pas, dire que t'as un jumeau, même si on avait pas été dans la même fac, c'pas la mer à boire » Me justifiais-je malgré tout. « Parce qu'au moins, ma copine savait que j'en avais un » Tamsin, ouais il la mentionnait et ouais, c'était d'elle que je parlais. Comment il le savait ? J'en avais juste aucune idée pour le coup. Peut-être lui en avait-elle parlé juste après, j'en savais trop rien. « Sois déjà bien heureux que je lui parle de toi. J'ai même du lui raconter ce qui s'est passé. Ma version des faits en tout cas, pas la version calimero que tu lui as donné » Ouais j'étais fâché contre lui.. ouais fâché n'était pas assez fort, mais en tout cas, maintenant elle savait ce qu'il en était.

Il a parfaitement le droit de me faire le moindre reproche sur mes actes. Je suis égoïste et, ce n'est pas prêt de changer. Faut dire aussi que je ne fais pas d'effort pour lui prouver que je veux vraiment arranger les choses entre lui et moi. Je ne suis même pas capable d'avouer clairement que j'ai un jumeau. La honte. « C'est presque le cas Lincoln, tu n'es pas obligé de me croire. » Avec les années, je suis devenu le contraire de ce que j'étais dans mon enfance. Je me renferme sur moi-même, je reste avec les amies que j'ai, sans en avoir d'autre. Ma vie ne ressemble à rien. C'est plat dans tous les sens du terme. « Pour toi, ce n'est pas le cas puisque tu as toujours réussi à parler de ton passé. Ce n'est pas le cas pour moi. J'y arrive pas, je n'arrive pas à me confier, je n'y peux rien merde. » Je commence à monter un peu la voix. Étant donné que j'aimerais vraiment réussir à me confier même à ma meilleure amie. Même avec la meilleure volonté du monde, je n'y arrive pas. Ce n'est pas faute d'essayer mainte et mainte fois. « Crois ce que tu veux Lincoln. J'en ai marre de devoir tout m'expliquer sur quoique ce soit. J'ai simplement dit à ton amie que c'était de ma faute tout ce qui se trame entre nous. Si pour toi c'est faire le calimero, dans ce cas j'accepte de porter cette version sur mes épaules. » Même quand j'avoue que tout était de ma faute, ça ne lui plaît pas. Que dois-je réellement faire pour qu'il me pardonne une fois pour toute ?

Ça semblait tout de même irréel. J'veux dire, qui passe deux mois de sa vie sans parler à qui que ce soit, pas même ses amis ? Visiblement, je ne connaissais pas le nouveau Samaël qui était face à moi. Celui que je connaissais était sociable et s'amusait avec toutes les personnes qu'il rencontrait sur son chemin. Certes, il n'était pas du genre à parler de sa vie et ça je le comprenais bien trop pour le coup, seulement ouais... il n'était pas un ermite. C'était pas le Sam que je connaissais, c'est tout. « Arrête, j'ai jamais été du genre très ouvert. On nous a toujours appelé les huîtres quand il s'agissait de ça, si tu t'souviens bien » Ouais, je me souviens très bien du lycée, quand nous étions assez populaires tous les deux. Tout le monde blaguait bien en notre présence, mais des fois, quand il s'agissait de parler de nous, on se refermait assez facilement. Des huîtres quoi. « Tu vois, tu recommences » Se blâmer, faire celui à cause de qui on a tous les malheurs du monde. Calimero. « Ça va être ça à chaque fois ? Capituler, dire "oui oui c'est ma faute, je prends tout ça sur mes épaules" ? J'te connaissais plus fort et moins faible Sam, j'pensais que t'étais un guerrier qui se battrait pour ce qu'il veut, et non le genre à se laisser abattre à la moindre occasion, au moindre obstacle. Faut croire que t'as bien changé depuis le temps »

J'ai complètement changé depuis mon départ du cocon familial. Je ne suis plus de tout le même. Je me suis renfermé sur moi-même. En sachant que dans mon adolescence j'étais sociable et je m'amusais avec n'importe qui. Cela semble même choqué un peu Lincoln de me voir aussi changer. « Je m'en souviens très bien, ce n'est pas une chose que je peux oublier aussi facilement. Ni tout le reste. » On a toujours été pareil quand il fallait parler de nous. On se refermait aussi vite qu'on s'ouvrait. De vraies huîtres, c'est même le défaut qu'on nous donne à l'époque. « Excuse-moi encore une fois. » Encore une fois je m'excuse pour l'énième fois. J'ai l'impression de ne faire que ça, ces derniers temps. M'excuser encore et encore. « J'ai complètement changé depuis que j'ai abandonné mon frère lâchement ... Je m'en veux d'être parti comme un lâche sans même me battre pour toi. Je m'en veux de t'avoir laissé avec ces personnes qui sont censés être nos parents. Je m'en veux d'avoir fait autant de connerie pour au final devoir laisser sur le bord de la route la seule personne qui comptait et qui compte encore à mes yeux. Je m'en veux de ne pas avoir donné de nouvelle à mon frère. Tu veux que je te dise quoi en réalité Lincoln ? Que je ne suis qu'un p*tain d'égoïste qui a pensé qu'à sa gueule ? » Dis-je en haussant la voix. C'est bien la première fois que j'avoue des choses comme celle-ci à mon frère. Habituellement, je ne me confie jamais à lui. Je le fuis dès que je le peux.

Bien sûr, pour moi il restait Samaël, le mec qui lançait une soirée en une après midi, et tout le lycée se pointait quand même. C'était mon pilier à l'époque du lycée, avant qu'il ne prenne les voiles quand les parents en ont eu marre de ses conneries. Ouais, ma vision restait assez archaïque pour le coup, sans prendre en compte une possible évolution chez lui. Enfin, je ne relevais pas son excuse, encore une fois. Parce que j'pouvais clairement péter un câble sur place en fait, si je venais à lui dire d'arrêter. Une fois qu'il avait fini sa tirade, on avait entendu plusieurs "chuuuut!" agacés de la part des personnes se trouvant autour de nous. « J'sais pas c'que j'veux, okay ? J'en ai marre de cette situation... j't'en veux tellement mais tu m'manques, ok? Tu m'manques parce que j'sais que t'es là et qu'y'a rien qu'on puisse faire pour que tout soit comme avant » Ouais, c'était enfin dit, il me manquait. Après tant d'années passées séparément, j'avouais que mon con de grand frère me manquait mais ça changeait pas à quel point je lui en voulais. Il avait été égoïste, faible et ça allait être compliqué de passer au dessus de toute la rancoeur cumulée au fil des années.