- Vicky s'il te plait, tu peux garder Arlo ce soir ? J'ai un rendez-vous.

Lorsque la soeur d'Evie avait entendu cette dernière prononcer cette phrase, elle avait littéralement recracher l'eau qu'elle venait d'ingurgiter. Elle regarda la rousse avec deux grands yeux ronds comme des billes.
Evie leva les yeux au ciel et posa une main sur le plan de travail de la cuisine:

- T'emballe pas, je vois juste un ami !

Vicky haussa un sourcil, se leva de sa chaise et contourna la plan de travail. La jeune femme rousse fit une grimace: elle connaissait très bien ce regard... Cela voulait dire qu'elle allait subir un interrogatoire dans les règles:

- Et c'est qui, ce rendez-vous ? demanda la soeur de but en blanc.

Evie poussa un gros soupire et se dit soudain qu'elle aurait mieux fait de lui dire qu'elle avait besoin de s'aérer l'esprit... Elle lui indiqua donc qu'il s'agissait de Read, son ami qu'elle avait rencontré quelques mois plus tôt. Elle espéra qu'elle la laisserait tranquille après cela mais... C'était mal connaitre sa soeur ! Et au fond d'elle même, elle s'y attendait un peu ! Vicky insista donc:

- Et dis mois, tu le vois combien de fois par semaine ? Non parce que ne te fiche pas de moi, s'il y a un quota, ça devient LA définition du Rendez-vous.

Agacée, la scénariste lui dit d'un ton cassant:

- Mais je n'ai pas fait le compte bon dieu !! Et lâche moi un peu, tu peux ou pas ?

Vicky hocha la tête, légèrement déçue car elle savait qu'elle ne devait pas insister. Elle reporta donc son attention sur sa salade et lui assura qu'elle allait s'occuper de sa nièce, et la traiterait comme une princesse.
Un peu plus rassurée, Evie alla donc à l'étage pour se préparer. Lorsqu'elle eut terminer le "chantier", elle passa alors devant un miroir; elle marqua un temps d'arrêt. C'était elle ? Depuis la naissance d'Arlo, elle avait tellement passer de temps un survêtement et sans réel maquillage qu'elle fut des plus surprises en remarquant qu'elle s'était apprêtée sans s'en rendre compte. Elle avait lavé ses cheveux avec soin, les avait laissés détachés et ils dansaient en cascade le long de son dos. Elle portait également des boucles d'oreilles discrètes, toutes petites et ornées d'un rubis. Ses joues étaient rosies et elle avait appliqué son cher mascara dont elle ne se séparait jamais avant l'arrivée de sa fille. Enfin, elle portait un jean serré ainsi qu'un tee-shirt rouge avec un col en V. Elle descendit les escaliers et attrapa son manteau et son sac à main qui se trouvaient à l'entrée et s'empara d'une paire d'escarpins noirs. Quand elle se retrouva juchée sur ses talons, un sourire illumina furtivement son visage. Bon sang, comme elle se sentait revivre !!
Quelques jours plus tôt Read l'avait appelée, lui donnant un rendez-vous au cinéma, ne lui laissant pas vraiment le choix, lui indiquant que cela lui ferait le plus grand bien et qu'elle pourrait relâcher la pression. Et aujourd'hui c'était le jour J. Elle s'était donc engouffré dans des ruelles, la salle n'était pas bien loin de chez elle et Evie adorait marcher. N'étant plus qu'à quelques mètres du lieu, elle aperçut alors son ami qui lui faisait signe. Elle lui accorda un sourire et Read déposa un rapide baiser sur son front; la rousse était toujours étonnée de ces marques d'affections, car depuis sa relation avec Edgar, elle se méfiait largement des hommes, et même d'un geste aussi simple que celui là, qui n'avait pas forcément d'arrière pensée. Il lui demanda comment elle allait avant de la serrer dans ses bras. Comme un réflex, Evie huma rapidement son parfum, le temps de ce contact. Il était différent de celui de son ex, mais dès qu'il parvenait à ses narines, cela lui semblait très agréable:

- Et bien un peu mieux, Arlo doit dormir une heure de plus maintenant et ça fait vraiment la différence ! Et toi ?

Il lui demanda de choisir le film, soulignant que ses goûts en la matière n'étaient pas forcément terrible. La rouquine laissa échapper un rire et ajouta:

- Rooooh tu exagères !! Mmmm... Laisse moi voir, j'ai envie de rire tu vois... Je pensais donc à une comédie, mais pas un truc qui se termine en histoire romantique cucul !

Elle regarda vaguement les affiches qui se présentaient devant eux et finit par en pointer une du doigt:

- Qu'est-ce que tu pense de celui-là ? Il y a de l'action et une amie m'a dit qu'il y avait de bonnes touches d'humour.

