bercé par les litanies nocturnes, les paupières voilent des mirettes aveuglées. son faciès s’estompe un instant, dans ce coton immatériel, recraché d’entre les naseaux. le battant frénétique, il pompe la vapeur d’un mégot grossier. l'homme est las, étouffé dans son fauteuil trop large aux allures de monarchie. Une coupe de verre traîne non loin, le fond bruni par la boisson. plus loin encore, la bouteille à moitié vide.
l’imaginaire atrophié par la pathologie, il voyage au grès des fantasmes d’un insensible libre. les addictions prennent le contrôle, l'envoie valser entre réalité et irréel.

des faciès lui  reviennent en subliminal et font naître des sentiments enfantins qui fracturent sa carcasse de mâle érodé par le lubrique. le patriarche apparaît alors, puis celui de cette épouse trépassée. enfin, celui d'une autre femme. ce visage là ne disparaît pas, il s'imprime.
dehors, le firmament vide se laisse tromper par quelques points scintillants.  
ce masque, c'est le sien : alba. douce mélodie qui vrille pourtant ses tympans.
son faciès apparaît distinctement dans son imaginaire, ses traits mûris devenus si délectables. depuis que son portrait occupait les grandes parutions du pays, elle s'était emparé de l'attention d'oz. maxyne belmont, promise privilégiée aux mains d'une maison fortunée. une mascarade insupportable, une merveilleuse retrouvaille qui sonne pourtant le cor du mauvais. l'animal se marquerait lui-même le derme par son prémier prénom : alba. par des lettres de vermeille, il s'approprierait ainsi si belle enfant. car à l'époque où il l'a déniché, elle était un incroyable individu, un trésor; il n’avait jamais rencontré un être si poignant, fragmenté par les affres d’une vie bousillée. elle s'égarait et il s'est improvisé sauveur. un diamant brut dont il se voulait être le sculpteur. la jeune inconnue allait entrer son cercle sous son aile. le frère miséricordieux qui ne la protège guère des ennuis mais qui prie pour qu'elle les embrasse. et elle devient une merveilleuse recrue, une merveilleuse assassine. les gambino l'apprécie et chérisse encore oszcar. il est heureux. mais il s'éloigne, car les affaires l'appellent ailleurs. et elle s'éloigne, elle aussi jusqu'à ne plus apparaître. figure disparue, être abandonné. et le frère miséricordieux devient le bourreau monstrueux. la trahison, cette amertume qui l'assèche chaque jour. on ne les quitte pas, alors comment a t-elle osé ?

l'homme est mutin et se meurt dans ce silence insupportable, à peine les rejets fumeux se font entendre. pourtant, il chante une cacophonie insupportable en son for.
ces réminiscences finissent par s’estomper en un défiguré morbide, éveillent de nouveau une rage sourde. les paupières découvrent enfin des mirettes craquelées par des veinures vermeilles: le fou s’éveille enfin de sa transe. la bouteille traîne, l’essence presque évaporée. dernière gorgée, pour se donner l’espoir. doux breuvage qui rend à ses lippes charnues, leur douce caractère. il rince son œsophage avec ce liquide ambre, le reste fermente dans l’estomac, les veines et l’esprit retord.
paré comme un prince, oz éveille immédiatement la nature de son être: celle d'un fou sans discipline. les goûteux sentiments valdinguent, bruyamment, brutalement aussi loin que sa conscience l'autorise. annihilés, comme s’il était mis fin à une mascarade et que l’existence reprit son cheminement lugubre.
esprit malade, corps amputé du battant. caverneux le grognement qui retentit. colère froide du baron trahi, son squelette s’ébranle sous les flots d’un feu qui ne s'éteint jamais.

il l'a tant cherché, il l'a enfin trouvé. l'homme se redresse légèrement et jette ses prunelles azurées sur ce carnet au cuir noir, trônant non loin. des lettres d'encre tapissent ses feuilles et exposent les belmont, alba. sa résidence, son fiancé, ses proches et même son restaurant préféré. il est si bon d'être bandit, pour un temps. l'homme relit inlassablement les mêmes lignes, comme s'il en tirait une essence particulière. il sent grandir sa haine et une excitation malsaine fait trembler sa main. elle est là, non loin et il va bientôt la revoir. ô douce éternité qu'elle fut et qui prendra fin sous peu.
finalement, une photographie glisse d'entre les pages. elle apparaît heureuse, avec ce sourire qui étire ses lippes jusqu'aux oreilles. elle étreint avec tendresse son futur époux. elle semble si sage, si belle.. et si condamnée.
son doigt glisse doucement sur sa joue comme s'il se permettait une dernière errance avant le début de la fin. Elle n'avait aucune idée de ce que l'avenir lui réservait alors que ce loup se léchait déjà les babines à la simple pensée de son festin. elle ne savait rien. non, « tu n'as pas idée. » fait-il finalement échapper d'entre les lippes, inconscient que sa pensée ne parvient plus se à contenir dans sa caboche.