Read avait trois enfants et Evie vint à se dire que cela avait du être du sport pour lui... Alors elle se sentait un peu idiote à se plaindre des nuits qu'Arlo ne faisaient pas...
Elle lui adressa un grand sourire et pouffa même de rire lorsqu'il lui dit que son aînée commençait à devenir un peu plus turbulente. Elle faisait entièrement confiance à Read pour élever ses enfants de la façon la plus merveilleuse qu'il soit. Elle l'avait de nombreuses fois vu faire et elle devait avouer qu'elle avait toujours impressionnée par son calme et son aisance à régler les situations les plus périlleuses lorsque les trois garnements étaient réunis. De plus, si Evie était dans les parages, elle remarquait qu'Arlo appréciait particulièrement la compagnie de la petite famille.
Il la questionna ensuite sur ses projets. La rouquine s'autorisa à lâcher une grimace:

- Pfff... Rien pour l'instant... Du moins rien de concret... Je ne suis pas trop emballée par les propositions que je reçois. Ou peut-être que je ne suis pas encore prête à reprendre du service, j'ai peut-être peur... Va savoir !

Elle lui accorda un clin d'oeil pour marquer son trouble. Au fond d'elle, elle savait certainement que ce qu'elle venait de dire n'était pas si loin de la vérité... Elle avait peur de se retrouver de nouveau dans le grand bain... Ce grand bain qui allait la rapprocher un peu plus d'Edgar... Ce dont elle n'avait pas vraiment envie en ce moment.
Puis il finit par accepter la proposition de film faite quelques minutes plus tôt. Evie se contenta de hocher la tête pour finalement lâcher un:

- C'est bizarre de se dire qu'on ne verra pas son nom apparaitre sur un générique avant quelques mois...

Oui le cinéma était toute sa vie, sa carrière, elle avait bossé dur pour arriver là où elle se trouvait avant sa grossesse. Et elle espérait pouvoir retrouver cela un jour, même si l'idée la terrorisait. Mais elle chassa cette idée d'un revers de la main et accorda un nouveau sourire à Read, préférant largement prendre des nouvelles de son ami plutôt que de s’apitoyer sur son sort:

- Et toi alors, combien de personnes ont eu besoin d'être sauvées cette semaine ?

Suite à ces paroles, elle lui accorda un coup de coude blagueur alors qu'ils avançaient dans la file d'attente pour enfin pouvoir arriver à un guichet. Evie faisait bien entendu référence au métier de Read en lui posant cette question. Elle devait avouer qu'elle était bien curieuse de savoir dans quelle genre de situation il avait encore du intervenir ! Il lui avait déjà raconté certaines choses assez tordantes et inimaginables !

Read regardait Evie avec beaucoup de tendresse et d'amitié alors qu'elle commença à lui parler de ses projets. Rien de précis... Il lui sourit simplement. Il savait qu'elle finirait par s'en sortir, c'était une femme forte, il n'avait pas besoin qu'elle le lui prouve.
"Prends le temps qu'il te faut, alors." répondit-il simplement, posant délicatement une main contre sa joue, de façon plus amicale qu'autre chose. Il n'y avait aucune honte à prendre un peu de temps pour soit, surtout lorsqu'on était une jeune mère débordée. Read était très bien placé pour savoir qu'être parent était un travail à temps plein. D'ailleurs, heureusement qu'il avait sa famille pour l'aider, sans quoi, il ne se serait jamais donné le droit de pouvoir travailler... Il se serait senti inutile.

"Quelques mois, ce n'est pas si long." rétorqua-t-il face à la remarque de la demoiselle, après avoir accepté la proposition de film. Il savait qu'il ne le regretterait pas. Après tout, cette soirée cinéma n'était qu'un prétexte pour passer du bon temps avec Evie. Elle lui plaisait, c'était son amie, il voulait qu'elle soit heureuse, c'était tout et c'était une évidence.

Ils se placèrent dans la file d'attente et la demoiselle commença à blaguer.
"Il y en a toujours beaucoup trop." indiqua-t-il finalement, après avoir affiché un certain rire. "Mais tu sais, en ce moment, je ne suis pas trop sur le terrain, je suis plutôt formateur pour les nouveaux. J'ai sorti l'ambulance que deux fois cette semaine, afin d'accompagner des nouveaux." dit-il doucement. Il savait ce à quoi faisait référence Evie et décida tout de même de lui trouver une anecdote croustillante.

"Il y a bien eu ce type déguisé en superman qui s'est brisé les deux genous, parce qu'il jouait à un jeu sexuel avec sa femme... Il a voulu sauter du haut du placard pour faire un vol comme superman jusqu'au lit et... boum." Ce n'était pas bien de rire des douleurs des autres, mais pour le coup, la scène avait été drôle. Et même si les secouristes avaient été professionnels, ils n'avaient pu s'empêcher d'éclater de rire une fois le type pris en charge à l'hôpital.